Décision n° 438-A-2012
DEMANDE de révision présentée par Transat A.T. Inc. en vertu de l’article 32 de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée.
DEMANDE
[1] Transat A.T. Inc. (Transat) demande à l’Office des transports du Canada (Office) une modification de sa décision no 426-A-2012 en vertu de l’article 32 de la Loi sur les transports au Canada (LTC).
[2] Dans la décision no 426-A-2012 (décision), l’Office, en vertu de l’alinéa 60(1)b) de la LTC, a autorisé Sunwing Airlines Inc. (Sunwing) à utiliser les aéronefs avec équipage fournis par Travel Service, a.s., la fourniture par Travel Service, a.s. de ces aéronefs avec équipage afin de fournir son service international à la demande de Toronto (Ontario) et de Dorval (Québec), Canada à : Saint Martin, Antilles néerlandaise; Roatan et La Ceiba, Honduras; Belize City, Belize; Panama, Panama; Liberia et San Jose, Costa Rica; Puerto Plata et Punta Cana, République dominicaine et Cozumel, Mexique, du 8 novembre 2012 au 29 avril 2013, et de fournir ses services internationaux réguliers sur les routes autorisées par licence entre le Canada et la Jamaïque, la République dominicaine, Sainte-Lucie, Antigua-et-Barbuda, la Barbade, le Mexique, Cuba, Aruba et les Bahamas, du 8 novembre 2012 au 31 mai 2013, au moyen d’aéronefs avec équipage fournis par Travel Service, a.s.
[3] L’Office reconnaît que les réactions à l’avis du 19 octobre 2012 et les questions soulevées par les parties suggèrent qu’il serait opportun et bénéfique de préciser l’approche de l’Office concernant les demandes d’autorisation de location d’aéronefs avec équipage. L’Office a donc indiqué qu’il entamera une consultation pour obtenir les points de vue de l’industrie et des autres parties intéressées sur l’esprit des exigences relatives à l’autorisation de location avec équipage et de ce qui doit être pris en considération, y compris l’information qu’exige l’Office pour son évaluation de la « nécessité » en vertu de l’alinéa 8.2(3)j) du Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58, modifié (RTA).
[4] Transat prétend que de l’information, que l’Office n’avait pas au moment de rendre sa décision, montre qu’une entité autre que Travel Service, a.s. détient le contrôle opérationnel de certains vols que Sunwing commercialise grâce à une autorisation de location avec équipage accordée par l’Office, ce qui va à l’encontre de la Décision. De ce fait, Transat demande que l’Office modifie sa Décision afin de limiter son applicabilité, c’est-à-dire qu’elle prenne fin le 15 décembre 2012 plutôt qu’aux dates indiquées dans la Décision. Transat demande par ailleurs que l’Office exige que Sunwing suspende immédiatement toutes les activités que mène Travel Service-Slovakia, et que l’Office exige que Sunwing précise à l’Office le ou les transporteurs aériens qui exploitent de fait des vols conformément à la Décision.
[5] Transat demande également que l’Office mène rapidement ses consultations afin qu’elles soient terminées d’ici au 15 décembre 2012, date qui coïnciderait avec le changement proposé, à savoir que l’autorisation prenne fin le 15 décembre 2012.
QUESTION
[6] Y a-t-il eu des faits nouveaux ou une évolution des circonstances depuis que la décision no 426‑A‑2012 a été rendue qui justifieraient que l’Office modifie cette décision?
PRÉSENTATION
[7] Transat prétend que l’un des aéronefs précisés dans la demande de Sunwing auprès de l’Office en vertu de l’alinéa 60(1)b) de la LTC est immatriculé au nom de Travel Service-Slovakia. Transat fait remarquer que Travel Service, a.s. est apparentée à Travel Service-Slovakia; ce sont toutefois des transporteurs distincts. Transat ajoute que Travel Service, a.s. est titulaire d’un certificat canadien d’exploitant aérien étranger, mais pas Travel Service-Slovakia.
[8] Transat soutient que Travel Service-Slovakia a la garde et la responsabilité de l’aéronef en question, qu’elle maintient l’immatriculation non canadienne de l’aéronef, et que les vols effectués avec cet aéronef sont exploités par l’équipage de Travel Service-Slovakia. Selon Transat, comme la Décision autorise les activités dans le cadre d’une entente de location avec équipage entre Sunwing et Travel Service, a.s. seulement, l’utilisation de cet aéronef n’est pas permise en vertu de l’autorisation de location avec équipage accordée par l’Office.
CONTEXTE LÉGISLATIF
[9] Conformément à l’article 32 de la LTC :
L’Office peut réviser, annuler ou modifier ses décisions ou arrêtés, ou entendre de nouveau une demande avant d’en décider, en raison de faits nouveaux ou en cas d’évolution, selon son appréciation, des circonstances de l’affaire visée par ces décisions, arrêtés ou audiences.
[10] Il importe de souligner dès le départ que la procédure de révision envisagée par l’article 32 de la LTC n’est pas une procédure d’appel. Les parties qui souhaitent interjeter appel d’une décision de l’Office peuvent le faire devant la Cour d’appel fédérale en vertu de l’article 41 de la LTC.
[11] Cette procédure n’équivaut pas non plus à un pouvoir illimité conféré à l’Office de réviser ses décisions. La compétence de l’Office en vertu de cet article est limitée et ne peut être exercée que si, à son avis, il y a eu des faits nouveaux ou une évolution des circonstances de l’affaire visée par une décision particulière depuis qu’elle a été rendue.
[12] L’article 32 de la LTC énonce le cadre législatif par lequel l’Office peut exercer son pouvoir de réviser ses décisions. L’Office a tous les pouvoirs d’interpréter les dispositions de la LTC, sa loi habilitante.
[13] Une question analogue a été tranchée par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Kent c. Canada (A.G.), 2004 CAF 420 (affaire Kent). La Cour a établi un double critère pour la question de savoir si des faits nouveaux sont présentés à un tribunal dans le cadre d’une demande d’annulation ou de modification d’une décision. D’abord, il faut que les faits nouveaux avancés n’aient pas été découverts, malgré une diligence raisonnable, avant la première audience. Si tel est le cas, le tribunal doit alors passer à la deuxième étape et évaluer le caractère substantiel des faits nouveaux, c’est-à-dire qu’il doit déterminer l’importance des présumés faits nouveaux pour le fond de la demande. Dans les cas où il n’y a pas eu de faits nouveaux, la décision reste valable.
[14] Même si la décision rendue dans l’affaire Kent a trait au paragraphe 84(2) du Régime de pensions du Canada, L.R.C. (1985), ch. C-8, qui mentionne la présentation de « faits nouveaux » plutôt que « des faits nouveaux et une évolution des circonstances », l’Office y voit néanmoins une source d’orientation sur ce qui peut constituer des faits nouveaux ou une évolution des circonstances.
[15] Pour traiter une demande de révision, l’Office doit commencer par déterminer s’il y a eu des faits nouveaux ou une évolution des circonstances de l’affaire visée par la décision. Si aucun changement de ce type n’existe, la décision reste valable. Si, en revanche, l’Office conclut qu’il y a eu des faits nouveaux ou une évolution des circonstances depuis que la décision a été rendue, il doit alors déterminer si ce changement est suffisant pour justifier une révision, une annulation ou une modification de la décision. Lorsqu’une autre partie a participé à la première audience, l’Office peut décider d’enclencher le processus des actes de procédure pour assurer que toutes les parties à la décision initiale ont la chance de traiter des questions, notamment de la question de savoir s’il y a eu des faits nouveaux ou une évolution des circonstances depuis que la décision a été rendue, et de déterminer l’incidence de ce changement sur l’affaire.
[16] La formation des membres conclut que le libellé de l’article 32 doit généralement être interprété comme intéressant seulement les faits ou les circonstances qui n’existaient pas au moment de l’audience initiale ou qui n’étaient pas susceptibles d’être découverts par le demandeur à ce moment. Si le fait était connu du demandeur ou qu’il pouvait être découvert en exerçant une diligence raisonnable au moment de la plainte initiale, il ne peut alors constituer des faits nouveaux ou une évolution des circonstances. Le libellé de l’article 32 réfère clairement aux faits nouveaux ou à l’évolution des circonstances de l’affaire visée par la décision.
[17] Le fardeau de la preuve incombe à la partie qui demande la révision de fournir à l’Office des éléments de preuve et des explications prouvant qu’il y a eu des faits nouveaux ou une évolution des circonstances depuis que la décision a été rendue. La partie qui demande la révision doit aussi expliquer en quoi le changement présumé a une incidence sur l’issue de l’affaire.
[18] Une demande présentée en vertu de l’article 32 n’est pas la solution qui convient pour produire des éléments de preuve qui étaient connus ou qui auraient dû être connus du demandeur lors de la présentation de sa demande initiale. Son but n’est pas d’offrir la possibilité à la partie perdante de compléter le dossier ou de débattre à nouveau d’une affaire. Pour que la demande aboutisse, il doit y avoir eu véritablement des faits nouveaux ou une évolution des circonstances depuis que la décision initiale a été rendue pour justifier une nouvelle audience. Cela doit être soupesé par rapport au principe juridique de base qui privilégie la finalité des décisions. Cela protège l’autre partie, qui est en droit légitime de s’attendre à ce qu’une décision, une fois rendue, soit définitive.
ANALYSE ET CONSTATATIONS
[19] Dans la décision no 426-A-2012, l’Office a autorisé Sunwing à utiliser les aéronefs avec équipage fournis par Travel Service, a.s. L’Office n’a fait référence à aucun aéronef en particulier, car ce n’est pas une question à examiner aux termes de l’alinéa 60(1)b) de la LTC ou de l’article 8.2 du RTA. L’Office a toutefois assujetti son autorisation à la condition que Travel Service, a.s. maintienne le contrôle opérationnel des vols. En toute circonstance, même si l’information fournie par Transat concernant le soin et la responsabilité de l’aéronef en question était véridique, cela ne mènerait pas à une modification de la décision.
[20] Transat a soulevé des questions relativement au contrôle opérationnel de l’aéronef. Il s’agit de questions sur la conformité plutôt que d’un fait nouveau ou d’une évolution des circonstances de l’affaire qui pourrait mener l’Office à modifier la Décision. Par conséquent, l’Office traitera séparément la question de la conformité.
[21] Dans sa demande, Transat demande que l’Office abrège la période de validité de son autorisation, soit que les dates fixées dans la Décision soient ramenées au 15 décembre 2012, et que l’Office mène ses consultations sur la portée des dispositions de la location avec équipage à l’intérieur de cette période. Les recours demandés ne sont pas rationnellement rattachés à la question de la responsabilité et du soin d’un aéronef. Selon l’Office, cette demande semble être une tentative de Transat d’utiliser l’information en question pour rouvrir la Décision. Ce n’est ni la portée ni l’objet prévu d’une demande présentée en vertu de l’article 32.
CONCLUSION
[22] L’Office rejette la demande de révision de la décision no 426-A-2012 de l’Office présentée par Transat en vertu de l’article 32 de la LTC.
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