Décision n° 127-A-2004
le 17 mars 2004
Référence no M4212/M22-3-1
DEMANDE
[1] Martinair Holland N.V. (ci-après Martinair) a demandé à l'Office des transports du Canada (ci-après l'Office) les autorisations énoncées dans l'intitulé. La demande a été reçue le 19 décembre 2003 et des détails ont été fournis le 22 décembre 2003.
[2] Aux termes de la licence no 975115, Martinair est autorisée à exploiter un service international régulier entre les Pays-Bas et le Canada conformément à l'Accord relatif au transport aérien conclu entre le gouvernement du Royaume des Pays-Bas et le gouvernement du Canada et signé le 2 juin 1989, dans sa version modifiée (ci-après l'Accord).
[3] La condition no 1 de la licence no 975115 se lit comme suit :
La licenciée est autorisée à exploiter la (les) route(s) énoncée(s) dans l'Accord.
[4] La condition no 2 de la licence no 975115 se lit comme suit :
Le service international régulier autorisé par les présentes devra être exploité sous réserve des dispositions de l'Accord et de toutes ententes applicables que pourraient conclure le Canada et le Royaume des Pays-Bas.
[5] La note 6 de la liste des routes aériennes annexée à l'Accord limite le deuxième transporteur aérien désigné des Pays-Bas à l'exploitation de services à destination et/ou en provenance de seulement deux des points canadiens inscrits sur cette liste.
[6] En vertu de l'Accord, Martinair, le deuxième transporteur aérien désigné des Pays-Bas, peut exploiter des services à destination et/ou en provenance de seulement deux des points canadiens inscrits sur la liste des routes aériennes annexée à l'Accord. À l'heure actuelle, les points canadiens inscrits sur cette liste et qui peuvent être desservis par des transporteurs aériens désignés par le gouvernement des Pays-Bas sont : Halifax, Montréal, Ottawa, Toronto, Calgary et Vancouver. Edmonton n'est donc pas un point pouvant être desservi par Martinair.
[7] En raison de la nature extra-bilatérale des autorisations demandées par Martinair, l'Office, dans la décision no LET-A-4-2004 du 9 janvier 2004, a donné avis de la demande aux parties pouvant être intéressées, en l'occurrence Air Canada, Air Transat A.T. Inc. exerçant son activité sous le nom d'Air Transat (ci-après Air Transat) et la Edmonton Regional Airports Authority (ci-après Edmonton Airports). Les parties intéressées, ainsi que la Calgary Airport Authority (ci-après la CAA), ont toutes déposé une intervention à l'égard de la demande.
QUESTION
[8] L'Office doit déterminer s'il doit autoriser Martinair à exploiter des services internationaux réguliers pour le transport de passagers à destination et/ou en provenance de plus de deux points au Canada et s'il doit ajouter Edmonton comme point pouvant être desservi.
OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES
[9] L'Office a reçu une intervention de la CAA le 3 février 2004. Aux termes de la décision no LET-A-4-2004 du 9 janvier 2004, les commentaires devaient être reçus au plus tard le 27 janvier 2004. L'Office, en vertu de l'article 8 des Règles générales de l'Office national des transports, DORS/88-23, accepte par les présentes les commentaires soumis par la CAA comme étant pertinents et nécessaires à l'étude de cette affaire par l'Office.
POSITIONS DES PARTIES
[10] Martinair indique qu'elle a présenté la demande pour lui permettre d'exploiter des services réguliers à destination d'Edmonton et de Calgary au cours de l'été 2004. Ces activités comprendraient un itinéraire Amsterdam-Edmonton-Calgary-Amsterdam les lundis et un itinéraire Amsterdam-Calgary-Edmonton-Amsterdam les jeudis. Martinair affirme qu'elle veut continuer ses activités saisonnières à destination du Canada comprenant les points situés dans l'Ouest du Canada, comme l'a permis l'Office les années précédentes sauf pour l'été 2003. Martinair précise qu'elle serait le seul transporteur aérien fournissant des services aériens directs entre Amsterdam et Edmonton. Elle indique qu'elle exploitera aussi des services réguliers entre Amsterdam et Toronto.
[11] Edmonton Airports est intervenue à l'appui de la demande de Martinair. Elle déclare qu'Edmonton est sans service régulier à destination et/ou en provenance de l'Europe malgré la preuve d'un marché viable. Depuis qu'Air Canada a retiré son service en 2001, Edmonton a dû compter sur un programme de vols affrétés pendant l'été pour les destinations européennes. Selon Edmonton Airports, le service de Martinair, même s'il était limité à la saison estivale de l'IATA, a fourni un lien précieux et permanent pour les communautés d'affaires et de tourisme. Cependant, Edmonton Airports note qu'un programme de vols affrétés ne peut remplacer entièrement un service régulier qui peut desservir plus facilement le marché aux deux extrémités de la route. Elle ajoute que le service proposé est important parce qu'il assurerait à Edmonton et au Nord de l'Alberta un excellent accès à une portion du marché européen qui contribue des avantages importants en matière de tourisme récepteur durant la saison plutôt courte. Grâce à un vaste ensemble de correspondances à Amsterdam à destination et/ou en provenance d'autres parties de l'Europe de l'Ouest et de l'Est, la région profite aussi d'un excellent contact avec ces secteurs. Edmonton Airports explique que le grand Edmonton, qui a une population d'un million de personnes, et la zone desservie au nord de l'aéroport, qui a une population de 800 000 personnes, ne devraient pas être privés du service d'Amsterdam parce que les transporteurs aériens canadiens désignés refusent ou ne sont pas en mesure de le fournir. Edmonton Airports soutient que l'Office est tenu de reconnaître les lacunes d'un accord vieux de 13 ans et de permettre le service proposé comme étant dans l'intérêt public. Elle fait valoir que même si les transporteurs aériens canadiens affirment qu'il y a un déséquilibre important du trafic et des avantages dans l'accord existant en faveur des transporteurs aériens néerlandais, il n'y a pas de preuve démontrant que des demandes canadiennes ont été effectuées pour en modifier les conditions.
[12] La CAA est aussi intervenue à l'appui de la demande. Elle note que ni Air Canada, ni Koninklijke Luchtvaart Maatschappij, N.V. (ci-après KLM), n'ont choisi de desservir Calgary ou Edmonton et Air Transat exploitera seulement un service hebdomadaire à partir de Calgary. Selon la CAA, la seule vraie question est de savoir si le service sera exploité comme un service à la demande ou comme un service régulier. La CAA appuie l'opinion de Martinair selon laquelle ceux qui tirent profit du service régulier sont les voyageurs canadiens, dans ce cas les résidents de l'Alberta et des Territoires du Nord-Ouest. La CAA indique qu'un service régulier offre une plus grande visibilité dans le marché, une plus grande répartition et plus de facilité pour les réservations qu'un service à la demande. La CAA affirme que le service régulier transatlantique général à partir des villes de l'Alberta, surtout d'Edmonton, est limité et qu'un autre choix de destinations et de transporteurs aériens pour les voyageurs est nécessaire.
[13] La CAA fait valoir qu'il n'y a pas suffisamment de capacité, particulièrement pendant l'été, pour satisfaire les demandes du marché à partir de l'Alberta. La CAA affirme que lors du troisième trimestre de 2003, les vols réguliers transatlantiques en provenance de Calgary étaient exploités avec un coefficient d'occupation de 85 p. 100 et seulement 66 p. 100 des passagers des vols réguliers transatlantiques partant de Calgary ont voyagé sur ces vols directs, ce qui signifie que 34 p. 100 d'entre eux ont dû effectuer une correspondance à des points d'entrée canadiens ou américains. Avec l'aide des données de Statistique Canada pour l'année 2001, la CAA avance que le pourcentage plutôt bas des « autres passagers internationaux », c.-à-d. des passagers étrangers et transfrontaliers, utilisant les aéroports de Calgary et d'Edmonton par rapport aux aéroports de Toronto, Vancouver et Montréal reflète le petit nombre de transporteurs aériens internationaux réguliers aux aéroports de Calgary et d'Edmonton et de politiques aériennes internationales du Canada restreignant l'accès aux plus petites villes des transporteurs étrangers. Selon la CAA, ses propres sondages révèlent qu'un plus grand pourcentage de passagers à destination et en provenance de Calgary et d'Edmonton effectuent actuellement « d'autres itinéraires internationaux » que ce qui était suggéré par les données de Statistique Canada. La CAA note qu'Air Canada et KLM ont refusé ses demandes en vue d'ajouter des services à destination de l'Europe et, donc, affirme que lorsqu'un autre transporteur aérien veut desservir Calgary et relier la ville à un autre marché mal desservi, il est nécessaire d'accorder les droits exigés.
[14] La CAA est d'avis que, idéalement, la question devrait être réglée au moyen d'une révision de l'Accord relatif aux services aériens. Cependant, cela ne peut pas être fait pour la saison estivale 2004. La CAA réclame que la demande soit approuvée pour la saison estivale 2004 et jusqu'à ce que les négociations avec les Pays-Bas soient terminées.
[15] Air Transat a déposé une intervention en opposition à une partie de la demande. Air Transat signale qu'une demande identique d'autorisations extra-bilatérales a été déposée l'an dernier et a été refusée pour ce qui est de la demande de desservir plus de deux points au Canada. Nonobstant ce refus, Air Transat indique qu'elle a appris que Martinair n'a fait aucune démarche entre-temps pour que son gouvernement résolve la question au moyen de négociations aériennes bilatérales. Martinair cherche plutôt à obtenir les mêmes concessions unilatérales des administrations et des intervenants canadiens. Selon Air Transat, les autorisations extra-bilatérales devraient être de nature exceptionnelle et seulement envisagées là où le consensus à cette fin existe parmi les intervenants canadiens ou, en l'absence de ce consensus, où un avantage supplémentaire pour l'intérêt public et les voyageurs l'emporte clairement sur les impacts négatifs pour les intervenants. Air Transat explique que Martinair a indiqué qu'elle desservira tous les points canadiens qu'elle veut desservir au moyen de services réguliers ou de vols affrétés et que le but de la demande est de s'assurer que tous ces services sont exploités comme des services réguliers.
[16] Air Transat note que, en plus des services offerts entre le Canada et les Pays-Bas par Air Canada, KLM et les transporteurs aériens de sixième liberté, elle exploitera des services réguliers à partir de Toronto, Vancouver et Calgary à destination d'Amsterdam. Air Transat affirme donc que l'approbation de l'autorisation demandée ne résulterait pas en de nouveaux services pour les consommateurs, sauf à Edmonton, et qu'elle n'est pas nécessaire sur le plan de la concurrence. Selon Air Transat, l'approbation de la demande donnerait à Martinair des droits précieux pour distribuer ses produits au moyen d'un SMD (Système mondial de distribution) sans compensation pour les intervenants canadiens, ce qui aggraverait encore le déséquilibre important des parts de marché et des occasions commerciales dans le cadre de la relation bilatérale.
[17] Air Transat fait valoir que pour les raisons soulignées dans son intervention, elle s'oppose au retrait de la note 6 de la liste des routes aériennes annexée à l'Accord qui limite le deuxième transporteur aérien désigné des Pays-Bas à l'exploitation d'un maximum de deux des points inscrits sur la liste. Cependant, Air Transat ajoute qu'elle ne s'oppose pas à l'exploitation de services réguliers à destination et/ou en provenance d'Edmonton comme l'un des deux points autorisés.
[18] Dans son mémoire, Air Canada note que le service proposé va à l'encontre de l'Accord à deux égards parce que Edmonton n'est pas un point canadien qui peut être desservi par un transporteur aérien désigné des Pays-Bas et que plus que les deux points canadiens pouvant être desservis par le deuxième transporteur aérien désigné des Pays-Bas seraient desservis. Air Canada soutient que l'année 2003 a été une autre année difficile pour la grande majorité de l'industrie aérienne, y compris Air Canada. Elle mentionne la guerre en Iraq, le SRAS et le ralentissement des conditions économiques comme quelques-unes des raisons. Air Canada signale que ses difficultés financières l'ont amenée à se placer sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC). Air Canada indique qu'elle se concentre sur les routes d'une valeur plus élevée pour son réseau révisé et qu'elle retire ses routes de moindre valeur, en raisons de ses ressources limitées. Pour cette raison, elle fait savoir qu'elle a décidé d'assurer à nouveau son service saisonnier entre Toronto et Amsterdam, qui devrait être exploité entre le 1er juin et le 30 octobre 2004.
[19] Air Canada note que la demande est la même que celle présentée par Martinair en 2003, et que l'Office a refusée. Elle soutient que, comme c'était le cas l'an dernier, il est frappant de voir à quel point l'offre du transporteur aérien désigné des Pays-Bas, en ce qui a trait au nombre de sièges et à la fréquence, dépasse largement ce qui est offert par les transporteurs canadiens. Air Canada a fourni des résumés sur la fréquence et le nombre de sièges pour les activités de juillet 2004 pour elle-même, Air Transat, Martinair et KLM à l'appui de son affirmation que les transporteurs aériens désignés néerlandais offriront 75 p. 100 du nombre total de sièges passagers dans le marché. Air Canada explique que le marché Canada-Pays-Bas est très bien desservi et que les transporteurs aériens néerlandais profitent déjà de droits et d'avantages très libéraux en vertu de l'Accord. Elle mentionne qu'elle croit que l'Office peut comprendre l'importance pour Air Canada du volume de trafic à destination et/ou en provenance de son réseau afin d'augmenter la viabilité de son service Toronto-Amsterdam. Air Canada indique que le déséquilibre de la capacité qu'elle a identifié entravera sans doute ses tentatives d'exploiter avec succès un service entre le Canada et les Pays-Bas.
[20] Air Canada soutient que les transporteurs aériens canadiens n'ont rien à gagner de l'octroi d'autorisations extra-bilatérales à Martinair et que le service proposé aurait un impact négatif sur le service d'Air Canada entre Toronto et Amsterdam. Air Canada recommande donc que l'Office rejette la demande.
[21] Air Canada fait aussi observer que Martinair s'est permis d'afficher son service proposé entre Edmonton et Amsterdam au moyen du SMD sans une mise en garde que le service est assujetti à l'approbation du gouvernement.
[22] Dans sa réplique à Air Transat et à Air Canada, Martinair note qu'elle a offert un service jusqu'à l'été 2003 en vertu des autorisations extra-bilatérales qui sont demandées à nouveau. En raison des interventions déposées par Air Canada et Air Transat au sujet de la demande de 2003 de Martinair, l'Office, dans la décision no 121-A-2003 du 6 mars 2003, a refusé une demande semblable. Martinair signale qu'en raison du refus, elle a fourni un service identique en 2003 au moyen de vols affrétés. Elle affirme que si l'Office refuse la présente demande, elle demandera à nouveau une autorisation d'affrètement semblable afin de fournir la même capacité de transport pour l'été 2004.
[23] Martinair indique que l'Office doit s'inspirer des objectifs de la politique nationale des transports que l'Office a le mandat d'administrer et, dans ce contexte, elle fait valoir que l'Office doit s'inspirer des dispositions suivantes de la LTC :
5. Il est déclaré que, d'une part, la mise en place d'un réseau sûr, rentable et bien adapté de services de transport viables et efficaces, [...] utilisant au mieux et aux moindres frais globaux tous les modes de transport existants, est essentielle à la satisfaction des besoins [...] des voyageurs [...] comme à la prospérité et à la croissance économique du Canada et de ses régions, et, d'autre part, que ces objectifs sont plus susceptibles de se réaliser en situation de concurrence de tous les transporteurs [...] à condition que [...] :
[...]
b) la concurrence et les forces du marché soient, chaque fois que la chose est possible, les principaux facteurs en jeu dans la prestation de services de transport viables et efficaces;
[...]
g) les liaisons assurées en provenance ou à destination d'un point du Canada par chaque transporteur ou mode de transport s'effectuent, dans la mesure du possible, à des prix et selon des modalités qui ne constituent pas :
(i) un désavantage injuste pour les autres liaisons de ce genre, mis à part le désavantage inhérent aux lieux desservis, à l'importance du trafic, à l'ampleur des activités connexes ou à la nature du trafic ou du service en cause.
Il est en outre déclaré que la présente loi vise la réalisation [...] de ces objectifs [...]. »
[24] Martinair ajoute que le fait de l'obliger à exploiter un service à destination d'Edmonton et de Calgary, comme elle a été forcée de le faire à l'été 2003, serait une autre décision de l'Office allant à l'encontre des objectifs de la LTC.
[25] En réponse à la proposition d'Air Transat que toutes les exigences extra-bilatérales devraient être réglées au moyen de renégociations, Martinair note qu'il n'y a eu aucune demande de renégociations depuis que l'Accord est entré en vigueur en 1989. Même si elle reconnaît que les statistiques d'Air Canada démontrent que la capacité entre le Canada et les Pays-Bas est déséquilibrée, Martinair soutient que ce déséquilibre reflète un déséquilibre de trafic. Martinair indique qu'elle est spécialisée dans les marchés provenant d'Europe et principalement les marchés « VAP » (Visites à des amis ou parents), avec plus de 80 p. 100 de sa capacité vendue à ce marché. Elle explique qu'il ne s'agit pas d'un marché majeur pour Air Transat ou Air Canada.
[26] Martinair fait valoir que ni Air Canada, ni Air Transat n'ont jamais demandé de renégociations en raison du déséquilibre de longue date de la capacité entre les Pays-Bas et le Canada. Elle indique que cette inaction est due à la reconnaissance possible par les transporteurs aériens canadiens que le déséquilibre est dû à la différenciation entre les transporteurs aériens européens et canadiens dans les marchés desservis à Amsterdam.
[27] Martinair explique aussi que les chiffres concernant la capacité fournis par Air Canada sont inexacts. Les chiffres démontrent plus de capacité dans le marché qu'il n'y en a actuellement parce que Air Canada a compté les étapes plutôt que les voyages aller-retour comme des fréquences.
[28] Martinair indique qu'une très petite partie du marché du Canada à destination d'Amsterdam est véritablement un marché d'origine et de destination. Elle fait observer que très peu de Canadiens choisiraient le service d'Air Canada à destination d'Amsterdam pour voyager vers d'autres destinations, puisque Air Canada exploite seulement un service saisonnier à l'opposé des services directs transatlantiques des transporteurs aériens qui font partie de son alliance et dont les services permettent la correspondance avec les services d'Air Canada à Amsterdam.
[29] En ce qui concerne les commentaires d'Air Canada sur le chargement par Martinair de son indicateur IATA pour l'été 2004, y compris les vols d'Edmonton proposés avant l'autorisation de l'Office, Martinair mentionne que le service proposé d'Air Canada entre Toronto et Amsterdam peut être réservé dans le SMD depuis avant la fin de l'année, alors que l'indicateur d'Air Canada prévu pour ces activités a été déposé auprès de l'Office le jour de son intervention. De plus, Martinair affirme que l'affichage dans le SMD sert seulement à l'établissement d'une liste, à des fins d'information, et qu'il n'est pas ouvert à la finalisation des réservations.
[30] Martinair note qu'elle dessert le marché canadien depuis plus de 30 ans et qu'elle est le seul transporteur aérien ayant desservi le marché d'Edmonton au cours de la dernière décennie. Elle soutient qu'elle et KLM desservent le marché selon leurs façons de faire habituelles et que c'est Air Canada qui a amené l'incertitude dans le marché avec sa décision de dernière minute d'ajouter de la capacité. Selon Martinair, ce sont seulement les transporteurs aériens canadiens qui ont augmenté leur capacité sur les routes Canada-Amsterdam au cours des dernières années. Martinair s'interroge aussi sur le but d'Air Canada et d'Air Transat d'exiger des consommateurs de l'Ouest canadien, surtout ceux d'Edmonton, qui désirent que les services de Martinair soient des services affrétés. Cela, selon Martinair, est contraire à la politique nationale des transports.
[31] Martinair soutient que le fait de permettre les vols proposés n'aurait pas pour effet d'accentuer le contexte difficile dans lequel Air Canada prétend travailler.
ANALYSE ET CONSTATATIONS
[32] L'Office a examiné la demande, les interventions d'opposition d'Air Transat et d'Air Canada, la réplique de Martinair à ces interventions et les interventions déposées par Edmonton Airports et la CAA à l'appui de la demande.
[33] L'Office peut accorder une autorisation temporaire conformément au paragraphe 78(2) de la LTC pour exploiter un service qui n'est pas prévu aux termes d'un accord bilatéral de transport aérien.
[34] Comme il a été noté dans les plaidoiries, la demande d'autorisations extra-bilatérales de Martinair comporte deux volets. Premièrement, Martinair propose d'exploiter des services internationaux réguliers à destination et/ou en provenance d'Edmonton comme un point au Canada qui peut être desservi selon la route A.3) de la liste des routes aériennes annexée à l'Accord, un point qui n'est pas prévu aux termes de l'Accord. Deuxièmement, Martinair demande le retrait de la note 6 de la liste des routes aériennes qui limite le deuxième transporteur aérien désigné des Pays-Bas à l'exploitation de seulement deux des points canadiens inscrits sur cette liste.
[35] Dans sa réplique à Air Canada et à Air Transat, Martinair, citant diverses dispositions de l'article 5 de la LTC, soutient que le fait d'« obliger » Martinair à exploiter un service à destination d'Edmonton et de Calgary, comme elle a été forcée de le faire au cours de l'été 2003, serait une décision de l'Office allant à l'encontre des objectifs de la LTC. L'Office signale qu'il n'a pas obligé Martinair à exploiter des services affrétés à destination d'Edmonton et de Calgary l'été dernier. La décision no 121-A-2003 du 6 mars 2003 de l'Office permettait à Martinair de fournir un service international régulier à destination et/ou en provenance d'Edmonton comme l'un des deux points canadiens qui pourraient être desservis. Martinair aurait pu fournir un service régulier à Edmonton et à Calgary si elle avait choisi de ne pas desservir d'autres points canadiens. De plus, le fait d'indiquer que l'Office doit approuver la demande ou sinon être contraire aux objectifs de la politique nationale des transports suggère que l'adhésion du Canada à plusieurs accords aériens bilatéraux, y compris l'Accord Canada-Pays-Bas, est contraire à cette politique. Il est noté que l'article 5 de la LTC reconnaît que les conditions d'exploitation selon la politique doivent tenir dûment compte, entre autres choses, de la politique nationale. Dans ses décisions discrétionnaires rendues conformément au paragraphe 78(2) de la LTC, l'Office s'est inspiré de la politique nationale et des procédures du Canada relatives aux services aériens internationaux réguliers.
[36] Edmonton Airports et Martinair considèrent que les intérêts canadiens ont la responsabilité d'entamer des négociations avec les Pays-Bas pour corriger le déséquilibre de la capacité offerte par les Néerlandais en comparaison à celle offerte par les transporteurs aériens canadiens dans le marché Canada-Pays-Bas. L'Office note que la présente demande constitue la quatrième demande annuelle consécutive de Martinair pour des autorisations extra-bilatérales afin d'exploiter des services réguliers à destination et/ou en provenance d'Edmonton. Les transporteurs aériens canadiens n'ont pas indiqué dans les plaidoiries un désir d'obtenir plus de droits en vertu de l'Accord actuel. Il semble plutôt que c'est Martinair qui a un tel intérêt. En vertu du paragraphe 78(1) de la LTC, l'Office doit exercer ses attributions conformément aux ententes, conventions ou accords internationaux dont le Canada est signataire. Nonobstant cela, l'Office, en vertu du paragraphe 78(2) de la LTC, peut, entre autres choses, modifier les conditions d'une licence, seulement à titre provisoire, pour les services aériens internationaux non permis dans une entente, une convention ou un accord dont le Canada est signataire. Comme l'a mentionné Air Transat, toute mesure prise par l'Office pour permettre un service aérien en vertu du paragraphe 78(2) de la LTC est donc une exception qui dépasse les droits que les pays ont négociés entre eux. Comme l'Office l'a fait remarquer dans sa décision no 121-A-2003 du 6 mars 2003, les autorisations extra-bilatérales ont la capacité de perturber l'équilibre des avantages convenus dans l'Accord. Il s'ensuit que Martinair ne devrait pas nécessairement compter sur la répétition des autorisations extra-bilatérales de l'Office pour exploiter des services aériens extra-bilatéraux.
[37] Martinair se propose de desservir Edmonton deux fois par semaine. Un de ces vols serait effectué sans escale jusqu'à Edmonton et ferait escale à Calgary au retour. L'autre vol partirait de Calgary pour se rendre à Edmonton et ensuite sans escale d'Edmonton à Amsterdam. Edmonton Airports, la CAA et Martinair ont souligné différents avantages des services réguliers par rapport aux vols affrétés. Parmi ces avantages, on compte des correspondances plus faciles à Amsterdam à destination et/ou en provenance d'autres parties de l'Europe de l'Ouest et de l'Est, une meilleure visibilité dans le marché, une distribution plus vaste et la facilité de la réservation. Le mémoire de Martinair disant que le marché Canada-Amsterdam n'est pas un marché d'origine et de destination suggère aussi que le service régulier pourrait être approprié. L'Office comprend pourquoi Edmonton Airports et la CAA voudraient encourager les services internationaux réguliers directs à destination et/ou en provenance de l'Europe, particulièrement en raison du faible nombre de tels services actuellement fournis. Cependant, l'Office note que Martinair a indiqué qu'elle était spécialisée dans le marché provenant de l'Europe et les voyageurs qui rendent visite à des amis ou parents, avec plus de 80 p. 100 de la capacité vendue dans ce marché. De plus, le service proposé à destination d'Edmonton et de Calgary est saisonnier. Ces attributs ne sont pas incompatibles avec les caractéristiques de plusieurs services affrétés. Le nombre de passagers provenant de Calgary et d'Edmonton qui pourraient tirer profit d'un service régulier en faisant avantageusement la correspondance à Amsterdam pour se rendre à d'autres points pourrait être limité en raison de la reconnaissance par Martinair de sa concentration sur le marché en provenance de l'Europe. En même temps, il n'est pas clair pour l'Office que les avantages du tourisme qui, selon Edmonton Airports, seraient tirés de ce service proposé, seraient diminués de façon importante si le service était exploité à titre de service affrété. Dans ce contexte, l'Office note que Martinair a déclaré clairement que, si la demande est refusée, elle demandera à l'Office d'exploiter des services à destination de Calgary et d'Edmonton à titre de vols affrétés. Que Martinair exploite le service de façon régulière ou au moyen de vols affrétés, la capacité serait probablement la même.
[38] Dans sa réplique, Martinair soutient que peu de Canadiens choisiraient le service d'Air Canada à destination d'Amsterdam pour voyager vers d'autres destinations et que les vols proposés n'auraient pas pour effet d'accentuer le contexte difficile dans lequel Air Canada prétend travailler. Même si quelques Canadiens utilisaient le service d'Air Canada à destination d'Amsterdam pour la poursuite de leur voyage, le réseau important de services aériens entre le Canada et l'Europe qu'Air Canada exploite avec ses propres vols directs ou via des points européens autres que Amsterdam en coopération avec ses partenaires de Star Alliance pourrait être affecté par le service proposé. De plus, l'Office considère que les difficultés auxquelles Air Canada affirme faire face sont réelles et substantielles. L'Office note que plusieurs transporteurs internationaux, y compris Air Canada, font toujours face à des conditions difficiles alors qu'ils essaient de se remettre des répercussions de plusieurs facteurs qui ont eu un impact négatif sur le transport aérien international au cours des dernières années. En l'absence d'avantages importants pour le public voyageur ou pour les communautés touchées, il est difficile pour l'Office de trouver des motifs suffisants d'approuver des services aériens extra-bilatéraux qui pourraient avoir un impact négatif sur les tentatives des transporteurs aériens canadiens visant à se remettre de ces répercussions.
[39] Même si le service proposé pouvait avoir un impact sur le service prévu d'Air Transat entre Calgary et Amsterdam, l'Office note qu'Air Transat ne s'oppose pas à ce que Martinair desserve Edmonton pourvu que la restriction à la desserte d'au plus deux points canadiens soit maintenue. Martinair pourrait alors exploiter son service international régulier proposé entre Calgary et Edmonton, et Amsterdam, si elle ne dessert pas d'autres points canadiens.
[40] Compte tenu des arguments présentés par les deux transporteurs aériens canadiens qui assurent des services aériens internationaux réguliers entre le Canada et les Pays-Bas, l'Office n'est pas prêt à approuver la demande dans son ensemble, c.-à-d. que l'Office n'est pas prêt à permettre à Martinair de desservir plus de deux points canadiens. Cependant, l'Office est disposé à permettre à Martinair de desservir Edmonton comme l'un des deux points canadiens, donnant ainsi la possibilité à Martinair d'exploiter un service international régulier à destination et/ou en provenance d'Edmonton.
CONCLUSION
[41] Par conséquent, l'Office rejette par les présentes la demande de Martinair en vue d'obtenir l'autorisation d'exploiter des services internationaux réguliers à destination et/ou en provenance de plus de deux points au Canada.
[42] Toutefois, l'Office, conformément au paragraphe 78(2) de la LTC, modifie par les présentes les conditions nos 1 et 2 de la licence no 975115 afin d'autoriser Martinair à inclure Edmonton comme un point qui peut être desservi sur la route A.3) de la liste des routes aériennes annexée à l'Accord, du 10 mai au 23 septembre 2004, sous réserve de la condition suivante :
Il est interdit de transporter du trafic local entre des points situés au Canada.
[43] À tous les autres égards, les services doivent être exploités sous réserve des dispositions de l'Accord et de toutes ententes applicables que pourraient conclure le gouvernement du Canada et le Royaume des Pays-Bas.
[44] La présente décision fait partie intégrante de la licence no 975115 et y demeure annexée tant que ladite décision est en vigueur.
[45] La présente décision entre en vigueur le 20 février 2004, date à laquelle elle a été communiquée au moyen de la décision no LET-A-4-2004.
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