Décision n° 122-C-A-2021
DEMANDES présentées par de multiples demanderesses contre Air Canada, WestJet, Air Transat A.T. Inc. (Air Transat), United Airlines, Inc. (United Airlines), Sunwing Airlines Inc. (Sunwing) et Swoop, Inc. (Swoop) [défenderesses].
RÉSUMÉ
[1] Entre le 15 décembre 2019 et le 13 février 2020, l’Office a reçu 3 037 plaintes de passagers concernant l’obligation des transporteurs aériens de communiquer les raisons des retards et des annulations de vol sous le régime du Règlement sur la protection des passagers aériens, DORS/2019-150 (RPPA).
[2] En février 2020, l’Office a ouvert une enquête sur 570 de ces demandes et il a nommé un enquêteur responsable. Comme trois des demandes ont plus tard été retirées, le total a été ramené à 567. Le 1er octobre 2020, l’Office a reçu le rapport de l’enquêteur qui faisait état de plusieurs enjeux concernant des sujets communs de désaccord entre les passagers et les transporteurs aériens.
[3] Après une analyse du rapport, l’Office a conclu qu’une décision d’interprétation favoriserait une compréhension claire et uniforme des obligations des transporteurs et des droits des passagers aux termes du RPPA. C’est pourquoi l’Office, dans la décision no LET-C-A-72-2020, a ouvert les actes de procédure sur huit éléments d’interprétation d’ordre général en se fondant sur les enjeux mis en évidence dans le rapport de l’enquêteur.
[4] Dans la présente décision, l’Office énonce son interprétation de ces huit éléments d’ordre général qui peuvent se résumer comme suit :
- L’alinéa 13(1)a) exige que les transporteurs fassent des efforts raisonnables pour communiquer la raison d’une perturbation de vol aux passagers en donnant assez de détails pour que les passagers comprennent la raison invoquée et en quoi cette dernière a causé la perturbation de vol.
- Le paragraphe 19(4) exige que le transporteur communique, dans les explications offertes lorsqu’il rejette une demande d’indemnisation d’un passager, suffisamment d’information pour permettre au passager de décider s’il souhaite contester ce rejet.
- La raison principale de la perturbation de vol ou le facteur y ayant contribué le plus considérablement est le critère qu’il faut utiliser pour déterminer à quelle catégorie appartient une perturbation de vol lorsque de nombreuses raisons y ont contribué.
- Pour catégoriser une perturbation de vol causée par une pénurie de membres d’équipage, il faut tenir compte des circonstances entourant cette pénurie, notamment des facteurs comme la catégorisation des événements ayant causé la pénurie, et à savoir si le transporteur a dressé et mis en place des plans de continuité raisonnables.
- Pour catégoriser une perturbation de vol attribuable à un problème informatique ou à une panne de réseau, il faut tenir compte des circonstances du problème et, entre autres, déterminer : si le transporteur exerce un contrôle sur le système touché; si la panne ou le problème est causé par une cyberattaque; dans le cas où le transporteur exerce effectivement un contrôle sur le système touché, s’il a pris des mesures raisonnables pour prévenir la panne ou le problème; ce qu’il a fait pour les régler, par exemple, s’il a dressé et mis en place des plans de continuité raisonnables.
- Pour déterminer si un passager a droit à une indemnité pour inconvénients conformément à l’article 19 du RPPA parce qu’il a subi un retard en raison de multiples perturbations de vol au cours de son itinéraire, il est nécessaire de tenir compte de tous les vols ayant contribué à l’arrivée en retard du passager à la destination indiquée sur son billet initial, et de déterminer la raison principale du retard global ou le facteur y ayant contribué le plus considérablement.
- La maintenance régulière effectuée conformément aux obligations prévues dans les lois et les règlements, lorsqu’un aéronef est mis hors service, est dite « planifiée » au sens du paragraphe 1(1), mais la maintenance planifiée n’inclut pas les problèmes imprévus découverts durant les vérifications d’avant ou d’après vol.
- Pour déterminer si un transporteur a pris toutes les mesures raisonnables pour atténuer les conséquences du retard ou de l’annulation d’un vol précédent, comme l’exigent les paragraphes 10(2) ou 11(2) du RPPA, il faut tenir compte des circonstances entourant l’effet domino, dont : la durée de l’effet domino; l’éloignement de l’endroit et la question de savoir si la perturbation s’est produite dans un pays étranger; la disponibilité d’un autre aéronef ou équipage; les conséquences de la cause de l’annulation ou du retard de vol sur les activités du transporteur.
[5] Comme l’Office a maintenant énoncé des interprétations dans la présente décision, il considère que, par souci d’économie, d’efficacité et de proportionnalité judiciaires, il est justifié d’enjoindre aux parties de tenter de régler leurs différends de manière informelle en s’appuyant sur ces interprétations. En conséquence, l’Office dissocie les 567 demandes jointes dans le cas no 20-01590, suspend les instances individuelles liées à ces demandes, et ordonne à chaque défenderesse de reconsidérer les demandes d’indemnité pour les inconvénients subis et, en cas de refus de verser une indemnité, d’expliquer les motifs du refus tel que l’exige le paragraphe 19(4) du RPPA, en s’appuyant sur les interprétations fournies par l’Office dans la présente décision.
[6] Les demanderesses peuvent communiquer avec l’Office au plus tard le 15 février 2022 si des questions sur lesquelles l’Office a compétence demeurent non réglées. À ce moment‑là, l’Office pourra tenter de les régler au moyen de la facilitation ou de la médiation, selon ce qui convient. Si une question ne se règle pas par ces moyens informels, les demanderesses peuvent demander à l’Office d’aller de l’avant avec son processus décisionnel formel.
CONTEXTE
Lancement de l’enquête
[7] Le 15 décembre 2019, le RPPA est entré pleinement en vigueur. Entre le 15 décembre 2019 et le 13 février 2020, l’Office a reçu un nombre sans précédent de plaintes, soit 3 037, de la part de passagers aériens qui avançaient que des transporteurs ne respectaient pas leur obligation, aux termes du RPPA, de communiquer avec précision les raisons des retards ou des annulations de vol.
[8] Les 13 et 24 février 2020, l’Office a joint un sous-ensemble de demandes. D’abord, dans une directive envoyée par courriel le 13 février 2020, l’Office a joint 11 demandes contre Air Canada et WestJet sous le cas no 20-01590. Dans cette même directive, l’Office a également nommé son dirigeant principal, Conformité, à titre d’enquêteur en vertu du paragraphe 38(1) de la Loi sur les transports au Canada, LC 1996, c 10 (LTC). Le mandat de l’enquêteur consistait à obtenir les documents, les dossiers et les renseignements d’intérêt pour l’enquête, à mener des entrevues auprès des personnes et des organisations directement concernées par les plaintes et à recueillir d’elles des déclarations écrites, ainsi qu’à présenter un rapport à l’Office.
[9] Le 24 février 2020, l’Office a émis la décision no LET-C-A-12-2020, dans laquelle il a joint d’autres demandes au cas no 20-01590, dont des demandes contre quatre transporteurs supplémentaires, pour un total de 570 demandes contre six défenderesses. L’Office a indiqué que le but de l’enquête était d’examiner « les allégations qui ont été faites […] sur des questions liées aux communications, et de veiller à ce que les exigences relatives à la communication [du RPPA] soient claires à la fois pour les passagers et les transporteurs aériens ». Dans la décision no LET-C-A-44-2020 du 6 juillet 2020, l’Office a confirmé la portée de l’enquête et a clarifié la pertinence des renseignements concernant les raisons réelles d’un retard ou d’une annulation de vol ainsi que la pertinence de toute communication aux passagers sur la raison d’un retard ou d’une annulation de vol.
[10] Dans une directive du 6 avril 2020 communiquée par courriel, l’Office a retiré trois demandes du cas no 20-01590; deux suivant une requête des demanderesses et une afin de corriger une erreur de saisie de données. L’analyse de l’enquêteur visait donc 567 demandes se rapportant à 182 vols exploités par les défenderesses.
[11] L’Office avait initialement chargé l’enquêteur de lui présenter le rapport au plus tard le 26 mars 2020. Toutefois, compte tenu des effets de la pandémie de COVID-19, il a suspendu l’instance du 18 mars 2020 au 30 juin 2020 en prenant les arrêtés no 2020-A-32 et no 2020-A-37. Dès que l’enquêteur a repris le travail, il lui a fallu plus de temps en partie en raison de la capacité réduite de certaines défenderesses à répondre aux demandes de renseignements.
[12] L’enquêteur a remis son rapport à l’Office le 1er octobre 2020.
Rapport de l’enquêteur
[13] L’enquête portait principalement sur des déclarations de passagers selon lesquelles les défenderesses auraient fourni des renseignements inexacts ou incohérents concernant les raisons de retards ou d’annulations de 182 vols. L’annexe A du rapport renferme des renseignements sur 119 de ces vols, et l’annexe B des renseignements sur les 63 autres vols, tous d’Air Canada, qui ont fait l’objet d’une seule plainte par vol. Selon le rapport de l’enquêteur, rien ne prouve que les défenderesses auraient intentionnellement induit les passagers en erreur quant aux raisons des retards ou des annulations de vol. La preuve montre plutôt qu’une grande partie des renseignements communiqués aux passagers sur les raisons des retards ou des annulations de vol étaient inadéquats, sommaires et ambigus. Le rapport indique également que certaines défenderesses n’ont pas conservé dans leurs dossiers toutes les communications envoyées aux passagers.
[14] Le rapport de l’enquêteur fait ressortir un certain nombre de facteurs qui peuvent expliquer les problèmes de communication qu’il a constatés. Les retards et les annulations faisant l’objet de l’enquête sont souvent attribuables à des causes en évolution dont les raisons changent à mesure que la situation progresse. Comme de multiples raisons sont fournies pour expliquer une perturbation de vol, des passagers en viennent à remettre en question les renseignements qu’on leur donne puisque ces derniers leur semblent contradictoires. Dans d’autres cas, lorsqu’un passager réclamait une indemnisation, la façon de décrire une perturbation pendant qu’elle se déroulait et la façon de la décrire après étaient incohérentes. Il y a également eu des cas où, en réponse à une demande d’indemnisation d’un passager ayant été réacheminé, la défenderesse a fourni la raison du retard du vol de remplacement et non la raison de l’annulation du vol initial.
[15] Lorsque l’enquêteur a recueilli et analysé les faits entourant les déclarations liées aux communications, notamment quand il a comparé les raisons réelles des retards et des annulations de vol avec les renseignements qui ont été transmis aux passagers à ce sujet, il a constaté que certains problèmes étaient liés à des questions d’interprétation concernant la catégorisation des perturbations de vols, notamment à des questions sur la définition de « maintenance planifiée » et sur les conséquences de perturbations de vols précédents sur les vols qui suivent, qu’on appellent « effet domino ».
Actes de procédure
[16] Le 5 novembre 2020, au moyen de la décision no LET-C-A-72-2020, l’Office a versé le rapport de l’enquêteur au dossier de l’instance du cas no 20-01590, conformément au paragraphe 38(2) de la LTC, et il a invité les parties à déposer leurs commentaires sur les renseignements et les analyses contenus dans le rapport. L’Office a également ouvert les actes de procédure sur huit éléments d’interprétation d’ordre général concernant le RPPA. En plus de demander aux parties de déposer des présentations sur ces éléments, l’Office a invité les personnes intéressées à présenter des énoncés de position.
[17] Dans la décision no LET-C-A-85-2020 du 14 décembre 2020, l’Office a prolongé les délais pour déposer les présentations et les énoncés de position.
[18] Les 5 et 12 février 2021, les défenderesses WestJet, Swoop, Air Canada et Sunwing ont déposé une présentation, tandis qu’aucune présentation n’a été reçue d’Air Transat ou de United Airlines. Le 12 février 2021, l’Office a reçu un énoncé de position conjoint d’Airlines for America (A4A) et du Conseil national des lignes aériennes du Canada (CNLA). Le 12 mars 2021, il a en reçu d’autres des groupes Air Passenger Rights (APR) et AirHelp.
[19] Les réponses des demandeurs étaient attendues au plus tard le 12 mars 2021. Vingt présentations ont été reçues avant la date limite.
OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES
Portée de l’instance
[20] Air Canada et A4A font valoir que les obligations prévues à l’article 13 du RPPA visant à communiquer les renseignements en temps réel sont excessivement contraignantes et qu’elles devraient, par conséquent, être retirées du règlement.
[21] AirHelp s’oppose à une disposition commune qui figurerait dans les tarifs des transporteurs aériens et exigerait que les passagers communiquent d’abord directement avec le transporteur, sans consulter des tiers comme AirHelp.
[22] Ces sujets abordés par Air Canada, A4A et AirHelp dépassent la portée de l’enquête et de la présente instance. Ils ne concernent pas les huit éléments sur le RPPA pour lesquels l’Office a ouvert les actes de procédure. De plus, la présente instance vise à fournir une interprétation de ces éléments, non pas à modifier le règlement. L’Office ne se penchera donc pas sur ces sujets abordés par Air Canada, A4A et AirHelp.
Rapport de l’enquêteur
POSITIONS DES PARTIES
Présentations des demanderesses
[23] Plusieurs demanderesses ont fait diverses critiques contre les conclusions de l’enquêteur dans son rapport et ont notamment remis en question les raisons des retards ou des annulations de vol indiquées à l’annexe A du rapport. D’autres ont soulevé des arguments sur la portée du rapport, indiquant entre autres que l’enquêteur accordait une importance démesurée aux obligations de communication. Une demanderesse a réclamé une autre enquête sur les vols figurant à l’annexe B du rapport qui ont fait l’objet d’une seule plainte chacun.
Présentations des défenderesses
[24] WestJet remet en question les conclusions concernant deux vols en particulier que renferme l’annexe A du rapport. Swoop conteste pour sa part une grande partie de la constatation de faits concernant chaque vol visé par le rapport, et elle demande que ces différences soient corrigées dans le rapport. Air Canada n’est pas d’accord avec l’opinion que l’enquêteur exprime dans son rapport, à savoir que les défenderesses n’étaient pas bien préparées en vue de la mise en œuvre des obligations de communication prévues dans le RPPA, et elle demande que cet énoncé soit clarifié ou qu’il soit supprimé des archives.
ÉNONCÉS DE POSITION DES PERSONNES INTÉRESSÉES
APR
[25] APR n’est pas d’accord que l’Office entérine ou utilise le rapport parce que l’Office n’a pas publié sur son site Web ni joint au rapport la preuve utilisée par l’enquêteur. APR fait valoir que le fait de ne pas verser ces renseignements aux archives publiques pourrait soulever un problème d’équité procédurale pour les demanderesses si l’Office entend entériner ou utiliser le rapport. Il ajoute également que, de ce fait, l’Office déroge du principe de la publicité des débats et de ses pratiques habituelles.
ANALYSE
[26] En ce qui a trait au rapport, selon le paragraphe 38(2) de la LTC, l’Office peut « l’entériner sous forme de décision ou d’arrêté ou statuer sur le rapport de la manière qu’il estime indiquée ». Dans la décision no LET-C-A-72-2020, l’Office a versé le rapport au dossier de la présente instance.
[27] Le rapport est le fruit d’une recherche des faits qui a également permis de dégager de grands enjeux transversaux concernant des vols précis, enjeux que l’Office a utilisés pour élaborer les questions énoncées dans la décision no LET-C-A-72-2020, sur lesquelles ses interprétations s’avèrent nécessaires pour clarifier les sujets communs de désaccord entre les passagers et les transporteurs. Après les consultations sur ces questions auprès des parties et d’autres personnes intéressées, l’Office a établi, dans la présente décision, des interprétations sur ces éléments d’ordre général sans s’appuyer sur les constatations de faits de l’enquêteur liées à chacun des vols.
[28] Après avoir pris connaissance de ces interprétations, les parties qui n’auront pas réussi à régler leurs différends entre elles pourront demander à l’Office de trancher. Dans ce cas, l’Office établira un processus pour communiquer aux parties de chaque demande la preuve recueillie par l’enquêteur concernant le ou les vols en cause dans leur demande. Ainsi, les parties auront l’occasion de présenter des commentaires, des arguments et des éléments de preuve concernant la preuve pertinente recueillie et la constatation de faits effectuée par l’enquêteur.
LA LOI
[29] Les articles 10, 11 et 12 du RPPA divisent en trois catégories les obligations du transporteur lors d’une perturbation de vol, soit celles qui s’appliquent dans le cas d’une perturbation :
- attribuable à une situation indépendante de la volonté du transporteur (comme le prévoit l’article 10);
- attribuable au transporteur, mais nécessaire par souci de sécurité (comme le prévoit l’article 11);
- attribuable au transporteur (comme le prévoit l’article 12).
[30] Par conséquent, les obligations varient en fonction de la catégorie à laquelle appartient la perturbation de vol. L’obligation de verser une indemnité pour les inconvénients subis prévue aux articles 19 et 20 du RPPA s’applique seulement lorsqu’une perturbation de vol est attribuable au transporteur (alinéas 12(2)d), 12(3)d) et 12(4)d)). Peu importe la cause de la perturbation, le transporteur doit fournir aux passagers concernés les renseignements prévus à l’article 13, y compris la raison de la perturbation de vol (alinéa 13(1)a)).
[31] Les dispositions pertinentes du RPPA, de la LTC et du Règlement de l’aviation canadien, DORS/96-433 (RAC) sont reproduites à l’annexe.
PROBLÈMES D’INTERPRÉTATION
[32] L’Office aborde ci‑après huit éléments d’interprétation d’ordre général en s’appuyant sur les problèmes d’interprétation du RPPA que l’enquêteur a mis en évidence dans son rapport. La question 1 porte sur la quantité de détails que le transporteur doit fournir conformément à l’alinéa 13(1)a) lorsqu’il communique la raison d’une perturbation de vol, tandis que la question 2 porte sur l’explication qu’il doit fournir conformément au paragraphe 19(4) lorsqu’il rejette une demande d’indemnité pour les inconvénients subis.
[33] Concernant les six autres éléments, l’Office explique à quelle catégorie devraient appartenir les diverses situations de perturbations de vol afin de pouvoir déterminer les obligations du transporteur prévues dans le RPPA. Ces situations englobent les cas suivants : quand les raisons de la perturbation de vol évoluent (question 3); quand la perturbation de vol est attribuable à une pénurie de membres d’équipage (question 4); quand la perturbation de vol est attribuable à un problème informatique ou à une panne de réseau (question 5); quand le passager subit de multiples perturbations pour des vols multiples (question 6); quand la perturbation de vol pourrait être liée à la maintenance planifiée (question 7); quand la perturbation de vol est causée par le retard ou l’annulation d’un vol précédent (question 8).
[34] L’Office fait remarquer que pour en arriver à ces interprétations, il n’a ni examiné ni analysé les tarifs des demanderesses, lesquels pourraient prévoir des conditions plus avantageuses que celles du RPPA (paragraphes 86.11(4) de la LTC). En conséquence, si l’Office est appelé à trancher des demandes au moyen de son processus décisionnel formel, il devra interpréter, pour chaque demande, le tarif de chaque défenderesse, puis déterminer si les conditions qu’il renferme sont plus avantageuses que les obligations prévues dans le RPPA.
QUESTION 1 : QUEL NIVEAU DE DÉTAIL CONCERNANT LA RAISON DE LA PERTURBATION D’UN VOL DEVRAIT ÊTRE FOURNI AUX PASSAGERS PAR LES TRANSPORTEURS CONFORMÉMENT À L’ALINÉA 13(1)a) DU RPPA?
Positions des parties
PRÉSENTATIONS DES DÉFENDERESSES
[35] Les défenderesses avancent qu’il est impossible pour les transporteurs de fournir en temps réel les raisons détaillées des perturbations de vol. Elles font valoir que le RPPA les oblige à mettre en place des solutions excessivement contraignantes pour communiquer les renseignements en temps réel, comme l’exigence de fournir des mises à jour de la situation toutes les 30 minutes (paragraphe 13(2)) et les nouveaux renseignements dès qu’ils sont disponibles (paragraphe 13(3)). Les défenderesses font également valoir que les perturbations de vol sont souvent complexes et peuvent être occasionnées par de multiples raisons liées les unes aux autres et en constante évolution. Si un transporteur communique différentes raisons pour des perturbations de vol à mesure que les événements se produisent, les passagers risquent d’avoir l’impression que le transporteur se contredit; cela ne reflète pas non plus la réalité, à savoir que les raisons des perturbations de vol peuvent évoluer à mesure que les situations progressent. Il se peut également que le portrait complet de ce qui s’est passé n’ait pas été clair au moment des événements.
[36] Air Canada déclare que l’Office devrait s’en tenir à la norme imposant des efforts raisonnables qui obligeraient les transporteurs à communiquer même des renseignements fragmentaires à mesure que la perturbation évolue, sachant que ces renseignements ne donneront pas toujours un portrait complet de la situation. Air Canada déclare également que l’Office devrait concevoir un avis permanent à l’intention des passagers pour les prévenir que de telles communications pourraient ne pas être entièrement exactes tant qu’une enquête complète n’aura pas été menée, qu’elles ne reflètent pas nécessairement la cause première des retards et qu’elles ne permettent pas de déterminer l’admissibilité à une indemnisation.
[37] Selon Sunwing, si l’on doit considérer la quantité de détails requis dans les communications, il faut entre autres indiquer quand, où et à quelle étape d’un itinéraire les renseignements sont communiqués. Sunwing fait également état de limites techniques et linguistiques dans la communication de renseignements à propos de perturbations de vol pendant que l’incident se déroule. Par exemple, dans le cas des messages par SMS (texto), le nombre de caractères permis peut être limité, et à certains endroits, leur réception peut coûter cher aux passagers. Des annonces plus simples en langage clair peuvent être plus faciles à comprendre pour les passagers dont la langue maternelle n’est ni le français ni l’anglais, ou encore pour le grand public qui ne comprend pas nécessairement les complexités techniques et réglementaires des activités des transporteurs.
[38] WestJet et Swoop déconseillent une approche trop normative à cet égard parce que les perturbations de vol sont complexes et parce qu’il n’existe pas de solution universelle. WestJet utilise actuellement une liste de codes d’annulation et de retard qu’elle communique aux passagers, et lorsque de nombreux facteurs simultanés sont à l’origine d’une perturbation de vol, WestJet communique le principal facteur en cause.
PRÉSENTATIONS DES DEMANDERESSES
[39] Les demanderessesrestent sceptiques devant les explications des transporteurs concernant la communication des raisons changeantes durant des perturbations de vol. Nombre d’entre elles soutiennent que les défenderesses les induisent en erreur quand elles donnent les raisons des perturbations de vol, par exemple quand elles invoquent les « conditions météorologiques », alors que les conditions semblent bonnes. D’autres font valoir que la raison de la perturbation d’un vol indiquée à l’annexe A du rapport de l’enquêteur était différente de celle qu’ils ont obtenue au moment de la perturbation.
Énoncés de position des personnes intéressées
A4A et le CNLA
[40] Tout comme Air Canada, A4A et le CNLA appuient une norme de prestation d’efforts raisonnables pour communiquer les raisons des perturbations de vol. Selon eux, il est difficile de résumer, en temps réel et avant qu’une analyse n’ait eu lieu, des situations compliquées où de multiples facteurs causent une perturbation de vol. Les communications par messages textes et autres applications pendant qu’un événement se déroule sont transmises sous forme de messages automatisés, et il est en général impossible pour les transporteurs de programmer dans leurs systèmes toutes les raisons possibles d’une perturbation de vol. A4A et le CNLA font également valoir que des consommateurs pourraient s’inquiéter outre mesure de la sécurité des opérations de vol si toutes les raisons d’un retard attribuable à des problèmes de sécurité étaient données.
APR
[41] APR affirme que l’alinéa 13(1)a) du RPPA devrait être lu conjointement avec les notions telles que le droit d’être renseigné sur les indemnités (alinéa 13(1)b)), les normes de traitement (alinéa 13(1)c)) et les recours possibles (alinéa 13(1)d)).
[42] APR fait valoir que les renseignements prévus à l’alinéa 13(1)a) doivent être assez complets pour que le passager puisse évaluer par lui-même s’il est admissible à l’indemnité et aux normes de traitement. En ce qui concerne l’évolution des raisons des retards, APR fait remarquer que le RPPA renferme des dispositions sur le droit d’être informé des causes d’un retard à mesure que la situation évolue (paragraphes 13(2) et (3) du RPPA). APR est d’avis que les transporteurs doivent communiquer chaque raison d’un retard, mais aussi la durée du retard qu’a occasionné chacune de ces raisons.
AIRHELP
[43] AirHelp fait valoir que le RPPA oblige les transporteurs à fournir aux passagers des renseignements clairs, précis et en temps opportun sur les raisons des perturbations de vol, y compris dans des cas où de multiples raisons expliquent un retard à mesure que la situation évolue. AirHelp reconnaît que les opérations des transporteurs sont complexes, mais fait valoir que les transporteurs peuvent et doivent fournir une explication détaillée des raisons des perturbations de vol.
Analyse et déterminations
[44] Lorsque des passagers sont visés par une perturbation de vol, l’alinéa 13(1)a) du RPPA exige que le transporteur leur fournisse « la raison du retard, de l’annulation ou du refus d’embarquement ». Le RPPA exige également qu’il leur fournisse des mises à jour régulières — c’est-à-dire toutes les 30 minutes — de même que tout nouveau renseignement dès que possible (paragraphes 13(2) et (3)).
[45] Une des questions que l’enquêteur a mises en évidence dans son rapport était à savoir si les passagers recevaient assez de renseignements pour comprendre le lien entre les raisons changeantes des retards à mesure que la situation évoluait.
[46] Les principaux objectifs du RPPA consistent à faire en sorte que les passagers connaissent leurs droits et restent informés durant une perturbation de vol. Pour atteindre ces objectifs, les transporteurs doivent donner aux passagers des renseignements clairs, précis et en temps opportun.
[47] En se fondant sur ces objectifs, l’Office conclut que l’interprétation la plus juste de l’alinéa 13(1)a) du RPPA est que les transporteurs sont tenus de faire des efforts raisonnables afin de fournir assez de détails sur la raison d’une perturbation de vol pour que les passagers comprennent la raison donnée et comment cette raison a causé la perturbation de vol. Les renseignements devraient être fournis en langage clair sans jargon technique. L’Office encourage aussi les transporteurs à utiliser si possible une formulation type qui servira de modèle pour communiquer les renseignements de manière efficace et pour réduire le risque de confusion que pourrait entraîner un message mal écrit ou une erreur humaine commise en raison de contraintes de temps.
[48] L’Office reconnaît que l’obligation de fournir des renseignements en temps réel puisse être complexe, et qu’il pourrait être impossible pour les transporteurs de tirer au clair tous les renseignements sur la raison d’une perturbation de vol tant qu’un événement n’est pas terminé ou n’a pas fait l’objet d’une enquête. Toutefois, des énoncés trop brefs risqueraient d’empêcher les passagers de comprendre pourquoi leur vol a été perturbé, dans certaines circonstances, surtout lorsque les retards sont causés par de multiples raisons qui évoluent.
[49] L’Office note qu’un énoncé ambigu comme « problèmes d’horaire » ne serait pas considéré comme étant suffisant, car on ne sait pas trop si l’on fait référence à l’horaire d’un aéronef ou à celui d’un équipage. Le transporteur devrait plutôt préciser clairement le problème en indiquant par exemple : « problème d’horaire visant l’aéronef », « problème d’horaire visant l’équipage », « pas assez de membres d’équipage pour exploiter l’aéronef » ou « l’équipage a dépassé ses limites de temps de vol en raison de retards précédents ». Le transporteur devrait également expliquer la raison du problème d’horaire s’il la connaît au moment où il transmet l’information aux passagers. Par exemple, il devrait apporter la précision suivante : « L’équipage a dépassé ses limites de temps de vol en raison de retards précédents causés par de mauvaises conditions météorologiques ».
[50] De même, il ne suffirait pas de simplement dire que « la météo » cause une perturbation si ces conditions ne sont pas celles qu’on trouve au lieu de départ. Par exemple, si le transporteur sait que l’aéronef utilisé pour son vol est retardé en raison d’une tempête de neige dans la ville d’où provient l’aéronef, il doit le dire aux passagers concernés d’une manière claire et concise, comme suit : « Vol retardé en raison de mauvaises conditions météorologiques à l’endroit d’où arrive l’aéronef ».
[51] Si la raison d’un retard évolue, ces nouveaux renseignements devront faire partie des renseignements communiqués aux passagers touchés, par exemple : « Mise à jour sur la raison du retard : l’aéronef est arrivé, mais nous avons découvert un problème mécanique en ce qui concerne l’aéronef ».
[52] Pour expliquer les raisons changeantes d’un retard, l’Office encourage les transporteurs à concevoir un message type pour clarifier cet aspect qui crée habituellement de la confusion chez les passagers. Ils pourraient s’en servir au besoin, comme dans des communications par courriel pour donner une mise à jour sur la raison du retard, par exemple :
Les situations entourant les perturbations de vol peuvent être complexes et avoir de multiples causes. Les transporteurs ont l’obligation de vous informer de la raison d’une perturbation de vol. Sachez toutefois que les raisons d’une perturbation de vol qui vous auront été communiquées peuvent changer à mesure que la situation évolue, que de nouveaux problèmes se présentent ou que de nouveaux renseignements sont reçus.
[53] À titre de pratique exemplaire, l’Office encourage également les transporteurs à communiquer tous les autres renseignements pertinents aux passagers, y compris à quelle catégorie appartient la perturbation, s’il est possible de la déterminer.
QUESTION 2 : SI UN TRANSPORTEUR REFUSE DE VERSER UNE INDEMNITÉ AU MOTIF QUE LA PERTURBATION D’UN VOL LUI ÉTAIT ATTRIBUABLE MAIS NÉCESSAIRE PAR SOUCI DE SÉCURITÉ OU QU’ELLE ÉTAIT INDÉPENDANTE DE SA VOLONTÉ, QUEL NIVEAU DE DÉTAIL CONCERNANT LA RAISON DE LA PERTURBATION DU VOL DOIT-IL INCLURE DANS L’EXPLICATION DONNÉE AU PASSAGER CONFORMÉMENT AU PARAGRAPHE 19(4) DU RPPA?
Positions des parties
PRÉSENTATIONS DES DÉFENDERESSES
[54] Les défenderesses font valoir que le paragraphe 19(4) du RPPA n’oblige pas le transporteur à fournir une explication détaillée lorsqu’il rejette une demande d’indemnité.
[55] Air Canada estime qu’il suffirait de dire simplement qu’un retard était indépendant de sa volonté. Selon elle, depuis l’entrée en vigueur du RPPA, sa charge de travail pour traiter les demandes s’est considérablement accrue, de même que le nombre de plaintes déposées auprès de l’Office. Air Canada fait valoir que l’obligation de fournir un narratif détaillé, chaque fois adapté aux particularités de l’itinéraire de chaque passager, serait hautement disproportionnée, prendrait un temps excessif et aggraverait la situation.
[56] Les autres défenderesses avancent que lorsque les raisons d’un retard sont multiples, elles ne devraient pas être obligées de toutes les expliquer. Sunwing est d’avis que les réponses devraient porter sur la raison principale d’un retard, parce que les autres raisons contribuant au retard ne sont pas pertinentes pour la catégorisation. WestJet et Swoop indiquent pour leur part que le fait d’expliquer les raisons d’un retard quand il y en a plus d’une risque de créer plus de confusion chez les passagers.
PRÉSENTATIONS DES DEMANDERESSES
[57] Les demanderesses restent sceptiques devant les raisons que fournissent les transporteurs concernant les perturbations de vol et les rejets des demandes d’indemnisation. Les demanderesses sont surtout préoccupées par le fait que les raisons données au cours d’une perturbation de vol ne semblent pas concorder avec les renseignements fournis par le transporteur après coup. Rappelons que selon d’autres demanderesses, les raisons des perturbations de vol indiquées à l’annexe A du rapport de l’enquêteur sont différentes de celles qu’elles ont obtenues au moment de la perturbation. Une des demanderesses fait remarquer que son vol a été indiqué par l’enquêteur comme faisant partie des vols pour lesquels les demanderesses ont obtenu des explications concernant les perturbations à un vol de remplacement conformément au paragraphe 19(4), mais aucune explication concernant les perturbations au vol initial.
Énoncés de position des personnes intéressées
A4A et le CNLA
[58] A4A et le CNLA font valoir que, selon la formulation simple du paragraphe 19(4) du RPPA, un transporteur n’est pas obligé de dresser une liste de toutes les causes d’un retard, et ils affirment que l’explication du rejet d’une demande devrait porter uniquement sur le facteur ayant contribué le plus considérablement au retard. Ils soutiennent que les transporteurs se retrouveront avec un fardeau de traitement s’ils doivent fournir toutes les raisons d’un retard, et que cela ne donnera pas grand-chose de plus aux passagers.
APR
[59] APR estime que le paragraphe 19(4) du RPPA doit être lu conjointement avec les obligations de communication énoncées à l’article 13. L’objectif de ces dispositions est de permettre aux passagers de vérifier eux-mêmes si l’explication d’un transporteur pour refuser de verser une indemnité est valable, et ainsi de décider en connaissance de cause s’ils devraient entreprendre un recours judiciaire contre le transporteur. En présence de multiples raisons pour un retard, le transporteur devrait toutes les fournir et, si possible, détailler pour chacune la durée du retard occasionné.
AIRHELP
[60] Selon AirHelp, si de multiples raisons causent un retard, le transporteur devrait toutes les aborder et indiquer la durée du retard occasionné par chacune de ces raisons. Si l’une des raisons d’un retard est considérée comme étant attribuable au transporteur, il faudrait le mentionner. AirHelp indique que les transporteurs fournissent souvent comme réponse qu’il s’agit de « problèmes d’horaire », sans plus. AirHelp estime que ce n’est pas suffisant pour satisfaire aux exigences du paragraphe 19(4) du RPPA, car une telle réponse n’explique pas bien pourquoi un passager n’a pas droit à une indemnisation.
Analyse and déterminations
[61] Selon le paragraphe 19(4) du RPPA, le transporteur dispose de 30 jours, après la date de la réception de la demande, pour verser l’indemnité au passager ou lui fournir les motifs de son refus de la verser.
[62] Dans sans rapport, l’enquêteur a étudié le lien entre les renseignements que le transporteur doit fournir au titre de l’alinéa 13(1)a) du RPPA sur la raison d’une perturbation de vol, et ceux qu’il doit fournir au titre du paragraphe 19(4) lorsqu’il explique pourquoi il rejette une demande d’indemnisation. Il est indiqué dans le rapport que les passagers trouvent que cela prête à confusion quand le transporteur rejette une demande d’indemnisation en se basant sur un vol de l’itinéraire du passager autre que le vol indiqué dans la demande.
[63] Même si les défenderesses font valoir que la confusion des passagers sera plus grande si elles donnent des détails supplémentaires, l’Office fait remarquer que la situation actuelle semble déjà causer de la confusion chez les passagers qui en viennent à douter de la véracité des renseignements fournis par les transporteurs.
[64] L’explication exigée au paragraphe 19(4) du RPPA permet au passager de décider s’il devrait prendre des recours contre le transporteur concernant le rejet de sa demande d’indemnisation. En fonction de ce qui précède, l’Office interprète le paragraphe 19(4) comme suit : les transporteurs doivent fournir aux passagers assez de renseignements dans leur explication pour permettre aux passagers de décider s’ils souhaitent contester le rejet de leur demande par le transporteur. L’Office fait remarquer qu’aux termes du paragraphe 19(4), un transporteur a 30 jours pour donner suite à une demande et que, contrairement à son obligation de fournir la raison d’une perturbation de vol en temps réel prévue à l’alinéa 13(1)a), un transporteur a assez de temps pour mener l’enquête nécessaire liée à la demande et ainsi être en mesure d’expliquer au passager, de manière complète et claire, pourquoi il rejette sa demande d’indemnisation.
[65] Dans une situation où il y a de multiples raisons à un retard, le transporteur doit indiquer dans son explication quelles sont ces raisons et y attribuer les retards correspondants. Il doit également faire ressortir la raison principale du retard ou le facteur y ayant contribué le plus considérablement, comme il sera abordé à la question 3 ci-dessous, et indiquer à quelle catégorie générale appartient la perturbation, soit indépendante de la volonté du transporteur ou attribuable au transporteur mais nécessaire par souci de sécurité. Dans l’explication, le transporteur doit également aborder les situations où un passager subit de multiples perturbations à de multiples vols en route vers la destination indiquée sur son billet initial, selon le critère établi à l’élément 6 de la présente décision. Dans son explication, le transporteur doit fournir assez de renseignements pour que les passagers comprennent le lien entre les renseignements fournis conformément à l’alinéa 13(1)a) et l’explication fournie conformément au paragraphe 19(4), lorsque la demande d’indemnisation est rejetée. S’il y a de nouveaux renseignements sur la cause du retard depuis que la ou les raisons de la perturbation ont été communiquées au passager, le transporteur doit également les expliquer.
QUESTION 3 : COMMENT CATÉGORISER UNE PERTURBATION DE VOL POUR LAQUELLE IL EXISTE DE MULTIPLES RAISONS?
Positions des parties
PRÉSENTATIONS DES DÉFENDERESSES
[66] Air Canada affirme que lorsque de multiples raisons ont causé une perturbation de vol, elle utilise la cause première du retard pour en déterminer la raison dans son ensemble. En cas de multiples retards distincts dont les causes premières sont différentes, Air Canada affirme se baser sur la cause première de la plus longue suite de retards ayant la même cause première.
[67] Sunwing fait valoir que pour déterminer la catégorie d’une perturbation de vol, il faut s’appuyer sur la cause première ou le facteur causal d’origine, sauf si l’on est incapable de déterminer qu’un retard subséquent découle de cet événement causal d’origine.
[68] WestJet et Swoop catégorisent chacune des raisons ayant contribué au retard du passager, puis catégorisent la perturbation de vol globale en se basant sur la principale catégorie ayant contribué au retard, en fonction de sa durée. Elles affirment que de cette façon, elles considèrent la cause principale du retard global du passager.
PRÉSENTATIONS DES DEMANDERESSES
[69] Les demanderesses n’ont pas directement traité de cette question.
Énoncés de position des personnes intéressées
A4A et le CNLA
[70] A4A et le CNLA avancent que les transporteurs doivent d’abord déterminer si les différentes causes de la perturbation de vol ont un lien causal ou sont indépendantes. Ils indiquent également que si les retards sont indépendants et n’ont aucun lien causal, alors la cause première du retard le plus long devrait servir de base pour la catégorisation.
APR
[71] APR est d’avis que le critère du facteur déterminant pour établir la responsabilité devrait permettre de déterminer à quelle catégorie appartient une perturbation causée par de multiples raisons. Il faut donc déterminer ce qui se serait passé si aucun des événements attribuables au transporteur ne s’était produit. APR fait valoir que le tribunal de règlement des conflits au civil (Civil Resolution Tribunal) de la Colombie‑Britannique a récemment appliqué ce critère dans McNabb c Air Canada, 2021 BCCRT 100, pour déterminer la catégorisation au titre du RPPA, et que, parce que les passagers dans ce cas n’auraient pas manqué leur vol de correspondance n’eût été une raison attribuable au transporteur, le tribunal a conclu que cette perturbation de vol était attribuable au transporteur.
AIRHELP
[72] AirHelp soutient que la raison principale de la perturbation de vol ou la raison y ayant contribué le plus considérablement devrait être celle invoquée pour en déterminer la catégorie. Toutefois, si la perturbation de vol est causée par de multiples raisons indépendantes, le groupe affirme que la catégorisation devrait être fondée sur la raison la plus avantageuse pour le passager du fait qu’il est la partie la plus faible. Selon AirHelp, si l’une des raisons du retard est attribuable au transporteur, alors l’obligation de verser les indemnités prévues dans le RPPA devrait être appliquée.
Analyse
[73] Une perturbation de vol peut être complexe et évoluer au fil du temps, et de multiples raisons peuvent contribuer à une perturbation globale. Une perturbation de vol peut se produire lors de situations ayant des liens de causalité, mais les raisons ayant contribué au retard peuvent aussi être totalement indépendantes les unes des autres. Par conséquent, si de multiples raisons ont contribué à une perturbation, il peut être difficile de déterminer la catégorie à laquelle elle appartient, soit : attribuable au transporteur, attribuable au transporteur mais nécessaire par souci de sécurité ou indépendante de la volonté du transporteur. Quoi qu’il en soit, cette catégorisation repose entièrement sur les faits précis de chaque situation.
[74] L’Office estime que l’application stricte du critère de la cause première pourrait être trop rigide pour les situations où la raison initiale n’a pas de lien causal avec les autres. Par ailleurs, un critère basé sur la raison la plus avantageuse pour le passager risque de donner des résultats problématiques si cette raison n’a pas contribué de manière importante à la perturbation globale. En ce qui concerne le critère du facteur déterminant suggéré par APR, ou encore une approche s’appuyant sur la détermination de la cause première du retard le plus long, l’Office considère que ces méthodes risquent de donner lieu à des appréciations qui ne tiennent pas compte de toutes les circonstances de l’affaire.
[75] L’Office conclut plutôt que la raison principale d’une perturbation ou le facteur y ayant contribué le plus considérablement est le critère qu’il convient d’utiliser pour catégoriser une perturbation de vol causée par de multiples raisons. L’application de ce critère comporte trois étapes :
1) déterminer les raisons de la perturbation de vol, et attribuer les retards correspondants à chacune de ces raisons;
2) déterminer la raison principale de la perturbation de vol ou encore le facteur y ayant contribué le plus considérablement;
3) catégoriser la perturbation de vol en se basant sur la catégorie de la raison principale ou sur le facteur y ayant contribué le plus
considérablement.
[76] Chaque situation doit être évaluée au cas par cas. Les facteurs pertinents pour déterminer la raison principale de la perturbation, ou le facteur y ayant contribué le plus considérablement, englobent ce qui a causé le plus long retard, et la question de savoir si les différentes raisons du retard ont un lien causal. L’Office considère particulièrement que la cause première du plus long retard est un facteur clé à prendre en considération.
[77] Par exemple, un vol pourrait être retardé en raison à la fois d’un problème mécanique et du mauvais temps. La première étape devrait être de déterminer les raisons de la perturbation et de leur attribuer les retards correspondants. Ce pourrait être, par exemple, de déterminer qu’il y a eu une heure de retard à cause d’un problème mécanique découvert pendant l’inspection d’avant vol, suivie de deux autres heures de retard causées par une situation indépendante : une tempête de neige a obligé le dégivrage de l’avion et le déblayage de la piste, ce qui a ainsi réduit la capacité à l’aéroport. La prochaine étape consisterait à déterminer la raison principale de la perturbation, ou le facteur y ayant contribué le plus considérablement. Dans ce scénario, la tempête de neige pourrait être considérée comme étant la cause principale de la perturbation de vol, car elle semble être la cause première du retard le plus long. La dernière étape consisterait à catégoriser la perturbation de vol, laquelle, dans ce scénario, serait considérée comme étant attribuable aux conditions météorologiques, et donc indépendante de la volonté du transporteur.
QUESTION 4 : COMMENT CATÉGORISER UNE PERTURBATION DE VOL CAUSÉE PAR UNE PÉNURIE DE MEMBRES D’ÉQUIPAGE?
Positions des parties
PRÉSENTATIONS DES DÉFENDERESSES
[78] Les défenderesses font valoir que la plupart des situations de pénurie de membres d’équipage sont causées par des raisons indépendantes de leur volonté, ou qui leur sont attribuables mais nécessaires par souci de sécurité. Elles affirment plus particulièrement que les limites de temps de vol de l’équipage fixées dans les règlements de sécurité sont souvent atteintes parce que d’autres retards sont survenus.
[79] Air Canada est d’avis que chaque situation de pénurie de membres d’équipage devrait être évaluée au cas par cas. Selon elle, une planification adéquate des équipages et l’arrivée tardive d’un membre d’équipage pour des raisons attribuables au transporteur restent des situations qui sont attribuables à ce dernier. Toutefois, une perturbation de vol causée par un équipage ayant dépassé sa limite de temps de vol est liée à une question de sécurité. Air Canada affirme que la cause première d’une perturbation pourrait provenir d’un autre événement; si la pénurie de membres d’équipage est causée par une raison indépendante de la volonté du transporteur, alors cette pénurie devrait également être considérée comme étant indépendante de sa volonté. Air Canada dresse une liste d’exemples de situations qu’elle considère comme étant indépendantes de sa volonté et qui peuvent entraîner des pénuries de membres d’équipage : conditions météorologiques, grèves, pandémies, ou maladie d’un membre d’équipage. Air Canada soutient que l’expiration du temps de vol des membres d’équipage n’est pas toujours prescrite par la loi et que les membres d’équipage sont libres de décider s’ils prendront du service. Elle fait toutefois valoir que les transporteurs ne devraient pas être pénalisés pour une décision discrétionnaire liée à la sécurité, parce que les équipages pourraient sentir une pression les incitant à exploiter un vol afin d’éviter des coûts additionnels pour le transporteur. Air Canada soutient qu’un transporteur n’a pas d’équipage en réserve dans tous les aéroports où il mène ses activités, et elle fait valoir que dans certaines situations, un équipage en réserve pourrait ne pas être disponible.
[80] Sunwing avance que les pénuries de membres d’équipage ne seront habituellement pas causées par des raisons attribuables au transporteur, sauf dans le cas où celui-ci aurait omis d’assigner un équipage à un vol en particulier ou aurait attribué des tâches consécutives trop rapprochées. Comme Air Canada, Sunwing dresse une liste d’exemples de situations qui peuvent entraîner l’expiration du temps de vol de l’équipage. Elle cite également des dispositions du RAC (article 702.94) qui permettent à l’équipage de déterminer si le vol peut être exploité sans danger après que la période maximale de service de vol a été dépassée. Sunwing soutient toutefois que le transporteur est incapable de prédire les niveaux de fatigue des équipages et qu’il peut ne pas être en mesure de prolonger la période de service si l’équipage est fatigué.
[81] WestJet et Swoop font valoir que les pénuries de membres d’équipage sont souvent causées par des raisons indépendantes de la volonté du transporteur, et qu’elles sont toujours liées à des questions de sécurité. Elles soutiennent que des modifications aux dispositions réglementaires sur le temps de vol et de service ajoutent des difficultés pour les transporteurs (article 700.63 du RAC). Elles présentent elles aussi une liste d’autres facteurs qui, à leur avis, devraient être pris en considération, dont :
- le modèle de réseau du transporteur, par exemple si, selon son modèle, il mène ses activités dans de grands centres;
- le temps de la journée où se produit la perturbation;
- combien de temps d’avance le transporteur a été informé de la pénurie de membres d’équipage;
- l’éloignement de l’aéroport;
- des événements opérationnels en cours qui touchent les équipages en réserve du transporteur, comme des retards généralisés causés par de mauvaises conditions météorologiques, ou la pandémie de COVID-19;
- des exigences précises de formation ou de personnel pour l’équipage basées sur le type d’aéronef.
[82] Swoop fait également valoir que les transporteurs à très faible coût sont confrontés à des difficultés supplémentaires, notamment à des moyens limités pour avoir des équipages de remplacement à tous les aéroports où ils mènent leurs activités, et à un bassin restreint de membres d’équipage en attente. Swoop soutient que si l’on exige plus d’équipages en réserve, tout l’aspect économique du modèle d’affaires des transporteurs à très faible coût au Canada risque d’en souffrir.
PRÉSENTATIONS DES DEMANDERESSES
[83] Les demanderesses considèrent que les transporteurs sont responsables des problèmes entourant leurs effectifs. Elles font valoir que les transporteurs devraient savoir quand les limites de temps de service d’un équipage sont atteintes et être capables de régler les pénuries de membres d’équipage dans un délai raisonnable.
Énoncés de position des personnes intéressées
A4A et le CNLA
[84] A4A et le CNLA font valoir que dans le cas des pénuries de membres d’équipage, plusieurs raisons pourraient être considérées comme étant nécessaires par souci de sécurité ou indépendantes de la volonté du transporteur, et non pas attribuables au transporteur. Ils affirment que ces raisons incluent les conflits de travail, les problèmes médicaux, les épidémies de grippe, les pandémies, les accidents de la route qui bloquent l’accès à un aéroport, les phénomènes météorologiques et les dépassements des limites de temps de service d’un équipage pour des raisons indépendantes de la volonté du transporteur. A4A et le CNLA soutiennent que l’expiration du temps de service d’un équipage est une question de sécurité. En ce qui concerne les équipages en réserve, ils affirment que la plupart des membres d’A4A n’ont pas de base d’affectation pour les équipages au Canada, et que la plupart des transporteurs n’ont habituellement pas d’équipage en réserve à tous les aéroports qu’ils desservent. Donc, si un membre d’équipage tombe malade, le transporteur doit faire venir par avion un membre d’équipage en remplacement.
[85] A4A et le CNLA soutiennent également que les limites de temps de service n’expirent pas en soi s’il n’y a pas de raison sous-jacente, et que cette raison sous-jacente devrait être considérée comme étant la cause première de l’expiration du temps de service des équipages.
APR
[86] APR soutient que les transporteurs sont entièrement responsables de leurs effectifs et doivent donc veiller à disposer d’assez d’équipages en réserve. APR fait référence au sous‑alinéa 86.11(1)b)(ii) de la LTC, qui précise les catégories de situations considérées comme étant attribuables au transporteur mais nécessaires par souci de sécurité, et il insiste sur le terme « défaillance mécanique » que le sous-alinéa renferme.
[87] Cela dit, APR fait valoir que les pénuries de membres d’équipage ne devraient pas être considérées comme étant des mesures nécessaires par souci de sécurité. Il fait remarquer que la définition de « nécessaire par souci de sécurité » dans le RPPA même porte essentiellement sur les problèmes mécaniques d’un aéronef. Le groupe soutient également qu’une seule exception dans le RPPA a été indiquée comme étant indépendante de la volonté du transporteur en ce qui concerne les effectifs, et ce sont les conflits de travail, comme les grèves (alinéa 10(1)j)).
AIRHELP
[88] Selon AirHelp, les pénuries de membres d’équipage devraient être considérées comme étant attribuables au transporteur mais nécessaires par souci de sécurité, seulement si, en raison de circonstances très extraordinaires, le transporteur est incapable de trouver un équipage de remplacement et de s’assurer que les membres de l’équipage ne soient pas trop fatigués pour que l’aéronef soit exploité en toute sécurité. AirHelp est d’avis que les transporteurs devraient avoir des équipages en réserve dans les grands aéroports. AirHelp fait référence au Règlement (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil (règlement (CE) n° 261/2004) et soutient que les tribunaux européens ont conclu que la maladie d’un seul membre d’équipage ne fait pas partie des circonstances extraordinaires que les transporteurs peuvent invoquer pour se dégager de leur obligation de verser une indemnisation sous le régime européen.
Analyse et déterminations
[89] Une pénurie de membres d’équipage peut être causée par des situations et des circonstances variées, dont des retards entraînant l’expiration des temps de service. L’Office est d’accord avec les défenderesses lorsqu’elles affirment qu’un transporteur ne devrait pas être pénalisé si lui ou son équipage a pris une décision discrétionnaire concernant l’exploitation sécuritaire d’un aéronef. Toutefois, comme les absences ou les pénuries de personnel font partie du quotidien, il est possible de les prévoir et de planifier en conséquence, y compris celles qui se produisent parce les limites de temps de service sont atteintes.
[90] L’Office fait remarquer que les transporteurs sont responsables de l’établissement des horaires de leurs équipages, y compris d’une planification de continuité raisonnable. La pénurie de membres d’équipage causée par une erreur du transporteur dans l’établissement des horaires serait donc une situation qui lui serait attribuable.
[91] Pour catégoriser une perturbation de vol causée par une pénurie de membres d’équipage, il faut considérer les circonstances entourant cette pénurie, y compris, mais sans s’y limiter, les facteurs suivants :
- à savoir si des événements ayant affecté le vol ont causé la pénurie de membres d’équipage et si ces événements étaient indépendants de la volonté du transporteur, attribuables au transporteur, ou attribuables au transporteur mais nécessaires par souci de sécurité;
- à savoir si le transporteur a préparé et mis en place des plans de continuité raisonnables, compte tenu des éléments qui peuvent influer sur l’affectation d’un nouvel équipage, par exemple si le problème est survenu en région éloignée ou à l’étranger.
[92] En ce qui concerne le premier facteur, une variété d’événements peuvent contribuer à une pénurie de membres d’équipage, qu’ils soient attribuables au transporteur ou indépendants de sa volonté, et la possibilité d’avoir le contrôle sur des événements peut avoir une incidence sur la possibilité d’avoir le contrôle sur la pénurie de membres d’équipage que ces événements entraînent. Le paragraphe 10(1) du RPPA renferme une liste non exhaustive de situations indépendantes de la volonté du transporteur, et certaines de ces situations peuvent contribuer à une pénurie de membres d’équipage, comme des conflits de travail (alinéa 10(1)j)), des conditions météorologiques (alinéa 10(1)c)), ou encore des urgences médicales (alinéa 10(1)h)). La maladie inattendue d’un membre d’équipage pourrait entraîner une pénurie de membres d’équipage; un retard causé par la météo pourrait faire en sorte que les membres d’un équipage dépassent leur limite de temps de service et déterminent qu’il serait dangereux pour eux d’exploiter l’aéronef. De même, un retard causé pour une raison attribuable au transporteur mais nécessaire par souci de sécurité pourrait aussi faire en sorte qu’un équipage dépasse sa limite de temps de service, par exemple un problème mécanique qui entraînerait un retard de vol.
[93] Toutefois, même si les situations indépendantes de la volonté du transporteur, ou celles attribuables au transporteur mais nécessaires par souci de sécurité, contribuent à la pénurie de membres d’équipage, il est quand même possible d’arriver à la conclusion que cette pénurie est attribuable au transporteur, selon le deuxième facteur mentionné précédemment, à savoir si le transporteur a préparé et mis en place des plans de continuité raisonnables pour faire appel à un équipage de remplacement.
[94] Le plan de continuité du transporteur et les éléments qui influent sur l’affectation d’un nouvel équipage seront évalués au cas par cas. L’obligation d’avoir un équipage en réserve devrait être fondée sur les circonstances particulières de la perturbation de vol. L’Office reconnaît que des situations extraordinaires peuvent avoir une incidence sur l’équipage en réserve du transporteur, comme une maladie touchant un nombre important de membres d’équipage. Le transporteur peut également être incapable de trouver un équipage de remplacement en cas de conflit de travail. L’Office fait également remarquer que des retards peuvent affecter les vols servant à amener un équipage de remplacement pour des raisons indépendantes de la volonté du transporteur, comme des retards causés par de mauvaises conditions météorologiques.
[95] Lorsqu’ils établissent des plans de continuité raisonnables, les transporteurs ne sont pas nécessairement tenus d’avoir un équipage en réserve disponible à tous les aéroports où ils mènent leurs activités. Aux aéroports achalandés, comme dans les grands centres, on s’attendra davantage à ce que le transporteur dispose d’un équipage en réserve pour les absences de membres d’équipage dans des cas habituels du quotidien, par exemple qui tombent malades à l’occasion. L’Office comprend que la recherche d’un équipage de remplacement sera probablement plus difficile dans des régions plus éloignées ou à l’étranger, surtout aux endroits où les activités du transporteur sont limitées. Par exemple, si un transporteur canadien exploite un grand nombre de routes à destination de l’Europe, il pourrait être raisonnable de sa part d’avoir un équipage en réserve dans une ville européenne où se trouve un grand aéroport, comme à Londres, au Royaume‑Uni.
[96] Les transporteurs à très faible coût ne sont pas exemptés de l’obligation d’établir des plans de continuité raisonnables. Les facteurs susmentionnés ont permis de répondre à bon nombre des préoccupations soulevées par Swoop concernant son modèle d’affaires, comme tenir compte de l’éloignement de l’aéroport et de la portée des activités du transporteur à l’aéroport.
[97] Dans le contexte du règlement de plaintes liées à des perturbations causées par des pénuries de membres d’équipage, l’Office se penchera sur les éléments de preuve déposés par les transporteurs en lien avec les facteurs pertinents à prendre en compte pour déterminer à quelle catégorie appartiennent les perturbations.
QUESTION 5 : COMMENT CATÉGORISER UNE PERTURBATION DE VOL CAUSÉE PAR UN PROBLÈME INFORMATIQUE OU UNE PANNE DE RÉSEAU?
Positions des parties
PRÉSENTATIONS DES DÉFENDERESSES
[98] Les défenderesses font valoir que les problèmes informatiques et les pannes de réseau sont souvent des situations imprévisibles et impossibles à contrôler qui impliquent des tiers.
[99] Air Canada soutient que d’après son expérience, ces problèmes informatiques sont presque toujours liés à des problèmes impossibles à contrôler, comme le piratage informatique, ou encore à des problèmes externes créés par d’autres intervenants. Elle avance que les transporteurs dépendent souvent des réseaux ou des systèmes informatiques d’un ensemble complexe de tierces parties, par exemple des aéroports. Air Canada fait également valoir que les transporteurs n’ont aucun contrôle sur les problèmes informatiques et les pannes de réseau des autres. Même s’il convenait de commander des examens officiels après ce type d’incident pour en déterminer la cause, Air Canada affirme que ces incidents sont habituellement imprévisibles et impossibles à contrôler.
[100] Sunwing soutient qu’une perturbation de vol devrait être considérée comme étant indépendante de la volonté du transporteur si une panne de réseau est soit causée par un tiers qui n’est pas directement lié avec le transporteur par contrat, soit par une panne généralisée émanant d’un fournisseur de services de communications, ou causée en raison d’exigences relativement à des infrastructures gouvernementales.
[101] WestJet et Swoop font valoir que lorsque l’Office se penche sur des problèmes informatiques et des pannes de réseau, il devrait déterminer jusqu’à quel point la situation est attribuable au transporteur et s’il a pris toutes les mesures raisonnables pour les prévenir. Elles affirment dépendre de nombreux réseaux de tiers sur lesquels elles estiment n’avoir aucun contrôle, comme ceux de NAV CANADA ou des administrations aéroportuaires. Si un transporteur a une relation contractuelle directe avec la tierce partie responsable du système, l’Office devrait demander si le transporteur a pris toutes les mesures raisonnables pour prévenir le problème ou le réduire au minimum.
PRÉSENTATIONS DES DEMANDERESSES
[102] Les demanderesses n’ont pas directement traité de cette question.
Énoncés de position des personnes intéressées
A4A et le CNLA
[103] A4A et le CNLA font valoir que les problèmes informatiques et les pannes de réseau sont des situations opérationnelles imprévisibles et indépendantes de la volonté du transporteur. Ils renvoient à l’alinéa 10(1)g) du RPPA qui inclut les « problèmes liés à l’exploitation de l’aéroport » dans la liste des situations habituellement considérées comme étant indépendantes de la volonté du transporteur. A4A et le CNLA indiquent également que les transporteurs investissent énormément de ressources pour la maintenance et la sécurité des systèmes informatiques complexes auxquels ils se fient et que, chaque fois que surviennent des problèmes informatiques et des pannes de réseau, même s’ils sont brefs, cela coûte extrêmement cher aux transporteurs.
APR
[104] APR fait remarquer que les problèmes informatiques et les pannes de réseau se produisent régulièrement et n’ont rien d’extraordinaire. Selon lui, les transporteurs devraient donc être préparés pour composer avec ces problèmes et s’être déjà dotés de systèmes redondants et de systèmes de sauvegarde, ainsi que de canaux de communication auxquels ils pourraient avoir recours quand les systèmes principaux ne sont pas disponibles. APR affirme que les transporteurs sont responsables de la maintenance de leurs systèmes, y compris de ceux de leurs sous‑traitants. Il affirme également que lorsqu’il faut déterminer si le problème informatique ou la panne de réseau est attribuable au transporteur, il convient de se demander si le transporteur a pris toutes les mesures raisonnables pour prévenir ou atténuer la perturbation. APR fait valoir qu’il est pertinent de savoir si d’autres transporteurs sont également affectés par ce même problème; si le problème touche seulement un ou deux transporteurs et aucun autre, ce sont probablement les choix que le transporteur aura faits concernant ses technologies de l’information qui seront en cause. APR soutient que si la panne touche tous les transporteurs à un aéroport donné, il restera à se demander quelles mesures le transporteur a prises en réaction à l’événement.
AIRHELP
[105] AirHelp soutient que les problèmes informatiques et les pannes de réseau devraient normalement être considérés comme étant des situations attribuables au transporteur. Le groupe indique que selon le Règlement (CE) n° 261/2004, ces situations ne sont pas jugées comme étant extraordinaires. Il affirme également que ces pannes surviennent durant les activités régulières et que les transporteurs devraient être prêts à y faire face et avoir pris des mesures préventives. AirHelp déclare que si un problème informatique ou une panne de réseau survient, les transporteurs devraient être prêts à réagir rapidement.
Analyse
[106] L’Office considère que les transporteurs sont responsables des systèmes informatiques et des réseaux qu’ils contrôlent, y compris de leurs propres systèmes, et des systèmes de certains tiers, comme ceux des entrepreneurs. Les problèmes informatiques et les pannes de réseau font partie du quotidien des transporteurs, et c’est pourquoi ces derniers devraient les anticiper et planifier en conséquence, par exemple en prenant des précautions de cybersécurité raisonnables. On s’attend donc à ce que les transporteurs réagissent au quart de tour pour régler un problème dès qu’il survient.
[107] Afin de déterminer à quelle catégorie appartient une perturbation de vol associée à un problème informatique ou à une panne de réseau, il faut considérer les circonstances qui l’entourent en se questionnant, entre autres, sur les facteurs suivants :
- si le transporteur a un certain contrôle sur le système touché;
- si le problème ou la panne sont causés par une cyberattaque;
- advenant que le transporteur ait effectivement un certain contrôle sur le système touché, s’il a pris toutes les mesures raisonnables pour prévenir la panne ou le problème;
- comment le transporteur a donné suite à la panne ou au problème, par exemple, s’il a préparé et mis en place des plans de continuité raisonnables.
[108] En ce qui concerne le premier facteur, comme lorsque certains systèmes sur lesquels compte le transporteur sont exploités par des tiers, il a très peu de contrôle sur ces systèmes. Par exemple, si une défaillance met en cause un système ou un réseau d’un aéroport, elle pourrait être considérée comme étant un problème d’exploitation de l’aéroport au sens de l’alinéa 10(1)g) du RPPA, l’un des exemples de la liste non exhaustive de situations considérées comme étant indépendantes de la volonté du transporteur. Même si les transporteurs peuvent être considérés comme ayant très peu de contrôle sur les réseaux de certains tiers, on pourrait estimer qu’ils ont le contrôle sur les systèmes informatiques et les réseaux d’autres tiers avec qui ils font affaire, par exemple le système de réservation en ligne exploité par un entrepreneur en informatique ou par un mandataire du transporteur.
[109] Concernant le deuxième facteur, les cyberattaques sont des actes illégaux et donc des situations considérées comme étant indépendantes de la volonté du transporteur au sens de l’alinéa 10(1)b) du RPPA. Toutefois, l’Office fait remarquer que même dans le cas d’une cyberattaque, toutes les circonstances entourant l’événement doivent être prises en compte quand il faut déterminer si la perturbation est effectivement causée par une situation indépendante de la volonté du transporteur.
[110] Plus précisément, le troisième facteur porte sur la question de savoir si le transporteur a pris des mesures préventives pour protéger ses systèmes (ou ceux sur lesquels il a le contrôle). Il doit prévoir une maintenance adéquate pour ses systèmes, ce qui comprend prendre les précautions de cybersécurité qui s’imposent. En cas de cyberattaque, si le transporteur n’a pas pris de précautions de sécurité raisonnables, la perturbation, au lieu d’être considérée comme étant la conséquence d’un acte illégal ou de sabotage, pourrait être considérée comme étant la conséquence d’une panne de service causée par une mauvaise planification, laquelle sera donc attribuable au transporteur.
[111] Le quatrième facteur porte sur la réponse du transporteur à la panne de réseau ou au problème informatique, notamment à savoir s’il a préparé et instauré un plan de continuité raisonnable, comme mettre en œuvre des procédures de rechange ou prendre des mesures raisonnables pour réparer le problème ou redémarrer le réseau. Par exemple, devant un problème avec son système d’enregistrement en ligne, un transporteur peut mettre du personnel à la disposition des passagers pour les aider à l’aéroport ou au téléphone.
[112] Dans le contexte où l’Office doit régler des demandes sur des perturbations causées par des problèmes informatiques ou des pannes de réseau, pour déterminer à quelle catégorie appartient la perturbation, il étudiera les éléments de preuve déposés par les transporteurs en lien avec ces facteurs pertinents.
QUESTION 6 : COMMENT DÉTERMINER LA CATÉGORIE POUR ÉVALUER SI UN PASSAGER A DROIT À UNE INDEMNITÉ POUR INCONVÉNIENTS S’IL A SUBI PLUSIEURS PERTURBATIONS SUR PLUSIEURS VOLS EN ROUTE VERS LA DESTINATION INDIQUÉE SUR SON BILLET INITIAL?
Positions des parties
PRÉSENTATIONS DES DÉFENDERESSES
[113] Air Canada affirme avoir utilisé deux approches pour catégoriser des situations où un passager a subi plusieurs perturbations sur plusieurs vols en route vers sa destination finale. Au départ, Air Canada tenait compte du retard le plus long, déterminé en fonction de ce qui a causé le retard ayant duré le plus longtemps pour le passager, peu importe si cela lui avait fait manquer un vol de correspondance. Même si Air Canada maintient que le retard le plus long serait le facteur ayant contribué le plus considérablement au retard global pour le passager, elle a conclu que cette approche causait de l’insatisfaction au passager. Elle affirme avoir donc abandonné cette approche pour utiliser plutôt celle basée sur la cause de la perturbation de vol initiale ayant fait en sorte que le passager a manqué sa correspondance, sans tenir compte des raisons de retards non liés aux vols subséquents. Selon Air Canada, il est important que l’Office, par souci d’équité et de cohérence, établisse une approche claire et structurée pour effectuer la catégorisation dans ces cas.
[114] Sunwing affirme que le retard d’un segment de vol précédent causera un retard par effet domino sur les segments de vol suivants prévus sur l’itinéraire du passager vers la destination indiquée sur son billet initial. Elle affirme donc que c’est la cause première de la perturbation de vol initiale qui permettra d’en déterminer la catégorie, sauf si la durée d’un retard subséquent sans lien avec les autres retards est plus longue.
[115] WestJet et Swoop soutiennent que le principal élément à prendre en considération devrait être la principale cause ayant contribué à l’arrivée en retard du passager. Par exemple, les défenderesses affirment que si un retard causé par de mauvaises conditions météorologiques fait en sorte qu’un passager doive être réacheminé à bord d’un nouveau vol partant une heure plus tard, mais que ce nouveau vol de remplacement est lui-même retardé de trois heures en raison de maintenance imprévue, la principale cause de l’arrivée en retard du passager à sa destination finale sera le retard de trois heures attribuable à la maintenance imprévue, et non le retard d’une heure causé par la perturbation initiale.
PRÉSENTATIONS DES DEMANDERESSES
[116] Une des demanderesses ayant subi des retards sur plusieurs vols en route vers la destination finale indiquée sur son billet fait valoir que sa réclamation ne concerne pas le retard du vol précis que mentionne l’enquêteur dans son rapport, mais bien l’arrivée à sa destination finale avec, au total, 25 heures de retard.
Énoncés de position des personnes intéressées
A4A et le CNLA
[117] A4A et le CNLA renvoient à leur réponse précédente concernant la façon de déterminer la catégorie des perturbations de vol lorsqu’un retard a de nombreuses causes et, selon eux, le même processus en deux étapes devrait s’appliquer. Ils soutiennent que si le passager est réacheminé sur un autre vol, toute perturbation à ce vol de remplacement aura été causée par la perturbation de vol initiale ayant mené au réacheminement. En conséquence, les événements qui affectent les vols de remplacement n’affecteront habituellement pas la catégorisation, laquelle resterait basée sur la raison de la perturbation de vol initiale.
APR
[118] Selon APR, l’Office devrait appliquer le critère du facteur déterminant, c’est‑à‑dire évaluer ce qu’il serait advenu si aucun des événements attribuables au transporteur ne s’était produit.
AIRHELP
[119] AirHelp répète que la raison première d’une perturbation de vol ou celle y ayant contribué le plus considérablement devrait être celle à prendre en considération, et que s’il y a de multiples raisons indépendantes, alors il faut utiliser celle qui s’avère être la plus avantageuse pour le passager du fait qu’il est la partie la plus faible. Le groupe soutient que les événements qui touchent les vols de remplacement devraient donc affecter la catégorisation dans la mesure où ce sera à l’avantage du passager.
Analyse
[120] Il se peut qu’un passager arrive en retard à sa destination finale en raison de perturbations de plusieurs vols de son itinéraire, par exemple si son vol initial est perturbé et qu’il est réacheminé sur un autre vol lui aussi perturbé.
[121] Le montant d’indemnisation auquel un passager pourrait avoir droit en vertu à l’article 19 du RPPA dépend de « l’heure d’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur le titre de transport [billet] initial ». Donc, lorsqu’il faut déterminer si un passager ayant subi un retard en raison de perturbations de plusieurs vols a droit à une indemnité pour inconvénients au titre de l’article 19, il est nécessaire de prendre en compte tous les vols en cause dans le retard à l’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur son billet initial. Selon les circonstances, cela pourrait inclure les perturbations aux vols de remplacement.
[122] L’Office a indiqué précédemment comment catégoriser les perturbations de vol causées par de multiples raisons. Il conclut qu’il est correct d’utiliser une version modifiée du critère lorsqu’un passager subit plusieurs perturbations pour plusieurs vols :
1) déterminer les raisons de chaque perturbation de vol, et attribuer les retards correspondants à chacune de ces raisons;
2) déterminer la raison principale de l’arrivée en retard du passager à la destination indiquée sur son billet initial, ou déterminer le facteur
ayant le plus considérablement au retard;
3) catégoriser la perturbation de vol en se basant sur la catégorie de la raison principale ou du facteur y ayant contribué le plus
considérablement.
[123] Rappelons que chaque situation doit être évaluée au cas par cas. Lorsqu’il faut reconnaître toutes les raisons de chaque perturbation de vol, il faudrait aussi reconnaître les perturbations aux vols de remplacement. Parmi les facteurs pertinents qui permettent de déterminer la raison première d’une perturbation ou le facteur y ayant contribué le plus considérablement, il faut aussi inclure trois facteurs : ce qui a causé le retard le plus long, si un vol de correspondance a été manqué, et si les différentes perturbations ont un lien causal.
[124] Pour déterminer la cause première du retard, il faut que la perturbation de vol utilisée comme base pour la catégorisation ait un lien causal avec le fait que le passager soit arrivé en retard à sa destination finale. Par exemple, si le vol initial d’un passager est retardé, mais que le passager ne manque pas son vol de correspondance puisque le vol de correspondance a aussi été retardé, alors il n’y a pas de lien causal entre la perturbation du vol initial et l’arrivée en retard du passager à sa destination finale. Dans ce cas, la cause du retard du vol initial ne devrait pas servir de base pour déterminer si une perturbation de vol est attribuable au transporteur.
[125] Les situations où de multiples perturbations affectent de nombreux vols peuvent être très complexes. Par exemple, un passager a un itinéraire avec un seul transporteur de Vancouver (Colombie‑Britannique) à Halifax (Nouvelle-Écosse), via Toronto (Ontario), mais le passager manque cette correspondance à Toronto parce que son vol est parti de Vancouver avec une heure de retard à cause d’une tempête de neige. À Toronto, le passager pourrait donc être réacheminé, deux heures plus tard, sur un nouvel itinéraire, avec le même transporteur, de Toronto à Halifax via Montréal (Québec). Le vol de remplacement du passager de Montréal à Halifax pourrait ensuite être retardé pendant encore trois heures parce que le transporteur a pris une décision opérationnelle qui lui est attribuable. Comme le retard de trois heures causé par la décision opérationnelle prise à Montréal est plus long que le retard de deux heures à Toronto, la catégorisation pour déterminer si le passager a droit à une indemnisation pourrait être basée sur le retard de trois heures lié à la décision opérationnelle, et la perturbation de vol pourrait être considérée comme étant attribuable au transporteur.
QUESTION 7 : QU’EST-CE QUI DOIT OU NE DOIT PAS ÊTRE CONSIDÉRÉ COMME ÉTANT DE LA « MAINTENANCE PLANIFIÉE » AU SENS DU PARAGRAPHE 1(1) DU RPPA?
Positions des parties
PRÉSENTATIONS DES DÉFENDERESSES
[126] Air Canada soutient que les documents de référence de l’Office ne reflètent pas les mesures de sécurité prévues dans la LTC ni la définition que donne Transports Canada du terme « maintenance planifiée ». Air Canada n’est pas d’accord pour s’appuyer sur ce qu’elle considère comme étant une définition beaucoup trop large de ce qu’est une « maintenance planifiée » au sens du RAC (paragraphe 101.01(1)), qui inclut des inspections et des vérifications visuelles effectuées à intervalles prédéterminés conformément au RAC, à un calendrier de maintenance ou à une consigne de navigabilité. Air Canada fait valoir que la maintenance planifiée au sens du RPPA devrait plutôt être définie comme étant limitée aux situations où il est prévu qu’un aéronef sera mis hors service pour qu’on effectue les réparations ou les changements planifiés à des pièces de l’aéronef.
[127] Air Canada fait également valoir que les problèmes découverts durant des vérifications régulières sont forcément imprévus et que le transporteur ne devrait pas en être tenu responsable et donc obligé de verser des indemnités. Si de la maintenance est effectuée sur un aéronef conformément à son calendrier de maintenance et qu’une défaillance mécanique se produit quand même, ce n’est pas une défaillance qui aurait pu être prévue, et de ce fait, elle devrait être considérée comme étant liée à la sécurité. Selon Air Canada, des problèmes de sécurité peuvent être découverts n’importe quand sur des pièces, et il est primordial de préserver le principe de la politique non punitive de rapport de sécurité selon lequel il ne faut pas s’inquiéter de conséquences financières si des signalements sont faits.
[128] Sunwing affirme que les problèmes de maintenance découverts durant les vérifications d’avant et d’après vol ne sont pas à proprement parler de la maintenance planifiée, mais plutôt une vérification extérieure à la recherche de problèmes imprévus. Sunwing fait valoir que la maintenance planifiée est faite d’avance et que du temps est alloué en fonction du temps recommandé pour effectuer la vérification et corriger les défectuosités qu’on s’attend habituellement à découvrir dans ces situations. Toutefois, Sunwing fait valoir qu’il est impossible de prévoir tout ce qu’il serait possible de découvrir durant la maintenance planifiée. Donc si, au cours de la maintenance planifiée, on découvre quelque chose d’imprévu, en dehors des tâches prévues de vérification et de maintenance, alors ce ne serait pas considéré comme étant « lors de la maintenance planifiée », puisque les problèmes et les heures additionnelles qu’ils entraînent ne pourraient pas être anticipés.
[129] WestJet et Swoop affirment que le RPPA fait uniquement référence à de la maintenance planifiée et non pas à l’entretien régulier ou prévu, qui sont des termes qu’on retrouve dans les documents de référence publiés sur le site Web de l’Office. Elles soutiennent que la formulation « lors de la maintenance planifiée » est celle qui est utilisée dans la définition du terme « défaillance mécanique » au paragraphe 1(1) du RPPA, terme qui n’est utilisé nulle part ailleurs dans le RPPA. Elles soutiennent également que la définition de « nécessaire par souci de sécurité », au paragraphe 1(1), fait uniquement référence à la « maintenance planifiée », et non à des problèmes découverts « lors de la maintenance planifiée ».
[130] C’est pourquoi WestJet et Swoop font valoir qu’il sera inutile de donner une définition à l’énoncé « lors de la maintenance planifiée ». Selon elles, l’intention du législateur et de l’Office dans la façon de rédiger le RPPA était que le terme « maintenance planifiée effectuée conformément aux exigences légales » renvoie aux vérifications prévisibles dans le cadre de la maintenance qu’un transporteur planifiera et mettra à l’horaire. Elles soutiennent que si un nouveau problème est découvert durant la maintenance planifiée et prévue, et que cela retarde par la suite la remise en service de l’aéronef après la maintenance, l’aéronef devra être dûment réparé, sans précipitation, et sans la menace inutile de sanctions financières additionnelles.
PRÉSENTATIONS DES DEMANDERESSES
[131] Les demanderesses font valoir que les transporteurs sont responsables de l’entretien de leur équipement et qu’ils devraient être capables de gérer les réparations dans un délai raisonnable. Une des demanderesses soutient que les transporteurs devraient être responsables des problèmes bien documentés avec des aéronefs en particulier, et aussi responsables d’autres enjeux, comme le fait de ne pas avoir de techniciens disponibles 24 heures sur 24 pour effectuer la maintenance, ou de ne pas avoir la pièce nécessaire en stock.
Énoncés de position des personnes intéressées
A4A et le CNLA
[132] A4A et le CNLA affirment que les règles américaines et canadiennes exigent une maintenance planifiée à des intervalles réguliers conformes à la réglementation, et que l’aéronef est mis hors service pendant que la maintenance planifiée a lieu. La maintenance non planifiée d’avant ou d’après vol a lieu lorsqu’un problème inattendu est découvert et qu’il faut le régler immédiatement pour que l’aéronef puisse être exploité sans danger. Les transporteurs ne devraient pas être tenus responsables d’un problème qui survient à cause du défaut prématuré d’une pièce ou d’un système dont le calendrier de maintenance a été respecté; voilà l’intention des rédacteurs de la législation. La politique non punitive de rapport de sécurité est un principe fondamental du système de gestion de la sécurité d’un transporteur.
APR
[133] APR fait valoir que la catégorie « nécessaire par souci de sécurité » sert à dégager les compagnies aériennes de l’obligation de verser une indemnité dans les cas de maintenance imprévue qui obligent l’immobilisation immédiate d’un aéronef, dans des situations où il est vraiment impossible d’organiser un aéronef de remplacement. APR souligne que le transporteur a l’obligation d’atténuer les effets des retards sur les vols subséquents (paragraphe 11(2)), et que ce serait le critère à appliquer si un problème était découvert durant la réparation d’un autre problème. APR fait également valoir que les vérifications d’avant et d’après vol sont « planifiées », en ce sens que le moment où les vérifications seront faites est connu et prévu en fonction de l’heure de départ prévue du vol; selon le groupe, il s’agit d’une forme de maintenance effectuée conformément aux obligations légales.
AIRHELP
[134] AirHelp fait valoir que l’Office devrait adopter une interprétation large de l’énoncé « lors de la maintenance planifiée », et que les nouveaux problèmes découverts durant la réparation d’un autre problème devraient être considérés comme faisant partie de la maintenance planifiée. AirHelp ajoute que la maintenance planifiée devrait également inclure les vérifications d’avant et d’après vol, car ce sont des exigences du RAC. Un problème devrait être considéré comme ne faisant pas partie de la maintenance planifiée seulement s’il est découvert en dehors de ces vérifications, par exemple après que l’aéronef est déplacé en vue du départ ou pendant qu’il est en vol. AirHelp fait référence à la jurisprudence européenne liée au Règlement (CE) n° 261/2004 et fait valoir que l’indemnisation prévue sous ce régime est habituellement payable dans la plupart des cas de problèmes mécaniques. AirHelp fait également valoir que la décision de ne pas chercher un aéronef en remplacement d’un aéronef qui a besoin de maintenance est d’ordre opérationnel, donc attribuable au transporteur.
Analyse
[135] Les passagers n’ont pas droit à une indemnisation pour inconvénients si leur vol est perturbé pour des raisons attribuables au transporteur mais nécessaires par souci de sécurité (article 11 du RPPA), ce qui inclut les cas de défaillances mécaniques. Cette catégorie n’inclut pas les perturbations découlant de la maintenance planifiée, qui sont considérées comme étant attribuables au transporteur (article 12). En conséquence, la définition de « maintenance planifiée » est importante puisqu’elle a une incidence sur les droits des passagers, notamment leur droit à des indemnités pour les inconvénients subis.
[136] La disposition habilitante de l’article 11 du RPPA est le sous-alinéa 86.11(1)b)(ii) de la LTC. Cette disposition énonce les pouvoirs de l’Office de prendre des règlements pour indiquer les obligations des transporteurs dans des situations qui leur sont attribuables mais nécessaires par souci de sécurité, et il y est précisé que ces situations incluent les cas de défaillance mécanique. Sous le régime de la partie II de la LTC (portant sur le transport aérien), le paragraphe 1(1) du RPPA définit d’une part la « défaillance mécanique », laquelle exclut explicitement les problèmes découverts « lors de la maintenance planifiée effectuée conformément aux exigences légales », et d’autre part la notion « nécessaire par souci de sécurité », qui exclut explicitement les problèmes découverts lors de « la maintenance planifiée effectuée conformément aux exigences légales ».
[137] L’Office conclut que la maintenance régulière prévue pour répondre à des exigences législatives ou réglementaires, lorsque l’aéronef est mis hors service, constitue une « maintenance planifiée » au sens des définitions du paragraphe 1(1) du RPPA. Par conséquent, les perturbations découlant de mesures nécessaires pour régler les problèmes découverts durant la maintenance planifiée seraient considérées comme étant attribuables au transporteur. On s’attend à ce que les transporteurs fassent leur planification autour de la période de mise hors service de l’aéronef en vue de sa maintenance planifiée conformément aux exigences légales, mais aussi qu’ils réservent du temps pour le cas où l’on déterminerait, durant la maintenance planifiée, que d’autres travaux de maintenance s’imposent.
[138] Toutefois, en ce qui concerne les vérifications d’avant et d’après vol, l’Office conclut que ce ne sont pas des activités de maintenance planifiée, puisque l’aéronef n’est pas mis hors service pendant ces brèves vérifications. Les problèmes mécaniques impossibles à prévoir et découverts pendant ces vérifications seraient considérés comme étant attribuables au transporteur mais nécessaires par souci de sécurité, sauf dans des circonstances restreintes, par exemple lorsque le problème découvert n’empêche pas l’exploitation de l’aéronef en toute sécurité, ou qu’il est attribuable à une situation indépendante de la volonté du transporteur, comme une collision avec un animal sauvage (alinéa 10(1)i) du RPPA). Les vérifications d’avant et d’après vol, effectuées pour tous les vols, servent à repérer des problèmes imprévus de dernière minute, s’il y a lieu, que la maintenance régulière planifiée n’aurait pas empêchés. Donc, toute perturbation qui en résulte est impossible à anticiper ou à mettre au calendrier.
QUESTION 8 : QUELS FACTEURS L’OFFICE DEVRAIT-IL PRENDRE EN CONSIDÉRATION POUR DÉTERMINER SI LE TRANSPORTEUR A PRIS TOUTES LES MESURES RAISONNABLES POUR ATTÉNUER LES CONSÉQUENCES DU RETARD OU DE L’ANNULATION DE VOLS PRÉCÉDENTS, COMME L’EXIGENT LES PARAGRAPHES 10(2) ET 11(2) DU RPPA?
Positions des parties
PRÉSENTATIONS DES DÉFENDERESSES
[139] Air Canada fait valoir que l’application des paragraphes 10(2) et 11(2) du RPPA devrait être évaluée au cas par cas, et que l’Office ne devrait pas établir des facteurs trop restrictifs, parce que les scénarios sont trop variés pour être déterminés d’avance dans des documents de référence détaillés. Elle soutient que la portée des documents de référence de l’Office devrait être assez large pour être applicable à la nature diversifiée des activités au Canada. Air Canada indique que la nature du retard est un facteur qui peut modifier la portée d’un effet domino causé par le retard ou l’annulation d’un vol précédent.
[140] Par exemple, Air Canada affirme qu’une tempête de neige à un aéroport peut avoir un effet domino généralisé sur d’autres vols. Elle soutient que la portée de cet effet domino peut également varier selon le type d’aéronef et l’usage que le transporteur en fait dans le cadre de ses activités. Selon Air Canada, un Dash-8 peut faire plus de trajets en une journée qu’un Boeing 777. Par conséquent, si un Dash-8 est en retard, cela risque de perturber davantage de vols par la suite. Air Canada affirme que le lieu où se produit le retard peut également être un facteur pertinent, par exemple si la perturbation de vol a lieu à l’étranger.
[141] Air Canada soutient que l’Office devrait présumer que le transporteur a pris toutes les mesures raisonnables pour atténuer les conséquences de la perturbation de vol initiale, car le transporteur a intérêt à reprendre rapidement le temps perdu. Elle fait aussi remarquer qu’il est excessif d’obliger le transporteur à prouver qu’il a pris toutes les mesures raisonnables, parce que la démarche exige que les transporteurs reconstruisent une chaîne d’événements passés avec tous les facteurs pertinents en présence lorsque le retard se déroulait.
[142] Sunwing affirme que l’Office devrait tenir compte de tous les facteurs énumérés dans la question posée aux parties. Sunwing soutient que des facteurs secondaires pourraient s’ajouter et rendre difficile l’atténuation des conséquences d’une perturbation de vol, par exemple des tensions géopolitiques, des événements touchant l’ensemble de l’industrie, de même que des règles et des restrictions régionales. Sunwing soutient également que la taille géographique du Canada, le petit nombre de transporteurs et les restrictions réglementaires complexifient parfois les mesures qui permettraient de revenir aisément à la normale après des perturbations de vol ou de faire appel à des transporteurs de remplacement. Sunwing affirme qu’elle ne peut pas disposer d’aéronefs et d’équipages de remplacement à chaque aéroport en prévision de problèmes opérationnels et, plus particulièrement, que ce serait impossible aux petits aéroports.
[143] WestJet et Swoop indiquent que des « mesures raisonnables » doivent être déterminées en fonction des circonstances du cas qui se présente. Elles ne sont pas d’accord avec les guides publiés sur le site Web de l’Office exigeant que le transporteur prenne « toutes les mesures possibles » pour atténuer les conséquences de la perturbation de vol initiale. Elles soutiennent que la norme ne devrait pas être la perfection et que l’Office devrait tenir compte des réalités des systèmes de transport aérien complexes, ainsi que des nombreux facteurs intrinsèques et extrinsèques qui peuvent mener à un retard. De plus, elles soutiennent que la norme devrait viser le juste équilibre entre les droits des passagers et les réalités opérationnelles du transporteur. Selon WestJet et Swoop, pour évaluer chaque cas individuellement, il faudra considérer différents facteurs. Elles donnent plusieurs exemples, comme les limites des aéronefs, les problèmes liés à la météo et à l’établissement des trajets, la taille du parc d’aéronefs d’un transporteur, son modèle d’affaires et l’emplacement de sa base d’exploitation.
[144] Swoop explique qu’en raison de son statut de transporteur à très faible coût, elle a de la difficulté à trouver des aéronefs de remplacement. Plus particulièrement, Swoop affirme : qu’elle a recours à un réseau point à point qui n’a pas les mêmes horaires redondants qu’un gros transporteur dont le modèle d’affaires diffère; qu’elle ne garde pas en attente beaucoup d’équipages en réserve; que son réseau offre des vols directs sans escale, sans période d’attente ni correspondances complexes. Swoop fait valoir que, si l’on exige qu’elle ait des aéronefs de remplacement ou des équipages supplémentaires en attente, toute la dimension économique du modèle d’affaires des transporteurs à très faible coût au Canada risque d’en pâtir.
PRÉSENTATIONS DES DEMANDERESSES
[145] Concernant l’obligation d’atténuer les conséquences du retard ou de l’annulation d’un vol précédent, les demanderesses estiment que les défenderesses n’ont pas effectué une bonne planification pour parer aux perturbations lorsque se sont présentés des problèmes comme des retards causés par de mauvaises conditions météorologiques. Par exemple, l’une des demanderesses a fait valoir que la défenderesse ayant exploité son vol aurait dû prévoir plus de temps entre les vols pour le déglaçage d’un aéronef, puisque le temps froid était facile à prévoir en cette période de l’année à Calgary. Une autre demanderesse conteste particulièrement le fait que la défenderesse ait utilisé la raison du retard d’un vol précédent, d’une part parce qu’il n’y avait aucun lien direct entre les retards précédents et ceux qui ont suivi, et d’autre part parce que le transporteur aurait dû prendre des mesures afin de trouver un équipage pour remplacer l’autre après l’expiration de son de temps de service.
Énoncés de position des personnes intéressées
A4A et le CNLA
[146] Selon A4A et le CNLA, l’Office devrait présumer que les transporteurs ont fait tout ce qu’ils ont pu pour atténuer les perturbations à leurs horaires parce qu’ils sont motivés à fournir le meilleur service qui soit aux passagers, et parce que les retards peuvent coûter cher aux transporteurs. Ils affirment qu’il n’est pas rare qu’un transporteur prenne plusieurs jours pour se remettre d’une perturbation de vol majeure, selon des facteurs comme : l’éloignement; le fait que la perturbation se produise à l’extérieur du Canada; la disponibilité d’un aéronef ou d’un équipage de remplacement et l’endroit où ils se trouvent; le moment de la journée auquel survient la perturbation. Ils soutiennent que l’Office devrait tenir compte de tous les facteurs invoqués par le transporteur pour déterminer s’il a pris toutes les mesures raisonnables pour atténuer les conséquences de la perturbation initiale. Ils avancent également que les transporteurs se retrouveraient avec un fardeau intolérable et injuste si l’on décide de tenir compte des circonstances qui entourent uniquement le vol touché et le vol qui l’a immédiatement précédé.
APR
[147] APR soutient que l’énoncé « a pris toutes les mesures raisonnables » tire son origine de l’article 19 de la Convention pour l’Unification de certaines règles relatives au transport aérien international – Convention de Montréal (Convention de Montréal), et que la jurisprudence liée à la Convention de Montréal fait porter le fardeau de la preuve au transporteur, qui doit démontrer qu’il a pris toutes les mesures qui pouvaient raisonnablement s’imposer pour atténuer les conséquences d’une perturbation de vol. APR soutient que l’énoncé « a pris toutes les mesures raisonnables » aux paragraphes 10(2) et 11(2) du RPPA devrait avoir la même signification, et que le fardeau de la preuve devrait, de la même façon, revenir au transporteur. APR fait référence à l’affaire Lukacs c United Airlines, 2009 MBQB 29, et dresse une liste des facteurs qui, à son avis, permettent de déterminer si le transporteur s’est acquitté de ce fardeau. Selon APR, cela comprend les facteurs suivants :
- le régime de maintenance de l’aéronef, entre autres à savoir si le bris mécanique aurait pu être évité;
- la disponibilité d’un aéronef de remplacement dans d’autres centres;
- à savoir si le nombre d’aéronefs de remplacement était raisonnablement suffisant.
[148] APR affirme que cette liste de facteurs n’est toutefois pas exhaustive et qu’il faut absolument utiliser une approche au cas par cas axée sur les circonstances de chaque affaire.
AIRHELP
[149] AirHelp soutient que les effets domino provoqués par des retards ou des annulations de vols précédents ne sont pas considérés comme étant des circonstances extraordinaires aux termes du Règlement (CE) n° 261/2004. Pour interpréter le sens de l’énoncé « toutes les mesures raisonnables pour atténuer les conséquences du retard ou de l’annulation d’un vol précédent », AirHelp réfère l’Office à la jurisprudence de l’Union européenne qui, selon le groupe, exige que le transporteur prévoie une réserve de temps entre les vols pour éviter les effets domino. AirHelp fait valoir que lorsqu’un transporteur prévoit cette réserve de temps, il doit tenir compte du risque de retard du vol précédent, ainsi que des facteurs soulevés dans la question de l’Office, comme l’éloignement.
Analyse
[150] Un effet domino se produit lorsque le retard ou l’annulation d’un vol précédent est la cause directe de la perturbation d’un vol subséquent. Les effets domino peuvent être le résultat de divers scénarios, et peuvent se produire en raison du retard ou de l’annulation de vols de retour ou de correspondance qui devaient être effectués avec un aéronef ou un équipage qui arrivait.
[151] Selon le paragraphe 10(2) du RPPA, si une perturbation de vol est directement imputable à un retard ou à une annulation d’un vol précédent attribuable à une situation indépendante de la volonté du transporteur, cette perturbation est également considérée comme étant attribuable à une situation indépendante de la volonté du transporteur si ce dernier a pris toutes les mesures raisonnables pour atténuer les conséquences du retard ou de l’annulation du vol précédent. Le paragraphe 11(2) est au même effet, sauf qu’il vise les situations attribuables au transporteur, mais nécessaires par souci de sécurité.
[152] Donc, pour que les paragraphes 10(2) et 11(2) du RPPA s’appliquent, la perturbation qui suit doit être « directement imputable » à un retard ou à une annulation qui a précédé, et le transporteur doit avoir pris « toutes les mesures raisonnables » pour atténuer les conséquences du retard ou de l’annulation qui a précédé. Selon ces dispositions, il revient au transporteur de prouver qu’il a pris toutes les mesures raisonnables pour prévenir ou réduire au minimum les conséquences de l’effet domino. Il n’y a pas de présomption selon laquelle le transporteur a pris toutes les mesures raisonnables pour atténuer les conséquences de l’effet domino.
[153] Afin de déterminer si le transporteur a pris toutes les mesures raisonnables, il faut tenir compte des circonstances entourant l’effet domino, entre autres des facteurs suivants :
- la durée de l’effet domino;
- l’éloignement et si l’événement a lieu à l’étranger;
- la disponibilité d’un autre aéronef ou d’un autre équipage;
- l’effet de la cause du retard ou de l’annulation de vol sur les activités du transporteur.
[154] En ce qui concerne le premier facteur, un effet domino peut avoir des conséquences non seulement sur le prochain vol pour lequel le transporteur entendait utiliser l’aéronef ou l’équipage, mais aussi, selon les circonstances, sur des vols subséquents pour lesquels le transporteur entendait initialement utiliser l’aéronef ou l’équipage. Les circonstances de chaque cas précis serviront à déterminer le temps qui peut être considéré comme étant raisonnablement suffisant pour qu’un transporteur puisse revenir à la normale après le retard ou l’annulation d’un vol précédent qui a provoqué l’effet domino. L’Office fait toutefois remarquer que plus l’effet domino dure longtemps, plus la probabilité sera grande que des preuves fiables seront exigées pour démontrer que le transporteur a atténué les conséquences de l’effet domino pendant qu’il se produisait.
[155] Concernant les deux facteurs suivants, soit le lieu où survient une perturbation de vol et la disponibilité d’un nouvel aéronef ou équipage, le fait de prendre « toutes les mesures raisonnables » pour atténuer l’effet domino n’exige pas forcément que les transporteurs aient à leur disposition des aéronefs ou des équipages de remplacement à tous les aéroports où ils mènent leurs activités. Dans les grands aéroports, on s’attendra davantage à ce que le transporteur dispose d’aéronefs ou d’équipages de remplacement. L’Office reconnaît qu’il sera probablement plus difficile pour les transporteurs de tenter de trouver des aéronefs ou des équipages de remplacement en région éloignée et à l’étranger, surtout si leurs activités y sont restreintes.
[156] Concernant le quatrième facteur, l’Office s’attend à ce que, contrairement à des perturbations plus systémiques, un transporteur se remette rapidement du retard ou de l’annulation d’un vol précédent qui a eu des conséquences sur un vol précis en raison d’un problème particulier, comme une défaillance mécanique. Toutefois, certaines annulations ou certains retards peuvent également se répercuter sur de multiples vols, selon la fréquence à laquelle l’aéronef doit être utilisé pour d’autres vols.
[157] En plus des perturbations de vol généralisées causées par de mauvaises conditions météorologiques, il existe une variété de raisons possibles à des perturbations de vol qui peuvent avoir des conséquences considérables sur les activités d’un transporteur, par exemple :
- une crise sanitaire majeure comme dans le cas de la pandémie de COVID‑19;
- une guerre ou de l’instabilité politique;
- un accident à un aéroport, ou d’autres problèmes d’exploitation aéroportuaire;
- de graves pannes de réseau ou défaillances de systèmes qui sont indépendantes de la volonté du transporteur.
[158] Une vaste perturbation à un aéroport pourrait également avoir des répercussions sur la capacité du transporteur d’atténuer les conséquences du retard ou de l’annulation d’un vol précédent. Par exemple, une importante tempête de neige dans la ville où se trouve un aéroport majeur pourrait retarder de nombreux vols à d’autres destinations où l’on attend l’arrivée d’aéronefs en provenance de cette ville. Cette situation peut faire augmenter la demande pour les aéronefs en réserve disponibles, surtout si la ville est un centre névralgique pour le transporteur.
[159] L’Office fait remarquer que les transporteurs à très faible coût ne sont pas exemptés de l’obligation d’atténuer les effets domino. Nombre des préoccupations soulevées par Swoop en lien avec son modèle d’affaires sont abordées à même les facteurs énoncés précédemment, par exemple la prise en compte de l’éloignement de l’aéroport pour évaluer la capacité du transporteur de trouver un aéronef de remplacement.
CONCLUSION
[160] Par souci d’économie, d’efficacité et de proportionnalité judiciaires, l’Office considère qu’il est indiqué de dissocier les 567 demandes jointes dans le cas no 20‑01590, et de suspendre les instances individuelles liées à ces demandes. Dans l’intervalle, les parties doivent tenter de régler les enjeux soulevés dans les demandes, y compris ceux qui concernent l’indemnisation pour inconvénients, en s’appuyant sur les interprétations que l’Office a établies dans la présente décision. Pour ce faire, l’Office ordonne à chaque défenderesse de reconsidérer les demandes d’indemnisation pour les inconvénients subis et, dans le cas d’un refus de verser l’indemnité, d’expliquer les motifs du refus tel que l’exige le paragraphe 19(4) du RPPA, en s’appuyant sur les interprétations fournies par l’Office dans la présente décision.
[161] Les demanderesses peuvent communiquer avec l’Office au plus tard le 15 février 2022 si des questions demeurent non réglées. À ce moment-là, l’Office pourra tenter de les régler au moyen de la facilitation ou de la médiation, selon ce qui convient. Si une question ne se règle pas non plus par ces moyens informels, les demanderesses peuvent demander à ce que l’Office aille de l’avant avec son processus décisionnel formel.
[162] L’Office fait remarquer que les interprétations fournies dans la présente décision auront également une vaste portée d’application sur d’autres différends. Il encourage donc fortement les défenderesses et les autres transporteurs à appliquer les principes de la présente décision à d’autres réclamations en cours, y compris aux quelque 2 500 autres plaintes que l’Office a reçues entre le 15 décembre 2019 et le 13 février 2020, mais qui n’ont pas été jointes au cas no 20-01590.
ANNEXE À LA DÉCISION NO122-C-A-2021
Loi sur les transports au Canada, LC 1996, c 10 (LTC)
L’article 38 prévoit ce qui suit :
(1) L’Office peut déléguer son pouvoir d’enquête à l’un de ses membres ou fonctionnaires et charger ce dernier de lui faire rapport.
(2) Sur réception du rapport, l’Office peut l’entériner sous forme de décision ou d’arrêté ou statuer sur le rapport de la manière qu’il estime indiquée.
Le sous-alinéa 86.11(1)b)(ii) prévoit ce qui suit :
L’Office prend, après consultation du ministre, des règlements relatifs aux vols à destination, en provenance et à l’intérieur du Canada, y compris les vols de correspondance, pour :
b) régir les obligations du transporteur dans les cas de retard et d’annulation de vols et de refus d’embarquement, notamment :
(ii) les normes minimales relatives au traitement des passagers que doit respecter le transporteur lorsque le retard, l’annulation ou le refus d’embarquement lui est attribuable, mais est nécessaire par souci de sécurité, notamment en cas de défaillance mécanique
Aux termes du paragraphe 86.11(4), les obligations prévues par le RPPA sont « réputées figurer au tarif du transporteur dans la mesure où le tarif ne prévoit pas des conditions de transport plus avantageuses que ces obligations ».
Règlement sur la protection des passagers aériens, DORS/2019-150 (RPPA)
Au titre du paragraphe 1(1) du RPPA, les définitions suivantes s’appliquent à la Partie II de la LTC :
défaillance mécanique Problème mécanique qui réduit la sécurité des passagers, à l’exclusion du problème découvert lors de la maintenance planifiée effectuée conformément aux exigences légales. nécessaire par souci de sécurité Se dit de toute exigence légale à respecter afin de réduire les risques pour la sécurité des passagers, y compris les décisions en matière de sécurité qui relèvent du pilote de l’aéronef ou qui sont prises conformément au système de gestion de la sécurité au sens du paragraphe 101.01(1) du Règlement de l’aviation canadien, à l’exception de la maintenance planifiée effectuée conformément aux exigences légales.
Le paragraphe 10(1) prévoit ce qui suit :
Le présent article s’applique au transporteur lorsque le retard ou l’annulation de vol ou le refus d’embarquement est attribuable à une situation indépendante de sa volonté, notamment :
a) une guerre ou une situation d’instabilité politique;
b) un acte illégal ou un acte de sabotage;
c) des conditions météorologiques ou une catastrophe naturelle qui rendent impossible l’exploitation sécuritaire de l’aéronef;
d) des instructions du contrôle de la circulation aérienne;
e) un NOTAM au sens du paragraphe 101.01(1) du Règlement de l’aviation canadien;
f) une menace à la sûreté;
g) des problèmes liés à l’exploitation de l’aéroport;
h) une urgence médicale;
i) une collision avec un animal sauvage;
j) un conflit de travail chez le transporteur, un fournisseur de services essentiels comme un aéroport ou un fournisseur de services de navigation aérienne;
k) un défaut de fabrication de l’aéronef, qui réduit la sécurité des passagers, découvert par le fabricant de l’aéronef ou par une autorité compétente;
l) une instruction ou un ordre de tout représentant d’un État ou d’un organisme chargé de l’application de la loi ou d’un responsable de la sûreté d’un aéroport.
Le paragraphe 10(2) énonce ce qui suit :
Le retard ou l’annulation de vol ou le refus d’embarquement qui est directement imputable à un retard ou à une annulation précédent attribuable à une situation indépendante de la volonté du transporteur est également considéré comme attribuable à une situation indépendante de la volonté du transporteur si ce dernier a pris toutes les mesures raisonnables pour atténuer les conséquences du retard ou de l’annulation précédent.
Le paragraphe 10(3) énonce les obligations du transporteur lorsqu’une perturbation de vol est attribuable à une situation indépendante de la volonté du transporteur :
Lorsque le retard ou l’annulation de vol ou le refus d’embarquement est attribuable à une situation indépendante de la volonté du transporteur, ce dernier :
a) fournit aux passagers les renseignements prévus à l’article 13;
b) dans le cas d’un retard de trois heures ou plus, fournit aux passagers qui le désirent des arrangements de voyage alternatifs aux termes de l’article 18;
c) dans le cas d’une annulation ou d’un refus d’embarquement, fournit des arrangements de voyage alternatifs aux termes de l’article 18.
Le paragraphe 11(1) prévoit ce qui suit :
Sous réserve du paragraphe 10(2), cet article s’applique au transporteur dans le cas du retard ou de l’annulation de vol ou du refus d’embarquement qui lui est attribuable, mais qui est nécessaire par souci de sécurité.
Le paragraphe 11(2) énonce ce qui suit :
Le retard ou l’annulation de vol ou le refus d’embarquement qui est directement imputable à un retard ou à une annulation précédent attribuable au transporteur, mais nécessaire par souci de sécurité, est également considéré comme attribuable au transporteur mais nécessaire par souci de sécurité si le transporteur a pris toutes les mesures raisonnables pour atténuer les conséquences du retard ou annulation précédent.
Les paragraphes 11(3) à (5) énoncent les obligations du transporteur lors de perturbations de vol imputables à une situation attribuable au transporteur, mais nécessaires par souci de sécurité :
(3) Dans le cas du retard, le transporteur :
a) fournit aux passagers les renseignements prévus à l’article 13;
b) si le retard a été communiqué aux passagers moins de douze heures avant l’heure de départ indiquée sur leur titre de transport initial, applique les normes de traitement prévues à l’article 14;
c) s’il s’agit d’un retard de trois heures ou plus, fournit aux passagers qui le désirent des arrangements de voyage alternatifs ou un remboursement aux termes de l’article 17.
(4) Dans le cas de l’annulation de vol, le transporteur :
a) fournit aux passagers les renseignements prévus à l’article 13;
b) si l’annulation a été communiquée aux passagers moins de douze heures avant l’heure de départ indiquée sur leur titre de transport initial, applique les normes de traitement prévues à l’article 14 ;
c) fournit aux passagers des arrangements de voyage alternatifs ou un remboursement aux termes de l’article 17.
(5) Dans le cas du refus d’embarquement, le transporteur :
a) fournit aux passagers concernés les renseignements prévus à l’article 13;
b) refuse l’embarquement conformément à l’article 15 et applique à l’égard des passagers concernés les normes de traitement prévues à l’article 16;
c) fournit aux passagers des arrangements de voyage alternatifs ou un remboursement aux termes de l’article 17.
Le paragraphe 12(1) prévoit ce qui suit :
Sous réserve du paragraphe 10(2), le présent article s’applique au transporteur dans le cas du retard ou de l’annulation de vol ou d’un refus d’embarquement qui lui est attribuable mais qui n’est pas visé aux paragraphes 11(1) ou (2).
Les paragraphes 12(2) à (4) énoncent les obligations du transporteur lors de perturbations de vol imputable à une situation attribuable au transporteur :
(3) Dans le cas du retard, le transporteur :
a) fournit aux passagers les renseignements prévus à l’article 13;
b) si le retard a été communiqué aux passagers moins de douze heures avant l’heure de départ indiquée sur leur titre de transport initial, applique les normes de traitement prévues à l’article 14;
c) s’il s’agit d’un retard de trois heures ou plus, fournit aux passagers qui le désirent des arrangements de voyage alternatifs ou un remboursement aux termes de l’article 17;
d) s’ils ont été informés quatorze jours ou moins avant l’heure de départ indiquée sur leur titre de transport initial que leur arrivée à la destination indiquée sur ce titre de transport sera retardée, verse aux passagers l’indemnité minimale prévue à l’article 19 pour les inconvénients subis.
[…]
(3) Dans le cas de l’annulation, le transporteur :
a) fournit aux passagers les renseignements prévus à l’article 13;
b) si l’annulation de vol a été communiquée aux passagers moins de douze heures avant l’heure de départ indiquée sur leur titre de transport initial, applique les normes de traitement prévues à l’article 14;
c) fournit des arrangements de voyage alternatifs ou un remboursement aux termes de à l’article 17;
d) s’ils ont été informés quatorze jours ou moins avant l’heure de départ indiquée sur leur titre de transport initial que leur arrivée à la destination indiquée sur ce titre de transport sera retardée, verse aux passagers l’indemnité minimale prévue à l’article 19 pour les inconvénients subis.
[…]
(4) Dans le cas du refus d’embarquement, le transporteur :
a) fournit aux passagers concernés les renseignements prévus à l’article 13;
b) refuse l’embarquement conformément à l’article 15 et applique à l’égard des passagers concernés les normes de traitement prévues à l’article 16;
c) fournit aux passagers des arrangements de voyage alternatifs ou un remboursement aux termes de l’article 17;
d) verse l’indemnité minimale prévue à l’article 20 pour les inconvénients subis.
Le paragraphe 13(1) du RPPA prévoit les renseignements qui doivent être communiqués aux passagers visés par une perturbation de vol :
Le transporteur fournit aux passagers visés par le retard ou l’annulation de vol ou le refus d’embarquement les renseignements suivants :
a) la raison du retard, de l’annulation de vol ou du refus d’embarquement;
b) les indemnités qui peuvent être versées pour les inconvénients subis;
c) les normes de traitement des passagers applicables, le cas échéant;
d) les recours possibles contre lui, notamment ceux auprès de l’Office.
Les paragraphes 13(2) à (5) prévoient ce qui suit :
(2) Dans le cas du retard, le transporteur fournit aux passagers une mise à jour toutes les trente minutes sur la situation, et ce, jusqu’à ce qu’une nouvelle heure de départ soit fixée ou jusqu’à ce que des arrangements de voyage alternatifs aient été pris.
[…]
(3) Le transporteur fournit aux passagers tout nouveau renseignement dès que possible.
[…]
(4) Les renseignements visés au paragraphe (1) sont fournis au moyen d’annonces faites sur support audio et, sur demande, sur support visuel.
[…]
(5) Les renseignements visés au paragraphe (1) sont également fournis aux passagers à l’aide du moyen de communication disponible pour lequel ils ont indiqué une préférence, y compris un moyen qui est compatible avec les technologies d’adaptation visant à aider les personnes handicapées.
Le paragraphe 19(1) énonce ce qui suit :
Si les alinéas 12(2)d) ou (3)d) s’appliquent au transporteur, celui-ci verse l’indemnité minimale suivante :
a) dans le cas d’un gros transporteur :
(i) si l’heure d’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur le titre de transport initial est retardée de trois heures ou plus, mais de moins de six heures, 400 $,
(ii) si l’heure d’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur le titre de transport est retardée de six heures ou plus, mais de moins de neuf heures, 700 $,
(iii) si l’heure d’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur le titre de transport initial est retardée de neuf heures ou plus, 1000 $;
b) dans le cas d’un petit transporteur :
(i) si l’heure d’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur le titre de transport initial est retardée de trois heures ou plus mais de moins de six heures, 125 $,
(ii) si l’heure d’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur le titre de transport initial est retardée de six heures ou plus mais de moins de neuf heures, 250 $,
(iii) si l’heure d’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur le titre de transport initial est retardée de neuf heures ou plus, 500 $.
Les paragraphes 19(3) et 19(4) prévoient ce qui suit :
(3) Pour obtenir l’indemnité minimale prévue aux paragraphes (1) ou (2), le passager dépose une demande auprès du transporteur avant le premier anniversaire du retard ou de l’annulation.
[…]
(4) Le transporteur dispose de trente jours, après la date de la réception de la demande, pour verser l’indemnité au passager ou lui fournir les motifs de son refus de la verser.
L’article 20 énonce ce qui suit :
d) Si l’alinéa 12(4)d) s’applique au transporteur, il verse l’indemnité minimale suivante :
a) si l’heure d’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur le titre de transport initial est retardée de moins de six heures, 900 $;
b) si l’heure d’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur le titre de transport initial est retardé de six heures ou plus, mais de moins de neuf heures, 1800 $;
c) si l’heure d’arrivée du vol du passager à la destination indiquée sur le titre de transport initial est retardée de neuf heures ou plus, 2 400 $.
[…]
e) Le transporteur verse l’indemnité aux passagers aussitôt qu’il le peut sur le plan opérationnel, mais au plus tard quarante-huit heures après le refus d’embarquement.
[…]
f) Si l’indemnité est versée avant que le vol faisant partie des arrangements de voyage alternatifs n’arrive à la destination indiquée sur le titre de transport initial, elle est calculée en fonction de l’heure d’arrivée prévue.
[…]
g) Si le transporteur ne peut verser l’indemnité avant l’heure d’embarquement du vol faisant partie des arrangements de voyage alternatifs fournis, il donne au passager une confirmation écrite du montant de cette indemnité.
[…]
(5) Si le vol d’un passager arrive à la destination indiquée sur le titre de transport initial après l’heure prévue, et que le montant de l’indemnité qui a été versée, ou confirmée par écrit, ne reflète pas l’indemnité due aux termes du paragraphe (1), le transporteur ajuste le montant de l’indemnité en conséquence.
Règlement de l’aviation canadien, DORS/96-433 (RAC)
Le paragraphe 101. 01(1) définit « maintenance planifiée » comme suit :
maintenance planifiée Maintenance effectuée à intervalles prédéterminés en application du présent règlement, d’un calendrier de maintenance ou d’une consigne de navigabilité.
Le paragraphe 101. 01(1) définit « calendrier de maintenance » comme suit :
calendrier de maintenance Calendrier exigé en vertu de l’article 605.86 pour l’exécution des inspections et d’autres travaux de maintenance exigés en vertu du présent règlement.
Le paragraphe 101. 01(1) définit « système de gestion de la sécurité » comme suit :
système de gestion de la sécurité Processus documenté de gestion des risques qui intègre des systèmes d’exploitation et des systèmes techniques à la gestion des ressources financières et humaines pour assurer la sécurité aérienne ou la sécurité du public.
L’article 700.63 énonce ce qui suit :
700.63 (1) S’il est d’avis qu’une circonstance opérationnelle imprévue qui se produit dans les 60 premières minutes de la période de service de vol pourrait entraîner un niveau de fatigue compromettant la sécurité du vol, le commandant de bord peut, après avoir consulté tous les membres d’équipage sur leur niveau de fatigue :
a) réduire la période de service de vol d’un membre d’équipage de conduite;
b) prolonger la période de service de vol d’un membre d’équipage de conduite du nombre d’heures ci-après, en sus de la période maximale de service de vol prévue à l’article 700.28 ou au paragraphe 700.60(1) :
(i) une heure, si l’aéronef est utilisé par un seul pilote,
(ii) deux heures, si l’équipage de conduite n’est pas renforcé,
(iii) trois heures, si l’équipage de conduite est renforcé et si la période de service de vol prévue comprend un seul vol,
(iv) deux heures, si l’équipage de conduite est renforcé et si la période de service de vol prévue comprend deux ou trois vols;
c) prolonger la période de repos d’un membre d’équipage de conduite.
(2) Si une autre circonstance opérationnelle imprévue se produit après le décollage du vol final pour lequel la période maximale de service de vol a été prolongée au titre du paragraphe (1), le commandant de bord peut, malgré ce paragraphe, poursuivre le vol jusqu’à l’aérodrome de destination ou jusqu’à un aérodrome de dégagement.
(3) Après qu’une période de service de vol a été prolongée en vertu du présent article, l’exploitant aérien prolonge la période de repos d’une durée au moins égale à celle de la prolongation.
(4) À la fin de la période de service de vol, le commandant de bord avise l’exploitant aérien de toute modification apportée à une période de service de vol au titre du présent article.
L’article 702.94 énonce ce qui suit :
Le temps de vol total prévu au paragraphe 702.92(1) et la période maximale de service de vol visée au paragraphe 702.93(1) peuvent être dépassés si les conditions ci-après sont réunies :
a) le vol est prolongé à la suite d’une circonstance opérationnelle imprévue qui se produit après le début de la période de service de vol;
b) le commandant de bord, après avoir consulté les autres membres d’équipage de conduite, estime que dépasser le temps de vol total et la période maximale de service de vol ne présente aucun danger ;
c) l’exploitant aérien et le commandant de bord satisfont aux Normes de service aérien commercial.
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