Décision n° 634-AT-A-2007

le 14 décembre 2007

le 14 décembre 2007

DEMANDE présentée par Elizabeth Hardy en vertu des paragraphes 172(1) et (3) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée, relativement aux difficultés qu'elle a éprouvées lors d'un voyage avec Air Canada de Dallas, Texas, États-Unis d'Amérique à Toronto (Ontario), Canada le 24 mai 2007.

Référence no U3570/07-23


DEMANDE

[1] Le 24 mai 2007, Elizabeth Hardy a déposé auprès de l'Office des transports du Canada (ci-après l'Office) la demande énoncée dans l'intitulé. Le 3 août 2007, Air Canada a déposé sa réponse à la demande et Mme Hardy y a répliqué le 28 août 2007. D'autres mémoires et renseignements été déposés par les deux parties.

[2] Aux termes du paragraphe 29(1) de la Loi sur les transports au Canada (ci-après la LTC), l'Office est tenu de rendre sa décision au plus tard 120 jours après la date de réception de la demande, sauf s'il y a accord entre les parties pour une prolongation du délai. Dans le cas présent, les parties ont convenu de prolonger le délai jusqu'au 31 décembre 2007.

OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES

[3] Conformément au paragraphe 172(3) de la LTC, en cas de décision positive, l'Office peut exiger la prise de mesures correctives appropriées ou le versement d'une indemnité destinée à couvrir les frais supportés par une personne ayant une déficience en raison de l'obstacle en cause, ou les deux. Toutefois, l'Office ne peut pas imposer d'amendes pour mauvaise conduite ou accorder des indemnités pour dommages et ne tiendra donc pas compte des réclamations de Mme Hardy à cet effet.

QUESTIONS

[4] L'Office doit déterminer :

  • si Mme Hardy est une personne ayant une déficience aux fins de l'application des dispositions d'accessibilité de la LTC;
  • si la façon dont Air Canada a répondu à la demande de Mme Hardy, qui souhaitait changer de siège parce que le passager assis à côté d'elle dégageait une odeur de fumée, a constitué un obstacle abusif à ses possibilités de déplacement et, le cas échéant, les mesures correctives qui devraient être prises.

FAITS

[5] Le médecin de famille de Mme Hardy explique qu'elle a des antécédents d'asthme, dont les symptômes sont une toux, un essoufflement et une respiration sifflante généralement causés par une exposition à de fortes odeurs comme la fumée de cigarette, les eaux de Cologne, les parfums ou les produits chimiques, et pouvant aussi être causés par l'exercice. Son médecin ajoute que lorsque Mme Hardy est prise d'asthme en raison d'odeurs, le premier traitement est de l'éloigner de la source de l'odeur; par la suite, elle est habituellement traitée au moyen d'inhalateurs.

[6] Mme Hardy a voyagé à bord du vol no AC1047 d'Air Canada de Dallas, Texas, États-Unis d'Amérique à Toronto (Ontario), Canada le 24 mai 2007 avec un collègue et sa femme. On lui a assigné le siège 20C dans la cabine de la classe économique, qui était complète à l'exception de deux sièges dans la rangée 27 réservés à l'agent de bord et à la directrice des services.

[7] Mme Hardy n'a pas avisé Air Canada avant son voyage de son état de santé ou de besoins particuliers en matière de siège.

[8] Une fois l'altitude de croisière atteinte, Mme Hardy a demandé à l'agent de bord de lui attribuer un autre siège en raison de la forte odeur de fumée dégagée par le passager assis à côté d'elle. Mme Hardy a demandé s'il était possible pour elle de s'asseoir dans l'un des deux sièges vides de la rangée 27. L'agent de bord ne le lui a pas permis puisque ces sièges étaient réservés à l'équipage, mais elle a plus tard demandé à la directrice des services de s'occuper de la situation. Lors de discussions avec la directrice des services, Mme Hardy a indiqué qu'elle était asthmatique et elle a finalement obtenu le siège 14C de la classe économique.

ANALYSE ET CONSTATATIONS

[9] L'Office doit d'abord déterminer si la preuve appuie la conclusion que Mme Hardy est une personne ayant une déficience et qu'elle a fait face à un obstacle lors de son voyage avec Air Canada de Dallas à Toronto le 24 mai 2007.

Mme Hardy est-elle une personne ayant une déficience?

[10] Mme Hardy explique qu'elle a une forme d'asthme qui est généralement déclenchée par de fortes odeurs comme la fumée de cigarette, les eaux de Cologne, les parfums ou les produits chimiques, ce que confirme la lettre de son médecin. Elle ajoute qu'il s'agit d'une version sans allergie de l'asthme. De plus, Mme Hardy soutient qu'elle est une personne ayant une déficience aux termes de la partie V de la LTC pour les raisons suivantes : la lettre de son médecin qui confirme qu'elle fait de l'asthme; la reconnaissance par la Americans with Disabilities Act que l'asthme est une déficience; la déclaration de la Société canadienne de l'asthme affirmant que l'asthme et les allergies sont liées, mais qu'elles ne sont pas pareilles; la confirmation sur les sites Web de la Société canadienne de l'asthme et de la Asthma and Allergy Foundation of America que l'asthme cause des difficultés respiratoires; et les caractéristiques des déficiences de l'Organisation mondiale de la santé en ce qui a trait à l'asthme.

[11] Air Canada explique que les symptômes que peut ressentir Mme Hardy et qui sont décrits par son médecin, soit une toux, un essoufflement ou une respiration sifflante, ne sont pas des réactions allergiques en tant que telles, c.-à-d. asthme sans allergie. Air Canada ajoute que ces symptômes, en plus de la description des événements qui se sont produits le 24 mai 2007, sont insuffisants pour conclure que Mme Hardy est une personne ayant une déficience aux termes de la partie V de la LTC.

[12] Quant à la question de savoir si Mme Hardy est une personne ayant une déficience aux fins de l'application des dispositions d'accessibilité de la LTC, l'Office a déjà déterminé que, dans des situations évidentes, certaines personnes sont des personnes ayant une déficience aux termes de la partie V de la LTC. Lorsqu'il est évident qu'il y a une déficience, il n'est pas nécessaire d'examiner l'état de santé sous-jacent afin de conclure qu'une personne est une personne ayant une déficience aux termes de la partie V de la LTC.

[13] L'Office a appuyé une approche méthodologique à la détermination de l'existence d'une déficience dans les cas où l'existence d'une déficience n'est pas évidente ou apparente, mais où l'état de santé sous-jacent présente un grand nombre de situations dont un vaste éventail de degrés de gravité des symptômes et de limitation de possibilités de déplacement, ce qui empêche l'Office de déterminer l'existence d'une déficience simplement en raison de l'existence de la maladie. L'Office a appliqué ce type d'analyse aux cas mettant en cause des personnes ayant des allergies. Dans la décision no 243-AT-A-2002 du 10 mai 2002, l'Office conclut que les allergies ne sont pas en soi une déficience aux termes de la partie V de la LTC. Toutefois, il conclut que certaines personnes ayant des allergies ont peut-être une déficience, attribuable à ces allergies, aux termes de la partie V de la LTC. L'Office « ... conclut aussi que, pour trancher la question de savoir si une personne ayant des allergies fait face à des limitations d'activités et/ou à des restrictions de participation dans le cadre du réseau fédéral de transport dans un contexte particulier, il faut analyser chaque cas selon son bien-fondé. » À cet égard, l'Office a conclu « ...qu'il faut une preuve factuelle de l'existence de limitations d'activités et/ou de restrictions ... pour conclure qu'une personne ayant des allergies est une personne ayant une déficience aux termes de la partie V de la LTC ».

[14] Bien que l'Office accepte la preuve de Mme Hardy voulant qu'elle ait des antécédents d'asthme, il est d'avis que l'état de santé de Mme Hardy nécessiterait plus de preuves pour lui permettre de prendre une décision et déterminer si elle est une personne ayant une déficience aux fins de l'application des dispositions d'accessibilité de la LTC. À la lumière de la nature particulière du cas présent, la décision de l'Office quant à la nécessité de demander davantage de renseignements ou un témoignage d'expert à cet égard sera dictée par sa conclusion quant à savoir si Mme Hardy a fait face à un obstacle lorsqu'elle a voyagé avec Air Canada.

Les possibilités de déplacement de Mme Hardy ont-elles été restreintes ou limitées par un obstacle?

[15] Tel qu'il est susmentionné, l'Office est d'avis que la nécessité d'obtenir des renseignements supplémentaires ou d'avoir une preuve d'expert concernant l'état de santé de Mme Hardy est dictée par la preuve au dossier en appui à la conclusion que la réponse d'Air Canada à la demande de Mme Hardy d'obtenir un autre siège parce que le passager assis à côté d'elle sentait la fumée a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement.

Démarche de l'Office pour conclure en la présence d'un obstacle

[16] Le mandat que confère la partie V de la LTC à l'Office consiste à veiller à l'élimination des obstacles abusifs auxquels les personnes ayant une déficience se heurtent lorsqu'elles se déplacent dans le réseau de transport de compétence fédérale. Le mot « obstacle » n'est pas défini dans la LTC, mais il se prête à une interprétation libérale, car il s'entend généralement de ce qui s'oppose au passage, à l'action, à l'obtention d'un résultat ou qui gêne le mouvement. Par exemple, les difficultés ou les obstacles aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience peuvent survenir dans les installations des fournisseurs de services de transport; ou découler de la conception du matériel ou de l'application de politiques, de procédures et de pratiques; ou résulter du fait que les fournisseurs de services de transport ne se conforment pas à ces dernières, ou encore qu'ils n'ont pas su prendre des mesures positives afin d'assurer leur respect, y compris le fait de ne pas avoir assuré la formation adéquate des employés et des agents contractuels.

[17] Lorsqu'il se penche sur la question de savoir si une situation a constitué un « obstacle » aux possibilités de déplacement d'une personne ayant une déficience, l'Office examine généralement l'incident relaté dans la demande afin de déterminer si la personne qui a présenté la demande a établi (prima facea) :

  • qu'un obstacle aux possibilités de déplacement d'une personne ayant une déficience a été le résultat d'une distinction, d'une exclusion ou d'une préférence;
  • que l'obstacle était lié à la déficience de cette personne;
  • que l'obstacle est discriminatoire du fait qu'il a imposé un fardeau à la personne ou l'a privée d'un avantage.

[18] Il n'est pas nécessaire d'avoir connu des difficultés lors d'un voyage pour présenter une demande à l'Office en vertu de la partie V de la LTC. Ainsi, la conception d'installations ou de matériel, ou l'éventuelle mise en œuvre d'une politique est suffisante pour permettre à l'Office d'exercer sa compétence.

[19] L'Office a conclu dans des cas antérieurs qu'il y avait eu des obstacles dans plusieurs circonstances différentes. Par exemple, dans certains cas les personnes n'ont pas pu voyager, d'autres ont été blessées durant leurs déplacements (notamment quand l'absence d'installations convenables durant le déplacement affecte la condition physique du passager) et d'autres encore ont été privées de leurs aides à la mobilité après leur retour parce que celles-ci avaient été endommagées pendant le transport. De plus, dans certains cas l'Office a conclu en la présence d'obstacles lorsque les personnes ont finalement été en mesure de voyager, mais où les circonstances entourant l'expérience ont fait en sorte que les personnes ont été lésées dans leur sentiment de confiance et de sécurité, et dans leur dignité. L'Office a reconnu que de tels sentiments pouvaient faire en sorte que ces personnes seraient peu enclines à vouloir faire d'autres voyages et, par conséquent, avoir un effet négatif sur leurs déplacements.

Le cas présent

[20] Puisque les preuves des parties au sujet des événements qui ont eu lieu le 24 mai 2007 sont souvent contradictoires, l'Office doit décider si Mme Hardy a fourni une preuve suffisante pour l'emporter sur la preuve contraire présentée par Air Canada.

[21] Dans n'importe quel différend, il importe de déterminer quelle partie a l'obligation de prouver le point en litige. Dans les causes civiles, la règle générale veut que le demandeur porte le fardeau juridique de la preuve. Il est donc tenu d'établir, selon toute probabilité, c'est-à-dire la prépondérance de la preuve, que sa version est la bonne. Ce principe s'applique également aux allégations d'obstacles aux termes de la partie V de la LTC. Il revient donc à Mme Hardy de démontrer à l'Office que sa version des faits est plus probable que celle d'Air Canada.

Discussions antérieures au changement de siège

[22] Mme Hardy affirme qu'avant le décollage, elle a remarqué une très forte odeur de cigarette provenant du passager assis à côté d'elle dans le siège 20A, dont l'ouverture d'aération était ouverte, ce qui aggravait le problème. Mme Hardy explique qu'elle a ouvert son ouverture d'aération et qu'elle a dirigé l'air vers son visage afin d'essayer de chasser l'odeur et de respirer plus facilement. Après avoir atteint l'altitude de croisière, elle s'est adressée à l'agent de bord afin d'obtenir un autre siège.

[23] Selon Mme Hardy, lorsque sa demande a été refusée, elle est retournée à son siège et a tourné la tête vers l'allée afin d'essayer de mieux respirer. Toutefois, Mme Hardy explique que le resserrement de poitrine a persisté et, par conséquent, qu'elle s'est assise dans la rangée 27. Mme Hardy soutient aussi que lorsque l'agent de bord s'est approchée de l'office, elle lui a demandé à nouveau de changer de siège lui expliquant cette fois qu'elle faisait de l'asthme et qu'elle était allergique à la fumée, des renseignements que Mme Hardy mentionnait pour la première fois à l'agent de bord. Elle ajoute qu'elle a également dit à l'agent de bord qu'elle avait des difficultés respiratoires en raison de la forte odeur de fumée dégagée par l'homme assis à côté d'elle. Mme Hardy note que l'agent de bord a répété qu'elle ne pouvait pas s'asseoir dans la rangée 27, mais qu'elle consulterait la directrice des services. Mme Hardy explique que la directrice des services est revenue dans l'office et qu'elle lui a répété les détails concernant son état. Elle a ajouté qu'elle ressentait un resserrement de poitrine et qu'elle n'avait pas son inhalateur. Mme Hardy indique qu'elle a relaté une situation similaire où elle a dû s'éloigner de l'irritant et aller prendre de l'air. Elle a également expliqué que si cela ne réglait pas la situation, comme cela avait été le cas dans le passé, elle aurait besoin d'oxygène et avertirait la directrice des services, le cas échéant.

[24] La directrice des services a toutefois soumis une version différente des événements dans sa déclaration signée qu'Air Canada a déposée auprès de l'Office. La directrice des services explique que ce n'est qu'après avoir refusé un siège à Mme Hardy en classe affaires, malgré son insistance, que cette dernière a mentionné son asthme et le resserrement de poitrine, ce que nie Mme Hardy.

[25] Mme Hardy soutient qu'au lieu de répondre à sa demande de siège, la directrice des services lui a demandé pourquoi elle n'avait pas son inhalateur, ce à quoi elle a fourni une explication. Mme Hardy affirme que la directrice des services lui a dit qu'elle était la responsabilité du transporteur, ce à quoi elle a répondu que la responsabilité retombait sur la directrice des services en raison de l'état de santé de Mme Hardy et parce que la directrice des services refusait de tenir compte de sa demande.

[26] Par ailleurs, la directrice des services fait valoir qu'elle a demandé à Mme Hardy si elle avait besoin de premiers soins et si elle avait un inhalateur ou des médicaments avec elle. Elle explique que Mme Hardy a refusé toute aide et lui a dit qu'on lui avait mentionné que l'inhalateur pouvait exploser en vol, ce que nie Mme Hardy. Selon la directrice des services, Mme Hardy l'a alors menacée verbalement avec des déclarations concernant la responsabilité du transporteur si jamais elle avait une « crise d'asthme », ce que nie Mme Hardy.

[27] D'une part, Mme Hardy affirme qu'après un long échange avec la directrice des services à propos de divers autres sujets, elle s'est mise à pleurer et a dit à la directrice des services qu'elle était bouleversée parce qu'on refusait de lui assigner un nouveau siège et que sa santé était mise en danger. Mme Hardy indique également que la directrice des services a ensuite dit que Mme Hardy ne lui avait pas donné la chance de régler la question et qu'elle s'en était allée. D'autre part, la directrice des services affirme que Mme Hardy s'est mise à pleurer à la suite de ses objections concernant ses déclarations au sujet de la responsabilité du transporteur. Selon la directrice des services, Mme Hardy a affirmé que la directrice des services la harcelait, ce que nie Mme Hardy. La directrice des services explique qu'elle a demandé à Mme Hardy de s'asseoir dans le siège réservé à l'équipage pendant qu'elle lui trouvait un autre siège. Mme Hardy a ensuite été déplacée du siège 20C au siège 14C.

Discussions à la suite du changement de siège

[28] L'Office note qu'il existe d'autres divergences dans la preuve présentée par Mme Hardy et par la directrice des services en ce qui a trait aux diverses discussions qui ont eu lieu après que Mme Hardy a obtenu un autre siège.

[29] D'un côté, Mme Hardy soutient que la directrice des services s'est adressée à elle pour lui demander des renseignements personnels, y compris sur son état de santé, afin de remplir un rapport d'incident. Mme Hardy indique que lors de ces discussions, la directrice des services lui a aussi demandé si elle allait se rendre à l'hôpital, ce à quoi elle a répondu qu'elle s'y rendrait si ses douleurs à la poitrine persistaient après l'atterrissage, mais que, pour l'instant, son état était stable puisqu'elle s'était éloignée de l'odeur de fumée. Mme Hardy ajoute que la directrice des services a continué d'insister pour qu'on appelle une ambulance au moment de l'atterrissage, mais Mme Hardy a expliqué que son véhicule était à l'aéroport et qu'elle pouvait se rendre à l'hôpital de ses propres moyens. Selon Mme Hardy, lorsqu'elle a réitéré son refus pour une ambulance et qu'elle a indiqué qu'elle était entièrement capable de prendre des décisions en ce qui concerne sa santé, la directrice des services a déclaré qu'elle aviserait le capitaine et qu'elle le laisserait décider.

[30] D'un autre côté, la directrice des services affirme que lors de la distribution des boissons, elle a demandé à Mme Hardy comment elle se sentait, ce à quoi Mme Hardy a répondu que sa poitrine se resserrait. Mme Hardy nie avoir fait une telle déclaration, expliquant que le resserrement se stabilisait, qu'elle était loin du déclencheur de son asthme et qu'elle occupait le siège 14C depuis plus d'une heure.

[31] La directrice des services indique qu'elle s'est ensuite renseignée sur les besoins médicaux de Mme Hardy, ce à quoi cette dernière a répondu qu'elle se rendrait à l'hôpital après l'atterrissage et que si quelque chose lui arrivait en se rendant à l'hôpital, Air Canada serait tenue responsable. La directrice des services soutient qu'elle a posé d'autres questions à Mme Hardy au sujet de ses besoins médicaux et que Mme Hardy est devenue agressive et a fait diverses déclarations. La directrice des services déclare qu'elle a avisé Mme Hardy qu'il était du devoir du personnel d'informer le capitaine au sujet des passagers « malades » dans l'éventualité où leur état se détériorerait et qu'en tant que directrice des services, c'était ce qu'elle avait fait.

[32] La directrice des services explique qu'elle a demandé à Mme Hardy si elle portait un bracelet MedicAlert et si elle était allergique à certains médicaments, etc. au cas où ces renseignements devaient être communiqués à « STATMD » si son état se détériorait avant l'atterrissage. Mme Hardy affirme que la directrice des services n'a rien mentionné à propos de « STATMD » ou de la possibilité d'appeler un service médical.

[33] En plus des divergences précédentes dans les versions des événements de Mme Hardy et de la directrice des services d'Air Canada, l'Office note que Mme Hardy et la directrice des services sont aussi en désaccord à propos des discussions subséquentes entourant l'obligation pour Mme Hardy d'obtenir un certificat de santé lors de ses prochains voyages. Air Canada explique que les discussions qui ont eu lieu entre Mme Hardy et la directrice des services ont poussé cette dernière à rapporter au capitaine le non respect des procédures d'Air Canada par Mme Hardy. Les services de police ont été appelés pour être sur place à l'arrivée du vol à l'aéroport international Lester B. Pearson de Toronto (ci-après l'aéroport de Toronto).

[34] À son tour, Mme Hardy a nié bon nombre des allégations d'Air Canada, y compris celles selon lesquelles elle aurait indiqué qu'elle se rendrait à l'hôpital à l'atterrissage, qu'elle aurait menacé l'équipage de poursuite, qu'elle aurait refusé les mesures d'adaptation du transporteur, qu'elle serait devenue agressive et qu'elle ne se serait pas conformée aux procédures du transporteur.

[35] Malgré le fait que Mme Hardy a demandé une prolongation de délai de quarante-cinq jours, qui lui a été accordée, afin de fournir les notes de l'agent de police qui était présent à l'arrivée du vol en raison de l'incident, ainsi que les déclarations de son collègue et de sa femme qui ont été témoins des événements, son mémoire subséquent ne comprenait que les notes de l'agent de police. Mme Hardy a confirmé verbalement au personnel de l'Office qu'elle ne fournirait pas de déclarations des deux passagers puisqu'elle considérait que les notes du policier, telles que décrites plus loin, étaient suffisantes pour établir le bien-fondé de son cas.

Constatation

[36] Sans tenir compte des divergences dans la preuve fournie concernant de la façon dont Air Canada a répondu à la demande de Mme Hardy pour obtenir un autre siège, l'Office note que celle-ci a obtenu un autre siège, loin du passager assis à côté d'elle et qui dégageait une odeur de fumée, lorsqu'elle a mentionné son état médical au personnel du transporteur, c.-à-d. lorsqu'elle a demandé d'être déplacée une deuxième fois. La preuve au dossier démontre que Mme Hardy n'a pas informé le personnel d'Air Canada de son état de santé à sa première demande. Cette conclusion est aussi appuyée par la déclaration écrite de la directrice des services d'Air Canada. L'Office note qu'une fois qu'elle a été informée que Mme Hardy faisait de l'asthme et qu'elle était allergique à la fumée, l'agent de bord a demandé de l'aide à la directrice des services afin de satisfaire à sa demande de réassignation. En fin de compte, Mme Hardy a pu être déplacée au siège 14C.

[37] En ce qui a trait à la description des événements survenus, l'Office doit déterminer laquelle des différentes versions des événements est la plus probable.

[38] Les deux parties ont eu l'occasion de déposer autant de documents ou de mémoires qu'elles voulaient afin d'appuyer leur description de ce qui s'est produit le 24 mai 2007. Air Canada a fourni les mémoires de la directrice des services du vol et d'un agent principal du service Solutions clientèle d'Air Canada qui a parlé avec Mme Hardy après l'incident. Mme Hardy aurait pu fournir la déclaration de deux personnes qui ont été témoins de l'événement, mais elle ne l'a pas fait, même si elle avait mentionné que ces déclarations seraient déposées. Elle a préféré se fier à sa propre déclaration, qui, à son avis, était corroborée de façon satisfaisante par les notes cryptiques rédigées par l'agent de police qui lui a parlé à son arrivée à l'aéroport de Toronto.

[39] À cet égard, les notes rédigées par l'agent de police, obtenues par Mme Hardy en vertu de la Loi sur l'accès à l'information municipale et la protection de la vie privée, se lisent comme suit : objet Elizabeth Hardy, passagère indisciplinée; s'est disputée avec l'agent de bord; asthme; aucune poursuite criminelle. Puisque les notes de l'agent de police ne fournissent pas de renseignements à propos de ce qui a eu lieu une fois que Mme Hardy a changé de siège, ces notes ne peuvent en aucun cas appuyer sa version des événements qui ont eu lieu après qu'elle a obtenu le siège 14C.

[40] Selon la preuve présentée, l'Office n'est pas convaincu que la version des événements de Mme Hardy est suffisamment convaincante ou plus probable que celle d'Air Canada.

[41] Par conséquent, l'Office estime que la preuve de Mme Hardy est insuffisante pour appuyer la conclusion que les événements se sont produits comme elle les a décrits.

[42] L'Office estime que Mme Hardy ne s'est pas acquittée du fardeau de la preuve en ce qui a trait à ses allégations dans cette affaire, malgré le fait qu'elle ait eu tout le loisir de le faire lors des plaidoiries.

[43] À la lumière de ce qui précède, l'Office est convaincu qu'Air Canada a répondu aux besoins de Mme Hardy en matière de siège et estime que la manière dont Air Canada a répondu à sa demande d'obtenir un autre siège parce que le passager assis à côté d'elle dégageait une odeur de fumée n'a pas constitué un obstacle aux possibilités de déplacement de Mme Hardy. En raison de la précédente constatation, l'Office n'exigera pas les preuves supplémentaires nécessaires pour déterminer si Mme Hardy est une personne ayant une déficience aux fins de l'application des dispositions d'accessibilité de la LTC.

[44] Par conséquent, l'Office n'envisage aucune autre mesure dans cette affaire.

Membres

  • Gilles Dufault
  • John Scott
  • Beaton Tulk
Date de modification :