Décision n° 29-AT-R-2017

le 15 février 2017
DEMANDE présentée par Marie Murphy et Martin Anderson (demandeurs) contre VIA Rail Canada Inc. (VIA) en vertu du paragraphe 172(1) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée (LTC).
Numéro de cas : 
16-02732

RÉSUMÉ

[1] Les demandeurs, qui voyagent fréquemment avec VIA, ont tous deux une déficience et doivent par conséquent utiliser des scooters. Les demandeurs font valoir que pendant des années, ils ont eu des difficultés à voyager ensemble avec leurs scooters entreposés dans les trains de voyageurs de VIA et que la politique actuelle de VIA, qui prévoit qu’un des scooters soit entreposé dans la zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants dans le compartiment de voyageurs et que l’autre soit entreposé dans le module prévu pour les bagages, est inefficace.

[2] L’Office des transports du Canada (Office) s’est penché sur les questions présentées par les demandeurs pour déterminer si elles constituent un obstacle à leurs possibilités de déplacement et, le cas échéant, si l’obstacle peut être éliminé sans que VIA se voit imposer une contrainte excessive.

[3] Pour les motifs énoncés ci-après, l’Office conclut qu’un obstacle existe et que des mesures peuvent être prises pour l’éliminer sans que VIA se voit imposer une contrainte excessive, à tout le moins en donnant des consignes plus efficaces au personnel et, potentiellement, en entreposant deux scooters dans une zone munie de dispositifs de retenue ou en veillant à ce que chaque train soit équipé de plus d’une zone munie de dispositifs de retenue.

LA LOI

[4] La demande a été déposée en vertu du paragraphe 172(1) de la LTC, qui prévoit ce qui suit :

Même en l’absence de disposition réglementaire applicable, l’Office peut, sur demande, enquêter sur toute question relative à l’un des domaines visés au paragraphe 170(1) pour déterminer s’il existe un obstacle abusif aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience.

[5] Les éléments suivants sont également pertinents au cas présent :

  • Le document intitulé Accessibilité des voitures de chemin de fer et conditions de transport ferroviaire des personnes ayant une déficience (Code ferroviaire), qui précise une série de normes d’accessibilité, notamment la fourniture d’au moins une zone munie d’un dispositif de retenue pour fauteuil roulant par train;
  • Le Règlement sur la formation du personnel en matière d’aide aux personnes ayant une déficience, DORS/94-42 (Règlement) qui prévoit que tous les transporteurs doivent veiller à ce que tous leurs employés et entrepreneurs qui peuvent être appelés à manipuler des aides à la mobilité reçoivent un niveau approprié de formation sur les politiques et les procédures liées aux besoins des personnes ayant une déficience et aux services à leur fournir, les responsabilités du transporteur, les compétences nécessaires pour fournir de l’assistance aux personnes ayant une déficience, les différents types d’aides à la mobilité et les méthodes de fixation des aides à la mobilité dans la voiture de voyageurs et le rangement des aides à la mobilité dans l’aire des bagages.

QUESTIONS

[6] La présente décision vise à déterminer :

  1. si les demandeurs sont des personnes ayant une déficience aux termes de la partie V de la LTC;
  2. si la difficulté alléguée rencontrée par les demandeurs pour voyager ensemble avec leurs scooters correctement entreposés dans les trains de voyageurs de VIA constitue un obstacle à leurs possibilités de déplacement et à celles d’autres personnes ayant une déficience semblable et, le cas échéant;
  3. si l’obstacle peut être éliminé sans que VIA se voit imposer une contrainte excessive.

QUESTION 1 : LES DEMANDEURS SONT-ILS DES PERSONNES AYANT UNE DÉFICIENCE AUX TERMES DE LA PARTIE V DE LA LTC?

[7] Les demandeurs ont des limitations de possibilités de déplacement et doivent utiliser des scooters. VIA reconnaît qu’ils sont des personnes ayant une déficience aux termes de la partie V de la LTC. L’Office conclut donc que le premier des trois éléments susmentionnés est respecté.

QUESTION 2 : EST-CE QUE LA DIFFICULTÉ ALLÉGUÉE RENCONTRÉE PAR LES DEMANDEURS POUR VOYAGER ENSEMBLE AVEC LEURS SCOOTERS CORRECTEMENT ENTREPOSÉS DANS LES TRAINS DE VOYAGEURS DE VIA CONSTITUE UN OBSTACLE À LEURS POSSIBILITÉS DE DÉPLACEMENT ET À CELLES D'AUTRES PERSONNES AYANT UNE DÉFICIENCE SEMBLABLE?

[8] Les fournisseurs de services de transport ont le devoir de rendre leurs services accessibles aux voyageurs ayant une déficience. Lorsqu’une structure physique, une politique ou une pratique constitue un obstacle pour une personne ayant une déficience, le fournisseur de services doit éliminer cet obstacle en apportant une modification générale à la structure, à la politique ou à la pratique ou, si ce n’est pas possible, en prenant des mesures particulières visant à répondre aux besoins liés à la déficience de cette personne. Il y a une exception à cela, soit lorsque l’élimination de l’obstacle entraîne une contrainte excessive pour le fournisseur de services, situation qui est traitée dans la question 3.

[9] Si une variété de mesures d’accommodement peuvent répondre aux besoins liés à la déficience d’une personne, il n’est pas nécessaire que la mesure d’accommodement corresponde exactement à ce que la personne demande, mais elle doit répondre efficacement aux besoins liés à la déficience de la personne, tout en préservant sa dignité.

Positions des parties

Les demandeurs

[10] Les demandeurs ont fourni des copies de billets pour des voyages quʼils ont effectués avec VIA entre Windsor (Ontario) et Toronto (Ontario), en avril, en mai et en juillet 2016.

[11] Les demandeurs font valoir que le nombre de zones munies de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants dans les voitures de voyageurs de VIA est un problème d’une importance fondamentale pour toutes les personnes qui voyagent à bord des trains de VIA avec leurs aides à la mobilité, et ils affirment que la zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants est le seul endroit sans danger où ranger leurs scooters. Les demandeurs font valoir que le nombre insuffisant de zones munies de dispositifs de retenue par train constitue un obstacle structurel qui les a obligés à l’occasion à voyager à bord de trains différents.

[12] Les demandeurs font valoir que le Code ferroviaire établit des normes minimales et volontaires d’accessibilité, mais que de telles normes peuvent parfois être insuffisantes étant donné que les mesures d’accommodement raisonnables dépendent de l’invalidité de la personne ayant une déficience, de l’incidence de l’obstacle et des recours possibles.

[13] Les demandeurs font valoir que la politique actuelle de VIA selon laquelle un scooter soit entreposé dans la zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants et l’autre dans le module prévu pour les bagages est problématique étant donné que le personnel de VIA est réticent à démonter le scooter pour l’entreposer dans le module prévu pour les bagages, ou ne savent pas comment procéder. Les demandeurs indiquent qu’ils ont dû entreposer leurs scooters eux-mêmes « presque à chaque fois », et que cela leur occasionne de la douleur, des inconvénients et de l’humiliation. Les demandeurs ajoutent que lorsque le scooter est entreposé dans le module prévu pour les bagages, d’autres bagages sont placés de manière inappropriée autour du scooter, ou par-dessus ce dernier, ce qui augmente le risque de dommages. Ils ajoutent également que le démontage et le remontage du scooter à des fins d’entreposage causent de l’usure. Ils affirment que cet espace d’entreposage ne peut pas être considéré comme étant un « espace d’entreposage prioritaire » comme le prévoit le Code ferroviaire. 

[14] Les demandeurs indiquent qu’ils ont fait face à un obstacle créé par l’attitude du personnel qui était réticent à démonter l’aide à la mobilité pour pouvoir l’entreposer, et que, dans les cas où il est disposé à démonter l’aide à la mobilité, il ne sait pas comment faire et, en fin de compte, les demandeurs doivent s’en charger. Selon les demandeurs, cette façon de faire va à l’encontre de la politique de VIA.

[15] Les demandeurs font valoir que le scooter de M. Anderson a été endommagé lorsqu’il a été entreposé dans l’aire des bagages. Ils affirment qu’un pneu a été endommagé parce que le passage qui est adjacent à la voiture VIA-1 est extrêmement étroit, et que cela démontre que les entrées étroites des voitures HEP font en sorte qu’il n’est pas possible ou qu’il est dangereux d’entreposer le deuxième scooter dans l’aire des bagages. Ils affirment que cette situation leur cause du stress, de l’anxiété et de l’incertitude.

[16] Les demandeurs font valoir que, compte tenu de ce qui précède, ils doivent choisir de risquer d’endommager leur scooter et de se blesser en le démontant ou de voyager à bord de trains différents, ce qui leur occasionne des dépenses supplémentaires et les prive de la possibilité de voyager ensemble en tant que couple marié.

VIA

[17] VIA fait valoir qu’elle respecte le Code ferroviaire qui prévoit que les trains de voyageurs devraient être équipés d’au moins une zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants dans les voitures munies d’une toilette accessible et que les trains de voyageurs qui ne sont équipés que d’une zone munie d’un dispositif de retenue pour fauteuil roulant devraient avoir un espace de rangement prioritaire pouvant accueillir un autre fauteuil roulant personnel. VIA souligne toutefois que le principal objectif de la zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants est de veiller à ce que les personnes qui ne peuvent pas transférer de leur aide à la mobilité à un siège de train ordinaire ait un accès égal à voyager en train, et ajoute que les demandeurs sont tous deux capables de transférer de leurs scooters à un siège de train ordinaire.

[18] VIA fait valoir qu’elle a mis en œuvre une politique qui s’applique à deux personnes qui voyagent ensemble avec leurs aides à la mobilité à bord de voitures LRC (Léger, Rapide, Confortable) et de voitures à alimentation électrique de service (AES) II qui ne sont pas équipées de wagons à bagages pour les trains circulant dans le corridor entre Québec (Québec) et Windsor (Politique). La Politique prévoit ce qui suit :

  • Le premier passager voyage avec une aide à la mobilité qui sera fixée dans la zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants de la voiture VIA-1.
  • Le deuxième passager doit pouvoir transférer dans un siège de train ordinaire, et la deuxième aide à la mobilité doit être entreposée dans le module prévu pour les bagages de la prochaine voiture.
  • Le passager ayant le scooter démontable montrera au personnel de VIA comment le démonter correctement.
  • Les deux aides à la mobilité doivent respecter les restrictions relatives à la hauteur, à la longueur, à la largeur et au poids définies dans la Politique, y compris celle voulant qu’aucun des éléments de l’aide à la mobilité devant être soulevé à partir du sol ou retiré de l’aide à la mobilité ne doit peser plus de 50 livres.
  • Toute demande pour que deux personnes voyagent ensemble avec leurs aides à la mobilité dans le corridor Québec-Windsor doit être présentée 48 heures avant le voyage et est conditionnelle à la disponibilité de la zone munie de dispositifs de retenue dans la voiture VIA-1.

[19] VIA a émis des lignes directrices relatives à l’entreposage d’une deuxième aide à la mobilité aux termes de la Politique, lesquelles prévoient que le personnel doit utiliser, comme solution de rechange, la partie inférieure du module prévu pour les bagages lorsque la hauteur de l’aide à la mobilité n’excède pas 26 pouces. Le personnel de VIA a également reçu comme consigne de ne pas entreposer d’autres bagages dans le même espace afin de prévenir tout dommage à l’aide à la mobilité et d’utiliser plutôt les modules compartimentés prévus pour les bagages. VIA souligne que dans les trains ayant des wagons à bagages, l’espace disponible doit être confirmé au moment de la réservation afin de déterminer s’il est possible d’entreposer de façon sécuritaire l’aide à la mobilité.

[20] VIA affirme que même si les demandeurs se sont plaints que leurs aides à la mobilité avaient parfois été entreposées de façon incorrecte, cela ne signifie pas nécessairement que la Politique est inefficace. VIA fait valoir que la question porte sur un manquement sur le plan du service à la clientèle et qu’elle met tout en œuvre pour remédier à la situation.

[21] En ce qui a trait à un des incidents mentionnés par les demandeurs, VIA fait valoir qu’il n’existe pas de preuve voulant que VIA soit responsable du pneu crevé sur le scooter de M. Anderson et que les demandeurs se contredisent dans leur conclusion concernant la cause du pneu crevé (c.‑à‑d. un mauvais entreposage par rapport à un cadre de porte étroit).

Analyse et constatation

[22] Les demandeurs ont une mobilité réduite et se déplacent en scooter, mais ils peuvent se transférer dans un siège de train ordinaire. L’égalité d’accès aux services de VIA exige qu’elles puissent voyager ensemble à bord des voitures de voyageurs, assis dans des sièges ordinaires avec leurs scooters entreposés correctement.

[23] En théorie, la Politique de VIA, qui prévoit qu’un scooter soit entreposé dans la zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants et que l’autre soit démonté par le personnel, puis entreposé en toute sécurité dans un espace d’entreposage prioritaire et désigné, pourrait être adéquate pour répondre aux besoins liés à la déficience des demandeurs et de ceux des autres personnes ayant des déficiences similaires, et pourrait assurer ainsi qu’ils ont un accès égal aux services de VIA. Toutefois, la preuve démontre que, selon la prépondérance des probabilités, cela n’a pas toujours été le cas en pratique en raison des difficultés liées à l’application de la Politique. Ces difficultés comprennent en partie la réticence du personnel de VIA de démonter et d’entreposer le deuxième scooter et le fait de placer les bagages sur le scooter entreposé.

[24] Le fait que ces difficultés soient survenues à plusieurs occasions avec des employés différents rend impossible d’accepter l’affirmation de VIA selon laquelle les problèmes qu’ont rencontrés les demandeurs relèvent simplement d’un problème lié au service à la clientèle et suscitent des inquiétudes sur la pertinence des consignes et de la formation données au personnel quant aux besoins des voyageurs ayant une déficience ainsi qu’aux responsabilités et aux procédures de VIA en la matière.

[25] L’Office conclut par conséquent que la difficulté qu’ont les demandeurs à voyager ensemble avec leurs aides à la mobilité entreposées correctement à bord des trains de voyageurs de VIA constitue un obstacle à leurs possibilités de déplacement mobilité et à celles des autres personnes ayant des déficiences similaires.

QUESTION 3 : L’OBSTACLE PEUT-IL ÊTRE ÉLIMINÉ SANS QUE VIA SE VOIT IMPOSER UNE CONTRAINTE EXCESSIVE?

[26] Un obstacle sera jugé abusif s’il peut être éliminé, soit par une modification générale des structures physiques, d’une politique ou d’une pratique ou par un accommodement des besoins liés à la déficience des voyageurs, sans que le fournisseur de services se voit imposer une contrainte excessive. Si un obstacle est abusif, il faudra mettre en place des mesures correctives pour y remédier.

Positions des parties

Les demandeurs

[27] Les demandeurs demandent que les mesures précises suivantes soient mises en place :

  • Un minimum de deux zones munies de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants dans chaque voiture de chaque train de voyageurs de VIA, ou la possibilité d’entreposer deux scooters dans une zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants;
  • Que le personnel de VIA fixe correctement les scooters et les récupère à l’arrivée à la destination;
  • Que le personnel de VIA aide les personnes à transférer de leur aide à la mobilité personnelle au siège et inversement;
  • Que l’Office mette à jour la norme relative au nombre requis de zones munies de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants par train afin de mieux s’harmoniser avec le ratio de passagers ayant une déficience par rapport aux passagers n’ayant pas de déficience.

[28] Les demandeurs affirment que les trains de VIA dans l’Ouest canadien ont souvent trois ou quatre zones munies de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants par train, alors que les trains circulant dans le couloir Windsor-Québec n’en ont qu’une. Ils font valoir que cela démontre que l’ajout de zones munies de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants est une mesure d’accommodement raisonnable et financièrement viable. Les demandeurs affirment qu’une meilleure accessibilité aux trains par l’ajout de zones munies de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants accroîtrait le nombre de passagers ayant une déficience qui voyagent avec leur aide à la mobilité, de sorte que les avantages qui en découleraient compenseraient le coût de cette mesure pour VIA et n’entraîneraient pas de contrainte excessive. Selon les demandeurs, VIA n’a pas démontré que l’ajout de zones munies de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants poserait des risques de sécurité ou des contraintes opérationnelles.

[29] Les demandeurs soutiennent que le consultant qui a été embauché par VIA pour étudier la possibilité d’entreposer deux scooters dans une zone munie de dispositifs de retenue a confirmé qu’il était possible de le faire de façon sécuritaire. Selon les demandeurs, VIA devrait divulguer les résultats de l’étude, qui a été lancée il y a plus d’un an, et ils demandent de pouvoir bénéficier de cette mesure d’accommodement.

[30] Les demandeurs fait valoir que VIA n’a fourni aucune preuve selon laquelle elle a formé son personnel sur l’application de la Politique ou qu’elle en a surveillé la bonne application par les membres de son personnel.

VIA

[31] VIA affirme que, le fait que certains trains circulant dans l’Ouest canadien soient équipés de plus d’une zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants ne crée pas un précédent à mettre en place dans d’autres trains. VIA affirme qu’il serait déraisonnable d’exiger un réaménagement de ses anciennes voitures pour ajouter des zones munies de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants alors que l’acquisition de nouvelles voitures fait l’objet d’une analyse approfondie, et que les modifications structurelles requises pour satisfaire aux exigences des demandeurs imposeraient une contrainte excessive à VIA en ce qui a trait aux coûts et à l’exploitation.

[32] VIA reconnaît qu’en juin 2015, elle a lancé une étude visant à analyser la possibilité d’entreposer deux aides à la mobilité dans une zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants dans ses voitures LRC, au lieu d’entreposer une des aides à la mobilité dans le module prévu pour les bagages. VIA souligne que cette étude et le rapport connexe sont incomplets. VIA soutient qu’elle doit effectuer une étude interne d’évaluation des risques et des dangers, consulter les représentants du syndicat (le comité de santé et de sécurité) et assurer la liaison avec Transports Canada sur le sujet.

[33] VIA affirme donc qu’il est prématuré de conclure que d’entreposer deux aides à la mobilité dans une zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants est une option réalisable, étant donné que l’étude relative à l’entreposage de deux aides à la mobilité dans une zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants n’est pas encore terminée. VIA soutient que si elle devait assurer l’exploitation sans avoir examiné en détail l’incidence que cette option pourrait avoir sur les passagers et l’entreprise elle-même, cela pourrait justifier une constatation de contrainte excessive fondée sur les préoccupations de sécurité et les coûts.

Analyse et constatation

[34] La contrainte excessive est déterminée par une évaluation des conséquences négatives de fournir un accommodement, en tenant compte de facteurs comme les contraintes de sécurité, d’exploitation, d’ordre physique ou structurel, ainsi que les contraintes économiques et financières. Dans le cas présent, VIA fait référence à une contrainte excessive en ce qui a trait aux coûts et à l’exploitation, mais elle n’explique pas l’ampleur de ces contraintes ni leur incidence sur l’entreprise.

[35] VIA n’a fourni aucune explication sur ce qui retarde l’achèvement de l’étude relative à la possibilité d’entreposer deux scooters dans une zone munie de dispositifs de retenue et ne donne aucun échéancier des prochaines étapes. L’Office ne dispose donc d’aucune base sur laquelle se fonder pour déterminer si une telle modification imposerait une contrainte excessive à VIA.

[36] De plus, VIA n’a fourni aucune raison expliquant pourquoi son personnel ne peut être formé ou supervisé de manière à faire appliquer correctement et de façon uniforme les règlements, les codes, les politiques et les procédures sur l’entreposage d’un scooter dans une zone munie de dispositifs de retenue et de l’autre scooter dans le module prévu pour les bagages.

[37] L’Office conclut par conséquent que l’obstacle peut être éliminé sans que VIA se voit imposer une contrainte excessive, à tout le moins en donnant des consignes plus efficaces au personnel et, potentiellement, en entreposant deux scooters dans une zone munie de dispositifs de retenue ou en veillant à ce que chaque train soit équipé de plus d’une zone munie de dispositifs de retenue.

ORDONNANCE

[38] L’Office ordonne à VIA de prendre les mesures suivantes d’ici le 15 mai 2017 :

  • Donner des consignes claires à tous les employés qui pourraient offrir un service aux personnes ayant une déficience quant au contenu et à l’application des règlements, des codes, des politiques et des procédures pertinentes, conformément au Règlement, et veiller à ce que son personnel applique correctement les exigences connexes.
  • Fournir à l’Office et aux demandeurs, une copie de la version finale du rapport de l’étude sur la possibilité d’entreposer deux scooters dans la zone munie de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants et un résumé des résultats de toutes les consultations requises.
  • Soit réviser la Politique afin qu’elle prévoit l’entreposage de deux scooters dans la zone munie de dispositifs de retenue ou l’assurance que chaque train est équipé d’au moins deux zones munies de dispositifs de retenue, ou encore, présenter des preuves à l’Office qu’aucune de ces révisions ne peut être mise en œuvre sans imposer une contrainte excessive.

[39] Dans l’éventualité où VIA opte pour réviser sa Politique, l’Office ordonne à VIA de déposer une copie de sa politique révisée, en plus de l’afficher sur son site Web, aux fins d’examen et d’approbation par l’Office, d’ici le 15 mars 2017. En outre, l’Office ordonne à VIA de fournir, dans les 60 jours suivant la révision, une formation à jour à tous les employés qui pourraient devoir offrir un service aux personnes ayant une déficience sur les modifications apportées à la Politique et sur la façon dont ces modifications doivent être mise en œuvre au niveau opérationnel.

[40] Si VIA choisit de faire valoir que la révision de sa Politique lui causerait une contrainte excessive, elle doit le faire d’ici le 15 mars 2017. Les demandeurs auront ensuite jusqu’au 29 mars 2017 pour déposer leur réponse aux présentations de VIA, et VIA aura jusqu’au 5 avril 2017 pour déposer une réplique à la réponse des demandeurs. Une fois ces actes de procédures effectués, l’Office déterminera si la contrainte excessive a été démontrée. Si ce n’est pas le cas, l’Office ordonnera à VIA de mettre en place une des modifications à la Politique et de former ses employés en conséquence. Si c’est le cas, l’Office ordonnera soit des modifications différentes à la Politique et une formation connexe, ou il déterminera qu’aucune autre mesure n’est requise.

[41] L’Office se penchera, de manière distincte, sur la requête des demandeurs visant la mise à jour de la norme minimale relative au nombre de zones munies de dispositifs de retenue pour fauteuils roulants par train, comme le prévoit le Code ferroviaire, dans le contexte de son Initiative de modernisation de la réglementation actuelle.

Membre(s)

Scott Streiner
Stephen Campbell
William G. McMurray
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