Décision n° 117-R-2011
le 13 avril 2011
DEMANDE présentée par la Ville de Lac-Mégantic conformément aux paragraphes 101(3) et (4) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée, et à l'article 16 de la Loi sur la sécurité ferroviaire, L.R.C. (1985), ch. 32 (4e suppl.).
Référence no R8050/155-117.11
Introduction et questions
Demande
[1] La Ville de Lac-Mégantic (Ville) a demandé à l'Office des transports du Canada (Office) l'autorisation de construire un franchissement routier (à niveau) où se croisent la rue de la Gare et la subdivision Moosehead (point milliaire 117,11) de la compagnie de chemin de fer Montréal, Maine & Atlantique Canada Cie. (MMAC), dans la ville de Lac-Mégantic, dans la province de Québec, comme il est indiqué sur le dessin no C120726-FE07 et toutes les révisions subséquentes. La Ville a également demandé à l'Office de répartir les coûts de construction et d'entretien du franchissement routier ainsi que les coûts d'installation et d'entretien du système d'avertissement (signaux de traverse, feux clignotants et barrières). En outre, la Ville demande à l'Office l'autorisation d'effectuer les ouvrages liés au franchissement routier qui suivent (ouvrages liés) :
- Déplacement de la voie ferrée principale d'environ cinq mètres vers l'est - dessin no C120726-FE01-06, section LOT-2D-B, feuillet 3 de 9, en date du 29 mars 2010;
- Déplacement de l'aiguillage des voies de dédouanage et d'emmagasinement vers le nord afin de limiter les voies traversées au passage à niveau à deux - dessin no C127026-FE01-06, section LOT-2D-B, feuillet 4 de 9, en date du 29 mars 2010;
- Ajout d'une troisième voie ferrée - dessin no C120726-FE01-06, section LOT-2D-B, feuillet 5 de 9, en date du 29 mars 2010.
Questions
- L'Office devrait-il autoriser la construction du franchissement routier proposé et les ouvrages liés?
- Si l'Office autorise la construction du franchissement routier proposé et les ouvrages liés, comment les coûts de construction du franchissement routier et des ouvrages liés et les coûts d'entretien du franchissement routier ainsi que les coûts d'installation et d'entretien du système d'avertissement devraient-ils être répartis?
[2] Comme il est indiqué dans les motifs qui suivent, l'Office autorise la construction du franchissement routier et des ouvrages liés. En outre, l'Office détermine que la Ville doit assumer la totalité des coûts de construction et d'entretien de la surface du franchissement et des abords routiers de même que les coûts d'installation du système d'avertissement. L'Office détermine également que 80 pour cent des coûts d'entretien du système d'avertissement doivent être assumés par la Ville et 20 pour cent de ces coûts doivent être assumés par MMAC. De plus, l'Office autorise la Ville à effectuer, à ses frais, les ouvrages liés.
Question environnementale
[3] La présente demande est examinée en vertu, entres autres, du paragraphe 101(3) de la Loi sur les transports au Canada (LTC), ce qui déclenche le besoin d'une évaluation environnementale en vertu de l'alinéa 18(1)a) de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, L.C. (1992), ch. 37 (LCÉE). Cependant, puisque la Ville a obtenu une aide financière en vertu du Fonds de stimulation de l'infrastructure à l'égard des travaux, elle est exemptée de l'obligation d'effectuer une évaluation environnementale pour le projet.
Contexte
[4] La Ville procède à la construction d'un centre sportif qui comprendra un aréna, une piscine semi-olympique, un gymnase, une salle polyvalente, un espace de restauration et une salle de quilles. Ce centre sportif constitue un apport important à la revitalisation du centre-ville historique de la Ville et est un élément crucial de la stratégie de la Ville visant à préserver et développer l'industrie locale en assurant la rétention d'une main d'œuvre spécialisée qui exige de plus en plus de services et d'équipements urbains récréatifs de première qualité.
[5] La demande vise la construction d'un franchissement routier, rue de la Gare, afin de permettre l'accès au centre sportif. Le franchissement routier sera muni de signaux de traverse, de feux clignotants, de clôtures et de barrières. La vitesse maximale autorisée sur la voie ferrée principale est de 16 km/heure alors que la vitesse maximale sur la rue de la Gare est de 50 km/heure.
[6] Il existe présentement un passage privé qui emprunte essentiellement la même assiette que le franchissement routier proposé. Ce passage est utilisé par des représentants de la Ville, des véhicules de service et des clients de MMAC qui se rendent à la cour de triage.
[7] La Ville et MMAC, après de nombreuses discussions, n'ont pu s'entendre sur les modalités de la construction du franchissement routier et des ouvrages liés. La Ville a donc déposé la présente demande.
Visite sur les lieux
[8] L'Office a déterminé qu'une visite sur les lieux était indiquée afin d'obtenir une vue d'ensemble de la situation. Cette visite a eu lieu le 7 décembre 2010 et des représentants de la Ville, de MMAC et de Transports Canada y ont pris part.
[9] Le procès-verbal du 23 décembre 2010, préparé par le personnel de l'Office, fait partie du dossier.
Positions des parties
Construction du franchissement routier et les ouvrages liés
[10] La Ville fait valoir que la circulation en provenance de la rue Frontenac se dirigera vers la rue de la Gare pour accéder au franchissement routier proposé. La Ville affirme avoir analysé la possibilité de relocaliser le passage plus au sud. Cependant, le dénivelé est trop important pour permettre l'aménagement du passage à cet endroit tout en respectant les pentes d'approche maximales. La Ville fait valoir que la possibilité de mettre en place un tunnel ou un viaduc a été envisagée mais les contraintes du site ont démontré qu'une telle option est techniquement irréaliste principalement à cause de pentes contraignantes. MMAC soutient avoir proposé de construire un viaduc sous le chemin de fer, situé au sud-est du passage, mais la Ville a refusé en raison des coûts qu'engendrerait un tel projet.
[11] La Ville indique que le nombre maximal estimé de trains au passage de la rue de la Gare est de 28 convois par jour. La Ville ajoute que le produit vectoriel anticipé (le nombre moyen quotidien de trains multiplié par le débit de circulation moyen quotidien) est de 6 076 (28 x 217). MMAC soutient que le produit vectoriel anticipé est de 70 000 (28 x 2 500).
[12] MMAC indique que le franchissement routier proposé est problématique puisqu'il franchirait la cour de triage de MMAC. Cette dernière fait valoir que le franchissement routier proposé n'est pas acceptable puisqu'il causerait des contraintes au niveau des manœuvres et entraînerait une perte d'espace dans la cour de triage. MMAC fait également valoir que si la construction du franchissement routier était autorisée, cela occasionnerait une perte de capacité de 1 117 pieds de voie à l'intérieur de la cour de triage et une perte supplémentaire de 2 320 pieds de voie à l'est. MMAC affirme qu'elle ne veut pas que le potentiel de développement et d'expansion de ses activités ferroviaires soit restreint.
[13] La Ville indique que la conversion du passage privé existant impliquera l'ajout d'une troisième voie ferrée d'emmagasinement dans le cadre des ouvrages liés. Selon la Ville, ceci augmentera la capacité de stockage, de dédouanage et d'emmagasinement de MMAC.
[14] En outre, la Ville fait valoir que, même si le franchissement routier proposé franchit la cour de triage de MMAC, il ne causerait pas de problèmes supplémentaires puisqu'il y a déjà un passage privé à cet endroit. De plus, la Ville allègue que la demande d'un franchissement routier public ne change en rien la capacité réelle de stockage de wagons puisque les mêmes normes de dégagement auxquelles est assujetti le passage privé qui existe déjà à cet endroit s'appliqueraient.
Répartition des coûts
[15] La Ville recevra une subvention du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial du Québec qui couvrira 80 pour cent de tous les coûts. La Ville doit assumer 20 pour cent des coûts. De ce 20 pour cent, la Ville demande à l'Office d'ordonner à MMAC, en raison des avantages liés à la sécurité que tirera MMAC au nouveau franchissement, de payer 50 pour cent des coûts de construction du franchissement (y compris l'installation du système d'avertissement) et des ouvrages liés, ainsi que 100 pour cent des coûts d'entretien du système d'avertissement. La Ville, vu les avantages liés à l'accès et à la sécurité que tireront du franchissement routier ses citoyens et les utilisateurs du centre sportif, accepte d'assumer 50 pour cent des coûts de construction liés au franchissement (y compris l'installation du système d'avertissement) et des ouvrages liés et 100 pour cent des coûts liés aux abords routiers du franchissement. La Ville n'a déposé aucune présentation en ce qui a trait à la répartition des coûts d'entretien du franchissement routier.
[16] MMAC s'oppose à la demande de la Ville concernant le partage des coûts de construction du franchissement routier puisque selon elle, elle ne tirera aucun avantage de ce franchissement routier et s'il est construit, il le sera au seul avantage de la Ville et au détriment des activités de MMAC. Cette dernière s'oppose aussi au fait que les coûts d'entretien soient sa responsabilité au motif qu'elle est la partie principale, et en tant que telle, elle n'a pas à assumer les coûts liés à la construction du franchissement routier et à son entretien futur. MMAC ajoute que le maintien du statu quo convient à ses activités.
[17] MMAC fait valoir que la partie en second est la Ville et que cette dernière doit en conséquence assumer seule tous les coûts de construction et d'entretien futur du franchissement routier.
[18] La Ville indique que le franchissement routier proposé ne constitue pas une demande d'un nouveau franchissement puisqu'il y a déjà un passage en place, et que la question devant l'Office visant l'autorisation et la répartition des coûts a pour but premier de rendre le franchissement plus sécuritaire pour le public. La Ville affirme en outre qu'elle est la partie principale puisqu'elle est celle dont le droit de passage est le plus ancien.
[19] La Ville maintient que MMAC profitera du franchissement routier puisque celui-ci sera plus sécuritaire non seulement pour les piétons, mais également pour les camions liés à ses activités ferroviaires.
[20] En outre, la Ville soutient qu'elle a acquis certains lots de la Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique (CP) et que ceux-ci sont grevés de servitudes de passage qui permettent d'accéder aux anciens lots de CP par la rue Frontenac. Ces droits de passage sont actuellement exercés par l'intermédiaire d'un passage privé qui emprunte la même assiette que celle visée par la présente demande de franchissement routier public.
[21] MMAC affirme que l'assiette des servitudes de passage créée ne concorde pas avec le franchissement routier envisagé par la Ville. MMAC allègue que le lot faisant l'objet de la présente demande n'est grevé d'aucune servitude de passage en faveur de la Ville.
[22] La Ville réitère que bien que l'assiette des droits de passage ait originalement été prévue comme traversant d'autres lots, cette assiette de droit de passage a été, dans les faits, exercée sur le lot presque exactement à l'endroit qui fait l'objet de la présente demande.
Analyse et constatations
Législation
[23] Les paragraphes 101(3) et (4) de la LTC prévoient que :
(3) L'Office peut, sur demande de la personne qui ne réussit pas à conclure l'entente […] autoriser la construction d'un franchissement convenable ou de tout ouvrage qui y est lié, ou désigner le responsable de l'entretien du franchissement.
(4) L'article 16 de la Loi sur la sécurité ferroviaire s'applique s'il n'y a pas d'entente quant à la répartition des coûts de la construction ou de l'entretien du franchissement.
[24] Les paragraphes 16(1) et (4) de la Loi sur la sécurité ferroviaire (LSF) prévoient ce qui suit :
(1) Faute de recours prévu sous le régime de la partie III de la Loi sur les transports au Canada ou de la Loi sur le déplacement des lignes de chemin de fer et les croisements de chemin de fer, le promoteur et tout bénéficiaire des installations ferroviaires peuvent, avant ou après le début des travaux relatifs à la construction ou à la modification de ces installations, saisir l'Office de leur désaccord sur leurs obligations en ce qui concerne le coût de réalisation des travaux et les frais d'exploitation et d'entretien des installations.
[...]
(4) L'Office détermine la quote-part de chacun à l'égard des frais de réalisation, d'exploitation et d'entretien en tenant compte de la subvention accordée, le cas échéant, au titre des articles 12 ou 13, des avantages respectifs que retirerait des installations la personne qui l'a saisi ou qui aurait pu le faire, et de tout point qu'il juge utile. Les obligations à l'égard de ces frais sont réparties conformément à la décision de l'Office.
1. L'Office devrait-il autoriser la construction du franchissement routier proposé et les ouvrages liés?
[25] En vertu du paragraphe 101(3) de la LTC, l'Office peut autoriser la construction d'un franchissement convenable ou de tout ouvrage qui y est lié. La Cour d'appel fédérale, dans Fafard c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, [2003] FCA 243 (Fafard), a conclu ce qui suit : « Un passage convenable est un passage adéquat et approprié pour les fins auxquelles il est destiné et mis en place. »
[26] Les questions concernant la sécurité au franchissement routier, telles que la visibilité réduite, la synchronisation entre le panneau de contrôle des feux ferroviaires et celui des feux routiers et l'évaluation détaillée de la sécurité, relèvent de la compétence de Transports Canada. Par conséquent, l'Office n'a pas à examiner ni à trancher ces questions.
[27] Néanmoins, avant de rendre une décision quant au caractère convenable d'un franchissement routier, l'Office doit tenir compte de la sécurité, puisque la Cour d'appel fédérale a également conclu, dans Fafard, que « la notion de "passage convenable" doit comporter un élément de sécurité. »
[28] Par conséquent, comme la détermination d'un franchissement convenable comprend la sécurité et vu que la Ville et MMAC ont soulevé la question de la sécurité au franchissement, l'Office a demandé à Transports Canada, l'autorité en matière de sécurité ferroviaire au Canada, de fournir des commentaires.
[29] Dans une lettre en date du 30 novembre 2010, Transports Canada indique que si le franchissement routier respectait la réglementation, c'est-à-dire la pratique courante de l'industrie, les lignes directrices, les normes, les règles et les règlements, Transports Canada n'aurait aucun problème avec la construction du franchissement routier. Transports Canada ajoute que le passage tel que présenté originalement par la Ville présentait des problèmes mais que, lors de discussions avec la firme d'ingénierie, ces problèmes ont été résolus. Par conséquent, Transports Canada indique que sous réserve de la réception de l'avis de travail, le franchissement routier proposé semblerait satisfaisant.
[30] Transports Canada, lors de la visite subséquente sur les lieux, a indiqué que le franchissement, tel qu'il existe actuellement, est un passage privé utilisé par un nombre restreint de personnes et sa configuration est acceptable étant donné son utilisation actuelle. Transports Canada a également indiqué que cependant, l'utilisation future proposée par la Ville fait en sorte que le franchissement deviendra public, et ce changement d'utilisation demandé par la Ville fait en sorte que le franchissement routier futur devra répondre aux normes actuelles.
[31] Par conséquent, l'Office a tenu compte de l'aspect de la sécurité tel que l'a ordonné la Cour d'appel fédérale et, se fondant sur la présentation de Transports Canada et considérant que des révisions des plans sont prévues pour donner suite aux commentaires de Transports Canada, l'Office détermine que le franchissement routier proposé satisferait aux normes d'un franchissement convenable.
[32] MMAC propose des solutions de rechange au franchissement routier proposé, telles qu'un tunnel ou un viaduc, dont, selon elle, l'Office devrait tenir compte. Dans la décision no 688-R-2004, l'Office a noté qu'un des facteurs utilisé afin de déterminer si un saut-de-mouton est justifié est le produit vectoriel de la circulation routière-ferroviaire. Lorsque le produit vectoriel est inférieur à 200 000, un franchissement routier (à niveau) est généralement suffisant, à condition qu'il soit muni de dispositifs de protection adéquats. Dans le cas présent, le produit vectoriel anticipé ne justifie pas la construction d'un saut-de-mouton à cet endroit.
[33] En outre, l'Office accepte que l'option de mettre en place un tunnel ou un viaduc n'est pas réalisable puisque les contraintes du site démontrent que ces options sont irréalistes sur le plan technique principalement en raison de pentes contraignantes.
[34] En ce qui a trait aux incidences néfastes potentielles d'un franchissement routier (à niveau) sur les activités de MMAC, de même que la perte d'espace d'entreposage de wagons, l'Office note qu'un passage privé existe présentement à cet endroit, et que pour compenser la perte d'espace d'entreposage de wagons sur les voies enlevées, une nouvelle voie d'entreposage serait construite à l'ouest du nouveau franchissement routier. MMAC conservera donc la même capacité de stockage de wagons. De plus, il est admis que le volume de circulation routière sur le franchissement routier augmentera en fonction des activités au centre sportif mais qu'il est prévu que le volume de circulation supplémentaire ne sera habituellement pas de longue durée.
[35] L'Office conclut donc que la construction d'un franchissement routier ne nuira pas indûment aux activités de MMAC au point de justifier un refus par l'Office d'autoriser la construction du franchissement routier proposé.
[36] Par conséquent, l'Office conclut qu'un franchissement routier est nécessaire puisqu'il fournira un accès au centre sportif et, par conséquent, l'Office, conformément au paragraphe 101(3) de la LTC, autorise la construction d'un franchissement routier (à niveau) et les ouvrages liés au point milliaire 117,11 de la subdivision Moosehead.
2) Comment les coûts de construction du franchissement routier et des ouvrages liés de même que les coûts d'entretien du franchissement routier et les coûts d'installation et d'entretien du système d'avertissement devraient-ils être répartis?
[37] Le paragraphe 101(4) de la LTC prévoit que l'article 16 de la LSF s'applique si les parties ne réussissent pas à conclure une entente quant à la répartition des coûts de construction et d'entretien d'un franchissement routier. Lorsque les parties au projet ne réussissent pas à conclure une entente quant à leurs responsabilités en ce qui concerne les coûts de construction, de modification, d'exploitation ou d'entretien d'un franchissement routier, l'article 16 de la LSF permet au promoteur ou à quiconque pourrait tirer avantage de l'ouvrage ferroviaire, une fois terminé, d'en référer à l'Office pour une décision. En l'espèce, les parties n'ont pas réussi à s'entendre sur la répartition des coûts du franchissement routier proposé. Par conséquent, l'Office détermine que cette question doit être examinée en vertu du paragraphe 101(4) de la LTC.
[38] Le paragraphe 16(1) de la LSF prévoit ce qui suit :
Faute de recours prévu sous le régime de la partie III de la Loi sur les transports au Canada ou de la Loi sur le déplacement des lignes de chemin de fer et les croisements de chemin de fer, le promoteur et tout bénéficiaire des installations ferroviaires peuvent, avant ou après le début des travaux relatifs à la construction ou à la modification de ces installations, saisir l'Office de leur désaccord sur leurs obligations en ce qui concerne le coût de réalisation des travaux et les frais d'exploitation et d'entretien des installations.
[39] Par conséquent, l'Office a le pouvoir de répartir les coûts du franchissement routier proposé, des ouvrages liés et du système d'avertissement.
[40] L'Office a le pouvoir discrétionnaire pour déterminer les coûts que doit assumer chaque partie dans le cadre d'une demande. Dans la décision no 517-R-2003, l'Office a indiqué ce qui suit :
L'Office doit déterminer la quote-part de chacun à l'égard des frais de réalisation, d'exploitation et d'entretien en tenant compte des avantages respectifs retirés par chacun et de tout point qu'il juge utile. Le besoin des installations peut être un point que l'Office juge utile, mais le paragraphe 16(4) de la LSF n'exige pas que la répartition des coûts repose sur l'identité de la partie qui a créé ce besoin, au contraire des allégations de CN. Dans le même ordre d'idée, l'Office note l'argument de la demanderesse selon lequel la règle de l'ancienneté, qui imputerait tous les coûts de l'élargissement et de l'entretien du franchissement routier à la partie en second, devrait s'appliquer. La règle de l'ancienneté a déjà été utilisée par l'Office et les organismes qu'il a remplacés et était également incluse dans l'ordonnance générale no 4 du Règlement sur les passages à niveau au croisement d'un chemin de fer et d'une voie publique, promulguée dans l'ancienne Loi sur les chemins de fer. L'Office pourra tenir compte de cette règle ou de tout autre principe dans l'affaire présente ou dans toute autre affaire; toutefois, il juge chaque affaire sur son bien-fondé. [soulignement ajouté]
[41] Après avoir examiné les arguments des parties concernant leur ancienneté au passage en question et les avantages de l'ensemble du projet, l'Office est d'avis qu'en tenant compte des facteurs indiqués ci-après, il ne devrait pas appliquer le principe de l'ancienneté pour déterminer la quote-part des parties relativement aux coûts de construction et d'entretien du franchissement routier proposé et du système d'avertissement. L'Office considère qu'en l'espèce, il est indiqué d'accorder plus d'importance aux avantages respectifs que tireraient du franchissement routier et du système d'avertissement la Ville et MMAC et du fait que la Ville a présenté cette demande. Pour en arriver à cette détermination, l'Office se fonde également, dans les circonstances, sur un des principes qu'il a établi au paragraphe 33 de la décision no 224-R-2009 et auquel l'Office accorde de l'importance, c'est-à-dire : « Les coûts de toute installation ou amélioration additionnelle aux travaux requis pour la reconstruction devraient normalement être assumés par la partie qui demande ces installations ou améliorations additionnelles. »
[42] Dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire relativement à la répartition des coûts en fonction des avantages respectifs des parties et des obligations du promoteur du projet, l'Office estime que les présentations des parties sur le droit de passage sont sans objet.
[43] La position de la Ville est que les deux parties tireront des avantages de la construction du franchissement routier public.
[44] Cependant, la situation en l'espèce est exceptionnelle. La Ville procède à la construction d'un centre sportif à un emplacement qui exige la reconstruction d'un passage privé et la conversion de ce passage privé en un franchissement routier public. Le besoin du franchissement routier public proposé est créé en raison de la nécessité de la Ville de fournir à ses citoyens un accès amélioré et sécuritaire au centre sportif.
[45] Par conséquent, l'Office est d'avis que la Ville sera la principale bénéficiaire des améliorations apportées au franchissement routier situé au point milliaire 117,11. Non seulement le franchissement fournira un accès direct au nouveau centre sportif, mais la Ville et les citoyens bénéficieront, sur le plan de la sécurité publique, de l'installation et de l'utilisation du système d'avertissement au franchissement routier.
[46] Par contre, la construction d'un franchissement routier public ne permettra pas à MMAC de desservir d'autres clients, ni d'améliorer ses activités ferroviaires. Le passage privé actuel répond aux exigences de MMAC et, en fait, MMAC a indiqué préférer le statut quo. Si la Ville n'avait pas proposé de changement, il n'y aurait pas eu de raison d'apporter des changements à l'infrastructure de MMAC.
[47] L'Office conclut que la Ville est la principale bénéficiaire de la construction d'un franchissement routier public. Ceci est le principal facteur de la répartition des coûts en l'espèce.
[48] Par conséquent, l'Office détermine que la Ville est responsable des coûts de construction du franchissement routier et des ouvrages liés et des coûts d'entretien du franchissement routier ainsi que les coûts liés à l'installation du système d'avertissement.
[49] Toutefois, en ce qui a trait à l'entretien du système d'avertissement, l'Office est d'avis que même si la Ville est la principale bénéficiaire du système d'avertissement, MMAC bénéficiera également de la sécurité accrue du système d'avertissement. Par conséquent, il est indiqué que MMAC assume une partie des coûts d'entretien de ce système d'avertissement.
[50] Actuellement, MMAC assume les coûts d'entretien du passage privé existant. En 2009, selon MMAC, ces coûts d'entretien s'élevaient à 1 416 $. En se fondant sur le Guide des frais ferroviaires pour l'entretien et la construction des franchissements 2010, les coûts d'entretien annuel pour un système d'avertissement à un passage avec barrières s'élèvent à 7 815,10 $. Vingt pour cent de ce montant équivaut à 1 563,02 $, soit un montant semblable à celui qu'assume actuellement MMAC pour l'entretien du passage existant.
[51] Par conséquent, l'Office estime que MMAC devrait être responsable pour un montant équivalent à 20 pour cent des coûts d'entretien du système d'avertissement; soit un montant comparable à ce qu'elle aurait à débourser pour l'entretien si le franchissement demeurait privé. La Ville devrait être responsable d'assumer 80 pour cent des coûts d'entretien du système d'avertissement.
Conclusion
[52] L'Office autorise la construction d'un franchissement routier (à niveau) où se croisent la rue de la Gare et la subdivision Moosehead (point milliaire 117,11), dans la ville de Lac-Mégantic, et répartit les coûts comme suit :
- La Ville doit assumer 100 pour cent des coûts de construction de la surface du franchissement et des abords routiers, ainsi que des coûts d'installation du système d'avertissement.
- La Ville doit assumer 100 pour cent des coûts liés à l'entretien futur de la surface du franchissement et des abords routiers.
- Les coûts liés à l'entretien futur du système d'avertissement doivent être assumés par la Ville à 80 pour cent et par MMAC à 20 pour cent.
[53] En outre, l'Office autorise la Ville à effectuer, à ses frais, les ouvrages liés.
Membres
- Jean-Denis Pelletier, ing.
- John Scott
Membre(s)
- Date de modification :