Décision n° 125-R-1997

le 6 mars 1997

RELATIVE aux questions ayant trait à la méthode d'établissement du coût du capital de l'Office des transports du Canada en ce qui concerne les compagnies de chemin de fer réglementées.

No de référence : 
T 6275-15

Le 31 juillet 1985, le Comité des transports par chemin de fer de la Commission canadienne des transports (ci-après le Comité) a rendu public le document intitulé Décision relative à la méthode d'établissement du coût du capital relative aux questions liées à la méthode d'établissement du coût du capital de la Commission canadienne des transports pour les chemins de fer réglementés; et relative aux projets de modifications au Règlement sur le calcul des frais ferroviaires en ce qui concerne le coût du capital (ci-après la décision de 1985).

La Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10 (ci-après la LTC) est entrée en vigueur le 1er juillet 1996. Conformément à l'article 196 de la LTC, la décision de 1985 est maintenue aux termes des dispositions transitoires de la LTC et de la Loi de 1987 sur les transports nationaux, L.R.C. (1985), ch. 28 (3e suppl.), dans la mesure où elle n'enfreint pas la LTC. Même si l'application des méthodes d'établissement des coûts a été resserrée en vertu de la nouvelle loi, par exemple par l'élimination des subventions, l'Office continue d'avoir une responsabilité légale permanente dans d'autres domaines, comme l'établissement du barème des taux maximums de transport du grain et l'établissement des prix d'interconnexion.

L'article 32 de la LTC indique en partie que l'Office peut modifier toute décision si, à son avis, il y a des faits nouveaux ou une évolution des circonstances de l'affaire visée par cette décision.

Depuis que la décision de 1985 a été rendue publique, l'industrie ferroviaire a subi des changements considérables. Il est par conséquent devenu évident que certains éléments de cette décision ne sont peut-être plus pertinents ou doivent être maintenant révisés.

L'Office a entamé l'examen de la décision de 1985 par voie d'une lettre du 27 septembre 1996 adressée aux parties qui avaient pris part à la démarche qui a donné lieu à la décision, ainsi qu'à ceux qui avaient manifesté depuis 1985 un intérêt à l'égard des questions de coûts du capital. Ceux-ci devaient fournir leurs commentaires et faire part de leurs positions respectives sur des questions précises à examiner et portant sur les données devant servir à l'établissement des coûts du taux du capital. En date du 1er novembre 1996, la Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique (ci-après CPR), la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (ci-après le CN) et les provinces de l'Alberta, du Manitoba et de la Saskatchewan ainsi que les coopératives du blé des Prairies (ci-après les provinces et coopératives) avaient fait part de leurs réponses.

Parmi les questions principales au sujet desquelles on a reçu des commentaires, notons les suivantes :

  • Le taux du coût des actions ordinaires de CPR doit-il continuer d'être établi en fonction de celui de Canadien Pacifique Ltée (ci-après CPL) aux fins de l'établissement des taux du coût du capital?
  • Le taux du coût des actions ordinaires du CN doit-il continuer d'être établi en fonction de celui de CPR, ou doit-on établir des taux distincts pour chaque compagnie ferroviaire?
  • L'Office doit-il avoir recours aux résultats obtenus des modèles axés sur le marché pris individuellement ou se servir d'un mélange du modèle d'équilibre des actifs financiers (ci-après le MEAF), de la méthode de la valeur actualisée nette (ci-après la méthode VAN) et de la méthode de la prime de risque du capital-actions?
  • Doit-on continuer d'effectuer le rajustement à la baisse (soit d'un demi-point de pourcentage) relativement au risque commercial de CPR, par rapport au taux du coût des actions ordinaires de CPL?
  • Doit-on continuer d'effectuer le rajustement à la baisse (soit d'un point de pourcentage) relativement au risque afférent au transport du grain, par rapport au taux du coût des actions ordinaires de CPR?
  • L'investissement ferroviaire net et la structure du capital des compagnies ferroviaires doivent- ils tenir compte des réductions de la valeur des éléments d'actif qu'ont connues CPR et CN en 1995?

Le 23 décembre 1996, l'Office avait fourni un rapport du personnel aux intéressés (annexe A) dans lequel on résumait leurs positions et formulait les premières recommandations sur les questions à examiner. De plus, l'Office avait indiqué aux parties que trois questions devaient être examinées lors d'une audience consultative. Ces questions étaient les suivantes : le rajustement lié au risque commercial de CPR; le rajustement relatif au risque afférent au transport du grain; et la question d'éléments d'actif (soit le traitement des réductions de la valeur des éléments d'actif des deux compagnies ferroviaires).

Avant la tenue de l'audience consultative, CPR, le CN et les provinces et coopératives ont déposé des témoignages écrits.

L'audience consultative s'est déroulée les 27 et 28 janvier 1997. Bien que les provinces et coopératives aient de prime abord prévu y prendre part, elles ont choisi de ne pas prendre part à l'audience orale du 27 janvier 1997. Elles ont toutefois, d'un commun accord avec l'Office et les autres parties, poursuivi leur participation par le dépôt de documents écrits seulement, y compris celui de la preuve de réfutation. Les compagnies de chemin de fer ont étoffé la preuve écrite grâce à des témoignages lors de l'audience consultative. En date du 7 février 1997, l'Office avait reçu toutes les conclusions finales par écrit.

La présente décision traite des deux questions soulevées dans le rapport du personnel, au sujet desquelles toutes les parties ont eu l'occasion de fournir leurs commentaires, ainsi que des trois questions abordées lors de l'audience consultative.

I QUESTIONS ABORDÉES DANS LE RAPPORT DU PERSONNEL

Le 23 décembre 1996, l'Office a remis aux participants son rapport du personnel (annexe A) pour qu'ils formulent d'autres commentaires à son sujet. Ce rapport résume la position des participants jusqu'ici et contient des recommandations sur toutes les questions ayant trait à l'examen, à l'exception des trois questions qui ont été abordées par la suite lors de l'audience consultative. L'Office n'a reçu que des commentaires d'intérêt secondaire sur le rapport du personnel.

RÉSUMÉ DES QUESTIONS ET CONSTATATIONS DE L'OFFICE

1. Taux du coût des actions ordinaires

Dans la décision de 1985, il a été décidé que puisque CPR n'avait pas d'actions ordinaires émises dans le public, le taux du coût de ses actions ordinaires serait fondé sur celui de CPL, rajusté pour tenir compte de toutes différences entre ces deux entreprises en matière de risques commerciaux et financiers.

Par suite de l'abrogation de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, L.R.C. (1985), ch. W-8 (ci-après la LTGO), de l'entrée en vigueur de la LTC et de la privatisation du CN en 1995, l'Office a déterminé qu'il fallait répondre aux questions suivantes :

  • CPL devrait-il servir de référence pour la détermination des taux?
  • Le CN et CPR devraient-ils avoir chacun leur propre taux du coût des actions ordinaires?
  • Dans l'affirmative, quand auraient-ils des données suffisantes pour effectuer le calcul?
  • Devrait-il y avoir un taux moyen?

CONSTATATIONS DE L'OFFICE

Après étude de la position de CPR, du CN et des provinces et coopératives, l'Office estime que le fait de prendre pour référence le taux du coût des actions ordinaires de CPL est encore approprié puisque cette dernière est la seule compagnie de chemin de fer dont les actions sont cotées en bourse qui possède les renseignements commerciaux permettant de déterminer ce taux.

Le taux du coût des actions ordinaires de CPR devra donc continuer d'être fondé sur celui de CPL. L'Office continuera d'utiliser ce processus à moins que d'autres renseignements sur le marché lui permettent de déterminer le taux du coût des actions ordinaires de CPR. Ce taux servira par la suite à déterminer le taux du coût des actions ordinaires du CN. L'Office continuera d'utiliser cette méthode jusqu'à ce que d'autres renseignements sur le marché lui permettent d'établir un taux du coût des actions ordinaires distinct pour le CN. En ce qui a trait au CN, l'Office prévoit que d'ici 2002, il y aura assez de données pour effectuer le calcul.

2. Modèles axés sur le marché

Dans la décision de 1985, l'Office a proposé trois méthodes axées sur le marché pour mesurer le coût des actions ordinaires de CPL : la méthode VAN, le modèle MEAF, et la méthode de la prime de risque. Selon la méthode VAN, le coût des actions ordinaires équivaut à la somme des taux de rendement actuels des actions majorée du taux d'augmentation des dividendes prévu. Le MEAF permet de calculer le coût des actions ordinaires et d'en faire la somme d'un taux de rendement hors risque et de la prime de risque d'un portefeuille donné (représentant l'ensemble du marché), multipliée par l'indice de risque de CPL par rapport à celui de l'ensemble du marché (appelé « risque bêta » de CPL). La méthode de la prime de risque permet de mesurer le rendement actuel des obligations du gouvernement du Canada, majoré d'une prime au titre du risque supplémentaire des actions ordinaires par rapport aux obligations du gouvernement du Canada.

La décision de 1985 prévoyait que la détermination du taux du coût du capital annuel serait effectuée grâce à un jugement éclairé faisant suite à l'évaluation des résultats de chacune des trois méthodes susmentionnées.

Par la suite, le climat économique a évolué et les intéressés se sont dits préoccupés par la question de savoir quelle est la meilleure méthode à utiliser et quels sont les fondements de ces trois méthodes.

Les questions suivantes ont été posées :

  • L'Office devrait-il avoir recours à un mélange de diverses méthodes comme la méthode VAN, le MEAF et la méthode de la prime de risque?
  • Le taux de rendement hors risque utilisé par le MEAF devrait-il avoir tôt ou tard une provenance déterminée (c.-à-d. Éconoscope, Consensus Forecasts)?
  • La prime de risque devrait-elle être révisée? Dans l'affirmative, quelles cotes d'obligation (p. ex. les bons du Trésor, les obligations du gouvernement du Canada) devraient être utilisées? Quelle devrait être la durée de ces obligations (p. ex. 10 ans, 30 ans)?

CONSTATATIONS DE L'OFFICE

Après avoir examiné la position de CPR, du CN, des Provinces et Coopératives, l'Office est d'avis qu'il faut continuer à utiliser les trois méthodes axées sur le marché (c.-à-d. la méthode VAN, le MEAF et la méthode de la prime de risque) pour estimer le coût des actions ordinaires de CPL. Comme dans le cas de la décision de 1985, le résultat des trois méthodes sera évalué chaque année et l'on retiendra le modèle ou la combinaison de modèles qui convient le mieux. L'Office constate que le jugement joue dans l'estimation des résultats des modèles. Pour ce qui est des données que nécessitent ces modèles, il faut attacher le plus d'importance aux données et aux études canadiennes.

L'Office a examiné séparément chacun des éléments suivants propres au MEAF.

a) Taux hors risque

L'Office est d'avis qu'en appliquant le MEAF, le recours à des obligations du gouvernement du Canada à court terme (de 1 à 3 ans) et à long terme (10 ans et plus) pour remplacer des titres à taux hors risque est approprié.

Pour les besoins des applications fondées sur les données prévisionnelles, on a envisagé diverses sources de taux hors risque. La disponibilité des données est un facteur dont il faut tenir compte pour sélectionner les taux les plus précis et les plus raisonnables à utiliser pour calculer le coût des actions pour les besoins du barème. Pour le barème, l'Office juge que les taux à court et à long termes doivent s'appuyer sur la cote des obligations du gouvernement du Canada publiée dans le Globe and Mail au mois de janvier. En outre, l'Office surveillera la cote des obligations au cours de la période d'établissement du barème afin d'évaluer la vraisemblance de la cote des obligations du mois de janvier. Pour calculer les prix d'interconnexion, l'Office procédera de la même façon et aura recours aux mêmes sources d'information pour le mois de mai.

b) Prime de risque du marché

Dans le cas de la prime de risque du marché, une durée uniforme, fondée sur celle qui se rapporte à une obligation à taux hors risque, doit être utilisée pour calculer la prime de risque d'un portefeuille du marché. Pour réagir aux changements dans les conditions du marché, l'Office évaluera en permanence la prime de risque du marché, pour déterminer l'apport à fournir au MEAF.

c) Bêta

En ce qui a trait au coefficient bêta du MEAF qui indique le risque systématique, l'Office continuera d'évaluer le coefficient bêta antérieur de CPL, rajusté en fonction de sa tendance à long terme de converger vers l'unité.

3. Risque financier de CPR

Dans la décision de 1985, il a été décidé que pour établir une distinction entre le taux du coût des actions ordinaires de CPR et celui de CPL, il fallait effectuer, entre autres, un rajustement pour tenir compte de toutes différences entre les deux sociétés en matière de risques financiers. Le Comité a décidé qu'un rajustement à la baisse d'un point de pourcentage du coût des actions ordinaires de CPL, pour obtenir le coût des actions ordinaires de CPR, aurait été approprié en guise de rajustement du risque financier pour 1982. Dans la décision en question, il reconnaissait que la structure du capital de CPR contenait une dette inférieure à celle de la structure du capital de CPL, dont les actions sont cotées en bourse, de sorte que le risque financier de CPR était moindre que celui de CPL.

Depuis la décision de 1985, la conjoncture économique a changé, tout comme le statut de CPR par rapport à celui de CPL.

La question suivante a été posée :

  • Le rajustement est-il encore approprié?

CONSTATATIONS DE L'OFFICE

Après étude de la position de CPR, du CN et des Provinces et Coopératives, l'Office estime que CPR a le même niveau de risque financier que CPL puisque les structure du capital des deux sociétés sont essentiellement les mêmes à l'heure actuelle. Cependant, l'Office continuera de surveiller la position financière de CPR sur une base annuelle. Si la structure du capital de CPL et celle de CPR restent semblables, il ne devrait pas y avoir de rajustement. Si ces deux structures diffèrent sensiblement, l'Office envisagera de rajuster le taux du coût des actions ordinaires de CPL pour tenir compte de cette différence.

4. Risque commercial du CN

Dans la décision de 1985, le Comité a signalé qu'il était souhaitable de faire en sorte que le CN ait sa propre structure du capital et ses propres taux relatifs aux divers composants de cette dernière. Le calcul du coût des actions ordinaires de la compagnie a été compliqué par le fait qu'elle était une société d'État, de sorte que les méthodes utilisées pour calculer le coût des actions ordinaires de CPR lui étaient inapplicables. En ce qui a trait au risque commercial, le Comité a fait remarquer que les opérations du CN étaient à peu près semblables à celles de CPR, et que tant le CN que CPR étaient très diversifiés en ce sens qu'ils avantageaient tous les secteurs de l'économie canadienne. Il a donc décidé que le risque commercial relatif au CN était le même que celui qui avait trait à CPR.

Depuis la décision de 1985, la conjoncture a évolué, tout comme le statut du CN.

La question suivante a été posée :

  • Le rajustement est-il encore nécessaire?

CONSTATATIONS DE L'OFFICE

Jusqu'à ce que les données soient suffisantes pour permettre de calculer le coût des actions ordinaires du CN, l'Office estime que les circonstances entourant le risque commercial du CN sont toujours semblables à celles de CPR. Par conséquent, le coefficient de rajustement de risque utilisé pour CPR devrait s'appliquer au CN.

5. Risque financier du CN

Dans la décision de 1985, le Comité déclarait que le risque financier du CN était différent de celui de CPR pour deux raisons principales :

  • La structure du capital du CN comportait un ratio d'endettement beaucoup plus élevé que celui de CPR, ce qui entraînait en théorie un risque financier supérieur.
  • Le CN était une société d'État, de sorte qu'il risquait beaucoup moins d'être mis en faillite qu'une société privée, ce qui lui valait un plus faible risque théorique de devoir engager toutes les dépenses occasionnées par une faillite.

De l'avis du Comité, le risque financier moindre du CN, à cause de l'improbabilité d'une faillite et de l'accès garanti aux marchés financiers, faisait contrepoids au risque financier accru découlant du ratio d'endettement supérieur de cette entreprise. Le Comité a donc jugé que le CN avait le même niveau de risque financier que CPR.

Depuis la décision de 1985, la conjoncture a évolué, tout comme le statut du CN en tant que société d'État.

La question suivante a été posée :

  • Le rajustement est-il encore approprié?

CONSTATATIONS DE L'OFFICE

L'Office constate qu'en raison de la privatisation du CN, le fardeau de la dette a été réduit et, en fait, le ratio d'endettement du CN est maintenant semblable à celui de CPR.

L'Office est d'avis qu'à l'heure actuelle, si l'on se fonde sur les renseignements les plus récents, le CN a le même niveau de risque financier que CPR. Toutefois, l'Office continuera de surveiller chaque année la situation financière du CN. Advenant que la structure du capital du CN et de CPR reste la même, il ne sera pas nécessaire d'opérer un rajustement. Mais si les deux structures diffèrent sensiblement, l'Office envisagera alors de rajuster le coût des actions ordinaires du CN pour tenir compte de cette différence.

6. Allocation pour fonds de roulement

La décision de 1985 faisait référence à deux méthodes pour quantifier l'élément « liquidités fournies par les investisseurs » des fonds de roulement actuellement affectés aux opérations ferroviaires du CN et de CPR. La première était celle des avances et des retards échelonnés, et la seconde, celle du bilan. Le Comité a décidé qu'il prendrait en considération les résultats de l'une ou l'autre méthode.

En 1991, l'Office a pris la décision de réviser les besoins en fonds de roulement. L'une des mesures qu'il a adoptées était que les fonds de roulement établis feraient l'objet d'un examen quadriennal, conforme au cycle d'examen des coûts de revient prévu par la LTGO. La méthode des avances et des retards échelonnés a servi à calculer l'allocation pour fonds de roulement du CN et de CPR pour l'année de référence 1992. La période d'examen suivante aurait été 1996.

À cause de l'abrogation de la LTGO et des nombreuses études d'avances et de retards échelonnés nécessaires à l'établissement d'une nouvelle façon de calculer l'allocation pour fonds de roulement, les questions suivantes ont été posées :

  • L'Office devrait-il maintenir le processus actuel : adopter 1992 comme année de référence pour son étude et continuer à indexer annuellement l'allocation?
  • L'Office devrait-il forcer les compagnies de chemin de fer à mener des études d'avances et de retards échelonnés approfondies pour 1996 dans le cadre de l'examen quadriennal (1996 serait l'année de référence et il y aurait indexation pendant les trois années suivantes)?
  • L'Office devrait-il envisager d'autres possibilités?

CONSTATATIONS DE L'OFFICE

Par une lettre datée du 12 mars 1996, l'Office a demandé au CN et CPR de lui faire part de leurs commentaires et (ou) suggestions sur divers paramètres relatifs au calcul du fonds de roulement. Par une lettre datée du 10 avril 1996, CPR a déclaré que, depuis l'élimination de l'examen des coûts quadriennal, la nécessité de calculer le fonds de roulement pour 1996 était éminemment contestable.

L'Office a déterminé que le processus qui consiste à adopter 1992 comme année de référence pour son étude et à indexer annuellement l'allocation sera maintenu. L'Office pourra, toutefois, réévaluer cette méthode au besoin.

7. Structure du capital

La décision de 1985 portait sur l'établissement de la structure du capital ferroviaire appropriée, y compris le ratio d'endettement utilisé pour déterminer le taux du coût du capital.

À cause de cette restructuration par le CN et par CPR, il y aura peut-être un impact sur des éléments de leurs structures du capital respectives. Les questions suivantes ont été posées :

  • L'Office devrait-il continuer à utiliser la structure financière de la société mère (c.-à-d. CPL), en lui apportant des rajustements pour tenir compte de l'élément ferroviaire de cette dernière au moyen de la méthode des flux de l'encaisse?
  • L'Office devrait-il envisager d'autres options (c.-à-d. que dans le cas du CN, les opérations ferroviaires représentent environ 90 p. 100 de ses activités)? La structure du capital de cette compagnie, dont fait état le rapport annuel pour les actionnaires, est-elle une solution de rechange à la méthode des flux de l'encaisse?

CONSTATATIONS DE L'OFFICE

Après étude de la position de CPR, du CN et des provinces et coopératives, l'Office estime que, dans le cas de CPR, la méthode utilisée pendant les années précédentes (c.-à-d. celle qui est fondée sur les flux de l'encaisse) devrait être maintenue pour calculer la structure du capital de CPR.

Pour ce qui est du CN, pendant les années antérieures à 1992, sa proportion de la dette à long terme a été déterminée en attribuant la totalité de la dette à long terme de la compagnie aux activités ferroviaires, à l'exclusion de la proportion clairement identifiée comme non ferroviaire. En 1995, les activités du CN ont représenté plus de 90 p. 100 de celles de l'ensemble de la compagnie. L'Office estime qu'aux fins du coût du capital, le fait de se fonder sur la dette à long terme de l'ensemble du CN, réduite en fonction des activités non ferroviaires identifiables, était un bon moyen de déterminer la dette à long terme du CN.

8. Prix d'interconnexion

Selon la décision de 1985, on allait établir un taux du coût du capital pour le transport de l'huile et de la farine de colza canola, en vertu du décret C.P. 1976-894. Ce décret du conseil a été abrogé en 1995. Comme le taux en question a servi également à calculer les prix d'interconnexion, il faut maintenant établir une méthode pour déterminer à cette fin le coût du capital. En 1997, le prix d'interconnexion a été calculé au moyen du barème de 1996-1997 pour le transport du grain, certains rajustements étant apportés aux divers éléments du taux du coût des actions ordinaires.

Les questions suivantes ont été posées :

  • Pour calculer le taux du coût du capital aux fins des prix d'interconnexion de 1998 et des années subséquentes, les compagnies de chemin de fer devraient-ils agir séparément? ou
  • L'Office devrait-il continuer à se fonder sur un taux du coût du capital existant, comme le barème, et apporter les rajustements appropriés aux éléments du taux du coût des actions ordinaires, comme il l'a fait pour calculer le prix d'interconnexion de 1997?

CONSTATATIONS DE L'OFFICE

Grâce à ce processus d'examen, les participants ont accepté de se servir, pour ce qui est du taux du coût du capital aux fins des prix d'interconnexion, du taux du coût du capital déterminé pour le barème en apportant les rajustements appropriés à l'élément du taux du coût des actions ordinaires. Ces rajustements comportent i) l'utilisation des taux hors risque appropriés lorsque le MEAF ou la méthode de la prime de risque sont utilisés dans la détermination du taux du coût des actions ordinaires de CPL; et ii) l'exclusion de tout rajustement pour risque afférent au transport du grain. Par conséquent, l'Office a déterminé que cette méthode sera utilisée pour établir les prix d'interconnexion à l'avenir.

9. Allocation pour impôt sur le revenu

Dans sa décision relative à l'impôt sur le revenu datée du 17 août 1979 , le Comité a déclaré que pour le calcul du coût du capital aux fins de la subvention, il allait être nécessaire de prendre en considération la question de savoir si une compagnie de chemin de fer donnée payait ou reportait ses impôts sur le revenu. Dans le passé, pour déterminer les taux du coût du capital aux fins du transport du grain de l'Ouest et de l'établissement de prix d'interconnexion, une allocation pour impôt sur le revenu a été prise en compte.

La question suivante a été posée :

  • Faudrait-il tenir compte d'une allocation pour impôt sur le revenu dans le calcul du barème et des prix d'interconnexion?

CONSTATATIONS DE L'OFFICE

L'Office estime qu'il n'y a pas eu de faits nouveaux ou une évolution des circonstances en ce qui a trait à l'allocation pour impôt sur le revenu. Il estime donc qu'il faudrait tenir compte d'une allocation pour impôt sur le revenu pour calculer les taux du coût du capital aux fins du transport du grain de l'Ouest, les prix d'interconnexion et d'autres taux qu'il y a lieu d'établir dans d'autres secteurs.

II QUESTIONS ABORDÉES DANS LE CADRE DE L'AUDIENCE CONSULTATIVE

L'audience consultative a porté sur trois questions bien précises : i) le risque commercial de CPR; ii) le rajustement pour risque afférent au transport du grain et iii) la question des éléments d'actif. Sous réserve des exceptions ci-après, tous les participants qui ont pris part à l'audience consultative ont fourni des témoignages oraux ou écrits, ou les deux, et des conclusions finales sur les trois questions. Le CN n'a pas abordé la question du risque commercial de CPR tandis que les provinces et coopératives n'ont pas abordé la question des éléments d'actif.

QUESTIONS ET ANALYSE ET DÉCISION DE L'OFFICE

1. Risque commercial de CPR

Dans la décision de 1985, il a été décidé que pour calculer le coût des actions ordinaires de CPR, on se baserait sur le coût correspondant de CPL et qu'on procéderait à des rajustements pour tenir compte des différences dans les risques commerciaux entre les deux entités. Le Comité a décidé qu'un rajustement à la baisse d'un demi-point de pourcentage du coût des actions ordinaires de CPL était approprié. Il a fait remarquer que CPR était au service de presque tous les secteurs de l'économie canadienne, de sorte que ses activités commerciales doivent être encore plus corrélées à la performance de l'ensemble de l'économie que celles de CPL.

Depuis la décision de 1985, la conjoncture économique a changé, tout comme le statut de CPR par rapport à l'ensemble de CPL. Compte tenu de ces changements, on a demandé aux participants si le rajustement traditionnel s'imposait toujours.

Position de CPR

CPR est d'avis que le rajustement d'un demi-point de pourcentage pour tenir compte de son risque commercial par rapport à celui de l'ensemble de CPL n'est plus justifié.

La position de CPR a été présentée au moyen de déclarations qualitatives et quantitatives, d'une analyse statistique du risque systématique fondée sur la méthode de l'analyse bêta et d'une analyse statistique du risque global. En outre, CPR a répondu à la position des provinces et coopératives. Finalement, CPR a fourni une mesure de la vraisemblance de ses résultats et a fait allusion à la décision de 1985.

Selon CPR, son trafic est lourdement tributaire des marchés d'exportation et l'amalgame du trafic a davantage de rapport avec la performance des exportations du secteur primaire qu'avec l'économie dans son ensemble. CPR se heurte à une concurrence accrue qui s'explique par la libéralisation des échanges et par la plus grande importance attachée aux lois de la concurrence dans les régimes de réglementation des États-Unis et du Canada. CPR soutient également que le portefeuille de CPL a considérablement changé depuis 1985. L'effet du dessaisissement par CPL de certains éléments de son portefeuille de titres a majoré la part des activités commerciales représentée par CPR. C'est ainsi que les résultats financiers de CPL sont plus étroitement liés à ceux de CPR que ce n'était le cas en 1985. La proportion des actifs identifiables de CPL que possède CPR a considérablement augmenté entre 1985 et 1995. Et on peut en dire autant de la proportion des recettes de CPL qui revient à CPR pendant la même période.

Risque systématique

Au nom de CPR, M. Evans soutient que l'Office ne doit pas se contenter de tenir compte du risque systématique pour mesurer le risque commercial, mais de la totalité des risques (aussi bien systématiques que non systématiques). M. Evans a présenté des preuves démontrant que CPR comporte plus de risques en 1995 qu'en 1985 en ayant recours à une analyse des coefficients bêta, de la cotation des obligations et de la variabilité des recettes d'exploitation de CPR.

M. Evans s'est polarisé sur l'estimation du risque systématique tel qu'il est mesuré par le coefficient bêta : celui-ci permet de déterminer dans quelle mesure le taux de rendement d'un titre individuel ou d'un élément d'actif suit ceux de la bourse, en l'occurrence la bourse de Toronto (TSE 300). Se servant des données du marché pour CPL et pour les entités de CPL dont les actions sont cotées en bourse (c.-à-d. PanCanadian Petroleum Limited et Laidlaw Inc.) et de certaines hypothèses touchant les autres entités dont les actions ne sont pas cotées en bourse, M. Evans a calculé un coefficient bêta pour CPR. Il a démontré que son analyse indique que CPR comporte plus de risques que le CPL étant donné que le coefficient bêta est égal à 1,5 alors que celui du CPL est égal à 1,3. Si M. Evans a utilisé ce coefficient, c'est que le coefficient bêta utilisé dans le MEAF tient fréquemment lieu de mesure du risque relatif et non pas strictement du risque systématique.

M. Evans a utilisé la cotation des obligations pour mesurer les risques relatifs de CPL et CPR. Les obligations de CPR sont maintenant cotées ce qui n'était pas le cas en 1985. Les cotes pour le CPL sont plus favorables que celles de CPR. Par conséquent, M. Evans a conclu que l'analyse de la cote des obligations étaye sa déclaration selon laquelle CPR comporte plus de risques que le CPL. M. Evans a également montré que les cotes d'obligations pour PanCanadian Petroleum sont plus favorables que celles de CPL et CPR. Cela permet de conclure que les cotes d'obligations pour les autres investissements de CPL seraient inférieures à la cote de CPL. Comme CPR englobe la majeure partie des avoirs autres que PanCanadian Petroleum de CPL, on considère que CPR a une cote d'obligation inférieure à celle de CPL. C'est pourquoi CPR comporte relativement plus de risques que CPL.

M. Evans s'est livré à une analyse du coefficient de variation des taux de rendement des recettes d'exploitation sur les actifs globaux pour démontrer que CPR comporte plus de risques que le CPL. Selon M. Evans, les résultats indiquent que plus le taux de rendement des recettes d'exploitation est dispersé et moins il est stable, plus le coefficient de variation est élevé et par conséquent plus le risque commercial est grand. En l'occurrence, M. Evans a démontré que le coefficient de variation des recettes d'exploitation de CPR était plus élevé que celui des recettes d'exploitation d'autres divisions de CPL.

En réponse à la suggestion des provinces et coopératives, fondée sur le modèle de M. Patterson1 , voulant que l'Office calcule le coefficient bêta de base de CPR, M. Evans a fourni ses commentaires sur la vraisemblance de ce modèle. Comme le modèle de M. Patterson a été évalué à partir des données portant sur la période 1969-1987, pour pouvoir se fier à ce modèle, l'Office devait recueillir des données sur CPR pour la période 1969-1987 et, après avoir appliqué le modèle à ces données historiques, effectuer des rajustements en fonction des changements intervenus dans les circonstances et les risques. En bref, CPR affirme que l'utilisation du modèle de M. Patterson dans le contexte actuel soulève plus de questions qu'il ne fournit de réponses. En outre, M. Evans mentionne la propre allusion de M. Patterson quant aux limites de la formule bêta de base selon laquelle ce modèle nécessite de nombreuses données comptables, sans compter que les estimations sont sujettes à un volume important d'erreurs de prédiction statistique.

M. Evans a également tenu compte des conclusions des provinces et coopératives concernant les risques fondés sur la corrélation statistique. M. Evans déclare qu'il était inopportun de conclure que CPR est plus étroitement corrélée à la situation de l'économie que le CPL. C'est pourquoi M. Evans désapprouve la conclusion que le Comité a tiré dans la décision de 1985 à savoir que les risques commerciaux de CPR sont inférieurs aux risques commerciaux de CPL. Pour étayer son affirmation selon laquelle ces conclusions de la décision de 1985 sont inappropriées, M. Evans soutient que le coefficient bêta mesure la sensibilité du taux de rendement se rattachant aux activités commerciales au taux de rendement du marché boursier en général (en l'occurrence, le taux de rendement de l'indice boursier TSE 300). En revanche, le R-carré mesure la corrélation plutôt que la sensibilité. Il n'y a pas de rapport obligatoire entre la sensibilité du taux de rendement au marché boursier et la mesure dans laquelle les activités commerciales sous-jacentes sont ou non corrélées à l'activité économique en général.

Compte tenu de son analyse et de celle de M. Evans, CPR a déduit que l'ajustement à la baisse du risque commercial de CPR n'était pas justifié.

POSITION DES PROVINCES ET COOPÉRATIVES

Les provinces et coopératives ont fourni des preuves étayant leur assertion selon laquelle il faut maintenir la diminution d'un demi-point de pourcentage dans la différence des risques commerciaux entre le CPL et CPR.

Les provinces et coopératives soutiennent que même si les différences entre le CPL et CPR ont diminué ces dernières années, elles sont toujours appréciables. Les activités ferroviaires canadiennes de CPR restent faibles par rapport à l'ensemble des activités de CPL, comme en témoigne le fait que les recettes canadiennes de CPR en 1995 n'ont représenté qu'environ le tiers des recettes de CPL, ce qui indique qu'on ne peut pas supposer que les risques de ces deux entités sont les mêmes.

Les provinces et coopératives soutiennent que si l'Office constate qu'il y a toujours une forte corrélation entre les activités de CPR et la conjoncture économique en général, il doit alors continuer d'opérer un rajustement au titre du risque commercial. En revanche, s'il constate que ce n'est plus le cas, l'Office doit réviser le niveau de la provision pour risque commercial de CPR par rapport à CPL en ayant recours à une analyse bêta de base, comme celle que décrit M. Patterson pour estimer le coefficient bêta de CPR.

Les provinces et coopératives soutiennent que le recours au MEAF signifie que l'Office reconnaît que la principale forme de risque commercial que présente CPR est un risque systématique. Si l'Office juge que les risques non systématiques sont d'importants facteurs déterminants des espérances de rendement des investisseurs de CPL, il ne peut pas conceptuellement utiliser le MEAF.

Les provinces et coopératives doutent également de la validité du calcul du coefficient bêta de CPR selon la formule proposée par M. Evans. Selon les provinces et coopératives, le coefficient bêta de la société mère peut être perçu comme la moyenne pondérée des coefficients bêta de chacune de ses divisions. Les provinces et coopératives font observer que M. Evans a utilisé ce modèle alors que le coefficient bêta de seulement deux des sept divisions était connu et qu'il a utilisé un certain nombre d'hypothèses éminemment contestables. Selon elles, cette méthode n'est valable que lorsqu'on ignore le coefficient bêta d'une seule division.

Pour ce qui est de l'analyse de la cotation des obligations, les provinces et coopératives soutiennent qu'il n'est pas logique d'utiliser les cotations relatives au CPL et à PanCanadian Petroleum pour affirmer que CPR encourt de plus grands risques. La méthode de cotation des obligations a pour but d'évaluer les aléas relatifs des obligations d'une entreprise et non pas ses investissements en capital.

En ce qui a trait au coefficient de variation dont fait état M. Evans, les provinces et coopératives ont fait valoir que puisque le coefficient de variation consiste en un ratio ayant le rendement moyen comme dénominateur, il ne constitue pas, par définition, une mesure de risque statique. Il confond risque et rendement et, par conséquent, ne peut servir à évaluer les risques aux fins d'établir le coût des actions ordinaires.

Les provinces et coopératives ont de plus fait valoir que l'écart normal des bénéfices d'exploitation — et par conséquent du coefficient de variation des bénéfices d'exploitation — tente d'évaluer l'ensemble des risques liés à l'exploitation et non pas les risques systématiques. Conséquemment, les provinces et coopératives ont conclu que le recours à cette analyse est incompatible lorsqu'on a recours au MEAF pour en arriver au taux du coût des actions ordinaires de CPR.

ANALYSE ET DÉCISION DE L'OFFICE

Analyse de l'Office

L'Office constate qu'avec le temps qui s'est écoulé depuis 1985, le portefeuille de valeurs de CPL a changé et que beaucoup des éléments qui auraient pu contribuer à la diversification du risque en 1985 sont absents du portefeuille en 1996. De même, l'importance de CPR dans le portefeuille de CPL a pris tellement d'ampleur que si, en 1995 l'on devait considérer CPR et PanCanadian Petroleum ensemble, ces deux entités représenteraient environ les trois quarts de la valeur des bénéfices de ce portefeuille, et CPR à lui seul représente environ 50 p. 100 de la valeur des bénéfices et environ 40 p. 100 de la valeur des actifs de CPL. Il s'agit là d'un changement de taille dans les circonstances qui régissent le rapport entre le CPL et CPR depuis 1985.

L'Office a examiné les arguments présentés par M. Evans dans son analyse des aléas relatifs de CPL et de CPR. L'Office sait bien que ses calculs du coefficient bêta résiduel de CPR (à environ 1,5) reposent sur des hypothèses excessives et que ses efforts sont allés au-delà de l'utilisation normale de ce type de modèle. Il n'en reste pas moins que l'Office est persuadé selon les règles de la logique que le coefficient bêta de CPR doit être supérieur à celui de CPL, même si la différence exacte ne peut pas être calculée comme il le suggère. L'Office accepte également l'idée que les aléas relatifs d'entités commerciales se reflètent dans une certaine mesure dans le rendement de leurs obligations, même s'il y a quantité d'autres facteurs qui dictent les rendements de chaque entité à un moment donné. Enfin, l'analyse qui révèle que les bénéfices de CPR sont plus instables que ceux de CPL, comme en témoigne le coefficient de variation des bénéfices de chaque société, est également indicative des plus grands aléas de CPR. En conclusion, chacune des mesures proposées par M. Evans étaye la position voulant que, depuis 1985, CPR comporte au moins autant de risques que le CPL, et que cela s'explique par l'évolution des circonstances depuis cette époque.

L'Office a étudié à la recommandation des Provinces et Coopératives voulant que l'Office évalue le risque commercial de CPR au moyen d'une formule bêta de base au lieu de s'en remettre au modèle MEAF pour calculer le coût des actions ordinaires. M. Evans critique la formule bêta de base telle que l'a décrite M. Patterson. Les provinces et coopératives font allusion à l'utilisation de ce modèle dans l'affaire de Teleglobe2 Canada Inc. qui a été exposé en détail dans la décision du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (ci-après CRTC). L'Office a étudié la décision et note que M. Patterson a commencé par estimer le rapport entre les niveaux observés de risque systématique et les variables comptables qui semblent déterminer ce risque, en utilisant les données de 61 entreprises. Il a appliqué ce rapport aux variables comptables correspondantes de Teleglobe Canada Inc. pour déterminer ce que serait son coefficient bêta si ses actions étaient cotées en bourse. Le CRTC en a déduit que le fait que M. Patterson n'ait pas tenu compte de la tendance de son modèle à surestimer les coefficients bêta des entreprises à l'extrémité de son échantillon présentant le moins de risques s'est traduit par une surestimation du coefficient bêta de Teleglobe Canada Inc. Pour les besoins de cette méthode, l'Office juge que le calcul du coefficient bêta de base présente des difficultés en raison des hypothèses à formuler. De plus, l'Office convient avec M. Evans que le modèle a des limites car il nécessite de nombreuses données comptables, sans compter que les estimations sont sujettes à un nombre important d'erreurs de prédictions statistiques. Par conséquent, l'Office estime que ce modèle n'est pas pratique et que son utilisation est limitée. C'est pourquoi l'Office a décidé de ne pas retenir cette formule.

L'Office a étudié la déclaration des provinces et coopératives selon laquelle si l'Office continue de s'en remettre au seul modèle MEAF, cela implique que seul le risque systématique doit être évalué. La distinction entre risque systématique et non systématique est une caractéristique propre au MEAF qui n'est pas prévue par la méthode VAN ou la méthode de la prime de risque. Ces méthodes tiennent compte du risque global qu'encourent les investisseurs en décidant de leurs placements. L'Office également reconnaît qu'il faut examiner l'ensemble des risques. Tel qu'on l'indique dans le rapport du personnel et ailleurs dans la présente décision, l'Office évaluait auparavant les résultats obtenus des trois modèles axés sur le marché, à savoir la méthode VAN, le MEAF et la méthode de la prime de risque, et faisait appel au plus approprié ou à une combinaison de ceux-ci afin de fournir à l'Office le taux du coût des actions ordinaires de CPL. Ce taux était rajusté en fonction du risque commercial de CPR, s'il y avait lieu. Ainsi, en ayant recours à différentes techniques d'établissement des taux du coût des actions ordinaires, les taux du coût des actions ordinaires n'étaient pas établis en se basant uniquement sur le fait que les risques étaient ou non systématiques.

Tel qu'on l'indique ci-dessus, au sujet des modèles axés sur le marché, l'Office continuera d'évaluer chaque année les résultats obtenus des trois modèles et accordera plus d'importance au modèle le plus approprié ou à une combinaison des modèles. De cette façon, l'Office établit un taux du coût des actions ordinaires en se fondant sur les résultats des diverses techniques d'évaluation et en s'appuyant sur son jugement éclairé.

Décision de l'Office

Pour les raisons susmentionnées, l'Office est d'avis que les analyses statistiques présentées par chacun des participants ont beau être instructives, elles ne donnent pas de résultats concluants à proprement parler. L'Office a décidé que, pour la détermination du taux du coût du capital qui servira à l'établissement des coûts liés aux activités ferroviaires de 1997 qui seront exercées après l'émission de la présente décision et à la prochaine campagne agricole (1997-1998), le rajustement au titre du risque commercial du taux du coût des actions ordinaires de CPL pour qu'il atteigne le taux du coût des actions ordinaires de CPR sera égal à zéro. L'Office continuera de surveiller la situation et il déterminera chaque année le rajustement nécessaire selon son jugement éclairé.

2. Rajustement pour risque afférent au transport du grain

Selon l'alinéa 38(2)b) de la LTGO, le coût du capital à utiliser conformément aux dispositions de cette loi devait être rajusté pour tenir compte de tout risque différentiel dans le transport du grain en question. Au cours de l'audience qui a mené à la décision de 1985, l'Office a examiné trois façons de déterminer si le trafic céréalier avait, en matière de risque, des caractéristiques différentes de celles d'autre trafic marchandises, et, dans l'affirmative, si un rajustement du coût applicable des actions ordinaires était justifiable. Ces trois méthodes étaient les suivantes :

  • Déterminer empiriquement si le trafic céréalier avait jusque là été plus risqué ou moins risqué que l'ensemble du trafic marchandises.
  • Comparer les risques occasionnés par le trafic céréalier aux risques engendrés par les services publics réglementés.
  • Comparer directement le trafic céréalier à d'autres genres de trafic marchandises précis.

Selon la décision de 1985, le Comité a constaté que pour l'application de la LTGO, le trafic céréalier était moins risqué que le trafic marchandises en général. Il a déterminé que cette différence de risque aboutissait à un coût des actions ordinaires qui, en vertu de la loi en question, était inférieur d'un point de pourcentage au taux du coût des actions ordinaires déterminé pour l'ensemble des opérations de CPR.

À cause de l'abrogation de la LTGO, de l'évolution de la conjoncture et des préoccupations exprimées par les intéressés au sujet de la sensibilité relative du trafic céréalier au cycle économique par rapport à celle du trafic marchandises en général, on a demandé aux participants d'aborder les questions suivantes afin d'aider l'Office dans son étude :

  • Le risque du transport du grain devrait-il être différent de celui du transport d'autres produits de base?
  • Comment les caractéristiques du transport du grain sont-elles différentes de celles du transport d'autres produits de base?
  • Quelles sont les répercussions de l'abrogation de la LTGO sur le transport du grain?

Position de CPR

CPR indique que chaque produit de base qu'il achemine a ses propres caractéristiques en matière de transport, et que les possibilités de transport varient énormément d'un produit à un autre. Il est impossible de considérer les produits autres que céréaliers comme faisant partie d'une catégorie relativement homogène, et d'inférer les différences dans les caractéristiques de transport selon qu'il s'agit de transport du grain et de transport d'autres marchandises.

Selon CPR, l'abrogation de la LTGO a trois grandes conséquences pour les compagnies de chemin de fer :

  • La cessation du versement de la subvention fédérale signifie que les expéditeurs paient la totalité du taux de transport de marchandises prescrit. Elle a éliminé les disparités artificielles qui encourageaient la production de grain en vrac destiné à l'exportation outre-mer, et elle a créé une plus forte incitation à accroître la consommation intérieure de grain grâce à des activités à valeur ajoutée et à des récoltes de plus grande valeur. Elle a augmenté les choix qui s'offrent aux producteurs en matière de cultures à mener à bien et de marchés à approvisionner. L'abrogation de la LTGO modifiera les systèmes de culture, augmentera dans les Prairies la transformation à valeur ajoutée, et modifiera l'orientation des transports (exportations accrues vers les États-Unis, et exportations accrues par d'autres modes de transport que le chemin de fer). Ces changements auront pour effet d'accroître le risque relatif aux volumes de trafic prévus en raison de la grande variabilité des volumes par rapport au volume total.
  • Le paiement de la totalité du taux par l'expéditeur a accru la concurrence modale (tant intramodale qu'intermodale) à laquelle CPR est confrontée au chapitre du transport du grain. Les choix concurrentiels qui s'offrent aux expéditeurs sont devenus plus nombreux, ce qui augmente le risque pour CPR des investissements dans des biens céréaliers.
  • La seule différence entre la réglementation du transport du grain dans l'Ouest canadien et celle qui vise l'acheminement de tous les autres produits de base est l'existence d'un barème dans le cas du transport du grain.

CPR fait valoir qu'étant donné que les caractéristiques de la demande de transport sont différentes d'un produit à un autre, les variations dans les courants de transport ne sont pas en corrélation les unes avec les autres, ni avec l'économie en général. Par conséquent, l'adjonction du transport du grain à l'éventail du trafic de CPR modifie la variabilité de l'ensemble du trafic à peu près dans la même mesure que celle qui serait constatée dans le cas d'autres produits. Rien ne prouve que la corrélation entre les changements dans les quantités de grain transportées et les changements dans les quantités d'autres produits acheminées est différente de la corrélation entre les changements dans les quantités de produits non céréaliers transportées.

CPR a fourni des preuves concrètes montrant que les caractéristiques afférentes au transport du grain sont essentiellement les mêmes que celles d'autres produits de base. Elles ont montré que :

  • la variabilité moindre de l'ensemble du trafic par suite de l'augmentation du transport du grain a été relativement faible;
  • le transport accru des autres produits de base (à l'exception des produits automobiles et des conteneurs pour l'import-export) a contribué davantage à réduire la variabilité du trafic ferroviaire que le transport du grain;
  • la relation moyenne entre les changements dans les quantités de grain transportées et les changements dans les quantités d'autres produits acheminées n'est pas très différente de la relation moyenne entre les changements dans les quantités de produits autres que céréaliers transportées;
  • le grain ne se distingue pas par des caractéristiques qui donnent à penser qu'il est moins « risqué » que d'autres produits.

Par suite des éléments de preuve recueillis, CPR est d'avis que rien ne justifie une réduction du coût de ses actions ordinaires sous prétexte que le transport du grain comporte un risque inférieur à celui du transport d'autres marchandises.

CPR fait allusion au risque législatif/réglementaire comme étant un secteur de risque qui se rattache au transport du grain et qui le rend matériellement plus aléatoire que le transport d'autres produits. Un élément important de ce risque tient à l'incertitude qui entoure l'aboutissement de l'examen prévu en 1999 de la section VI de la LTC et à l'incertitude de savoir si les taux s'appliquant au transport du grain continueront d'être réglementés. Cette incertitude constitue un facteur de risque propre au transport du grain. En vertu de cette incertitude, on peut dire qu'il y a un risque appréciable et exceptionnel qui se rattache aux investissements dans les actifs ayant trait au grain.

Position du CN

Selon le CN, l'abrogation de la LTGO a eu les répercussions suivantes sur les compagnies de chemin de fer :

  • Les expéditeurs de grain de l'Ouest destiné à l'exportation doivent désormais assumer l'intégralité des coûts de transport par chemin de fer. Cette loi et d'autres programmes d'aide gouvernementaux isolaient les agriculteurs des réalités économiques de la production céréalière, des décisions de marketing et de transport.
  • Cette mesure a donné lieu à une nouvelle dynamique de la concurrence dans l'économie du grain de l'Ouest et a introduit de nouveaux éléments de risque dans le volume et les taux du transport du grain de l'Ouest pour chaque compagnie de chemin de fer.
  • Cette mesure permet aux expéditeurs d'avoir accès à la concurrence et aux mécanismes de règlement des conflits de la LTC, tout en plafonnant les taux ferroviaires.

Le CN juge que la demande relative au transport du grain diffère de celle de la plupart des autres produits sous un rapport important. Pour la plupart des autres produits, l'incertitude qui entoure la demande globale de transport (par tous les modes) provient essentiellement de l'instabilité de la demande du produit à transporter sur le marché. Dans le cas du grain toutefois, le temps est un facteur d'instabilité qui s'applique aux deux extrémités de la chaîne de production-consommation. Les conditions météorologiques au Canada ont une incidence sur la production de grain canadien alors que les conditions météorologiques dans les pays exportateurs et importateurs rivaux affecte la situation globale de l'offre et de la demande.

Le CN déclare par ailleurs qu'avant de décider d'opérer un rajustement au titre du risque afférent au transport du grain, l'Office doit tenir compte de l'instabilité d'un actif considéré isolément et de sa corrélation avec d'autres actifs d'un portefeuille bien diversifié (mais pas forcément le marché). Le CN affirme que la décision de 1985 implique que le dernier l'emporte sur le premier par une marge suffisante pour justifier un rajustement à la baisse et reconnaît que la décision de 1985 était peut-être justifiée en vertu du régime de la LTGO. Toutefois, le CN estime que les conditions ont depuis lors tellement changé que l'instabilité du transport du grain l'emporte aujourd'hui sur les avantages qui résultent de sa soi-disant indépendance par rapport au cycle commercial.

Le CN en déduit qu'un examen attentif du marché actuel et futur du transport du grain démontrera que les risques sont au moins aussi élevés que ceux des autres produits transportés par les compagnies de chemin de fer.

Position des provinces et coopératives

En ce qui a trait à la première question, les provinces et coopératives ont eu recours à une simple analyse de régression pour déterminer la relation entre les changements annuels dans le nombre de tonnes transportées en vertu de la LTGO et les changements annuels dans le PIB réel. Les résultats ont montré que ces changements annuels ne sont pas vraiment mis en corrélation. Les provinces et coopératives concluent qu'à la lumière du coefficient bêta de base, le coefficient bêta des quantités de grain transportées par chemin de fer est zéro. Les fluctuations actuelles de ces quantités ne peuvent être mises en corrélation avec l'activité économique globale, de sorte qu'elles ne constituent aucun risque systématique pour CPR ou le CPL. Le risque bêta fondamental relatif au grain est zéro.

Les provinces et coopératives laissent entendre que si le risque systématique en matière de transport ferroviaire du grain est zéro, et si le MEAF est une méthode valable d'estimation du coût des actions ordinaires des compagnies de chemin de fer, il faut conclure que le taux hors risque est le taux approprié du coût des actions ordinaires dans le cas du grain, mesuré par le MEAF.

Cependant, si l'Office conclut que le taux approprié du coût des actions ordinaires est supérieur au taux hors risque à cause de risques non systématiques, l'Office doit conclure, selon les provinces et coopératives, que le MEAF n'est pas une méthode valable. Par conséquent, on ne peut pas toujours utiliser celui-ci lors du processus servant à établir le coût des actions ordinaires relatif au transport du grain. Il faut alors avoir recours à d'autres méthodes pour calculer le taux du coût des actions ordinaires.

Si l'Office arrive à la conclusion que le risque commercial de CPR dans son ensemble est à peu près le même que celui que présente l'économie dans son ensemble, la différence entre le transport du grain et celui d'autres produits de base est celle qui existe entre un coefficient bêta de un pour le CPR, ce qui est équivalent pour l'économie dans son ensemble, et un coefficient bêta de zéro, qui s'applique au transport du grain. S'il décidait que les risques que court CPR dans son ensemble sont inférieurs à ceux de l'ensemble de l'économie, la différence de risque relative au transport du grain serait réduite, mais elle serait compensée entièrement par une différence croissante en matière de risque commercial de CPR relativement au CPL. Le risque afférent au transport du grain resterait le même.

Pour ce qui est de la différence entre les caractéristiques du transport du grain et celles du transport d'autres produits, les provinces et coopératives font valoir que les quantités de grain transportées ne sont pas particulièrement sensibles aux taux de transport de marchandises en vigueur. Comme l'industrie est réglementée, les compagnies de chemin de fer peuvent demander la totalité des taux de transport du grain autorisés, sans diminution substantielle du trafic. Dans le cas d'autres produits, surtout ceux qui sont tirés des ressources naturelles, le trafic risque de baisser considérablement lorsque leurs prix diminuent. Dans une telle situation, les compagnies de chemin de fer sont forcées de réduire leurs prix pour continuer à transporter du grain.

L'abrogation de la LTGO a mis fin à la subvention fédérale pour le transport du grain de l'Ouest, de sorte que les producteurs paient maintenant le plein tarif, soit environ le double de celui qu'ils payaient auparavant. Les provinces et coopératives soutiennent qu'il y a concurrence d'autres modes de transport, diversification de l'économie agricole de l'Ouest et diminution des exportations de grain. Toutefois, selon les provinces et coopératives, il semblerait que la concurrence du camionnage ne risque pas d'augmenter beaucoup, à cause des très longs trajets qu'exige le transport du grain de l'Ouest. De plus, au point de vue économique, l'acheminement du grain d'exportation aux ports américains n'en fait pas une option concurrentielle. L'abrogation de la LTGO n'a pas entraîné, dans l'Ouest canadien, de réduction de la superficie totale où les six plantes principales sont cultivées et récoltées. En outre, il n'est pas du tout certain que dans les Prairies, la transformation supplémentaire à valeur ajoutée ait pour conséquence de réduire le trafic ferroviaire, vu que les quantités sont fréquemment des produits d'exportation acheminés par chemin de fer vers leur point de destination, comme c'est le cas pour le colza canola.

Les Provinces mentionnent que rien n'indique que n'importe lequel des risques découlant de l'abrogation de la LTGO serait systématique puisqu'ils ne sont pas en corrélation avec l'économie. Par conséquent, ils n'ont rien à voir avec l'estimation du taux du coût des actions ordinaires relative au transport du grain selon le MEAF.

ANALYSE ET DÉCISION DE L'OFFICE

Analyse de l'Office

CPR et les provinces et coopératives ont donné des interprétations de la variabilité relative du transport du grain par rapport au transport d'autres produits. L'hypothèse inhérente à cette preuve est qu'un trafic plus stable et moins volatil présente moins de risques. L'Office note les preuves présentées par CPR selon lesquelles tout autre produit en vrac et tout autre produit, à l'exception des véhicules automobiles et des conteneurs destinés à l'importation/exportation, contribue plus à réduire la variabilité du trafic total que le grain. C'est pourquoi l'ajout du trafic du grain à l'ensemble de l'amalgame de trafic de CPR contribue très peu à réduire cette variabilité en comparaison avec d'autre trafic et, par voie de conséquence, les aléas de l'amalgame de trafic.

L'Office note également que les volumes expédiés peuvent être différents d'une année à l'autre. La qualité peut également être différente d'une année à l'autre selon, entre autres, les conditions météorologiques. Cela à son tour crée une certaine instabilité dans les recettes et les rendements générés par le transport du grain par chemin de fer. L'Office est d'avis que les volumes de grain ont effectivement varié et continueront de varier dans des proportions significatives selon les conditions météorologiques qu'il fait au Canada durant les saisons de croissance et d'expédition, et également selon les conditions climatiques, la conjoncture économique, le commerce extérieur et la situation politique dans d'autres parties du monde qui produisent et qui consomment du grain.

Selon l'Office, la variabilité des recettes et des rendements, ainsi que de l'intensité d'utilisation des actifs que les compagnies de chemin de fer affectent au transport du grain, crée un certain élément de risque qui n'est pas sans rappeler le caractère aléatoire d'autres produits. L'Office accepte la thèse selon laquelle le grain est sujet à un risque supplémentaire. Toutefois, les taux de transport du grain ne peuvent dépasser le maximum réglementaire fixé par la LTC. C'est ainsi qu'il y a un risque de perte se rattachant au transport du grain et non pas à celui d'autres produits. Les compagnies de chemin de fer peuvent réduire leurs taux, comme dans la négociation des taux d'incitation, pour favoriser la rentabilité des expéditeurs, mais rien ne les autorise à augmenter leur taux au-dessus du plafond actuel pour contrebalancer, par exemple, leurs opérations sur des voies de chemin de fer en acier léger et à destination de points de livraison éloignés avec de faibles volumes à transporter.

Cette situation est fondamentalement différente de celle qui s'applique à d'autres produits où le produit suit un cycle régulier assujetti à un contrat assorti d'engagements fermes à en assurer le transport. Le charbon est un bon exemple.

L'Office en déduit que l'abrogation de la LTGO en 1995 s'est accompagnée d'un certain nombre de changements annexes dans la façon de cultiver, de manutentionner et de transporter les grains. Les producteurs de grain sont aujourd'hui tenus de payer l'intégralité des coûts de transport du grain depuis la ferme jusqu'au silo terminus. Au préalable, le gouvernement fédéral leur accordait de généreuses subventions. C'est pourquoi l'Office est forcé de reconnaître que les agriculteurs ont désormais tout intérêt à sélectionner la combinaison de transport la moins chère par camion et par rail ou par camion jusque chez un transformateur local. L'Office convient qu'il y a de fortes chances pour que d'importantes quantités de grain qui étaient jadis acheminées par chemin de fer ne le soient plus à l'avenir. Le grain peut être acheminé par camion jusqu'à une compagnie de chemin de fer rivale, ou directement vers les marchés d'écoulement, ou encore vers un établissement local pour y être transformé en produits à la valeur ajoutée, comme la trituration des oléagineux ou l'élevage avec des grains fourragers. L'Office convient également qu'il y a des chances pour que la quantité totale de grain produite diminue tandis que les agriculteurs soustraient à la céréaliculture les terres à rendement marginal, vu que les produits ne suffisent plus à régler les coûts de transport non subventionnés jusqu'aux marchés d'écoulement. Il se peut en outre que les céréaliculteurs diversifient leurs activités vers d'autres secteurs, comme l'élevage de bétail, réduisant du même coup la quantité de grain qui doit être transportée par chemin de fer. L'Office note que certains produits à la valeur ajoutée sont actuellement transportés par camion et que le transport d'autres produits sera soumis à la concurrence du camionnage.

L'Office conclut également que la vente annoncée, mais pas encore effective, du parc de wagons-trémies du gouvernement ajoute un nouvel élément de risque au transport du grain. Les compagnies de chemin de fer ne savent plus à qui appartiendront ces wagons ni qui en assurera l'exploitation, alors qu'ils représentent environ 50 p. cent du parc de wagons à grain disponibles. Les problèmes que pourraient entraîner l'affectation et l'utilisation des wagons sont aussi des facteurs qui contribuent à cette incertitude.

L'Office relève par ailleurs que les provinces et coopératives soutiennent que la réduction du taux du coût du capital décrétée par le Comité dans sa décision de 1985 n'a eu aucun rapport avec l'adoption à cette époque de la LTGO et avec son entrée en vigueur. Comme elles le disent dans leur argumentation finale :

... la décision de 1985 de la CCT qui a fixé à 1 p. 100 le rajustement pour risque afférent au transport du grain l'a fait uniquement en fonction du risque systématique. Aucun autre rajustement n'a été opéré pour tenir compte de la diminution des risques résultant de la LTGO. (traduction)

Les provinces et coopératives soutiennent qu'il serait préjudiciable aux céréaliculteurs si l'on élimine la réduction du coût du capital sous prétexte que la LTGO a été abrogée en 1995.

Toutefois, l'Office a analysé la décision de 1985 à cet égard et elle note le passage suivant :

... les données empiriques présentées durant l'audience n'ont pas été des plus utiles. Au fur et à mesure que nous prendrons de l'expérience en ce qui concerne le transport du grain aux termes de la LTGO, le Comité prévoit que les analyses empiriques pourraient se révéler plus utiles. Entre-temps, le Comité doit procéder à une détermination et cette détermination doit être faite au meilleur de son jugement avec les données qu'il a à sa disposition. À la lumière de ce raisonnement, le Comité estime que, dans les circonstances actuelles, le transport du grain aux termes de la LTGO est moins risqué que le transport de marchandises en général. Selon le jugement du Comité, ce risque différentiel produit un coût de capitaux propres en vertu de la LTGO qui se situe à 1 p. 100 de moins que le taux du coût du capital établi pour toutes les opérations de CP Rail. Le Comité réexaminera ce rajustement si les circonstances changent ou si de nouvelles informations sont disponibles en ce qui a trait au transport du grain.»

L'Office déduit d'après cet élément de la décision de 1985, prise dans le contexte de l'ensemble de l'affaire entendue à cette époque, que le Comité était au courant des effets de l'adoption de la LTGO, même si elle n'était pas en mesure de calculer empiriquement l'exactitude de cet impact. C'est pour cette raison, entre autres, que le Comité a porté un jugement éclairé sur la question et a réduit de 1 p. 100 le taux du coût des actions ordinaires. C'est dans le même esprit donc que l'Office doit dans ce cas tenir compte des effets de l'abrogation de la LTGO. L'Office est d'avis qu'un changement aussi important dans la législation régissant le transport du grain de l'Ouest ne fait qu'amplifier le risque que courent les compagnies de chemin de fer.

L'Office est d'avis que l'incertitude en soi constitue un risque et reconnaît que l'industrie céréalière canadienne vit une période de changements considérables. L'Office accepte les arguments exposés par M. Evans selon lesquels l'incertitude en soi et l'impossibilité de prédire l'avenir constituent un risque.

Pour les raisons susmentionnées, l'Office conclut que le transport du grain, de nos jours, ne comporte pas moins de risques que le transport d'autres marchandises.

Décision de l'Office

L'Office conclut donc que pour la prochaine campagne agricole (1997-1998), le rajustement pour risque afférent au transport du grain du taux du coût des actions ordinaires de CPR pour l'établissement du taux du coût des actions ordinaires affecté au transport du grain par CPR sera nul. L'Office continuera de surveiller la situation et déterminera chaque année le rajustement nécessaire en s'appuyant sur son jugement éclairé.

3. Éléments d'actif

Étant donné que le CN et CPR ont tous deux fait face à une réévaluation importante de leurs éléments d'actif en 1995, on a demandé aux participants de déterminer si les réductions de valeur des éléments d'actif devaient se refléter dans l'investissement ferroviaire net et, par conséquent, dans les éléments de la structure du capital utilisés dans l'établissement des taux du coût du capital.

Position de CPR

CPR a analysé la question des principes comptables généralement reconnus qui sont touchés par les réductions de valeur des éléments d'actif survenues en 1995. CPR reconnaît que les réductions de valeur doivent être fondées sur le principe de prudence voulant que l'option comptable la moins favorable se reflète dans les capitaux propres. C'est ainsi que CPR a procédé à une évaluation de ses éléments d'actif dans l'Est en fonction du montant net récupérable prévu, et a imputé les réductions de valeur à un poste spécial dans le bilan, les charges reportées, sous le montant d'amortissement cumulatif net des éléments d'actif. Cette écriture de compensation a été présentée comme dépense dans l'état des résultats. Les réductions de valeur des éléments d'actif seront saisies par amortissement du produit comptabilisé d'avance dans l'état des résultats sur une période d'environ 20 ans. CPR prétend que l'utilisation d'un produit comptabilisé d'avance dans le bilan au moyen d'un montant forfaitaire s'est avérée nécessaire car les registres de la société ne sont pas suffisamment détaillés pour permettre un calcul embranchement par embranchement ou subdivision par subdivision.

Ces réductions de valeur sont une écriture comptable qui ne font que modifier le moment où le coût non amorti des actifs immobilisés est imputé aux recettes. Les réductions de valeur n'ont aucune influence sur les coûts engagés par CPR pour acquérir des éléments d'actif, et elles doivent être recouvrées sur les recettes générées par le trafic ferroviaire assuré par ces éléments d'actif. La réglementation des taux est axée sur le coût des actifs et non sur leur valeur. Les amortissements sont des dépenses hors-trésorerie qui n'ont aucune incidence sur l'impôt sur le revenu. Ils n'ont pas non plus d'incidence sur les taux que doit facturer la compagnie de chemin de fer pour recouvrer l'ensemble de ses coûts, notamment les coûts d'achat de ces éléments d'actif.

À la question de savoir si les réductions de valeur des éléments d'actif doivent être assimilées à des actifs inertes, CPR est d'avis que les éléments d'actif sont toujours utilisés et utiles et que, par conséquent, ils ne doivent pas être considérés comme inertes. CPR précise que les éléments d'actif en question satisfont aux trois critères énoncés à l'article 3060 du manuel de l'Institut canadien des comptables agréés (ICCA) pour déterminer ce qui constitue un actif immobilisé : i) il faut que ce soit un actif que la compagnie possède pour l'utiliser; ii) il faut que la compagnie ait l'intention de continuer à utiliser cet actif durant le restant de sa vie utile prévisible; et iii) l'actif ou le groupe d'actifs ne doivent pas être mis en vente dans le cours normal des activités de l'entreprise. CPR prétend que ses actifs ferroviaires dans l'Est répondent à ces trois critères. Le type d'amortissement prévu par l'article 3060 du manuel de l'ICCA n'est pas autorisé pour les actifs inertes ou retirés du service.

CPR estime donc que les réductions de valeur des actifs ne sont pas comparables à une déclaration d'actifs inertes et que, pour les besoins d'indexer le barème relatif au transport du grain dans l'Ouest du Canada et à d'autres fins de réglementation, l'investissement ferroviaire net et la structure du capital ne doivent pas refléter les réductions de valeur des actifs.

Position de CN

Le CN a fourni des preuves analogues à celles de CPR. Le CN soutient que les réductions de valeur des actifs n'ont aucun rapport avec l'établissement des coûts et que les objectifs de l'établissement des coûts sont radicalement différents de ceux de la comptabilité.

Le CN en déduit donc que les réductions de valeur des actifs ne doivent pas être traitées comme une déclaration d'actifs inertes et doivent par conséquent être exclues du calcul de l'investissement ferroviaire net et, par conséquent, de la structure du capital.

Position des provinces et coopératives

Les provinces et coopératives étaient d'avis que le motif des réductions de valeur des actifs était leur utilité économique réduite. À cet égard, on peut les assimiler à des actifs jugés inertes ou inutilisés et inutiles, ce qui explique la position des provinces et coopératives voulant qu'il soit inopportun de les inclure dans la structure du capital.

ANALYSE ET DÉCISION DE L'OFFICE

Analyse de l'Office

L'Office constate que les éléments d'actif qui ont subi une réduction de valeur sont toujours destinés à être utilisés par les compagnies de chemin de fer et produisent ainsi une source de revenu. On peut donc dire qu'ils sont utilisés et utiles. Par conséquent, l'Office conclut qu'il ne constituent pas un actif inerte. L'Office accepte le point de vue des chemins de fer que les coûts engagés dans l'acquisition de ces éléments d'actif doivent figurer dans leurs livres comptables. Ainsi, l'actif demeure un élément de la base de coûts et de la base de l'actif matériel des transporteurs.

L'Office prend note de la décision concernant l'établissement du taux du coût du capital pour la campagne agricole de 1996-1997 dans laquelle il avait déterminé que pour être conforme avec le calcul de l'indice des prix pour le barème les réductions de valeur des éléments d'actif n'ont pas été incluses dans la détermination de l'investissement ferroviaire et la structure du capital. Compte tenu de la preuve et des arguments présentés à cet égard, l'Office n'est pas convaincu qu'il y a eu des faits nouveaux ou une évolution des circonstances qui justifient une procédure différente.

Décision de l'Office

L'Office estime que les réductions de valeur des actifs effectuées par les deux compagnies de chemin de fer en 1995 ne doivent pas se refléter dans l'investissement ferroviaire net et, par conséquent, dans la structure du capital pour déterminer les divers coûts du capital.

RÉSUMÉ DES QUESTIONS ABORDÉES PENDANT L'AUDIENCE CONSULTATIVE

CONCLUSIONS

1. Risque commercial de CPR

L'Office est d'avis que les analyses statistiques présentées par chacun des participants ont beau être instructives, elles ne donnent pas de résultats concluants à proprement parler. L'Office a décidé que, pour la détermination du taux du coût du capital qui servira à l'établissement des coûts liés aux activités ferroviaires de 1997 qui seront exercées après l'émission de la présente décision et à la prochaine campagne agricole (1997-1998), le rajustement au titre du risque commercial du taux du coût des actions ordinaires de CPL pour qu'il atteigne le taux du coût des actions ordinaires de CPR sera égal à zéro. L'Office continuera de surveiller la situation et il déterminera chaque année le rajustement nécessaire selon son jugement éclairé.

2. Rajustement pour risque afférent au transport du grain

L'Office a déterminé que pour la prochaine campagne agricole (1997-1998), le rajustement pour risque afférent au transport du grain du taux du coût des actions ordinaires de CPR pour l'établissement du taux du coût des actions ordinaires affecté au transport du grain par CPR sera nul. L'Office continuera de surveiller la situation et il déterminera chaque année le rajustement nécessaire selon son jugement éclairé.

3. Éléments d'actif

L'Office estime que les réductions de valeur des actifs effectuées par les deux compagnies de chemin de fer en 1995 ne doivent pas se refléter dans l'investissement ferroviaire net et, par conséquent, dans la structure du capital pour déterminer les divers taux du coûts du capital.


  1. Patterson, C.S., The Cost of Capital : Theory and Estimation, Quorum Books, 1995, p. 221..
  2. Décision télécom, CRTC 91-21, Ottawa, 19 décembre 1991.
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