Décision n° 435-C-A-2006

le 11 août 2006

le 11 août 2006

RELATIVE à une plainte déposée par Peter Strickland concernant le refus de la part d'Air Canada de le transporter, ainsi que sa femme, sur un vol entre Ottawa (Ontario), Canada et Londres, Royaume-Uni via Toronto (Ontario), Canada) le 9 mai 2005.

Référence no M4370/06-50119


PLAINTE

[1] Le 6 février 2006, Peter Strickland a déposé auprès de l'Office des transports du Canada (ci-après l'Office) la demande énoncée dans l'intitulé.

[2] Le 20 février 2006, Dr. Strickland a été informé de la compétence de l'Office dans cette affaire et on lui a également demandé de confirmer s'il désirait poursuivre officiellement cette dernière devant l'Office. Le 14 mars 2006, Dr. Strickland a informé l'Office qu'il désirait poursuivre officiellement l'affaire devant l'Office.

[3] Le 29 mars 2006, on a demandé à Air Canada de fournir sa réponse à la plainte à l'Office et à Dr. Strickland dans les 30 prochains jours, et Dr. Strickland s'est vu accorder 10 jours suivant la date de réception de la réponse du transporteur pour déposer une réplique auprès de l'Office et en signifier une copie à Air Canada.

[4] Le 27 avril 2006, Air Canada a demandé une prolongation jusqu'au 29 mai 2006 pour déposer sa réponse à la plainte. Dans sa décision no LET-C-A-124-2006 datée du 11 mai 2006, l'Office a accordé cette prolongation. Le 23 mai 2006, Air Canada a déposé son mémoire. Le 31 mai 2006, Dr. Strickland a déposé sa réplique auprès de l'Office.

[5] Aux termes du paragraphe 29(1) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, l'Office est tenu de rendre sa décision au plus tard 120 jours après la date de réception de la demande, sauf s'il y a accord entre les parties pour une prolongation du délai. Dans le cas présent, les parties ont convenu de prolonger le délai jusqu'au 11 août 2006.

QUESTION

[6] L'Office doit déterminer si Air Canada a appliqué de façon adéquate les modalités de transport concernant le refus de transporter et les délais pour l'enregistrement précisés dans son Tarif international énonçant les règles applicables aux passagers et les prix, CTA(A) No. 458 (ci-après le Tarif), comme l'exige le paragraphe 110(4) du Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58, modifié (ci-après le RTA).

POSITIONS DES PARTIES

[7] Dr. Strickland affirme que lui et sa femme, Lin Xu, avaient fait une réservation pour le vol no AC441 d'Air Canada dont le départ d'Ottawa à destination de Toronto était prévu le 9 mai 2005, avec une correspondance avec le vol no AC868 d'Air Canada à destination de Londres, au Royaume-Uni. Selon Dr. Strickland, lui et Mme Xu sont arrivés à la billeterie d'Air Canada une heure avant le départ du vol no AC441. Dr. Strickland soutient que le personnel d'Air Canada a procédé à l'enregistrement de gens qui attendaient derrière lui et sa femme, dans la file d'attente. Dr. Strickland ajoute que lorsque le temps est venu de s'enregistrer, le personnel d'Air Canada les a informés qu'il était trop tard pour procéder à leur enregistrement pour le vol en raison des longues files d'attente dans l'aire de sûreté de l'aéroport. Dr. Strickland indique qu'il a répondu que le « contrôle radioscopique » ouvre habituellement une file de contrôle supplémentaire pour accélérer le traitement. Dr. Strickland affirme que le personnel d'Air Canada l'a alors agressé physiquement, l'a pris par les bras et l'a forcé, ainsi que sa femme, à se rendre à l'autre bout de l'aire d'enregistrement.

[8] Dr. Strickland indique que lui et sa femme se sont alors rendus au comptoir d'enregistrement de WestJet, où ils ont été interpellés par deux agents de police, qui avaient apparemment été mandés par Air Canada. Dr. Strickland signale qu'ils ont passé presque une heure à discuter de l'incident avec les agents de police et que le personnel d'Air Canada a menti aux agents de police lorsqu'il leur a dit que Dr. Strickland et Mme Xu avaient commis un crime. Dr. Strickland indique que, à la fin, les agents de police les ont relâchés mais ont refusé d'enquêter sur sa plainte d'agression physique contre le personnel d'Air Canada. Dr. Strickland explique que lui et sa femme sont retournés à la maison et ont rappelé Air Canada afin de réserver un nouveau vol vers Toronto et Londres. Dr. Strickland explique qu'au cours des 24 heures suivantes, le personnel d'Air Canada l'a continuellement informé que leur dossier était à l'étude. Dr. Strickland explique qu'au milieu de l'après-midi le jour suivant, le personnel d'Air Canada l'a informé qu'ils avaient une réservation à bord d'un vol prévu le soir même.

[9] Selon Dr. Strickland, ils sont retournés, lui et sa femme, à l'aéroport international MacDonald Cartier (ci-après l'aéroport d'Ottawa) le jour suivant et se sont présentés au comptoir d'enregistrement d'Air Canada trois heures avant le départ de leur vol. Dr. Strickland affirme que le personnel d'Air Canada a encore une fois refusé de les transporter. Il souligne qu'il a appelé Air Canada de nombreuses fois le lendemain et a été informé que lui et sa femme n'avaient plus jamais le droit de voyager avec Air Canada. Dr. Strickland soutient que le personnel d'Air Canada a essayé de les empêcher de voyager avec d'autres transporteurs. Il précise que le 10 mai 2006, lui et sa femme ont pris un vol d'Air Transat Inc., exerçant son activité sous le nom d'Air Transat, entre Montréal et Bruxelles.

[10] Dr. Strickland demande que des accusations criminelles soient portées contre le personnel d'Air Canada pour leur agression physique sans motif et irrationnelle contre lui. De plus, il demande une indemnité totalisant environ 8 700 $CAN pour les frais qu'il a dû assumer en raison du refus d'Air Canada de les transporter.

[11] Dans sa réponse du 23 mai 2006, Air Canada affirme que le 9 mai 2005, Dr. Strickland et sa femme étaient en retard pour l'enregistrement du vol no AC441. Air Canada fait observer qu'à 6 h 40, l'agente principale responsable de l'enregistrement à l'aéroport d'Ottawa a informé Dr. Strickland et sa femme qu'il était trop tard pour les enregistrer avec leurs bagages pour le vol de 7 h à destination de l'aéroport international Lester B. Pearson de Toronto (ci-après l'aéroport de Toronto) parce qu'ils devaient encore passer le contrôle de sûreté. Le transporteur explique que l'agente principale a procédé à l'enregistrement de quelques passagers qui attendaient derrière Dr. Strickland et sa femme pour un vol décollant plus tard à destination de l'aéroport de l'île de Toronto. Air Canada souligne que cette information a été communiquée à Dr. Strickland à ce moment.

[12] Air Canada soutient que son agente principale a ensuite demandé à Dr. Strickland et à sa femme de l'accompagner à la billeterie, afin de faire une réservation pour le prochain vol disponible vers l'aéroport de Toronto. Air Canada maintient que l'agente principale n'a pas touché, tiré, saisi ou agressé physiquement Dr. Strickland ou Mme Xu, et elle ne les a pas forcés à se rendre à la fin de la file d'enregistrement. Air Canada explique que Dr. Strickland et Mme Xu ont simplement suivi l'agente principale jusqu'à la billeterie et qu'à ce moment, cette dernière s'est éloignée et Dr. Strickland a haussé le ton et a tenu un langage vulgaire. Air Canada fait observer qu'en entendant cela, l'agent à la billeterie a appelé la police. Selon Air Canada, Dr. Strickland s'est ensuite éloigné subitement de la billeterie et a heurté l'agente principale d'Air Canada avec sa valise pour se rendre au comptoir d'enregistrement, où il a déposé sa valise sur le tapis roulant, s'attendant à être enregistré. Air Canada affirme que l'agente principale s'est rapprochée du comptoir d'enregistrement et a avisé l'agente que Dr. Strickland ne voyagerait pas pour l'instant et que des agents de police arriveraient bientôt.

[13] Selon Air Canada, l'agente d'enregistrement a essayé de retirer la valise de Dr. Strickland du tapis roulant afin de la lui remettre, mais il a repoussé la valise vers elle. Le transporteur explique qu'au même moment, un autre agent, qui travaillait aux files d'enregistrement et qui a vu l'incident, s'est approché et a retiré la valise de Dr. Strickland du tapis roulant. Air Canada affirme que Dr. Strickland a usé de violence verbale à son endroit. Air Canada ajoute que Dr. Strickland s'est ensuite éloigné du comptoir d'enregistrement et s'est dirigé vers le comptoir de WestJet, où les agents de police l'ont rencontré et lui ont parlé. Air Canada explique que les agents de police ont accompagné Dr. Strickland à l'extérieur de l'aérogare. Air Canada ajoute que quelques instants plus tard, Mme Xu a parlé elle-même à l'agente principale et a demandé que le transporteur leur permette de voyager. Le transporteur raconte que Mme Xu a été informée que l'agent devait communiquer avec le service de la sécurité d'Air Canada avant de leur permettre de prendre un vol. Air Canada soutient que les 9 et 10 mai 2005, le personnel du service de la sécurité a essayé de communiquer avec Dr. Strickland, par téléphone, à l'un des numéros de Mme Xu et a laissé un message vocal afin qu'ils rappellent un numéro précis. Air Canada souligne que ni Dr. Strickland, ni Mme Xu n'ont retourné les appels. Air Canada a soumis des copies du dossier passager (ci-après DP) de Dr. Strickland, les billets, des lettres du 9 mai 2005 de Dr. Strickland à Air Canada et les dispositions applicables de son Tarif.

[14] Air Canada a aussi soumis une copie de sa lettre du 1er juin 2005 à Dr. Strickland, dans laquelle le transporteur avisait Dr. Strickland qu'en raison de son comportement à l'aéroport d'Ottawa le 9 mai 2005, il étudiait la question à savoir s'il devait l'accepter ou non en tant que passager à l'avenir et il lui offrait la possibilité de fournir ses observations écrites. De plus, Air Canada a soumis une copie de la lettre du 10 juin 2005 reçue de Dr. Strickland, dans laquelle ce dernier admettait avoir haussé le ton en parlant à l'un des employés du transporteur, s'excusait et assurait à Air Canada qu'il continuerait d'être un passager exemplaire à bord de tous les aéronefs. Air Canada a aussi fourni une copie de sa lettre du 30 juin 2005 à Dr. Strickland dans laquelle le transporteur acceptait ses promesses, l'avisait qu'il répondait des actions prises par ses employés le 9 mai 2005 et l'informait qu'il serait accepté à bord de ses vols. Air Canada souligne que le 11 mai 2005, elle a remboursé le coût des billets à Dr. Strickland conformément à la règle 90D de son Tarif.

[15] Air Canada affirme qu'elle prend la sécurité et la sûreté au sérieux et que le comportement agressif et abusif de Dr. Strickland envers ses employés à l'aéroport d'Ottawa le 9 mai 2005 n'était pas acceptable. De plus, Air Canada fait valoir que Dr. Strickland et sa femme étaient en retard pour s'enregistrer pour leur vol vers Toronto le 9 mai 2005, avaient manqué l'échéance applicable à la porte d'embarquement et que son refus de les transporter en vertu des dispositions de son tarif sur l'enregistrement était justifié.

[16] Dans sa réplique, Dr. Strickland suggère que l'Office obtienne une copie de la vidéo de surveillance de l'aéroport des comptoirs d'enregistrement d'Air Canada, comme preuve de la gravité de l'agression dont il a été victime. Dr. Strickland affirme que le comportement d'Air Canada envers lui et sa femme était malveillant et démontrait que le transporteur voulait causer le plus de tort possible. Dr. Strickland note que le tarif du transporteur autorise le refus de service seulement si un passager est en retard à la porte d'embargement et prétend que lui et sa femme n'ont même pas eu la chance de s'y rendre. Dr. Strickland soutient que, si le personnel d'Air Canada les avaient enregistrés, ils auraient facilement été à la porte d'embarquement à temps. Dr. Strickland accuse Air Canada de mentir lorsqu'elle affirme qu'il était 6 h 40 lorsque le personnel les a informés qu'ils avaient manqué leur vol vers Toronto et lui a expliqué pourquoi ils avaient retiré des gens derrière eux dans la ligne pour les enregistrer avant eux. Dr. Strickland nie avoir haussé le ton en parlant au personnel du transporteur et avoir démontré un comportement agressif ou abusif.

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES APPLICABLES

[17] La compétence de l'Office relative à la présente plainte est établie aux paragraphes 110(1) et (4) et à l'article 113.1 du RTA, qui prévoient :

110.(1) Sauf disposition contraire, des ententes, conventions ou accords internationaux en matière d'aviation civile, avant d'entreprendre l'exploitation d'un service international, le transporteur aérien ou son agent doit déposer auprès de l'Office son tarif pour ce service, conforme aux exigences de forme et de contenu énoncées dans la présente section, dans lequel sont comprises les conditions du transport à titre gratuit ou à taux réduit.

110.(4) Lorsqu'un tarif déposé porte une date de publication et une date d'entrée en vigueur et qu'il est conforme au présent règlement et aux arrêtés de l'Office, les taxes et les conditions de transport qu'il contient, sous réserve de leur rejet, de leur refus ou de leur suspension par l'Office, ou de leur remplacement par un nouveau tarif, prennent effet à la date indiquée dans le tarif, et le transporteur aérien doit les appliquer à compter de cette date.

113.1 Si un licencié n'applique pas les prix, taux, frais ou conditions de transport applicables au service international et figurant à son tarif, l'Office peut :

a) lui enjoindre de prendre les mesures correctives qu'il estime indiquées;

b) lui enjoindre d'indemniser des personnes lésées par la non-application de ces prix, taux, frais ou conditions de transport.

[18] Enfin, il est prévu ce qui suit au sous-alinéa 122c)(viii) du RTA :

122. Les tarifs doivent contenir :

c) les conditions de transport, dans lesquelles est énoncée clairement la politique du transporteur aérien concernant au moins les éléments suivants :

viii) le refus de transporter des passagers ou des marchandises,

DISPOSITIONS APPLICABLES DU TARIF

[19] Les règles suivantes du tarif régissant les modalités de transport en vigueur le 1er avril 2005 sont pertinentes pour le présent cas.

[20] RÈGLE 25 REFUS DE TRANSPORTER- LIMITES DU TRANSPORTEUR

II COMPORTEMENT DU PASSAGER – REFUS DE TRANSPORTER – COMPORTEMENT INTERDIT ET SANCTIONS

(A) COMPORTEMENT INTERDIT :

Sans limiter le caractère général de ce qui précède, les énoncés suivants représentent des comportements interdits où il peut être nécessaire pour le transporteur, en faisant preuve de jugement raisonnable, de prendre des mesures afin d'assurer le confort ou la sécurité physique de la personne, des autres passagers (dans l'avenir et à l'heure actuelle) ou des employés du transporteur; la sécurité de l'aéronef; l'exercice sans entraves des fonctions des membres d'équipage à bord de l'aéronef ou des opérations aériennes sécuritaires et adéquates :

...

(2) le comportement ou l'état du passager est ou a la réputation d'être perturbateur, injurieux, menaçant, intimidant, violent ou indiscipliné et qu'il y a risque, de l'avis d'un employé raisonnable responsable du transporteur, que ce passager nuirait au confort et à la sécurité physique des autres passagers ou des employés du transporteur, nuirait à un membre d'équipage dans l'exercice de ses fonctions à bord de l'aéronef ou encore à la sécurité et aux opérations en vol.

...

(4) la personne qui ne se conforme pas aux instruction du transporteur et de ses employés, y compris les instructions de cesser tout comportement interdit;

...

(B) Sanctions :

Lorsqu'en faisant preuve de jugement raisonnable, le transporteur décide que le passager se livre à un comportement interdit décrit ci-dessus, le transporteur peut imposer toute combinaison des sanctions suivantes :

(1) renvoi du passager à tout point;

(2) probation. Le transporteur peut convenir que le passager doit suivre certaines conditions probatoires comme de ne pas se livrer à un comportement interdit afin que le transporteur puisse assurer le transport dudit passager. Ces conditions probatoires peuvent être imposées pour toute période de temps qui, au jugement raisonnable dont fait preuve le transporteur, est nécessaire pour assurer que le passager s'engage de façon continue à éviter le comportement interdit;

(3) refus de transporter le passager. Ces refus de transporter peuvent aller d'une interdiction unique à une interdiction indéterminée ou à vie. Le transporteur devra faire preuve de jugement raisonnable en déterminant la durée de la période de refus, qui devra correspondre à la nature du comportement interdit et se terminera lorsque le transporteur sera assuré que le passager ne représente plus une menace pour la sécurité des autres passagers, de l'équipage de l'aéronef ou le confort des autres passagers ou de l'équipage, l'exercice sans entraves des fonctions des membres d'équipage à bord de l'aéronef ou des opérations aériennes sécuritaires et adéquates.

...

Ces mesures ne portent pas atteinte aux autres droits et recours du transporteur, à savoir de déposer une réclamation pour tous dommages causés par le comportement interdit ou autres disposition prévues dans les tarifs du transporteur, y compris les recours prévus dans le Guide des membres d'Aéroplan ou le dépôt d'accusations criminelles ou de frais statutaires.

III RECOURS DU PASSAGER ET LA LIMITE DE RESPONSABILITÉ

La responsabilité du transporteur dans le cas où il refuse de transporter un passager pour un vol particulier ou le renvoi d'un passager en route pour toute raison précisée dans les paragraphes précédents ou dans la règle 21 est limitée au recouvrement de la valeur du remboursement de la portion non utilisée du billet du passager qui a été refusé ou renvoyé par le transporteur, comme prévu à la règle 90(D).

Une personne que l'on refuse de transporter pour une période indéterminée pouvant aller jusqu'à une interdiction à vie ou à qui un avis de probation est délivré peut fournir au transporteur, par écrit, les raisons pour lesquelles il ou elle ne représente plus une menace pour la sécurité ou le confort des passagers ou de l'équipage ou la sécurité de l'aéronef. De tels documents peuvent être envoyés à l'adresse se trouvant sur l'avis du refus de transporter ou l'avis de probation.

Le transporteur doit répondre au passager dans un délai raisonnable en fournissant son évaluation de la nécessité ou non de prolonger l'interdiction ou de maintenir la période de probation.

[21] RÈGLE 60 RÉSERVATIONS

(D) DÉLAIS POUR L'ENREGISTREMENT

(1) On recommande au passager de se présenter pour l'enregistrement aux endroits désignés à cette fin au moins 120 minutes avant l'heure de départ prévue du vol sur lequel le passager a une réservation, afin de permettre l'exécution des formalités gouvernementales et des procédures de départ. Le passager doit se trouver à la porte d'embarquement au moins 25 minutes (Exception : à partir de l'aéroport international Pearson à Toronto, au moins 55 minutes) avant l'heure de départ prévue du vol sur lequel le passager a une réservation et doit arriver avec les documents appropriés et prêt à voyager. Si le passager ne satisfait pas à une de ces exigences, le transporteur réattribuera tout siège réservé à l'avance ou annulera la réservation de ce passager. Les départs ne seront pas retardés pour les passagers qui arrivent trop tard pour que ces formalités soient remplies avant l'heure de départ prévue. Le transporteur n'est pas responsable envers le passager pour les pertes ou les dépenses dues au défaut du passager de se conformer à la présente disposition

NOTE : Aux fins de cette règle, l'enregistrement est le point pour l'enregistrement des bagages et la porte d'embarquement est le point où le talon de la carte d'embarquement est déchiré et gardé par le transporteur. [traduction]

[22] RÈGLE 90 (REMBOURSEMENTS)

(D) REMBOURSEMENT INVOLONTAIRE

...

(2) Montant du remboursement involontaire

Le montant du remboursement involontaire est établi comme suit :

(a) Si le voyage n'a pas lieu, le transporteur remboursera le prix du billet et les frais afférents.

...

ANALYSE ET CONSTATATIONS

[23] Pour en arriver à ses constatations, l'Office a examiné attentivement tous les éléments de preuve soumis par les parties au cours des plaidoiries. L'Office a aussi examiné les modalités de transport précisées dans le tarif concernant le refus d'Air Canada de transporter des passagers et sa responsabilité dans de telles situations, ainsi que les disposition concernant les délais pour l'enregistrement et les remboursements au moment du voyage de Dr. Strickland.

[24] En vertu du paragraphe 110(4) du RTA, un transporteur doit, entre autres choses, appliquer les conditions de transport établies dans son tarif.

Refus de transporter

[25] L'Office signale que la règle 25 du tarif prévoit qu'Air Canada a le droit de refuser de transporter un passager lorsque le passager affiche un comportement faisant partie de la liste de « comportements interdits » qui figure dans son tarif.

[26] Dans une lettre du 1er juin 2005, Air Canada a avisé Dr. Strickland qu'il s'est vu refusé le transport, le 9 mai 2005, à l'aéroport d'Ottawa parce qu'il était arrivé trop tard pour s'enregistrer pour le vol no AC441 d'Air Canada vers Toronto. Air Canada a affirmé qu'après s'être fait dire qu'il était en retard, Dr. Strickland a fait une scène, a usé de violence verbale et a tenu un langage vulgaire à l'endroit des employés d'Air Canada. Le transporteur a ajouté qu'en raison de ce comportement, la police locale a été appelée et elle a accompagné Dr. Strickland jusqu'à l'extérieur de l'aérogare.

[27] Le comportement interdit que le transporteur a attribué à Dr. Strickland est décrit dans la règle 25 II (A)(2) : « le comportement ou l'état du passager est ou a la réputation d'être perturbateur, injurieux, menaçant, intimidant, violent ou indiscipliné et qu'il y a risque, de l'avis raisonnable d'un employé raisonnable du transporteur, que ce passager nuirait au confort et à la sécurité des autres passagers ou des employés du transporteur, nuirait à un membre d'équipage dans l'exercice de ses fonctions à bord de l'aéronef ou encore à la sécurité et aux opérations en vol »; et dans la règle 25 II (A)(4) : « la personne ne se conforme pas aux instructions du transporteur et de ses employés, y compris les instructions de cesser tout comportement interdit ».

[28] Après examen de la preuve qui lui a été présentée, l'Office note ce qui suit :

[29] Dans une lettre datée du 9 mai 2005 à Air Canada, Dr. Strickland a écrit :

Je vous demande de m'excuser pour les mots un peu durs que j'ai pu utiliser en m'adressant à l'un de vos employés ce matin, mais il a été extrêmement désagréable et agressif à mon égard, me forçant de répondre comme je l'ai fait. Les mots que j'ai utilisés ont seulement été prononcés dans un élan de frustration alors que je m'éloignais...

À l'avenir, je garderai ma frustration pour moi-même. Toutefois, il est vrai que la femme s'occupant de l'enregistrement était énervée et a explosé alors qu'elle faisait face à une critique mineure. Je peux seulement accepter 50 % du blâme pour les ressentiments et la situation n'était rien d'autre que des ressentiments dans le contexte d'une situation inhabituelle. [traduction]

[30] Dans une autre lettre à Air Canada, datée du 10 juin 2005, Dr. Strickland a écrit :

D'abord, j'aimerais dire que je suis sincèrement désolé d'avoir haussé le ton lorsque je me suis adressé à une employée, de votre personnel d'enregistrement, à l'aéroport d'Ottawa lorsque celle-ci s'est mise en colère. La colère n'apporte rien d'utile et j'ai l'habitude de « suivre le courant » et c'est ce que je ferai à l'avenir.

J'aimerais souligner que je n'ai jamais, de toute ma vie, causé de problème à BORD D'UN AÉRONEF et je respecte le fait qu'une norme plus sévère doit être maintenue à bord et je suis toujours très poli et silencieux lorsque je voyage. L'incident en question, où votre personnel a crié après moi et j'ai répondu avec quelques mots, s'est produit au sol. Encore une fois, je regrette que cet incident ait eu lieu et j'éviterai de réagir sous l'impulsion de votre personnel à l'avenir. Je ne veut pas m'abaisser au niveau des quelques personnes en colère de votre personnel d'aéroport. Toutefois, je vous recommande de congédier cette femme abusive dans un souci de protéger la réputation de votre compagnie aérienne. [traduction]

[31] Dans cette même lettre, Dr. Strickland a reconnu qu'après avoir appris qu'il était en retard pour s'enregistrer pour le vol no AC441 d'Air Canada, « Cela m'a mis en colère et je me suis éloigné de l'aire et j'ai crié quelques mots tout en m'en allant » [traduction].

[32] Dans sa réplique à l'Office du 31 mai 2006, Dr. Strickland a affirmé que « [...] le fait qu'Air Canada ait laissé sous-entendre que j'ai parlé fort ne justifie pas un refus en vertu de la règle 25 ». Il a ajouté que « le fait de parler fort lorsqu'on fait la file devant l'aire d'enregistrement ne contrevient pas aux règles du transport aérien » [traduction].

[33] Dr. Strickland ne nie pas qu'un incident a eu lieu. Toutefois, selon lui, c'était le comportement de l'agent d'Air Canada au comptoir d'enregistrement qui a déclenché sa réaction agressive.

[34] Même si l'Office reconnaît que le refus de permettre à un voyageur de s'enregistrer perturbe les plans de ce dernier, il ne peut justifier l'usage d'un language vulgaire par Dr. Strickland. Ce dernier a reconnu qu'il était en colère, qu'il a usé de violence verbale et qu'il a tenu un language inapproprié. Il a affirmé dans sa lettre du 9 mai 2005 que les mots utilisés ont seulement été prononcés en raison de sa frustration alors qu'il s'éloignait, mais il a admis dans sa lettre du 10 juin 2005, qu'il a haussé le ton, parlé fort et était en colère. Dans de tels cas, l'Office est d'avis que le comportement perturbateur des passagers, même avant un vol, doit être traité par le personnel sur les lieux car le fait de ne pas contrôler la situation pourrait amener des conséquences graves pour l'exploitation sécuritaire du vol en général.

[35] À la lumière de ce qui précède, l'Office estime que les preuves présentées démontrent que le comportement de Dr. Strickland justifie la décision d'Air Canada de lui refuser le transport en vertu de la règle 25 du Tarif.

[36] La règle 25 III du tarif, Refus de transporter, sur le recours du passager et la limite de responsabilité prévoit que dans des cas comme celui-ci, le transporteur remboursera au passager la valeur de la portion inutilisée de son billet comme prévu dans la règle 90(D). Air Canada a remboursé à Dr. Strickland le prix de son billet d'avion et de celui de Mme Xu le 11 mai 2005.

[37] L'Office note que le 30 juin 2005, après avoir reçu des excuses et des assurances écrites de la part de Dr. Strickland qu'il continuerait d'être un passager exemplaire, Air Canada a informé Dr. Strickland qu'elle serait disposée à le transporter sur ses vols futurs.

[38] À la lumière de ce qui précède et en raison du fait que l'Office n'a aucune compétence lorsqu'il s'agit de déterminer si une agression s'est produite ou non, l'Office estime qu'il n'est pas nécessaire de donner suite à la suggestion de Dr. Strickland d'exiger une copie de la vidéo de surveillance à l'aéroport d'Ottawa.

Délais pour l'enregistrement

[39] En ce qui a trait à l'affirmation de Dr. Strickland que lui et Mme Xu se sont présentés en ayant suffisamment de temps pour l'enregistrement du vol no AC441 d'Ottawa à Toronto le 9 mai 2005, l'Office a examiné les dispositions du Tarif d'Air Canada concernant les délais pour l'enregistrement. Le paragraphe (D), Délais pour l'enregistrement de la règle 60, Réservations, du Tarif d'Air Canada, prévoit que le passager doit être à la porte d'embarquement, prêt à voyager, au moins 25 minutes avant l'heure de départ prévue de son vol. La même règle prévoit que si le passager ne répond pas à cette exigence, le transporteur réattribuera tout siège réservé à l'avance ou annulera sa réservation sans être responsable des pertes ou dépenses engagées par le passager.

[40] L'Office note que dans sa lettre à l'Office datée du 6 février 2006, Dr. Strickland a affirmé ce qui suit :

...Lorsque notre tour est venu pour l'enregistrement, 35 minutes avant le vol, le personnel de sûreté d'AC nous a demandé quel était notre numéro de vol... [traduction]

[41] Dans sa lettre adressée à Air Canada et datée du 9 mai 2005, Dr. Strickland a affirmé ce qui suit :

...Le vol a une période d'enregistrement de 30 minutes et nous sommes arrivés environ 45 minutes avant le vol. Au moment où nous avons atteint la fin de la ligne d'enregistrement, il restait encore 35 minutes, toutefois nous avons appris que nous ne pourrions pas nous enregistrer. [traduction]

[42] Dans la lettre de Dr. Strickland du 1er juin 2005 adressée à Air Canada, il a indiqué ce qui suit :

...Étant arrivé tôt, lorsque j'ai atteint la fin de la ligne, il restait encore 35 minutes avant le départ... [traduction]

[43] De plus, dans sa réponse du 23 mai 2006, Air Canada a affirmé ce qui suit :

Nous souhaitons vous aviser que le 9 mai 2005, à l'aéroport international d'Ottawa, Dr. Strickland et sa femme, Mme Xu, sont arrivés trop tard pour qu'on puisse procéder à leur enregistrement pour le vol no AC441 d'Air Canada partant d'Ottawa à 7 h... [traduction]

[44] D'après la preuve au dossier, l'Office note que le 9 mai 2005, 35 minutes avant l'heure de départ prévue du vol no AC441, Dr. Strickland et Mme Xu n'étaient pas encore enregistrés et n'avaient pas passé par les procédures de sécurité à l'aéroport d'Ottawa.

[45] Le Tarif d'Air Canada prévoit que les passagers doivent être présents à la porte d'embarquement, prêts à monter à bord, au moins 25 minutes avant l'heure de départ prévue de leur vol. Selon les mémoires au dossier, si Air Canada avait permis à Dr. Strickland et à Mme Xu de s'enregistrer, ils auraient seulement eu 10 minutes pour s'enregistrer avec leur bagage, passer par les procédures de sécurité de l'aéroport et se rendre à la porte d'embarquement.

[46] Dans les circonstances, l'Office estime qu'il était raisonnable de la part du personnel d'Air Canada de croire que Dr. Strickland et Mme Xu ne pourraient pas respecter le délai de 25 minutes pour se rendre à la porte d'embarquement. Selon la preuve au dossier, l'Office estime qu'Air Canada a appliqué de façon appropriée les modalités de transport établies dans son Tarif lorsqu'elle a refusé de transporter Dr. Strickland et sa femme, Mme Xu, d'Ottawa à Toronto le 9 mai 2005.

[47] L'Office note qu'Air Canada a remboursé à Dr. Strickland le coût du billet de Mme Xu même si la règle 60(D) du tarif concernant les délais pour l'enregistrement ne prévoit pas un remboursement de ce genre.

CONCLUSION

[48] À la lumière des constatations précédentes, l'Office rejette par les présentes la plainte.

Membres

  • Gilles Dufault
  • Guy Delisle
  • Beaton Tulk
Date de modification :