Lettre-décision n° LET-A-5-2023

le 10 février 2023

Détermination par l’Office des transports du Canada (Office) à savoir si Volatus Aerospace Corp. (Volatus) est Canadienne au sens de la Loi sur les transports au Canada, LC 1996, c 10 (LTC).

Numéro de cas : 
22-64704

Contexte

[1] Volatus a déposé une demande auprès de l’Office le 24 novembre 2022 en vue d’obtenir une licence pour l’exploitation d’un service aérien intérieur au moyen de drones.

[2] Afin d’obtenir une licence pour l’exploitation d’un service intérieur, un transporteur aérien doit convaincre l’Office qu’il satisfait à toutes les exigences énoncées à l’article 61 de la LTC, y compris à celle d’être Canadien au sens du paragraphe 55(1) de la LTC. Cette exigence doit être respectée en tout temps.

La loi et les documents de référence

[3] Aux termes du sous-alinéa 61a)(i) de la LTC, l’Office délivre une licence pour l’exploitation d’un service intérieur si le demandeur est Canadien.

[4] Aux termes du paragraphe 55(1) de la LTC, Canadien signifie :

a) Citoyen canadien ou résident permanent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés;

b) toute administration publique du Canada ou ses mandataires;

c) personne morale ou entité, constituée ou formée au Canada sous le régime de lois fédérales ou provinciales et contrôlée de fait par des Canadiens et dont au moins 51 % des intérêts avec droit de vote sont détenus et contrôlés par des Canadiens, étant toutefois entendu :

(i) qu’au plus 25 % de ses intérêts avec droit de vote peuvent être détenus directement ou indirectement par un non-Canadien, individuellement ou avec des personnes du même groupe,

(ii) qu’au plus 25 % de ses intérêts avec droit de vote peuvent être détenus directement ou indirectement par un ou plusieurs non-Canadiens autorisés à fournir un service aérien dans tout ressort, individuellement ou avec des personnes du même groupe.

[5] Pour déterminer la qualité de Canadien, l’Office applique la définition du terme « Canadien » de la LTC aux renseignements qu’un demandeur a présentés sur des sujets comme sa structure organisationnelle, sa gouvernance, ses contrats de service, ses dettes et ses capitaux propres. L’Office applique ce terme aux renseignements présentés en s’appuyant sur les facteurs exposés dans son Guide sur la propriété canadienne et le contrôle de fait pour le transport aérien (Guide).

Analyse

[6] Le transporteur aérien doit se conformer à trois exigences pour être considéré comme étant Canadien : 1) constitution en société; 2) actions assorties de droit de vote; 3) contrôle de fait.

[7] Lorsque le titre de propriété du licencié appartient à une ou à plusieurs entités, la définition de Canadien s’applique également à chacune des entités. Si, à leur tour, elles-mêmes appartiennent à d’autres entités, l’Office doit déterminer qui contrôle l’entreprise en remontant jusqu’au sommet de la chaîne de propriété et en appliquant la définition de « Canadien » à chaque échelon de la structure de propriété.

Exigence visant la constitution en société

[8] Pour qu’une entité soit canadienne, elle doit être constituée en personne morale sous le régime des lois du Canada ou de l’une de ses provinces. Volatus est constituée en personne morale sous le régime de la Loi sur les sociétés par actions de l’Ontario et, par conséquent, satisfait à l’exigence à cet égard.

Exigence visant les actions assorties de droit de vote

[9] L’exigence visant les actions assorties de droit de vote est satisfaite si au moins 51 % des actions assorties de droit de vote sont détenues et contrôlées par des Canadiens, et qu’aucun non-Canadien autorisé à fournir un service aérien individuellement ou avec des personnes du même groupe ne détient et ne contrôle directement ou indirectement plus de 25 % des actions assorties de droit de vote, soit individuellement, soit avec des personnes du même groupe.

[10] Volatus est une société cotée à la Bourse de croissance TSX. Ian McDougall et Glen Lynch, deux Canadiens, détiennent dans Volatus chacun 34 % des actions assorties de droit de vote. Les 32 % d’actions restantes appartiennent à plus de 1 000 investisseurs.

[11] Des actionnaires canadiens contrôlent à l’heure actuelle au moins 68 % des actions assorties de droit de vote. Pour qu’un non-Canadien contrôle plus de 25 % des actions assorties de droit de vote de Volatus, il faudrait que presque toutes les actions cotées en bourse qui sont en circulation soient détenues et contrôlées par des non-Canadiens et que ces non-Canadiens soient regroupés. De même, pour que des non‑Canadiens autorisés à fournir des services aériens puissent détenir et contrôler plus de 25 % des actions assorties de droit de vote de Volatus, il faudrait que presque toutes les actions cotées en bourse qui sont en circulation soient détenues et contrôlées par des fournisseurs non canadiens de services aériens, individuellement ou avec d’autres non‑Canadiens.

[12] Étant donné qu’aucun actionnaire non canadien ne détient plus de 1 % des actions assorties de droit de vote et que les actions sont cotées sur une bourse canadienne, il n’existe aucun scénario réaliste selon lequel un seul actionnaire ou un groupe de fournisseurs non-Canadiens de services aériens, individuellement ou avec d’autres actionnaires non-Canadiens, détiendraient plus de 25 % des actions assorties de droit de vote.

[13] Toutefois, en tant que société cotée en bourse, son pourcentage d’actions assorties de droit de vote détenues par des Canadiens peut être assujetti à des fluctuations constantes. Comme il est indiqué dans le Guide, afin de s’assurer qu’une société cotée en bourse est Canadienne et continue de satisfaire à l’exigence d’être Canadienne, l’Office exige qu’elle établisse :

I. soit un système de restriction et de contrôle sur une valeur mobilière, qui limite l’achat ou le transfert de valeurs mobilières de la personne morale qui risquerait d’entraîner le non-respect des exigences visant les actions assorties de droit de vote;

II. soit un régime à droit de vote variable, qui prévoit que des non-Canadiens détiennent des actions assorties d’un droit de vote variable, de sorte que, lorsque le pourcentage d’actions assorties de droit de vote variable détenues par des non-Canadiens dépasse le pourcentage maximum permis du total d’actions avec droit de vote, le nombre de votes assortis à chaque action avec droit de vote variable baisse automatiquement pour que le seuil maximum permis ne soit pas dépassé.

[14] L’Office est convaincu que Volatus respecte en ce moment les exigences visant les actions assorties de droit de vote, mais il conclut que, tant qu’un système de restriction et de contrôle une valeur mobilière ou qu’un régime à droit de vote variable n’a pas été établi, Volatus pourrait plus tard ne plus satisfaire à l’exigence visant les actions assorties de droit de vote.

Exigence visant le contrôle de fait

[15] La troisième exigence, le contrôle de fait, est satisfaite si le pouvoir, qu’il soit exercé ou non, de contrôler les activités de prise de décisions stratégiques d’une entreprise, et de gérer et de diriger les opérations courantes de cette entreprise appartient à des Canadiens. L’influence doit être dominante ou déterminante pour être considérée comme étant un « contrôle de fait ».

[16] Comme l’explique le Guide, l’Office prend en considération les quatre facteurs suivants pour déterminer qui détient le contrôle de fait : i) la gouvernance de la société; ii) les droits des actionnaires; iii) les risques et les rétributions; iv) les affaires et les activités commerciales.

[17] L’Office n’a pas relevé de droits d’actionnaires qui permettraient à des non-Canadiens d’exercer le contrôle de fait, ni d’indicateurs que des actionnaires non-Canadiens auraient assumé la majorité des risques ou qui auraient droit à la majorité des rétributions liées à l’exploitation de Volatus, non plus de dettes ou autres accords donnant à des non-Canadiens la capacité de contrôler de fait l’entreprise.

[18] Toutefois, lorsque l’Office évalue la structure de gouvernance de Volatus, il conclut qu’elle ne dispose pas des contrôles nécessaires pour l’élection du conseil d’administration et pour le vote aux assemblées d’actionnaires et aux réunions du conseil d’administration qui permettraient de démontrer qu’elle sera toujours contrôlée de fait par des Canadiens.

[19] Le conseil d’administration est élu par les actionnaires pour orienter et gérer les affaires de Volatus. Par conséquent, les conditions suivantes doivent être remplies pour que le contrôle de fait soit détenu par des Canadiens :

  • les actionnaires canadiens doivent avoir le droit de nommer au moins la moitié des membres du conseil d’administration;
  • au moins la moitié des membres du conseil d’administration doivent être Canadiens.

[20] De même, pour qu’une entreprise soit considérée comme étant contrôlée de fait par des Canadiens, les dispositions liées au quorum d’une société, soit le nombre minimum obligatoire de membres présents à une assemblée ou à une réunion pour qu’elle soit valide, doivent toujours exiger ce qui suit :

  • au moins la moitié des actionnaires ou des administrateurs présents à une assemblée d’actionnaires ou à une réunion du conseil d’administration sont Canadiens;
  • au moins la moitié des membres présents à une réunion du conseil d’administration ont été nommés par des actionnaires canadiens.

[21] L’Office conclut que le conseil d’administration de Volatus est en ce moment contrôlé par des Canadiens, puisque les cinq administrateurs nommés sont Canadiens, et ce sont des actionnaires canadiens, lesquels détiennent plus de 51 % des actions avec droit de vote, qui ont élu les administrateurs actuels.

[22] Toutefois, Volatus n’a pas démontré que des actionnaires canadiens auront toujours le droit de nommer une majorité d’administrateurs. Dans une société cotée en bourse, par exemple, la mise en place d’un système de restrictions, comme un régime à droit de vote variable, peut garantir que les Canadiens conservent toujours la capacité d’avoir au moins 51 % des votes lors des réunions d’actionnaires, y compris lors de l’élection des administrateurs.

[23] De plus, les statuts et les autres documents sur la gouvernance de Volatus ne prévoient aucune disposition selon laquelle le quorum pourra être atteint uniquement si une majorité de membres canadiens ayant le droit de vote sont présents aux réunions des actionnaires et du conseil d’administration.

[24] L’Office est d’avis que l’actuel conseil d’administration de Volatus est contrôlé par des Canadiens, mais il conclut que Volatus doit modifier ses statuts ou ses règlements administratifs pour garantir que le conseil d’administration aura toujours la qualité de Canadien.

Conclusion

[25] L’Office conclut que Volatus est Canadienne, au sens du paragraphe 55(1) de la LTC, à condition qu’elle mette en place soit un système de restriction et de contrôle sur une valeur mobilière, soit un régime à droit de vote variable, et qu’elle établisse des exigences l’obligeant à être représentée au conseil d’administration par une majorité de Canadiens. L’Office ordonne à Volatus de faire la preuve, au plus tard le 12 février 2024, qu’elle se conforme à ces exigences.

[26] Toute la correspondance et tous les actes de procédure doivent se référer au cas 22-64704 et être envoyés par courriel au Secrétariat de l’Office à secretariat@otc-cta.gc.ca.

Membre(s)

Mark MacKeigan
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