Décision n° 361-AT-A-2005
Suivi - décision no 538-AT-A-2005
le 10 juin 2005
Référence no U3570/04-52
DEMANDE
[1] Le 29 novembre 2004, Stephanie et Ross Sowak ont déposé auprès de l'Office des transports du Canada (ci-après l'Office) la demande énoncée dans l'intitulé.
[2] Le 10 janvier 2005, Air Canada a demandé une prolongation jusqu'au 25 janvier 2005 pour déposer sa réponse à la demande, ce à quoi l'Office a acquiescé par la décision no LET-AT-A-10-2005 du 14 janvier 2005. Air Canada a déposé sa réponse le 25 janvier 2005.
[3] Le 7 mars 2005, M. et Mme Sowak ont déposé leur réplique à la réponse du transporteur. Le 12 avril 2005, l'Office, par la décision no LET-AT-A-108-2005, a accepté la présentation reçue après le délai prescrit, conformément à l'article 4 des Règles générales de l'Office des transports du Canada, DORS/2005-35, la jugeant pertinente et nécessaire à son examen de cette affaire. Dans la même décision, l'Office a accordé à Air Canada l'occasion de lui faire part de ses commentaires relativement aux renseignements additionnels soumis par les demandeurs dans leur réplique. Le 28 avril 2005, Air Canada a informé l'Office qu'elle n'avait aucun autre commentaire à formuler, faisant valoir qu'elle avait fourni antérieurement une réponse complète à la demande.
[4] Aux termes du paragraphe 29(1) de la Loi sur les transports au Canada (ci-après la LTC), l'Office est tenu de rendre sa décision au plus tard 120 jours après la date de réception de la demande, sauf s'il y a accord entre les parties pour une prolongation du délai. Dans le cas présent, les parties ont convenu de prolonger le délai jusqu'au 10 juin 2005.
OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES
[5] En plus des questions d'accessibilité soulevées dans la demande, M. et Mme Sowak ont exprimé des préoccupations portant sur le service. Puisque de telles préoccupations n'ont aucun lien avec le fait que M. et Mme Sowak sont des personnes ayant une déficience, l'Office n'est pas habilité à les examiner en vertu de l'article 172 de la LTC. Par conséquent, l'Office ne fera aucune détermination sur ces questions dans la présente décision.
QUESTION
[6] L'Office doit déterminer si le niveau d'assistance offert à la suite des changements des portes d'embarquement les 23 octobre et 7 novembre 2004, et le manque d'aide avec fauteuil roulant à l'aéroport international de Vancouver (ci-après l'aéroport de Vancouver) aux mêmes dates ont constitué des obstacles abusifs aux possibilités de déplacement de M. et Mme Sowak, et, le cas échéant, quelles mesures correctives devraient être prises.
FAITS
[7] M. et Mme Sowak ont tous deux de la difficulté à marcher. M. Sowak ne jouit pas du plein usage de ses jambes; il porte des attelles jambières et marche à l'aide d'une canne. Mme Sowak a de l'arthrite et, au moment des incidents, son nom était sur une liste d'attente en vue de subir une reconstruction du genou. M. et Mme Sowak ont fait un voyage aller-retour avec Air Canada d'Edmonton (Alberta), au Canada, à Honolulu, Hawaï, aux États-Unis d'Amérique, les 23 octobre et 7 novembre 2004, avec une correspondance à Vancouver dans les deux directions.
[8] Le dossier passager (ci-après le DP) faisant état des réservations comprend des « demandes de service spécial » pour à la fois M. et Mme Sowak reflétant le code WCHR. Ce code est défini comme suit dans le Passenger Services Conference Resolutions Manual de l'Association du transport aérien international : « (Fauteuil roulant - R pour rampe) - le passager peut monter/descendre des marches et se rendre jusqu'à son siège à bord de l'aéronef et le quitter, mais a besoin d'assistance avec fauteuil roulant pour se rendre à l'aéronef ou le quitter, p. ex. à la rampe d'accès, à la jetée ou encore à la salle d'embarquement mobile, selon le cas. » [traduction]
[9] À l'arrivée de leur vol à Vancouver le 23 octobre 2004, les agents d'Air Canada ont aidé M. et Mme Sowak à se rendre à l'aire des douanes et du contrôle de sécurité. Après être passés, ils n'ont toutefois reçu aucune aide et ils ont dû se rendre à pied à la porte d'embarquement de leur vol de correspondance. Ils ont appris qu'on avait changé la porte d'embarquement désignée pour ce vol trente minutes seulement avant l'embarquement. Ils ont ainsi dû marcher jusqu'à cette nouvelle porte où l'embarquement avait déjà commencé.
[10] Le 7 novembre 2004, les agents d'Air Canada à l'aéroport de Vancouver ont encore une fois aidé M. et Mme Sowak à se rendre de l'aéronef à l'aire des douanes et du contrôle de sécurité en fauteuil roulant et en voiturette motorisée. Cependant, une fois passés, ils ont de nouveau dû se rendre à pied à leur porte d'embarquement sans aucune aide. Environ trente minutes avant le départ prévu de leur vol vers Edmonton, ils ont appris de la part d'un employé d'entretien d'Air Canada qu'il y avait eu un changement de la porte d'embarquement et celui-ci les a aidés à transporter leurs bagages jusqu'à la nouvelle porte où, encore une fois, ils ont constaté que l'embarquement avait déjà commencé.
POSITIONS DES PARTIES
[11] En ce qui concerne les événements du 23 octobre 2004, M. et Mme Sowak déclarent que lorsqu'ils sont arrivés à l'aéroport d'Edmonton, l'agent au comptoir d'enregistrement d'Air Canada a entrepris de communiquer avec les agents de Vancouver et d'Honolulu pour les informer qu'ils avaient besoin d'aide pour se rendre à l'aéronef ou le quitter, aux portes d'embarquement et aux aires de récupération des bagages.
[12] Les Sowak déclarent qu'après être passés aux douanes à Vancouver, ils ont toutefois dû marcher jusqu'à la porte d'embarquement de leur vol de correspondance. Ils affirment que cette longue marche a été très douloureuse et fatigante, et que lorsqu'ils ont enfin atteint la porte d'embarquement, ils ont constaté que les passagers avaient déjà commencé à embarquer. Ils ajoutent que lorsqu'ils ont demandé la permission d'embarquer avant les autres passagers, on leur a simplement dit de façon cavalière de prendre place au bout de la file. M. et Mme Sowak maintiennent que les agents à la porte d'embarquement n'ont fait aucun effort pour les aider et n'ont démontré aucune compassion à leur égard en dépit de leur détresse.
[13] M. et Mme Sowak déclarent que lors de leur voyage de retour, ils ont encore une fois dû marcher jusqu'à la porte d'embarquement de leur vol de correspondance vers Edmonton après être passés aux douanes et au contrôle de sécurité à l'aéroport de Vancouver. Ils font remarquer que leurs cartes d'embarquement indiquaient que le vol partirait de la porte 34C à 12 h 30. Les Sowak avancent que pendant qu'ils attendaient à cette porte, des agents d'Air Canada qui procédaient à l'embarquement d'un vol à destination de Calgary dont le départ était prévu pour midi leur ont confirmé, à deux reprises, qu'ils étaient à la bonne porte d'embarquement pour leur vol vers Edmonton. Les Sowak font remarquer toutefois que lorsque le vol à destination de Calgary a été parti, ils se sont aperçus qu'ils étaient les seuls passagers à cette porte. Ils ont alors demandé à un autre agent, qui était sur le point de partir, s'ils étaient à la bonne porte, et cet agent leur a confirmé qu'ils étaient bien à la bonne porte.
[14] M. Sowak déclare qu'à ce moment-là, il a demandé à un membre du personnel d'entretien d'Air Canada s'ils étaient à la bonne porte. Cet employé a vérifié à l'ordinateur et les a avisé que la porte d'embarquement pour leur vol vers Edmonton avait été modifiée et que l'embarquement s'effectuerait à la porte 35. Il a ensuite aidé M. et Mme Sowak à se rendre à la porte 35, où ils ont constaté que les passagers étaient presque tous embarqués. M. et Mme Sowak déclarent qu'ils étaient tous les deux épuisés et irrités, et qu'on leur a encore une fois dit de se placer au bout de la file des passagers.
[15] Air Canada dit avoir conduit une enquête sur cette affaire, mais qu'elle n'a pu recréer les événements ou les conversations qui ont eu lieu les 23 octobre et 7 novembre 2004.
[16] Air Canada allègue que M. et Mme Sowak ne se seraient pas identifiés comme étant des passagers ayant une déficience auprès des agents des portes d'embarquement de Vancouver les 23 octobre et 7 novembre 2004. Air Canada avance qu'il aurait ainsi été raisonnable pour un agent de conclure que M. et Mme Sowak étaient en mesure d'embarquer suivant la procédure normale. Air Canada allègue que cela peut aussi expliquer pourquoi on a demandé à M. et Mme Sowak de faire la queue avec les autres passagers pour embarquer. Sur ce point, M. et Mme Sowak déclarent dans leur réplique qu'ils croient que les agents de Vancouver n'ont pas été mis au courant de leurs déficiences et de leur besoin d'assistance pour se rendre aux portes d'embarquement ou encore qu'ils ont ignoré ces besoins.
[17] Air Canada explique que lorsqu'il y a un changement à une porte d'embarquement, les agents en place à cette porte prêteraient normalement attention aux passagers qui sont assis dans les fauteuils réservés aux personnes ayant une déficience et aux passagers en fauteuil roulant afin de leur fournir l'aide nécessaire pour se rendre à la nouvelle porte d'embarquement. Air Canada fait également remarquer que les portes 34 et 35 à l'aéroport de Vancouver sont situées à une distance d'environ quarante à cinquante pieds l'une de l'autre. Air Canada affirme qu'elle fait usage de voiturettes motorisées pour prêter assistance aux passagers qui en font la demande. Dans leur réplique, M. et Mme Sowak se demandent pourquoi les agents ne devraient se soucier que des personnes en fauteuil roulant, faisant valoir qu'ils devraient aussi se préoccuper des passagers qui utilisent une canne ou qui ont une mobilité réduite.
[18] Air Canada déclare qu'elle regrette sincèrement la perception de M. et Mme Sowak selon laquelle les agents n'ont pas eu de compassion à leur égard et leur offre l'assurance que ses employés s'efforcent de donner un bon service à tous les passagers. Sur ce point, Air Canada fait remarquer qu'elle donne de la formation et envoie des rappels à ses agents qui transigent avec le public sur la façon de communiquer avec les passagers aînés et les personnes ayant une déficience, et elle a déposé une copie de son manuel intitulé « Dans la même direction ». Dans leur réplique, M. et Mme Sowak donnent à penser que les procédures comprises dans ce manuel n'ont pas été suivies ou ont été ignorées par certains agents d'Air Canada. Dans sa réponse, Air Canada fait remarquer que pour qu'un transporteur puisse offrir une aide convenable aux personnes ayant une déficience, leurs besoins doivent être clairement identifiés et communiqués au moment de la réservation et tout au long du voyage. Air Canada ajoute qu'elle ne parvient pas à comprendre pourquoi M. et Mme Sowak ont choisi de ne pas se prévaloir du service avec fauteuil roulant qu'ils avaient demandé.
ANALYSE ET CONSTATATIONS
[19] Pour en arriver à ses constatations, l'Office a tenu compte de tous les éléments de preuve soumis par les parties au cours des plaidoiries.
[20] La demande doit être présentée par une personne ayant une déficience ou en son nom. En l'espèce, M. et Mme Sowak ont de la difficulté à marcher. M. Sowak ne jouit pas du plein usage de ses jambes; il porte des attelles jambières et marche à l'aide d'une canne. Mme Sowak a de l'arthrite et, au moment des incidents, son nom était sur une liste d'attente en vue de subir une reconstruction du genou. M. et Mme Sowak sont donc des personnes ayant une déficience aux fins de l'application des dispositions d'accessibilité de la LTC.
[21] Pour déterminer s'il existe un obstacle abusif aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience au sens du paragraphe 172(1) de la LTC, l'Office doit d'abord déterminer si les possibilités de déplacement de la personne qui présente la demande ont été restreintes ou limitées par un obstacle. Le cas échéant, l'Office doit alors décider si l'obstacle était abusif. Pour répondre à ces questions, l'Office doit tenir compte des circonstances de l'affaire dont il est saisi.
Les possibilités de déplacement ont-elles été restreintes ou limitées par un obstacle ?
[22] L'expression « obstacle » n'est pas définie dans la LTC, ce qui donne à penser que le Parlement ne voulait pas limiter la compétence de l'Office compte tenu de son mandat d'éliminer les obstacles abusifs dans le réseau de transport de compétence fédérale. De plus, le terme « obstacle » a un sens large et s'entend habituellement d'une chose qui entrave le progrès ou la réalisation.
[23] Pour déterminer si une situation constitue ou non un « obstacle » aux possibilités de déplacement d'une personne ayant une déficience dans un cas donné, l'Office se penche sur les déplacements de cette personne qui sont relatés dans la demande. Dans le passé, l'Office a conclu qu'il y avait eu des obstacles dans plusieurs circonstances différentes. Par exemple, dans certains cas des personnes n'ont pas pu voyager, d'autres ont été blessées durant leurs déplacements (notamment quand l'absence d'installations convenables durant le déplacement affecte la condition physique du passager) et d'autres encore ont été privées de leurs aides à la mobilité endommagées pendant le transport. De plus, l'Office a identifié des obstacles dans les cas où des personnes ont finalement été en mesure de voyager, mais les circonstances découlant de l'expérience ont été telles qu'elles ont miné leur sentiment de confiance, de dignité, de sécurité, situation qui pourrait décourager ces personnes de voyager à l'avenir.
Le cas présent
Politique d'Air Canada sur l'assistance à offrir aux personnes ayant une déficience lors des changements de portes d'embarquement
[24] Air Canada déclare que dans la pratique, lorsqu'il y a un changement à une porte d'embarquement pour un vol donné, les agents en place à cette porte sont tenus de prêter attention aux passagers qui sont assis dans les fauteuils réservés aux personnes ayant une déficience et aux passagers en fauteuil roulant afin de leur prêter assistance pour se rendre à la nouvelle porte d'embarquement. M. et Mme Sowak ont demandé pourquoi les agents des portes d'embarquement ne devraient se soucier que des personnes en fauteuil roulant et, ce faisant, ne prêter aucune attention aux passagers qui utilisent une canne.
[25] Sur ce point, l'Office est d'avis que la restriction qu'impose la politique d'Air Canada aux agents du transporteur de ne se préoccuper que des passagers en fauteuil roulant et ceux qui sont assis dans des fauteuils réservés aux personnes ayant une déficience dans les salles d'attente est raisonnable puisque plusieurs personnes ayant une déficience quelconque, visible ou non, pourraient bien être dispersées dans la salle d'embarquement.
[26] De plus, l'Office prend note qu'Air Canada fait usage de voiturettes motorisées pour transporter les passagers qui ont de la difficulté à marcher. L'Office remarque que M. et Mme Sowak n'ont pas demandé une telle aide pour se rendre de la porte d'embarquement initiale à la nouvelle porte, dans les deux cas.
[27] À la lumière de ce qui précède, l'Office détermine que la politique d'Air Canada sur l'assistance à offrir aux personnes ayant une déficience lors des changements de portes d'embarquement n'a pas constitué un obstacle aux possibilités de déplacement de M. et Mme Sowak.
Assistance avec fauteuil roulant à l'aéroport de Vancouver
[28] Les demandeurs déclarent qu'ils n'ont obtenu de l'aide que pour une partie seulement de leur déplacement dans l'aéroport de Vancouver pour aller prendre leur vol de correspondance, et ce, dans les deux cas. L'Office remarque que le 23 octobre 2004, les Sowak ont obtenu de l'aide jusqu'à l'aire des douanes et du contrôle de sécurité, mais qu'aucun agent en service ne leur a offert de les transporter jusqu'à leur porte d'embarquement, ce qui les a obligés à parcourir un long trajet à pied. L'Office remarque aussi que, le 7 novembre 2004, les Sowak ont reçu de l'aide pour se rendre jusqu'à l'aire des douanes et du contrôle de sécurité en fauteuil roulant et en voiturette motorisée; cependant, ils ont dû marcher jusqu'à la porte d'embarquement de leur vol vers Edmonton et transporter eux-mêmes leurs bagages, même si l'Office prend note qu'ils ont reçu de l'aide d'un agent d'Air Canada pour transporter leurs bagages lorsqu'il a été déterminé qu'ils n'étaient pas à la bonne porte d'embarquement. Dans les deux cas, les Sowak ont dû attendre en ligne avant d'embarquer dans l'aéronef.
[29] À la lumière de ce qui précède, l'Office détermine que le manque d'aide avec fauteuil roulant depuis l'aire des douanes et du contrôle de sécurité jusqu'à la porte d'embarquement, les 23 octobre et 7 novembre 2004, a constitué un obstacle aux possibilités de déplacement de M. et Mme Sowak.
L'obstacle était-il abusif ?
[30] À l'instar du terme « obstacle », l'expression « abusif » n'est pas définie dans la LTC, ce qui permet à l'Office d'exercer sa discrétion pour éliminer les obstacles abusifs dans le réseau de transport de compétence fédérale. Le mot « abusif » a également un sens large et signifie habituellement que quelque chose dépasse ou viole les convenances ou le bon usage (excessif, immodéré, exagéré). Comme une chose peut être jugée exagérée ou excessive dans un cas et non dans un autre, l'Office doit tenir compte du contexte de l'allégation d'obstacle abusif. Dans cette approche contextuelle, l'Office doit trouver un juste équilibre entre le droit des passagers ayant une déficience d'utiliser le réseau de transport de compétence fédérale sans rencontrer d'obstacles abusifs, et les considérations et responsabilités commerciales et opérationnelles des transporteurs. Cette interprétation est conforme à la politique nationale des transports établie à l'article 5 de la LTC et plus précisément au sous-alinéa 5g)(ii) de la LTC qui précise, entre autres, que les modalités en vertu desquelles les transporteurs ou modes de transport exercent leurs activités ne constituent pas, dans la mesure du possible, un obstacle abusif aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience.
[31] L'industrie des transports élabore ses services pour répondre aux besoins des utilisateurs. Les dispositions d'accessibilité de la LTC exigent quant à elles que les fournisseurs de services de transport du réseau de transport de compétence fédérale adaptent leurs services dans la mesure du possible aux besoins des personnes ayant une déficience. Certains empêchements doivent toutefois être pris en considération, par exemple les mesures de sécurité que les transporteurs doivent adopter et appliquer, les horaires qu'ils doivent s'efforcer de respecter pour des raisons commerciales, la configuration du matériel et les incidences d'ordre économique qu'aura l'adaptation d'un service sur les transporteurs aériens. Ces empêchements peuvent avoir une incidence sur les personnes ayant une déficience. Ainsi, ces personnes ne pourront pas nécessairement embarquer avec leur propre fauteuil roulant, elles peuvent devoir arriver à l'aérogare plus tôt aux fins de l'embarquement et elles peuvent devoir attendre plus longtemps pour obtenir de l'assistance au débarquement que les personnes n'ayant pas de déficience. Il est impossible d'établir une liste exhaustive des obstacles qu'un passager ayant une déficience peut rencontrer et des empêchements que les fournisseurs de services de transport connaissent dans leurs efforts pour répondre aux besoins des personnes ayant une déficience. Il faut en arriver à un équilibre entre les diverses responsabilités des fournisseurs de services de transport et le droit des personnes ayant une déficience à voyager sans rencontrer d'obstacle, et c'est dans cette recherche d'équilibre que l'Office applique le concept d'obstacle abusif.
Le cas présent
Assistance avec fauteuil roulant à l'aéroport de Vancouver
[32] Ayant déterminé que le manque d'aide avec fauteuil roulant depuis l'aire des douanes et du contrôle de sécurité jusqu'à la porte d'embarquement les 23 octobre et 7 novembre 2004 a constitué un obstacle aux possibilités de déplacement de M. et Mme Sowak, l'Office doit maintenant déterminer si cet obstacle était abusif.
[33] L'Office fait remarquer que, bien qu'ils ne soient pas officiellement applicables au transport international, l'Office accepte depuis longtemps que les principes fondamentaux des conditions de transport des personnes ayant une déficience figurant à la partie VII du Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58, modifié, s'appliquent également au transport international. Cela dit, l'Office fait valoir que selon les conditions de transport énoncées dans le règlement précité, les transporteurs sont tenus de fournir l'assistance requise à l'embarquement et au débarquement à la personne qui en fait la demande au moins 48 heures avant l'heure prévue du départ de son vol; s'il reçoit la demande moins de 48 heures avant le départ prévu du vol, le transporteur doit déployer des efforts raisonnables pour fournir le service.
[34] Bien que M. et Mme Sowak n'aient pas demandé d'aide avec fauteuil roulant avant le jour du départ de leur vol à l'aéroport d'Edmonton, cette aide leur a été offerte par l'agent d'Air Canada au comptoir d'enregistrement lorsqu'ils s'y sont présentés. À cet égard, Air Canada a pris note que le DP indiquait que M. et Mme Sowak avaient tous deux demandé de l'aide avec fauteuil roulant.
[35] Même si la demande d'assistance avec fauteuil roulant n'a pas été faite 48 heures avant l'heure prévue du départ des vols, Air Canada aurait dû déployer des efforts raisonnables pour fournir l'assistance requise avec fauteuil roulant du moment où M. et Mme Sowak ont débarqué de l'appareil jusqu'à la porte d'embarquement de leurs vols de correspondance. L'Office prend note que les Sowak avaient des motifs raisonnables de croire qu'on allait leur prêter assistance avec fauteuil roulant partout dans l'aéroport de Vancouver à la suite des arrangements pris à leur égard à l'aéroport d'Edmonton. Même si Air Canada a fourni de l'aide de la porte de l'appareil jusqu'à l'aire des douanes et du contrôle de sécurité à l'arrivée des Sowak à l'aéroport de Vancouver, ceux-ci n'ont pas reçu d'aide avec fauteuil roulant jusqu'à la porte d'embarquement de leurs vols de correspondance. De plus, aucune preuve n'a été présentée permettant de croire qu'il n'aurait pas été possible de leur fournir ce service à partir de l'aire des douanes et du contrôle de sécurité jusqu'aux portes d'embarquement de leurs vols de correspondance.
[36] Puisqu'on a offert à M. et Mme Sowak de l'aide avec fauteuil roulant au moment de leur enregistrement à l'aéroport d'Edmonton et que cette aide ne leur a été fournie que partiellement à l'aéroport de Vancouver, et puisque le transporteur n'a fourni aucune preuve permettant de croire que cette aide ne pouvait pas leur être fournie jusqu'aux portes d'embarquement désignées, l'Office détermine que le manque d'aide avec fauteuil roulant à partir de l'aire des douanes et du contrôle de sécurité jusqu'à la porte d'embarquement de leur vol de correspondance le 23 octobre et le 7 novembre 2004 a constitué un obstacle abusif aux possibilités de déplacement de M. et Mme Sowak.
CONCLUSION
[37] Compte tenu des constatations qui précèdent, l'Office a déterminé que la politique d'Air Canada sur l'assistance à offrir aux personnes ayant une déficience lors des changements de portes d'embarquement n'a pas constitué un obstacle aux possibilités de déplacement de M. et Mme Sowak.
[38] L'Office a également déterminé que le manque d'aide avec fauteuil roulant depuis l'aire des douanes et du contrôle de sécurité jusqu'à la porte d'embarquement, les 23 octobre et 7 novembre 2004, a constitué un obstacle abusif aux possibilités de déplacement de M. et Mme Sowak.
[39] Par conséquent, l'Office enjoint par les présentes à Air Canada de prendre les mesures suivantes dans les trente (30) jours de la date de cette décision :
- Fournir à l'Office une copie des politiques et des procédures qui ont été mises en application par Air Canada afin de fournir aux personnes ayant une déficience de l'aide avec fauteuil roulant à l'aéroport de Vancouver. Après avoir examiné ces documents, l'Office avisera Air Canada s'il juge que ces mesures contribueront à éviter la répétition de situations similaires à celle qu'ont vécue les Sowak, et indiquera à Air Canada les délais accordés pour finaliser ces mesures correctives.
- Publier un bulletin à l'intention du personnel d'Air Canada chargé de fournir de l'aide avec fauteuil roulant aux personnes ayant une déficience, en insistant sur l'importance d'être sensible aux besoins particuliers de ces personnes. Le bulletin devrait également comprendre un sommaire de la décision de l'Office dans le cas de M. et Mme Sowak, sans toutefois mentionner leur nom, ce qui pourra servir d'exemple de situations regrettables qui peuvent survenir lorsque le personnel d'Air Canada ne fournit pas adéquatement l'aide avec fauteuil roulant aux personnes ayant une déficience. Air Canada est tenue de soumettre à l'Office une copie de ce bulletin.
[40] Après avoir examiné les renseignements requis, l'Office déterminera si d'autres mesures s'imposent.
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