Décision n° 231-R-2011

le 22 juin 2011

le 22 juin 2011

DEMANDE présentée par la Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique en vertu du paragraphe 98(2) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée.

Référence no R8045/11-00701


Demande

[1] La Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique (CP) a déposé une demande auprès de l'Office des transports du Canada (Office) en vertu du paragraphe 98(2) de la Loi sur les transports au Canada (LTC) pour faire approuver la construction d'une nouvelle gare intermodale, qui sera connue comme étant l'installation intermodale de Regina. Cette gare intermodale s'étendra entre les points milliaires 98,5 et 102,30 de la subdivision Indian Head de CP, au nord de la voie principale de CP, à la limite ouest de la ville de Regina, dans la province de la Saskatchewan, comme l'illustrent les plans 02-G-101 à 02-G-105, révision A, du 17 janvier 2011.

[2] CP prévoit construire la phase 1 du projet de gare intermodale et sollicitera l'approbation des phases ultérieures selon ce qu'exigeront les volumes de trafic et les clients du Global Transportation Hub (GTH), plaque de transport et de distribution dernier cri qui s'étend sur environ 1 800 acres de terrain à la limite ouest de Regina.

[3] La demande comprenait l'ébauche d'une évaluation environnementale du projet produite conformément aux exigences de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, L.C. (1992), ch. 37 (LCÉE). Aux termes de l'alinéa 5(1)d) de la LCÉE, l'évaluation environnementale d'un projet s'impose avant que l'Office n'exerce son pouvoir discrétionnaire en vertu de l'article 98 de la LTC. Aux termes de la LCÉE, l'Office, de concert avec toute autre autorité responsable, doit veiller à ce qu'un examen environnemental préalable soit effectué avant de prendre une décision irrévocable relativement au projet.

[4] Dans la décision nº LET-R-59-2011, l'Office a déterminé, aux termes de l'alinéa 20(1)a) de la LCÉE, que le projet de gare intermodale ne devrait pas entraîner d'effets négatifs significatifs sur l'environnement si l'on tient compte de la mise en œuvre des mesures d'atténuation proposées par CP et acceptées par l'Office. De plus, l'Office a avisé CP que s'il autorisait le projet de construction en vertu de l'article 98 de la LTC, cette autorisation serait assujettie aux conditions associées à la détermination relative à l'évaluation environnementale rendue dans la décision nº LET-R-59-2011.

[5] Pour les besoins de la demande présentée en vertu du paragraphe 98(2) de la LTC et de l'évaluation environnementale réalisée aux termes de la LCÉE, CP a publié un avis dans le Leader-Post des 5 et 7 février 2011. Les intervenants disposaient d'un délai de 30 jours pour formuler tout commentaire au sujet de la demande de CP. Aucun commentaire n'a été reçu.

Fondement législatif

[6] Les paragraphes 98(1) et (2) de la LTC prévoient ce qui suit :

(1) La construction d'une ligne de chemin de fer par une compagnie de chemin de fer est subordonnée à l'autorisation de l'Office.

(2) Sur demande de la compagnie, l'Office peut accorder l'autorisation s'il juge que l'emplacement de la ligne est convenable, compte tenu des besoins en matière de service et d'exploitation ferroviaires et des intérêts des localités qui seront touchées par celle-ci.

Question

[7] L'emplacement de la ligne est-il raisonnable compte tenu des besoins en matière de service et d'exploitation ferroviaires et des intérêts des localités qui seront touchées par la ligne?

Emplacement de la ligne de chemin de fer

[8] La Province de la Saskatchewan (Province), la Ville de Regina et le gouvernement du Canada, par l'entremise de l'Initiative de la Porte et du Corridor de l'Asie-Pacifique, ont établi un partenariat pour financer et appuyer le GTH.

[9] L'emplacement de la gare intermodale visée dans les limites du GTH a été choisi après que l'on ait tenu compte de l'emplacement de la voie principale de CP, du site du centre de distribution de Les Compagnies Loblaw limitée et de la configuration du GTH, notamment des projets d'infrastructure routière du GTH.

[10] CP a envisagé d'autres emplacements, mais a estimé, avec l'assentiment des autres partenaires, que l'emplacement proposé du GTH était ce qui convenait le mieux pour répondre à l'augmentation des échanges commerciaux avec la région de l'Asie-Pacifique.

[11] Selon CP, la phase 1 du projet de gare intermodale prévoit la construction de huit voies, notamment des voies d'accès, des voies de travail, des voies de garage et une voie de réparation sur place. La phase 1 du projet prévoit la construction d'environ 10 milles de voies avec 14 aiguillages. En outre, la construction de cette gare prévoit la modification du système actuel de signalisation ferroviaire. Le système à commande centralisée de la circulation sera prolongé vers l'est à partir de l'installation. L'installation de CP requiert aussi la construction d'édifices connexes comme un bureau principal, un édifice d'entretien, une marquise au-dessus de l'entrée, des kiosques pour le personnel, un poste de pesée des camions et plusieurs ouvrages provisoires, de même que des voies d'accès, et des zones de stationnement et d'entreposage des conteneurs.

[12] L'installation intermodale prévue sera construite dans un secteur qui est utilisé à des fins agricoles depuis plus d'un siècle. Le site du GTH avait fait l'objet de travaux de terrassement et avait été débarrassé de la végétation indigène à des fins agricoles, et il est en cours de transition d'un usage agricole à un usage industriel. L'accès à l'installation prévue se fera par l'avenue Dewdney qui tourne au sud sur le chemin de concession 210, lequel a été élargi par la Province en une route à quatre voies qui dessert déjà le centre de distribution de Les Compagnies Loblaw limitée et qui desservira les entreprises futures du GTH. La Province a entrepris d'autres travaux routiers, notamment une route de liaison qui reliera l'avenue Dewdney à la route Transcanadienne (route 1) et à la route 11.

Besoins en matière de service et d'exploitation ferroviaires

[13] Dans sa présentation, CP a annexé à l'appui du GTH une déclaration du gouvernement de la Saskatchewan qui énonce ce qui suit :

Plus que toute autre province, la Saskatchewan est tributaire des exportations pour créer des emplois et assurer sa prospérité économique… ce que produit l'économie de la Saskatchewan est très demandé dans tout le Canada, dans toute l'Amérique du Nord et dans le monde entier. En raison de cette dépendance à l'égard des exportations, nous avons besoin de liaisons dernier cri avec les réseaux de transport nationaux et internationaux et les chaînes d'approvisionnement mondiales. Le GTH permettra de renforcer ces liaisons. [traduction]

[14] CP ajoute qu'il renforcera la capacité d'accueil de la marchandise en provenance de l'Asie-Pacifique et qu'il donnera accès aux conteneurs d'exportation en plus de renforcer la capacité d'expédition vers les marchés d'Asie. Une particularité du GTH est qu'il offre aux entreprises la possibilité de coimplanter leurs installations à côté de la gare intermodale prévue de CP. CP affirme que la subdivision Indian Head fait partie de sa ligne transcontinentale qui relie Montréal à Vancouver.

[15] CP exploitera des activités intermodales à la gare proposée et ne procédera pas au classement des wagons de marchandises ou des wagons-citernes, car ces activités demeureront à la gare ferroviaire existante de Regina. La gare intermodale prévue n'assurera pas le traitement de matières dangereuses pas plus qu'elle ne ravitaillera les locomotives en carburant.

[16] La coimplantation permet de plus grandes économies et réduit les distances de transport des conteneurs par camion depuis la gare intermodale prévue jusqu'aux installations des clients. De ce fait, Les Compagnies Loblaw limitée a opté pour le GTH, à côté de la gare intermodale prévue de CP, pour y situer son nouveau centre de distribution de l'ouest du Canada.

[17] CP a l'intention de relocaliser au GTH toutes ses activités intermodales depuis l'installation intermodale existante au centre-ville de Regina. Selon CP, l'installation intermodale actuelle est attenante à sa gare ferroviaire du centre-ville de Regina et son empreinte est réduite et inefficace. Elle est située dans une zone urbaine congestionnée où l'espace est insuffisant pour que les camions puissent charger des marchandises et pour que le chariot élévateur à cadre de préhension puisse fonctionner. De plus, l'espace restreint à l'installation existante oblige les camions en attente à se mettre en file et à faire tourner leurs moteurs au ralenti dans les rues publiques avoisinantes. L'accès par la route à la gare intermodale existante provoque de la congestion dans les rues de la ville, ce qui réduit davantage l'efficacité de l'emplacement actuel.

[18] L'interconnexion des wagons intermodaux à l'arrivée et au départ de la gare ferroviaire de Regina jusqu'à l'installation intermodale existante est également fort inefficace car la voie n'est pas assez longue et n'est pas compatible avec les trains modernes.

[19] L'Office reconnaît que l'objectif du GTH est d'offrir des infrastructures capables de traiter les volumes croissants de conteneurs et d'intégrer les modes de transport dans un réseau ininterrompu, sans compter que la gare intermodale prévue de CP est l'une des principales pierres angulaires de ce projet. L'Office est d'avis que CP ne pourra pas satisfaire aux besoins du GTH uniquement avec l'installation intermodale existante au centre-ville de Regina. L'Office est donc convaincu que l'emplacement de la ligne de chemin de fer prévue est raisonnable, compte tenu des besoins en matière de service et d'exploitation ferroviaires.

Intérêts des localités

Nature des activités

[20] Selon CP, les activités actuelles à l'installation intermodale comprennent le passage de sept trains de marchandises intermodaux/mixtes par jour. CP prévoit que dès que la gare intermodale prévue sera en service, elle pourra accueillir des trains-blocs intermodaux en provenance et à destination de l'est et de l'ouest. CP estime que la gare intermodale prévue accueillera chaque jour un ou plusieurs trains supplémentaires à l'arrivée et un ou plusieurs trains supplémentaires au départ.

[21] CP soutient que la conception de la gare intermodale prévue garantira la sécurité des activités. La vitesse des trains dans la gare sera limitée à 10 milles à l'heure et tous les véhicules automobiles qui circulent dans les limites de la propriété ne devront pas dépasser une vitesse de 25 milles à l'heure.

[22] Le projet de gare intermodale sera sécurisé par des clôtures de périmètre, des barrières et des caméras. L'accès en sera réglementé par des guérites à l'entrée. Le traitement du trafic à l'arrivée et au départ s'effectuera dans les guérites. Jusqu'à quatre voies seront réservées au trafic à l'arrivée et une voie distincte sera destinée au trafic de départ. Un poste de pesée pour les camions y sera également installé.

[23] Selon CP, la circulation des camions sera concentrée dans les limites du GTH, principalement entre l'installation attenante de Les Compagnies Loblaw limitée et la gare intermodale prévue.

Accès et franchissements routiers

[24] L'accès par la route à la gare intermodale prévue se fera par l'avenue Dewdney qui tourne au sud sur le chemin de concession 210.

[25] CP fait valoir que toutes les réserves routières seront fermées par la Province dans le périmètre de la gare intermodale prévue afin d'éliminer les passages à niveau.

  • Chemin de concession 210 : fermer l'emprise réservée qui n'est pas ouverte dans le périmètre de la gare intermodale prévue, notamment le passage à niveau existant qui franchit la subdivision Indian Head;
  • Chemin de concession 211 : fermer le chemin de concession 211 dans le périmètre de la gare intermodale prévue, notamment le passage à niveau existant qui franchit la subdivision Indian Head;
  • Chemin Condie (chemin de concession 209) : fermer ce passage qui franchit la subdivision Indian Head dans le cadre des améliorations routières du GTH.

[26] Par ailleurs, la Province améliorera le passage du chemin d'accès Grand Coulee (au point milliaire 102,22) en y installant un système de protection automatique afin de renforcer la sécurité du public et des activités ferroviaires.

[27] Selon CP, il n'y aura pas de franchissement routier dans les limites de l'empreinte de la gare intermodale prévue. De plus, l'élimination des passages à niveau non protégés par des systèmes d'avertissement contribuera à la sécurité publique car cela réduira le nombre d'interactions entre les trains et les véhicules à ces emplacements.

[28] De plus, la fermeture de ces passages procurera une distance suffisante pour accueillir de longs trains-blocs intermodaux. Le site dispose de suffisamment d'espace pour assurer l'efficacité des activités intermodales de camionnage.

[29] Dans le cadre du processus d'évaluation environnementale, un habitant de la région a soulevé la question d'une réduction de l'accès à sa terre ainsi que du drainage à proximité du lieu du projet. CP a convenu de permettre à cet habitant d'avoir accès à sa terre. Pour faciliter le drainage, CP a également convenu de remplacer trois ponceaux existants qui sont obstrués et séparés.

Appui à l'égard du projet

[30] Le 29 juin 2010, CP a tenu une séance d'information publique pour consulter le public et les intervenants. D'autres consultations ont été organisées par l'entremise du centre d'appel Community Connect de CP et des réunions de suivi ont également été organisées avec un représentant de CP. Les participants ont soulevé les questions de l'incidence du projet sur les terres agricoles, de la disparition d'un accès routier pour les agriculteurs, d'une augmentation de la circulation des camions et du bruit possible. CP s'est engagée à traiter, dans son rapport d'évaluation environnementale, les questions se rapportant au bruit, à la sécurité, à la circulation des camions, à l'accès routier des agriculteurs et à l'incidence sur les terres agricoles. Pour ce qui est du bruit et des vibrations, CP a mené une étude d'évaluation de l'incidence du bruit qui a permis de conclure que le projet n'aura aucune incidence notoire sur les niveaux de bruit dans le secteur.

[31] Les questions d'amélioration du réseau routier débordent le cadre de ce processus et sont abordées par d'autres autorités.

[32] Aucun commentaire n'a été reçu dans le cadre des consultations publiques.

[33] À l'appui de son projet, CP a présenté des lettres de Les Compagnies Loblaw limitée, de Regina Regional Opportunities Commission et de l'administration du Global Transportation Hub à l'appui de la gare intermodale prévue, en raison de l'incidence qu'elle aura sur l'économie locale, de l'amélioration du développement urbain et des avantages globaux pour la Ville de Regina.

[34] Selon CP, les gouvernements fédéral, provincial et municipal reconnaissent la nécessité d'avoir des installations intermodales intégrées à l'emplacement du GTH, cet appui étant reconnu par tous les ordres de gouvernement par l'entremise du financement de la Porte d'entrée du Pacifique.

[35] CP a tenu des consultations avec la Première nation de Sakimay au sujet du projet de gare intermodale. Au cours de ces consultations, les questions suivantes ont été abordées : bruit possible, préparatifs d'urgence, volumes prévus de trafic ferroviaire, besoin de passages à niveau et perspectives professionnelles et commerciales. En réponse aux questions soulevées, CP a confirmé que le projet ferait l'objet d'une évaluation environnementale. CP a donné l'assurance qu'elle prendrait des engagements à l'égard des préparatifs d'urgence dans ses plans d'évaluation environnementale et de sécurité d'exploitation. CP a également confirmé que le bruit serait abordé dans l'évaluation environnementale, notamment par des mesures d'atténuation bien précises. CP a par ailleurs confirmé qu'aucun nouveau passage à niveau ne serait nécessaire et que tous les passages existants dans le voisinage du projet seraient fermés ou améliorés par la Province avant la construction de l'installation intermodale prévue.

[36] La Première nation de Sakimay possède une parcelle de terrain à environ 2,5 kilomètres à l'est du site du projet qu'elle destine au développement économique. La Première nation de Sakimay exploite actuellement une petite entreprise sur cette parcelle de terrain et elle s'intéresse aux perspectives futures de développement économique de cette propriété tandis que le secteur passe à un usage industriel. CP a confirmé qu'elle continuerait d'étudier les perspectives professionnelles et commerciales avec la Première nation de Sakimay.

[37] À la lumière de ce qui précède, l'Office est d'avis que l'emplacement prévu de l'installation intermodale de CP est convenable et conforme aux intérêts des localités touchées.

Conclusion

[38] L'Office conclut que l'emplacement de l'installation intermodale est convenable, compte tenu des besoins en matière de service et d'exploitation ferroviaires et des intérêts des localités qui seront touchées par la ligne de chemin de fer.

[39] Par conséquent, l'Office, en vertu du paragraphe 98(2) de la LTC, et sous réserve des conditions suivantes, autorise la construction d'une ligne de chemin de fer qui sera connue comme étant l'installation intermodale de Regina, à la limite ouest de la ville de Regina, dans la province de la Saskatchewan.

Conditions

[40] CP doit :

  1. mettre en place les mesures d'atténuation, les pratiques exemplaires et les procédures nécessaires pour protéger l'environnement, comme l'indiquent son rapport d'évaluation environnementale et les renseignements complémentaires fournis ainsi que la décision no LET-R-59-2011;
  2. interdire tout écart par rapport à ces mesures d'atténuation, ces pratiques exemplaires et ces procédures sans l'approbation préalable de l'Office.

Membres

  • J. Mark MacKeigan
  • Jean-Denis Pelletier, ing.

Membre(s)

J. Mark MacKeigan
Jean-Denis Pelletier, ing.
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