Décision n° 137-C-A-2022
Demande présentée par Victor Lubky et Triva Lubky (demandeurs) contre WestJet (défenderesse) concernant un retard et une annulation de vol
[1] Les demandeurs ont acheté auprès de la défenderesse des billets pour un aller simple de Honolulu (Hawaii), à Calgary (Alberta), via Vancouver (Colombie-Britannique), le 29 février 2020. Le vol WS1865 de Honolulu à Vancouver devait décoller à 23 h 50, mais a d’abord été retardé, puis annulé tôt dans la journée du 1er mars 2020. Les demandeurs ont été réacheminés sur un nouveau vol, le vol WS4206, dont le départ était prévu à 23 h le 1er mars 2020, et ils sont arrivés à destination avec environ 23 heures de retard sur l’horaire prévu.
[2] Les demandeurs réclament des indemnités pour inconvénients de 1 000 CAD chacun, au titre du Règlement sur la protection des passagers aériens (RPPA).
[3] Dans la présente décision, le rôle de l’Office des transports du Canada (Office) consiste à déterminer si la défenderesse a correctement appliqué les conditions qui s’appliquent aux billets que les demandeurs ont achetés, conformément à son tarif en vigueur au moment du vol. Le RPPA est incorporé dans le tarif de la défenderesse. Si l’Office conclut que la défenderesse n’a pas correctement appliqué son tarif, il peut lui ordonner de prendre les mesures correctives qu’il estime indiquées.
[4] Pour déterminer si des indemnités sont dues au titre du RPPA, il faut établir si le retard ou l’annulation était attribuable au transporteur. Les demandeurs font valoir que le retard puis l’annulation du vol WS1865 étaient attribuables à la défenderesse. Ils soutiennent que la défenderesse a d’abord annoncé que le vol était retardé pour des raisons médicales, pour indiquer plus tard qu’il était annulé en raison d’un retard d’exploitation. Lorsque les demandeurs ont réclamé des indemnités auprès de la défenderesse après l’incident, elle les a informés que le vol WS1865 avait été annulé en raison d’un problème de maintenance.
[5] La défenderesse affirme que le retard du vol des demandeurs est survenu pour plusieurs raisons. Elle soutient qu’il a d’abord été causé par une situation indépendante de sa volonté. La défenderesse déclare que le vol WS1864 de Vancouver à Honolulu a été retardé. L’aéronef utilisé pour le vol WS1864 aurait dû servir pour le vol WS1865 des demandeurs. La preuve déposée par la défenderesse vient corroborer son affirmation selon laquelle le vol WS1864 partant de Vancouver a été retardé de 85 minutes en raison d’une urgence médicale obligeant l’aéronef à retourner à la porte avant le départ. Cette même preuve montre également que le vol WS1864 a rattrapé du temps en vol et est arrivé à Honolulu avec seulement 21 minutes de retard, dont 19 que la défenderesse attribue à l’urgence médicale.
[6] En ce qui concerne l’annulation subséquente du vol WS1865, la défenderesse indique qu’elle a changé d’aéronef en raison de problèmes lors d’une maintenance imprévue sur un autre aéronef, ce qui a entraîné l’annulation du vol WS1865. La défenderesse fait valoir que la maintenance imprévue, selon le RPPA, est considérée comme étant attribuable au transporteur, mais nécessaire par souci de sécurité. Elle prétend qu’elle a respecté ses obligations dans les circonstances puisqu’elle a traité les demandeurs conformément aux normes et les a réacheminés sur le prochain vol disponible vers Vancouver.
[7] La preuve à l’appui présentée par la défenderesse montre qu’elle a d’abord affecté l’aéronef 829 au vol WS1853 de Kahului à Vancouver prévu le 28 février 2020. Le vol WS1853 a été dérouté vers Honolulu après le décollage de Kahului en raison d’un problème avec le réservoir de carburant central de l’aéronef. Les passagers du vol WS1853 dérouté ont donc été réacheminés par la défenderesse sur un vol de rechange, le vol WS4153, qui devait être effectué au moyen de l’aéronef 818 à 12 h le 1er mars 2020. Les passagers du vol WS1865, notamment les demandeurs, qui devaient initialement partir de Honolulu à bord de l’aéronef 818—10 minutes avant le départ du vol WS4153—ont plutôt été réacheminés à bord du vol WS4206 dont le départ était prévu le 1er mars 2020, à 23 h.
[8] Dans la décision 122-C-A-2021 (décision d’interprétation du RPPA), l’Office a conclu que lorsque de nombreuses raisons ont contribué à un retard, il doit déterminer la raison principale de la perturbation, ou le facteur y ayant contribué le plus considérablement, afin de déterminer à quelle catégorie appartient le retard de vol. L’Office a affirmé que dans les facteurs pertinents à prendre en compte pour déterminer la raison principale d’une perturbation, il faut inclure ce qui a causé le retard le plus long. Dans le cas présent, l’Office conclut que la cause première du retard de 23 heures a été l’annulation du vol WS1865 et le réacheminement subséquent des demandeurs à bord du vol WS4206. L’Office conclut que le retard de 19 minutes du vol WS1864, même s’il résulte d’une situation indépendante de la volonté de la défenderesse au sens du RPPA, n’a pas eu d’incidence sur le retard global qu’ont subi les demandeurs.
[9] Compte tenu de la preuve qu’il détient, l’Office conclut que le vol WS1865 de Honolulu à Vancouver a été annulé parce que la défenderesse a pris la décision opérationnelle de changer d’aéronef. Cette décision qu’elle a prise pour atténuer les conséquences d’autres retards survenus plus tôt dans la journée aurait pu être acceptable pour elle dans le contexte d’exploitation de son réseau, mais l’aéronef 818 aurait pu être utilisé pour le vol WS1865 comme prévu, sauf qu’elle a plutôt décidé d’affecter cet aéronef au vol WS4153, parce que l’aéronef 829 n’était pas encore prêt pour effectuer le vol WS4153 comme prévu. L’Office conclut donc que les problèmes mécaniques avec l’aéronef 829 n’ont pas été une cause directe de l’annulation du vol WS1865, n’ont pas été directement attribuables à l’annulation, pas plus qu’ils ne peuvent être considérés comme ayant eu un effet domino dans le contexte du RPPA. Compte tenu de ce qui précède, l’Office conclut que l’annulation du vol WS1865 était attribuable à la défenderesse aux termes du RPPA.
[10] Selon le tarif de la défenderesse et le RPPA, si un passager a été informé d’une annulation attribuable à la défenderesse quatorze jours ou moins avant l’heure de départ indiquée sur son billet initial et que son arrivée est retardée de neuf heures ou plus, le transporteur doit verser une indemnité de 1 000 CAD par passager. Dans le cas présent, l’Office conclut que la défenderesse n’a pas correctement appliqué son tarif en ne versant pas aux demandeurs une indemnité de 1 000 CAD chacun pour le retard de plus de neuf heures qu’ils ont subi.
Ordonnance
[11] À la lumière de ce qui précède, l’Office ordonne à la défenderesse de verser aux demandeurs une indemnité de 1 000 CAD chacun le plus tôt possible, mais au plus tard le 23 décembre 2022.
Dispositions en référence | Identifiant numérique (article, paragraphe, règle, etc.) |
---|---|
Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58 | 110(4); 113,1(1) |
Règlement sur la protection des passagers aériens, DORS/2019-150 | 10; 12(1); 12(3)d); 19(1)a)(iii) |
International Passenger Rules and Fares Tariff WS1 containing Local Rules, Fares and Charges on behalf of WestJet Applicable to the Transportation of Passengers and Baggage between points in United States/Canada And points in Area 1/2/3 and between the US and points in Canada, CTA 518 | 12(A)(3); 100(j)(5)(b) |
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