Décision n° 89-R-1991
le 21 février 1991
DEMANDE présentée par la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada en vertu de l'article 158 de la Loi de 1987 sur les transports nationaux, L.R.C. 1985, ch. 28 (3e suppl.), pour l'approbation par l'Office national des transports de l'accord relatif à la cession de la "Northline" par la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada à la Commission des transports du Nord de l'Ontario entre Cochrane et Calstock dans la province d'Ontario, à savoir un tronçon de 2,61 milles de la subdivision Taschereau à Cochrane ou près de cette localité, un tronçon de 129,1 milles de la subdivision Kapuskasing entre Cochrane et Hearst, et un tronçon de 22,41 milles de la subdivision (l'épi) Pagwa entre Hearst et Calstock, y compris les terrains, bâtiments et installations ferroviaires connexes.
Références nos T 6115/487
T 6115/591
T 6115/676
INTRODUCTION
La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (ci-après le CN) et la Commission des transports du Nord de l'Ontario (ci-après la CTNO) ont conclu un accord le 11 août 1990, relativement à la cession par le CN de la "Northline" à la CTNO (cet accord sera désigné ci-après par l'expression accord de cession). Le 21 août 1990, l'Office national des transports (ci-après l'Office) a reçu du CN et de la CTNO l'avis de l'accord de cession, conformément aux dispositions du paragraphe 158(2) de la Loi de 1987 sur les transports nationaux (ci-après la LTN 1987). Copie de l'accord de cession, accompagnée d'une demande de traitement confidentiel du document, a également été déposée auprès de l'Office.
AVIS PUBLIC DE L'ACCORD DE CESSION
Avis de l'accord de cession a été publié les 17 et 26 octobre 1990 dans les journaux de la région visée et signifié aux expéditeurs établis le long de la ligne et aux autres parties intéressées. La date limite pour le dépôt des interventions avait été fixée à trente (30) jours suivant la date de publication de l'avis.
Après avoir examiné l'avis susmentionné, l'Office a estimé que l'avis pouvait renfermer certaines irrégularités, du fait qu'il ne traitait pas de questions telles que les redevances à payer, les tarifs d'encouragement et les arrangements connexes liés aux itinéraires d'acheminement, ni du contenu de l'accord de cession. L'Office estimait que toutes les parties touchées devraient être informées de ces faits afin d'être en mesure d'apporter des observations pertinentes. Par conséquent, l'Office a ordonné au CN de faire parvenir à toutes les parties intéressées un avis public modifié auquel serait incluse une version abrégée de l'accord de cession, qui en résume les points saillants. Le CN s'est conformé aux directives de l'Office le 17 janvier 1990. On a accordé un délai additionnel de quinze (15) jours pour le dépôt de nouvelles interventions.
QUESTIONS QUE L'OFFICE DOIT EXAMINER
Voici la teneur du paragraphe 158(3) de la LTN 1987 :
Dans les six mois suivant la réception de l'avis prévu par le paragraphe (2), l'Office, après la tenue éventuelle d'audiences publiques qu'il peut juger nécessaires pour permettre aux intéressés d'exprimer leur opinion sur la cession, approuve l'accord de cession, sauf s'il estime que celle-ci est contraire à l'intérêt public ou que le cessionnaire n'est pas habilité à exploiter la ligne ou le tronçon. (soulignement ajouté)
MÉMOIRES INVOQUANT DES RAISONS LIÉES À L'INTÉRÊT PUBLIC
Suite à la publication des avis mentionnés précédemment, l'Office a reçu des mémoires des intervenants indiqués ci-après.
La Corporation municipale de Hearst appuyait la cession de la "Northline" du CN à la CTNO, à la condition que le CN signe avec la CTNO un mémoire d'entente parallèle concernant la vente à la CTNO, à la valeur du marché, des terrains situés au sud de la voie ferrée, à Hearst. Ni ces terrains ni la gare de Hearst, au sujet de laquelle la Société historique de Hearst et de la région a fait part de son intérêt, ne sont visés par l'accord de cession. Par conséquent, ces questions n'ont aucune incidence sur la détermination de l'Office dans cette affaire.
La Corporation Mattice-Val Côté a demandé à l'Office de donner plus d'information au sujet de l'effet qu'aurait la cession sur plusieurs entreprises du secteur qui sont établies sur des terrains administrés par le CN, et sur les installations d'exploitation ferroviaire. La demande a été transmise au CN; dans sa réponse, ce dernier a dit qu'on reconnaît dans l'accord de cession que ces terrains et installations ferroviaires font actuellement l'objet de différents contrats qui seront remplacés par de nouveaux contrats signés par la CTNO. Le CN affirmait que le CN et la CTNO prévoyaient que les nouveaux contrats renfermeront essentiellement les mêmes dispositions que les contrats existants.
La Corporation municipale de Kapuskasing a fait savoir qu'elle donnait tout son appui à l'accord de cession.
Abitibi-Price Inc. (ci-après Abitibi-Price), qui exploite une grande usine de papier journal à Iroquois Falls (Ontario), sur les voies de la CTNO, a fait savoir qu'elle avait intérêt à ce que la CTNO offre un service adéquat et concurrentiel, et disait craindre que la cession de la "Northline" du CN à la CTNO n'ait des répercussions sur le service offert.
Malette Kraft Pulp and Power, division de Malette Inc. (ci-après Malette), qui exploite une usine à Smooth Rock Falls (Ontario), a fait savoir qu'elle s'oppose à l'accord de cession à moins qu'on ne trouve une solution qui réponde de façon satisfaisante aux préoccupations de la compagnie (énumérées plus loin) quant au niveau de service et aux tarifs d'acheminement du trafic.
En ce qui a trait aux tarifs du trafic, la version abrégée de l'accord de cession stipule que "le CN accepte d'aider la CTNO à maintenir l'utilisation du rail et à en faire la promotion, au moyen de tarifs d'encouragement qui favoriseront le recours aux services du CN comme principal transporteur de raccordement pour l'acheminement du trafic provenant des points situés le long des voies cédées..." (traduction libre). D'après l'interprétation de Malette, cela signifie qu'on obtiendra de meilleurs tarifs si l'on achemine le trafic suivant l'itinéraire ONR-CN-XXX plutôt que l'itinéraire ONR-CP-XXX, ou tout autre transporteur de raccordement. Advenant qu'un transporteur concurrent propose un tarif inférieur, Malette se demande si le CN proposera un tarif égal ou inférieur, ou bien si l'Ontario Northland Railway (ci-après l'ONR) sera limitée dans ses négociations avec des transporteurs concurrents, en raison de l'accord de cession conclu avec le CN. De plus, Malette voulait savoir quel effet la cession aurait sur le service d'Algoma Central Railway (ci-après ACR) entre Hearst et Sault Ste. Marie, et demandait si la compagnie perdrait la possibilité de recourir aux services d'ACR comme transporteur concurrent.
Au sujet du niveau de service, Malette prévoit qu'à la suite de travaux majeurs d'expansion à son usine de Smooth Rock Falls, elle s'attend à voir son trafic doubler en 1992. D'après Malette, le fait que l'accord de cession stipule que "...la fourniture de wagons en vue d'une augmentation du trafic fera l'objet de négociations entre le CN et la CTNO" (traduction libre) amène la compagnie à croire que l'ONR ne serait pas en mesure de fournir à elle seule les wagons additionnels nécessaires. Malette soutient qu'il est très incertain que les wagons additionnels dont la compagnie aura besoin après son agrandissement soient effectivement disponibles.
Le 11 février 1991, le CN a présenté aux interventions d'Abitibi-Price et de Malette une réponse portant sur trois points : le niveau de concurrence, le niveau de service et la fourniture de wagons.
Le CN disait qu'à son avis, l'accord de cession favorisait la concurrence et devrait améliorer l'accès à d'autres transporteurs, car le trafic de la "Northline" ne sera plus un trafic local pour le CN, et des transporteurs concurrents pourraient égaler les tarifs d'encouragement, ce qui serait à l'avantage des expéditeurs. Le CN soutient que les transporteurs pourront concurrencer le CN en proposant des tarifs conjoints avec la CTNO pour n'importe quel trafic de la "Northline". Le CN affirmait que comme les propositions de tarifs font souvent l'objet de contrats confidentiels, le trafic ne sera confié au CN que si l'expéditeur est convaincu que l'offre du CN/CTNO peut concurrencer n'importe quelle autre offre. Le CN ajoutait que mis à part les dispositions relatives aux tarifs d'encouragement et l'engagement quant à la fourniture de wagons, l'accord de cession ne contenait rien qui ait une incidence sur l'acheminement du trafic.
Le CN soutient que les expéditeurs pourront se prévaloir d'un service concurrentiel en passant par le réseau d'ACR entre Hearst et Sault Ste. Marie, et que le paiement d'encouragement sera versé à la CTNO, peu importe que le CN reçoive à Oba le trafic acheminé par l'intermédiaire d'ACR, ou qu'il reçoive à North Bay le trafic acheminé par la CTNO.
En ce qui a trait au niveau de service, le CN disait que selon ses prévisions, les niveaux de service futurs dans la "Northline" seront comparables à ce qu'ils sont actuellement, et que le service futur répondra aux besoins des expéditeurs à ce moment.
Pour ce qui est de la fourniture de wagons, le CN faisait valoir que comme l'engagement de fourniture oblige le CN à continuer de fournir des wagons aux niveaux actuels, et étant donné la concurrence qui pourrait se manifester à North Bay, on ne prévoit pas que les fournisseurs aient à s'inquiéter à ce sujet. D'après le CN, les wagons supplémentaires qui seront nécessaires à la suite de l'agrandissement chez Malette seront fournis de la même façon que si le CN était toujours présent dans la "Northline".
CONSTATATIONS
POUVOIR DE LA CTNO D'EXPLOITER LA LIGNE
Après avoir examiné la Loi sur la Commission des transports du Nord de l'Ontario, L.R.O. (1980), ch. 351, l'Office est convaincu que cette loi habilite la CTNO, corps constitué en vertu de la Temiskaming and Northern Ontario Railway Act, à exploiter la "Northline".
INTÉRÊT PUBLIC
L'Office a examiné tous les documents reçus et versés au dossier, et détermine que la tenue d'une audience publique n'est pas nécessaire et qu'il peut rendre une décision à partir des renseignements au dossier.
En ce qui a trait au mémoire de la Corporation Mattice-Val Côté, l'Office estime que les termes de l'accord de cession prévoient de façon adéquate le remplacement par la CTNO des accords existants conclus avec le CN.
Au sujet des préoccupations d'Abitibi-Price et de Malette, l'Office a étudié avec soin les mémoires de ces entreprises ainsi que les réponses présentées par le CN et l'accord de cession. L'Office juge que le CN a présenté une solution satisfaisante en ce qui touche l'accès à d'autres transporteurs et que d'autres transporteurs ont la capacité de proposer leurs services en vue d'acheminer le trafic de la "Northline" en offrant des tarifs conjoints avec la CTNO.
En ce qui a trait au niveau de service et à la fourniture de wagons, l'Office estime que les termes de l'accord de cession sont raisonnables et traitent de ces deux questions de façon satisfaisante. Toutefois, sans égard aux termes de l'accord de cession, il convient de noter que les transporteurs de compétence provinciale et de compétence fédérale sont tous deux tenus par la loi de prendre des mesures adéquates et convenables pour acheminer le trafic offert. Si un transporteur ne satisfait pas aux obligations de transporteur public que lui imposent les dispositions de la Railways Act, L.R.O. (1950), ch. 331, les parties affectées par un tel manquement pourraient se prévaloir d'un recours auprès des autorités réglementaires compétentes, en vertu des lois susmentionnées.
En outre, l'Office est d'avis que les tarifs d'encouragement convenus entre le CN et la CTNO n'influent pas indûment sur l'acheminement du trafic. C'est l'expéditeur, et non pas le transporteur, qui a le dernier mot quant au choix de l'itinéraire d'acheminement. Par conséquent, il revient aux expéditeurs, par exemple Malette, de décider si leur trafic sera confié à ACR, via Hearst, ou à un autre transporteur. À cet égard, il convient de noter qu'il sera toujours possible de procéder à des raccordements avec ACR à Hearst et avec le CP à Franz et North Bay.
Par conséquent, après avoir examiné l'accord de cession, l'Office est d'avis que cet accord n'aura pas de répercussions néfastes sur les expéditeurs ou sur la capacité des transporteurs de se concurrencer pour l'acheminement du trafic de la "Northline". Les transporteurs pourront conclure des ententes avec la CTNO et pourront choisir d'offrir des tarifs égaux ou inférieurs aux tarifs d'encouragement du CN. Donc, le CN peut perdre le trafic de la "Northline" au profit d'un concurrent s'il ne réussit pas à négocier des tarifs avec l'expéditeur ou la CTNO ou les deux. De plus, quelle que soit la préférence de l'expéditeur quant à l'itinéraire d'acheminement, la CTNO n'est pas tenue d'acheminer le trafic de la "Northline" par l'intermédiaire du CN, et les conditions de l'accord de cession ne l'empêchent pas d'engager des négociations avec d'autres transporteurs en vue de conclure d'autres arrangements en matière d'acheminement ou de tarifs.
En conclusion, l'Office, ayant étudié l'accord de cession et les pièces déposées, constate que l'on a apporté aucune preuve susceptible d'établir que la cession est contraire à l'intérêt public.
DÉTERMINATION
En conséquence, l'Office approuve par les présentes, en vertu du paragraphe 158(3) de la LTN 1987, l'accord de cession conclu entre la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada et la Commission des transports du Nord de l'Ontario relativement à la cession de la "Northline", par la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada à la Commission des transports du Nord de l'Ontario, y compris les terrains, bâtiments et installations ferroviaires connexes.
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