Décision n° 24-C-A-2023

le 9 mars 2023

Demande présentée par Yvonne Emma Nsengiyumva (demanderesse)contre Air Canada, Brussels Airlines N.V./S.A. (Brussels Airlines) et EGYPTAIR (Egyptair) [défenderesses], au titre du paragraphe 110(4) du Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58 (RTA), concernant des perturbations d’horaire et un retard de bagages

Numéro de cas : 
21-50058

[1] La demanderesse a acheté un billet auprès d’une agence de voyages pour un vol aller-retour de Montréal (Québec) à Kigali, Rwanda, dont le départ était prévu le 12 juillet 2019, à 15 h, et l’arrivée le 13 juillet 2019, à 18 h 50. L’itinéraire de départ comportait un vol de correspondance à Toronto (Ontario) et à Bruxelles, Belgique, mais, durant l’attente à l’aéroport de Montréal, la demanderesse a été informée que le vol de Montréal à Toronto serait retardé d’environ deux heures en raison de contraintes relatives au parc d’aéronefs d’Air Canada. Puisque ce retard allait empêcher la demanderesse de prendre son vol de correspondance à Toronto, Air Canada a décidé de réacheminer la demanderesse sur un vol de remplacement, de Montréal à Kigali, via Bruxelles et Le Caire, Égypte, dont l’arrivée à Kigali était prévue le 13 juillet 2019, à 22 h 45.

[2] Le vol de remplacement de Montréal à Bruxelles a également été retardé, car l’aéronef devant être utilisé pour exploiter ce vol a dû être remplacé. La demanderesse est donc arrivée à Bruxelles avec 1 heure 33 minutes de retard. La demanderesse affirme qu’elle a manqué son vol de correspondance de Bruxelles au Caire à cause de ce retard. Elle indique qu’Air Canada lui a alors offert un vol de remplacement lui permettant d’arriver à Kigali le 14 juillet 2019, à 3 h.

[3] Selon la demanderesse, elle a vécu « d’autres mésaventures » et est arrivée à Kigali le 14 juillet 2019 à 23 h, soit avec un retard de 28 heures et 10 minutes.

[4] Air Canada affirme que la demanderesse aurait finalement été réacheminée par EgyptAir sur un vol de remplacement de Bruxelles à Kigali, via Le Caire et Entebbe, Ouganda. Aucun détail n’a été fourni par la demanderesse par rapport à ce vol de remplacement d’EgyptAir ou aux « autres mésaventures » qu’elle a vécues. La demanderesse affirme qu’à cause des retards pendant son voyage, elle n’a pas pu assister à son propre mariage prévu le 14 juillet à 9 h et que ses bagages étaient manquants à son arrivée à Kigali. Elle indique qu’elle a dû acheter plusieurs articles de remplacement pendant qu’elle attendait qu’on lui livre ses bagages, soit 4 jours plus tard.

[5] La demanderesse réclame une indemnité de 2 500 CAD pour toutes les dépenses liées au retard et à la perte de ses bagages. Cette indemnité comprend un montant correspondant au coût des articles de remplacement achetés pendant qu’elle attendait qu’on lui livre ses bagages, ainsi que 300 CAD en frais de nourriture et 400 CAD en frais de taxi pour chaque fois qu’elle s’est présentée à l’aéroport pour tenter de récupérer ses bagages. Elle demande également une indemnisation au titre du Règlement sur la protection des passagers aériens (RPPA).

[6] Dans la présente décision, le rôle de l’Office des transports du Canada (Office) consiste à déterminer si les défenderesses ont correctement appliqué leur tarif au billet que la demanderesse a acheté.

[7] Si l’Office conclut que les défenderesses n’ont pas correctement appliqué leur tarif, il peut leur ordonner de prendre les mesures correctives qu’il estime indiquées ou de verser des indemnités à quiconque pour toutes dépenses qu’il a supportées en raison de la non-application du tarif.

[8] La demanderesse fait référence aux dispositions du RPPA, mais celui-ci n’était pas en vigueur au moment des incidents. Par conséquent, la demanderesse n’a droit à aucune indemnisation au titre du RPPA.

[9] La demanderesse fait également référence au règlement (CE) 261/2004 dans ses échanges de courriels avec Air Canada. Le tarif d’Air Canada incorpore le règlement (CE) 261/2004, mais indique que ce règlement s’applique seulement aux vols en provenance de l’Union européenne et de la Suisse. Dans le cas présent, étant donné que le vol de la demanderesse était en provenance du Canada, l’Office n’a pas compétence pour se pencher sur cet aspect de la demande.

Retard de vol

[10] La demanderesse est arrivée à sa destination avec un retard de 28 heures et 10 minutes. Selon le tarif d’Air Canada, les heures indiquées sur les horaires sont approximatives et non garanties, et ne font pas partie du contrat de transport.

[11] Lorsque le départ du vol de la demanderesse a été retardé à l’aéroport de Montréal, Air Canada était tenue soit de lui trouver une nouvelle place à bord d’un autre de ses vols, soit de la réacheminer sur le vol d’un autre transporteur avec lequel elle a conclu un accord à cette fin.

[12] Air Canada a réacheminé la demanderesse une première fois sur un autre de ses vols à l’aéroport de Montréal et ensuite sur un vol d’Egyptair à l’aéroport de Bruxelles.

[13] Par conséquent, l’Office conclut qu’Air Canada a correctement appliqué son tarif lorsqu’elle a réacheminé la demanderesse à deux reprises sur des vols de remplacement et qu’elle a fait de son mieux pour transporter la demanderesse avec une diligence raisonnable.

Délai pour réclamer des dépenses

[14] La Convention de Montréal exige que le passager adresse au transporteur sa protestation par écrit dans les 21 jours à partir de la date à laquelle le bagage a été mis à sa disposition.

[15] Selon Air Canada, la demanderesse n’a pas présenté de réclamation pour ses dépenses provisoires pendant qu’elle attendait qu’on lui livre ses bagages avant le 4 novembre 2020, soit plus d’un an après les incidents.

[16] La demanderesse a pourtant déposé un échange de courriels avec Air Canada, lequel démontre qu’elle a présenté sa réclamation le 31 juillet 2019, soit à l’intérieur du délai de 21 jours.

[17] Par conséquent, l’Office conclut que la demanderesse a présenté sa réclamation écrite à l’intérieur du délai de 21 jours précisé par la Convention de Montréal et qu’Air Canada est responsable du dommage qui résulte du retard dans le transport des bagages de la demanderesse.

Articles de remplacement

[18] La demanderesse a supporté diverses dépenses pour remplacer les articles contenus dans ses bagages. Elle a déposé plusieurs éléments de preuve indiquant qu’elle a acheté des vêtements et des articles de toilette. L’Office estime qu’il était raisonnable que la demanderesse achète la plupart de ces articles, considérant qu’elle voyageait à l’occasion de son propre mariage et que ces articles étaient liés à cet évènement, mais qu’il était déraisonnable d’acheter une troisième paire de souliers et un deuxième parfum. Une des factures déposées par la demanderesse, celle du 15 juillet 2019, est illisible et deux éléments de la facture du 16 juillet 2019, soit MAC et Signal, ne sont pas suffisamment détaillés. La demanderesse n’a donc pas droit à une indemnisation pour ces articles.

[19] À la lumière de ce qui précède, l’Office conclut qu’Air Canada n’a pas correctement appliqué les conditions énoncées dans son tarif en n’indemnisant pas la demanderesse pour les articles de remplacement qu’elle a achetés pendant qu’elle attendait qu’on lui livre ses bagages.

[20] Par conséquent, l’Office conclut que la demanderesse a droit à une indemnité de 1 495 000 RWF, soit 2 093 CAD.

[21] En ce qui concerne les frais de nourriture et de taxi que la demanderesse a réclamés pour chaque fois qu’elle s’est présentée à l’aéroport pour tenter de récupérer ses bagages, la demanderesse n’a pas expliqué comment elle avait supporté ces dépenses ni fourni de pièces justificatives à l’appui.

[22] Par conséquent, l’Office conclut que la demanderesse ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve de démontrer que le retard de ses bagages a entraîné ces dépenses. L’Office rejette donc cette partie de la demande.

Ordonnance

[23] L’Office ordonne à Air Canada de verser à la demanderesse une indemnité de 2 093 CAD le plus tôt possible, mais au plus tard le 24 avril 2023.

Dispositions en référence Identifiant numérique (article, paragraphe, règle, etc.)
Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58  110(4); 113.1
Règlement sur la protection des passagers aériens, DORS/2019-150  S.O.
International Passenger Rules and Fares Tariff AC-2 Containing Local and Joint Rules, Regulations, Fares and Charges on Behalf of Air Canada Applicable to the Transportation of Passengers and Baggage Between Points in Canada/USA and Points in Areas 1/2/3 and Between the USA and Canada, NTA(A) 458 80(A)(1); 80(A)(3); 80(C)(2); 80(C)(4); 105(B)(5); 105(C)(14)
Regulation (EC) 261/2004 of the European Parliament and of the Council of 11 February 2004 establishing common rules on compensation and assistance to passengers in the event of denied boarding and of cancellation or long delay of flights, and repealing Regulation (EEC) 295/91 S.O.

Convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international

17(2); 17(3); 19; 22(2); 23(1); 31(2)

Membre(s)

Mary Tobin Oates
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