Décision n° 15-P-A-2012

le 13 janvier 2012

PLAINTE déposée par Deryk Jackson contre Jazz Air S.E.C., représentée par son commandité, Commandité Gestion Jazz Air inc. exerçant son activité sous le nom d’Air Canada Jazz, de Jazz et de Jazz Air.

No de référence : 
M4120-3/10-50314

PLAINTE

[1] Le 16 décembre 2010, Deryk Jackson a déposé auprès de l’Office des transports du Canada (Office) une plainte dans laquelle il allègue que les prix appliqués par Jazz Air S.E.C., représentée par son commandité, Commandité Gestion Jazz Air inc. exerçant son activité sous le nom d’Air Canada Jazz, de Jazz et de Jazz Air (maintenant Jazz Aviation S.E.C., représentée par son commandité, Commandité Aviation Inc. exerçant son activité sous le nom d’Air Canada Jazz, de Jazz, de Jazz Air et de Thomas Cook Canada [Air Canada Jazz] à l’égard de ses services entre Toronto et Timmins (Ontario) sont nettement supérieurs aux prix établis pour les services desservant d’autres petites collectivités.

[2] Dans la décision no LET-P-A-24-2011 du 2 mars 2011, M. Jackson et Air Canada Jazz, le transporteur aérien visé, ont été informés que l’article 66 de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée (LTC) établit la compétence de l’Office relativement aux plaintes portant sur les prix appliqués par les transporteurs aériens à l’égard des services intérieurs. Plus particulièrement, les deux parties ont été avisées qu’aux termes des paragraphes 66(1) et (2) de la LTC, l’Office peut, dans certains cas, prendre certaines mesures correctives après avoir été saisi d’une plainte.

[3] En outre, l’Office a informé les deux parties des résultats de ses analyses préliminaires d’autres services intérieurs assurés entre Toronto et Timmins et de services intérieurs de nature similaire [en l’occurrence les services exploités sur les routes Rouyn-Noranda (Québec)-Montréal (Québec), Winnipeg (Manitoba)-Thunder Bay (Ontario), Cranbrook (Colombie-Britannique)-Vancouver (Colombie-Britannique) et Calgary (Alberta)-Grande Prairie (Alberta)] à ceux assurés par Air Canada Jazz entre Toronto et Timmins, et a demandé au transporteur de fournir à l’Office, et à M. Jackson, sa réponse à l’égard de la plainte et son approbation des conclusions de l’Office, ou de soumettre des solutions de rechange à l’examen de l’Office.

[4] Dans un mémoire daté du 24 mars 2011, Air Canada a fait part de ses commentaires sur les analyses préliminaires de l’Office et a fourni sa réponse à la plainte, en particulier sur qui, selon elle, aurait dû être saisi de la plainte. M. Jackson y a répliqué le 31 mars 2011.

[5] Dans le cadre de sa réponse, Air Canada a présenté une déclaration du professeur William Baumol qu’elle a affirmé être confidentielle. Air Canada a également revendiqué la confidentialité du curriculum vitæ du professeur Baumol qui était déjà en dossier auprès de l’Office. Par voie de la décision no LET-P-A-44-2011, l’Office a rappelé à Air Canada qu’elle ne pouvait pas s’en remettre à des documents déposés au préalable relativement à d’autres affaires sans rapport avec celle-ci ou à un jugement rendu dans ces affaires à l’égard de la confidentialité. Le 4 avril 2011, Air Canada a déposé sa demande de traitement confidentiel.

[6] En vertu de la décision no LET-P-A-67-2011 du 20 juin 2011, l’Office a rejeté la demande de traitement confidentiel d’Air Canada et, aux termes du paragraphe 24(2) des Règles générales de l’Office des transports du Canada, DORS/2005-35, a versé la déclaration et le curriculum vitæ du professeur Baumol au dossier public. Dans une lettre du 22 juin 2011, M. Jackson a fait part de ses commentaires sur la déclaration et le curriculum vitæ du professeur Baumol. Le 24 juin 2011, Air Canada y a répliqué.

QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

Qui est l’intimé dans la présente affaire?

[7] Air Canada déclare qu’elle est partie à un accord d’achat de capacité (AAC) modifié et reformulé avec Air Canada Jazz en vertu duquel Air Canada acquiert la majeure partie de la capacité de la flotte d’Air Canada Jazz. Air Canada fixe les horaires, les routes, les prix, les normes de service et d’autres questions d’ordre commercial se rapportant aux vols exploités par Air Canada Jazz pour le compte d’Air Canada en vertu de l’AAC. Le transport des passagers à bord des vols intérieurs exploités par Air Canada Jazz en vertu de l’AAC, qui, le 16 décembre 2010, englobaient les vols sur la route Toronto-Timmins, est assuré en vertu de la licence intérieure d’Air Canada. Les passagers transportés à bord de vols exploités par Air Canada Jazz aux termes de l’AAC sont des passagers d’Air Canada qui ont acheté leur titre de transport à Air Canada et qui ont signé un contrat de transport directement avec Air Canada. La responsabilité d’Air Canada Jazz se limite à exploiter les aéronefs de manière sûre et efficace. Air Canada Jazz n’exploite pas actuellement de services réguliers en vertu de ses propres licences et ne fixe actuellement pas de prix ni ne vend directement de sièges au public.

[8] D’après ces renseignements, l’Office estime que la licenciée compétente, soit celle qui exploite un service intérieur sur la route Toronto-Timmins, est Air Canada. C’est pourquoi l’intimée visée dans cette décision est Air Canada.

La plainte est-elle fondée?

[9] Pour ce qui est de l’allégation de prix déraisonnables, Air Canada est d’avis que l’Office a mal interprété la plainte plutôt générale de M. Jackson comme étant une plainte à l’égard d’« un prix » aux termes du paragraphe 66(1) de la LTC, étant donné que la compétence de l’Office en vertu du paragraphe 66(1) de la LTC n’est déclenchée que lorsqu’une plainte est déposée à l’égard d’un prix particulier. Air Canada déclare qu’il est impossible de savoir quel groupe de prix M. Jackson conteste, car il ne fournit aucune précision à l’appui de son allégation qu’un prix était déraisonnable.

[10] Selon les documents au dossier, l’Office est d’avis que M. Jackson n’a pas fourni de preuves à l’appui d’une plainte à l’égard d’un prix jugé déraisonnable étant donné qu’aucun prix n’est expressément mentionné. C’est pourquoi l’Office rejette cette partie de la plainte, faute de preuves.

[11] Pour ce qui est de l’allégation d’une gamme de prix insuffisante, Air Canada affirme que la plainte est vague et que le transporteur n’est pas tenu de donner suite aux plaintes vagues. Air Canada soutient que l’Office a mal interprété la plainte de M. Jackson, jugeant qu’elle soulevait la question d’une gamme de prix insuffisante, étant donné que M. Jackson ne donne aucune précision sur la gamme des prix qui serait insuffisante.

[12] L’Office estime que la plainte contient suffisamment de précisions et mérite qu’on y donne suite. M. Jackson affirme qu’il est préoccupé par les prix qu’Air Canada applique à l’égard de son service monopolistique entre Toronto et Timmins. Selon M. Jackson, ces prix dépassent fréquemment ceux appliqués à l’égard des vols transatlantiques et sont nettement supérieurs à ceux appliqués à l’égard de services desservant d’autres collectivités plus petites, comme Sudbury et Thunder Bay, où il n’existe pas de monopole. Ces précisions sont suffisamment claires pour que l’Office ouvre une enquête pour savoir si la gamme des prix est insuffisante.

[13] En outre, la plainte est du ressort de l’article 66 de la LTC dont le but est d’assurer que les passagers sur les routes où il n’existe pas de concurrence, ou une concurrence très limitée, bénéficient de prix qui sont essentiellement comparables en matière de niveau et de gamme à ceux qui sont offerts aux passagers qui empruntent des routes concurrentielles. L’Office est d’avis qu’il est investi des compétences nécessaires pour déterminer si la gamme de prix offerte entre Toronto et Timmins était insuffisante et qu’il y avait suffisamment d’éléments de preuve et de faits au dossier pour lui permettre d’étudier cet aspect de la plainte. Étant donné que le paragraphe 66(2) de la LTC confère à l’Office le pouvoir d’ordonner la prise de mesures correctives s’il conclut qu’un licencié offre une gamme de prix insuffisante, l’Office est d’avis qu’il est investi des compétences nécessaires pour examiner chaque prix appliqué par Air Canada à l’égard des services qu’elle exploite sur la route Toronto-Timmins.

QUESTIONS

[14] Les questions sur lesquelles l’Office doit se prononcer sont les suivantes :

  1. Air Canada était-elle la seule personne à offrir un service intérieur entre Toronto et Timmins au sens de l’article 66 de la LTC le 16 décembre 2010? Et, dans l’affirmative,
  2. la gamme de prix offerte par Air Canada à l’égard de ses services sur la route Toronto-Timmins était-elle insuffisante le 16 décembre 2010?

LA LOI

[15] L’article 66 de la LTC établit la compétence de l’Office à l’égard des plaintes portant sur les prix des services intérieurs appliqués par les transporteurs aériens. En vertu des paragraphes 66(1) et (2) de la LTC, l’Office peut ordonner la prise de certaines mesures correctives, sur dépôt d’une plainte, s’il conclut :

  1. que le transporteur aérien qui a publié ou appliqué le prix faisant l’objet de la plainte est un licencié qui, y compris les licenciés de son groupe, est la seule personne à offrir un service intérieur entre deux points;
  2. que le prix publié ou appliqué par le licencié à l’égard de ce service est excessif;
  3. ou que le licencié offre une gamme de prix insuffisante à l’égard de ce service.

[16] Aux termes du paragraphe 66(4) de la LTC, la compétence de l’Office à l’égard des plaintes portant sur des prix peut s’appliquer également aux routes intérieures desservies par plus d’un licencié si l’Office estime qu’aucun des autres services entre ces deux points ne constitue une solution de rechange suffisante. En évaluant les solutions de rechange raisonnables, l’Office tient compte du nombre d’escales, du nombre de sièges offerts, de la fréquence du service, des correspondances de vol et de la durée totale du vol.

[17] Par ailleurs, aux termes du paragraphe 66(3) de la LTC, pour décider si le prix publié ou appliqué à l’égard d’un service intérieur entre deux points est excessif ou si un licencié offre une gamme de prix insuffisante à l’égard d’un service intérieur entre deux points, l’Office prend en compte les facteurs suivants :

  1. les renseignements relatifs aux prix appliqués antérieurement à l’égard de services intérieurs entre les deux points;
  2. les prix appliqués à l’égard de services intérieurs similaires offerts par le licencié et un ou plusieurs autres licenciés au moyen d’aéronefs similaires, y compris les conditions de transport et le nombre de places offertes à ces prix;
  3. et tous autres renseignements que lui fournit le licencié, y compris ceux qu’il fournit au titre de l’article 83 de la LTC.

POSITIONS DES PARTIES

Généralités

[18] M. Jackson affirme que sa plainte émane des prix appliqués pour un voyage aller-retour entre Toronto et Timmins, au départ de Toronto le 25 décembre 2010, avec retour le 1er janvier 2011. Il précise qu’il s’agissait de vols directs. M. Jackson prétend que les prix appliqués par Air Canada à l’égard de son service monopolistique sur la route Toronto-Timmins, qui est une route très courte et fréquemment utilisée, sont souvent plus élevés que ceux qui sont appliqués à l’égard des vols transatlantiques et nettement supérieurs à ceux qui sont appliqués à l’égard des services desservant des localités plus petites comme Sudbury et Thunder Bay. M. Jackson affirme qu’il coûterait moins cher de se rendre en avion de Toronto à Londres ou à Paris qu’à Timmins, et ce, en dépit du fait que la durée du vol à cette dernière destination est moindre de 15 p. 100 et que la quantité de carburant consommé est nettement inférieure. M. Jackson est d’avis qu’Air Canada abuse des consommateurs en appliquant des prix excessifs à l’égard de ses services sur la route Toronto-Timmins.

[19] Air Canada répond que M. Jackson attribue l’écart des prix à son prétendu « monopole » sur la route Toronto-Timmins. Air Canada ajoute que l’Office est parfaitement au courant des modèles de tarification variables de l’industrie, et des différences qui existent dans les coefficients de remplissage des grands avions.

[20] Air Canada fait observer que certaines affirmations factuelles sont inexactes. Par exemple, M. Jackson affirme que Thunder Bay et Sudbury sont des localités « de taille analogue », alors que les données de Statistique Canada confirment que Timmins compte moins de la moitié de la population de Thunder Bay et moins du tiers de la population de Sudbury.

Article 66 de la LTC

[21] Air Canada prétend que les compétences de l’Office en vertu de l’article 66 de la LTC doivent être guidées par les principes suivants : 1) la politique des transports du Canada; 2) les grands principes de l’économie et de la concurrence dans le contexte de l’industrie du transport aérien; 3) les réalités du marché de l’industrie canadienne du transport aérien intérieur.

[22] Pour ce qui est de la politique des transports, Air Canada affirme que, conformément à l’article 5 de la LTC, qui énonce la politique nationale des transports, l’Office doit s’abstenir d’exercer ses pouvoirs aux termes de l’article 66 de la LTC dans les cas où les lois du marché servent à limiter les prix.

[23] Pour ce qui est des principes de l’économie et de la concurrence, Air Canada renvoie à une déclaration du professeur William Baumol, soumise par Air Canada, qui affirme :

  • que l’élimination des différences de prix entre les routes dénature les signaux du marché du côté de l’offre;
  • que l’effet des écarts dans les caractéristiques concurrentielles de routes apparemment concurrentielles ne peut être éliminé par l’imposition de règles;
  • qu’il est indispensable qu’un transporteur titulaire soit autorisé, sinon encouragé, à réduire les prix sur un itinéraire particulier pour être légitimement concurrentiel;
  • que les différences de tarification dans un secteur comme le transport aérien de passagers sont généralisées et sont imposées aux transporteurs aériens par les pressions du marché étant donné que, sans une telle tarification, les transporteurs ne peuvent pas recouvrer leurs coûts fixes, irrécupérables et communs.

[24] M. Jackson fait observer que la majeure partie de la déclaration du professeur Baumol est axée sur les arguments économiques favorables aux différences de tarification. M. Jackson ajoute qu’il est manifeste qu’Air Canada applique des prix différenciés sur la route Toronto-Timmins et sur les routes intérieures similaires retenues par l’Office. M. Jackson précise que sa plainte ne porte pas sur cette pratique de la part d’Air Canada; elle porte plutôt sur le fait qu’Air Canada applique expressément des prix plus élevés à l’égard des services qu’elle exploite sur la route Toronto-Timmins qu’elle ne le ferait à l’égard de services sur une route concurrentielle.

[25] M. Jackson affirme que la déclaration du professeur Baumol aborde effectivement la possibilité que les transporteurs aériens appliquent des prix sans doute plus bas sur des routes concurrentielles, par rapport aux routes non concurrentielles, mais ce, dans le contexte de l’« entrée » sur le marché de concurrents qui adoptent des « bas prix d’inauguration ».

[26] Air Canada soutient que l’Office ne doit pas oublier l’effet néfaste possible qu’une approche rigide à l’égard de son mandat en vertu de l’article 66 de la LTC risque d’avoir sur la capacité d’Air Canada d’être concurrentielle et de desservir des localités plus petites sur tout le réseau de services d’Air Canada. Air Canada soutient également que ses prix sont influencés par l’existence d’autres modes de transport (comme la voiture et l’autocar) et que ces modes contribuent à empêcher Air Canada d’appliquer des prix déraisonnables à l’égard de ses services sur la route Toronto-Timmins.

[27] Air Canada indique qu’il est primordial que l’Office reconnaisse qu’Air Canada n’est nullement obligée de desservir une destination quelconque au Canada, et que le transporteur ne le fera pas si cela n’est pas justifié sur le plan commercial. Air Canada fait remarquer qu’elle a toujours desservi de nombreuses localités qui n’auraient pas été desservies par avion si ce n’était de la présence d’Air Canada.

Autre service intérieur raisonnable entre Toronto et Timmins

[28] Air Canada fait observer que Bearskin Lake Air Service LP, représentée par son commandité, Bearskin GP Inc. exerçant son activité sous le nom de Bearskin Airlines (Bearskin Airlines) exploite un service de Timmins à Kitchener-Waterloo, avec correspondances à Sudbury et Ottawa. De plus, Air Canada signale que dans sa réponse à une plainte antérieure (décision no 484-P-A-2005), elle a fait valoir que de nombreux intervenants de l’industrie reconnaissent que les Canadiens voyagent par la route pour économiser de l’argent sur les vols et qu’ils sont prêts à se rendre à des aéroports plus éloignés pour économiser de l’argent. Toutefois, d’après l’interprétation d’un « point » que fait l’Office dans la décision no 484-P-A-2005, avec laquelle Air Canada n’est pas d’accord, Air Canada reconnaît qu’elle était l’unique transporteur aérien exploitant un service intérieur entre Toronto et Timmins le 16 décembre 2010.

Services intérieurs similaires

[29] M. Jackson affirme que les quatre routes comparables que l’Office présente comme des routes intérieures similaires permettent la meilleure comparaison pour la route Toronto-Timmins.

[30] Air Canada précise que dans le contexte de la décision no 484-P-A-2005, Air Canada a souligné que les quatre facteurs que prend en compte l’Office pour déterminer les routes jugées similaires, même s’ils ont été correctement analysés, n’étaient pas suffisants pour permettre de telles conclusions. Air Canada fait valoir que l’Office aurait dû également tenir compte d’autres facteurs pertinents dont (mais sans s’y limiter) la taille de la population desservie (grandeur du rayonnement), le nombre total de vols exploités quotidiennement au départ des aéroports en question, la composition de la clientèle, la contribution au réseau et la comparaison de la dynamique des prix sur les routes analysées. Air Canada est d’avis que les critères utilisés par l’Office par le passé ne suffisent pas à déterminer de manière raisonnable des services intérieurs « similaires ». Air Canada est toutefois consciente que l’Office a rejeté cette approche dans la décision no 484-P-A-2005. Air Canada ajoute que, compte tenu de l’interprétation par l’Office de ce qui constitue une route intérieure similaire (qu’Air Canada n’accepte pas), la sélection des routes retenues par l’Office semble bonne.

Insuffisance de la gamme des prix offerte sur la route Toronto-Timmins

[31] M. Jackson soutient qu’Air Canada abuse des consommateurs sur la route Toronto-Timmins. Selon M. Jackson, cette route fait l’objet d’un monopole et les prix appliqués à l’égard des services desservant des localités de taille analogue sont beaucoup plus attrayants lorsqu’il s’agit de services concurrentiels. M. Jackson ajoute que, même si les populations de Timmins, Sudbury et Thunder Bay sont différentes, il s’agit dans tous les cas de petites villes de l’Ontario situées dans le nord. Toutefois, il précise que, contrairement à Timmins, Sudbury et Thunder Bay bénéficient de services concurrentiels.

[32] Air Canada fait valoir que la gamme des prix offerte sur la route Toronto-Timmins doit être jugée, à première vue, suffisante, car il s’agit de la même gamme de prix qu’Air Canada offre sur toutes les autres routes intérieures au Canada où le transporteur n’utilise pas d’aéronefs offrant des sièges en classe affaires.

[33] Air Canada fait observer qu’elle offre sur ses routes intérieures au moins trois classes de tarifs (Latitude, Tango Plus et Tango) qui permettent aux consommateurs de sélectionner la classe de tarifs et les avantages qu’ils souhaitent pour le type de vol qu’ils planifient. Air Canada ajoute que les routes sur lesquelles sont exploités des aéronefs offrant des sièges en classe affaires offrent cinq classes de tarifs. Air Canada affirme par ailleurs qu’elle offre des laissez-passer de vol qui permettent aux personnes et aux entreprises de contrôler la prévisibilité des prix tout en autorisant des plans de voyage flexibles.

[34] Air Canada déclare que l’Office ne doit pas l’obliger à proposer une gamme de prix identique sur des routes concurrentielles et non concurrentielles, car cela risque d’aboutir à une incertitude de réglementation pour les transporteurs, qui finira par nuire aux consommateurs. Air Canada affirme par ailleurs qu’il existe des motifs légitimes de pratiquer des prix plus bas sur certaines routes, comme le comportement des consommateurs, les modes de déplacement, la démographie et les stratégies de segmentation du marché, la taille du marché et le caractère saisonnier.

ANALYSE ET CONSTATATIONS

[35] Pour en arriver à ses conclusions à l’égard des questions préliminaires et relatives aux prix soulevées dans la plainte, l’Office a tenu compte de tous les éléments de preuve présentés par les parties au cours des actes de procédure. L’Office a aussi tenu compte des renseignements accessibles publiquement et au sein de l’Office au sujet des services aériens offerts sur la route Toronto-Timmins et les prix publiés ou appliqués par Air Canada à l’égard de ses services entre ces deux points, notamment sur Internet, dans l’Official Airline Guide (OAG), dans les horaires publiés des vols et dans les tarifs des transporteurs aériens publiés par l’Airline Tariff Publishing Company.

[36] Dans son interprétation de l’article 66, Air Canada suggère à l’Office de tenir compte de la déclaration du professeur Baumol. L’Office est d’avis que la déclaration ne contient aucun renseignement présentant de l’utilité pour la plainte. De fait, elle a expressément été faite en réponse à une question qui n’est pas pertinente en l’espèce qui a été soulevée il y a un peu plus de dix ans. La déclaration fait état des principes fondamentaux à l’égard de la concurrence et de l’analyse économique au sujet de la réglementation des tarifs aériens en général. Air Canada n’a pas établi de lien entre la déclaration et son application à la présente affaire, comme les principes qui s’appliquent aux faits propres à cette affaire. Par ailleurs, la déclaration comporte un argument sur les prix différenciés, qui n’est pas une question en litige dans la présente affaire.

[37] Enfin, les arguments théoriques de la déclaration du professeur Baumol n’aident guère à élucider la LTC, que l’Office a pour mission d’administrer. Si le Parlement avait accepté les arguments soulevés ici, il n’aurait alors pas formulé la LTC comme il l’a fait. Étant donné que ces arguments n’ont rien de nouveau pour le domaine de la théorie de la réglementation, l’Office est tenu d’en déduire que le Parlement avait d’autres objectifs publics à l’esprit. C’est pourquoi l’Office n’accorde aucune valeur à la déclaration du professeur Baumol.

Autres services intérieurs raisonnables

Air Canada était-elle la seule personne à offrir un service intérieur entre Toronto et Timmins au sens de l’article 66 de la LTC le 16 décembre 2010?

[38] L’Office a examiné les renseignements dont il disposait au sujet du service intérieur assuré entre Toronto et Timmins le 16 décembre 2010.

[39] Air Canada a indiqué que Bearskin Airlines exploite un service entre Timmins et Kitchener- Waterloo, avec correspondances à Sudbury et Ottawa. Toutefois, selon l’interprétation d’un « point » donnée par l’Office dans la décision no 484-P-A-2005, Air Canada reconnaît qu’elle était le seul transporteur aérien exploitant un service intérieur entre Toronto et Timmins le 16 décembre 2010. Il n’est donc pas nécessaire que l’Office poursuive son analyse plus loin, compte tenu de l’aveu d’Air Canada.

[40] L’Office conclut qu’Air Canada était la seule personne à offrir un service intérieur entre Toronto et Timmins le 16 décembre 2010, au sens de l’article 66 de la LTC. Par conséquent, l’Office conclut que l’article 66 de la LTC s’applique en l’espèce.

Questions relatives aux prix

La gamme de prix offerte par Air Canada à l’égard de ses services sur la route Toronto-Timmins était-elle insuffisante le 16 décembre 2010?

[41] En plus des documents et des renseignements susmentionnés, l’Office, comme l’exige le paragraphe 66(3) de la LTC, a pris en compte les renseignements relatifs aux prix appliqués antérieurement à l’égard des services intérieurs offerts sur la route Toronto-Timmins et aux prix appliqués à l’égard de services intérieurs similaires offerts par Air Canada et un ou plusieurs autres licenciés au moyen d’aéronefs similaires, y compris les conditions de transport.

Autres services intérieurs offerts par Air Canada et par un ou plusieurs licenciés

[42] L’article 66 de la LTC requiert une comparaison entre les prix que le transporteur visé a offerts sur les routes où la concurrence est très limitée ou inexistante et les prix que ce même transporteur a offerts sur des routes concurrentielles similaires. Selon l’Office, l’article 66 de la LTC a pour objet de garantir aux voyageurs, sur les routes où la concurrence est limitée ou inexistante, des prix généralement comparables sur le plan de la gamme et du niveau des prix (non « identiques » comme le prétend Air Canada) à ceux offerts sur des routes concurrentielles similaires.

[43] Pour déterminer si un service en particulier entre deux points est similaire à celui visé dans une plainte formulée en vertu de l’article 66, au sens de l’alinéa 66(3)b) de la LTC, l’Office tient compte des facteurs suivants :

  1. l’exploitation d’un service intérieur par d’autres licenciés entre les deux points;
  2. le type d’aéronef utilisé par le licencié visé par la plainte formulée en vertu de l’article 66, dans le cadre de l’exploitation de son service entre les deux points;
  3. la distance en milles aériens entre les deux points;
  4. et le trafic passagers d’origine et de destination entre les deux points.

[44] En ce qui a trait au service intérieur visé par la présente plainte, l’Office a déterminé ce qui suit :

  1. le 16 décembre 2010, Air Canada Jazz a exploité son service intérieur entre Toronto et Timmins au moyen d’aéronefs moyens;
  2. selon l’OAG, la distance entre Toronto et Timmins est d’environ 566 kilomètres;
  3. le trafic passagers d’origine et de destination entre Toronto et Timmins était d’environ 58 470 passagers1.

[45] L’Office a procédé à la même analyse au sujet d’une vingtaine de services intérieurs afin de déterminer les services intérieurs sur lesquels Air Canada Jazz rivalise avec un ou plusieurs transporteurs aériens et qui présentent des caractéristiques similaires à celles du service offert par Air Canada Jazz entre Toronto et Timmins. D’après son analyse des facteurs mentionnés ci-dessus, l’Office a déterminé que, le 16 décembre 2010, il existait quatre services similaires à celui offert par Air Canada entre Toronto et Timmins au sens de l’alinéa 66(3)b) de la LTC. Il s’agit des services d’Air Canada entre :

  1. Rouyn-Noranda et Montréal;
  2. Winnipeg et Thunder Bay;
  3. Cranbrook et Vancouver;
  4. Calgary et Grande Prairie.

[46] L’établissement d’une similitude repose sur les motifs suivants :

  1. Outre le service exploité par Air Canada Jazz le 16 décembre 2010 au moyen d’aéronefs moyens :
    • Pascan Aviation Inc. exploitait un service intérieur entre Rouyn-Noranda et Montréal au moyen de petits aéronefs;
    • Bearskin Airlines et WestJet exploitaient des services intérieurs entre Winnipeg et Thunder Bay au moyen, respectivement, de petits et de gros aéronefs;
    • Pacific Coastal Airlines Limited exploitait un service intérieur entre Cranbrook et Vancouver au moyen de petits aéronefs;
    • WestJet exploitait un service intérieur entre Calgary et Grande Prairie au moyen de gros aéronefs.
  2. Selon l’OAG, la distance qui sépare Toronto de Timmins est d’environ 566 kilomètres :
    • la distance entre Rouyn-Noranda et Montréal est d’environ 498 kilomètres;
    • la distance entre Winnipeg et Thunder Bay est d’environ 598 kilomètres;
    • la distance entre Cranbrook et Vancouver est d’environ 537 kilomètres;
    • la distance entre Calgary et Grande Prairie est d’environ 555 kilomètres.
  3. Il convient de signaler que la route Toronto-Timmins est :
    • plus longue d’environ 14 p. 100 que la route Rouyn-Noranda-Montréal;
    • plus courte d’environ 5 p. 100 que la route Winnipeg-Thunder Bay;
    • plus longue d’environ 5 p. 100 que la route Cranbrook-Vancouver;
    • plus longue d’environ 2 p. 100 que la route Calgary-Grande Prairie.
  4. En 1999, le trafic passagers d’origine et de destination entre :
    • Rouyn-Noranda et Montréal était d’environ 39 850 passagers;
    • Winnipeg et Thunder Bay était d’environ 22 160 passagers;
    • Cranbrook et Vancouver était d’environ 31 860 passagers;
    • Calgary et Grande Prairie était d’environ 34 960 passagers.

[47] En faisant part à Air Canada des résultats de son analyse préliminaire, l’Office a demandé au transporteur de lui soumettre des commentaires sur la sélection par l’Office des services assurés sur les routes Rouyn-Noranda-Montréal, Winnipeg-Thunder Bay, Cranbrook-Vancouver et Calgary-Grande Prairie comme étant des services intérieurs similaires.

[48] Air Canada a répliqué que les quatre facteurs qui ont servi à l’Office à déterminer les routes jugées similaires, même s’ils ont été correctement analysés, n’étaient pas suffisants pour permettre de telles conclusions. Selon Air Canada, l’Office devrait également tenir compte d’autres facteurs pertinents dont (mais sans s’y limiter) la taille de la population desservie (grandeur du rayonnement), le nombre total de vols exploités quotidiennement au départ des aéroports en question, la composition de la clientèle, la contribution au réseau et la comparaison de la dynamique des prix sur les routes analysées. Toutefois, Air Canada a reconnu que, compte tenu de l’interprétation par l’Office de ce qui constitue une route intérieure similaire (avec laquelle Air Canada n’est pas d’accord), la sélection des routes retenues par l’Office semble bonne. Autrement, Air Canada n’a pas formulé d’observations sur la sélection par l’Office des services assurés sur les routes Rouyn-Noranda-Montréal, Winnipeg-Thunder Bay, Cranbrook-Vancouver et Calgary-Grande Prairie d’Air Canada comme étant des services similaires à ceux assurés sur la route Toronto-Timmins, pas plus qu’elle n’a proposé de route qu’elle jugeait plus appropriée à des fins de comparaison.

[49] Dans la décision no 484-P-A-2005, l’Office a indiqué que, selon lui, la considération de facteurs additionnels pour recenser des services intérieurs similaires limiterait grandement les services intérieurs susceptibles de satisfaire aux critères plus restrictifs ainsi obtenus ou l’amènerait à conclure que chaque service intérieur offert par un transporteur est essentiellement unique et que, par conséquent, il n’existe pas de services qui soient vraiment comparables. L’Office y indiquait également que les quatre facteurs pris en compte aux fins d’analyse des services intérieurs similaires représentent les caractéristiques fondamentales d’un service intérieur que le voyageur prend en considération et fournissent à l’Office une norme uniforme pour évaluer tous les services intérieurs. Voilà pourquoi l’Office estimait, et estime toujours, que les facteurs mentionnés plus haut conviennent pour recenser des services intérieurs similaires au sens de l’alinéa 66(3)b) de la LTC.

[50] Par conséquent, l’analyse par l’Office de la gamme des prix offerte sur la route Toronto-Timmins comportera une comparaison des prix publiés par Air Canada à l’égard des services assurés sur les quatre routes mentionnées plus haut.

Données relatives aux prix appliqués à l’égard des services intérieurs assurés sur la route Toronto-Timmins et sur les routes intérieures similaires

1. Aperçu général

[51] L’Office a analysé la gamme des prix offerte par Air Canada à l’égard de ses services sur la route Toronto-Timmins le 16 décembre 2010, et l’a comparée aux gammes de prix offertes par Air Canada à l’égard des services assurés sur les routes Rouyn-Noranda-Montréal, Winnipeg-Thunder Bay, Cranbrook-Vancouver et Calgary-Grande Prairie en ce qui concerne : la fourchette de prix, le nombre de prix offerts, la répartition des rabais par rapport au prix en classe Y, les classes de tarifs offerts et les gammes historiques de prix.

2. Fourchette de prix

[52] Les tableaux qui suivent rendent compte de l’écart entre le prix le plus élevé et le prix le plus bas sur chaque route sur trois ans et l’écart de valeur relative entre la route Toronto-Timmins et chacune des routes intérieures similaires sur le plan du prix, des recettes générées par kilomètre (R/K) et des pourcentages. Les prix sont des prix de base soumis par Air Canada.

16 décembre 2008

Route

Prix le plus élevé

Prix le plus bas

Gamme de prix

Écart sur le plan du prix le plus élevé sur la route Toronto-Timmins par rapport aux routes similaires

Écart sur le plan du prix le plus bas sur la route Toronto-Timmins par rapport aux routes similaires

Écart dans la gamme de prix sur la route Toronto-Timmins par rapport aux routes similaires

Prix

R/K

Prix

R/K

Prix

Prix

R/K

Prix

R/K

Toronto-Timmins (route au sens de l’article 66)

897 $

1,58 $

202 $

0,36 $

695 $

Winnipeg- Thunder Bay

735 $

1,23 $

99 $

0,17 $

636 $

162 $
22 %

0,35 $
29 %

103 $
104 %

0,19 $
116 %

59 $
9 %

Cranbrook-Vancouver

843 $

1,57 $

75 $

0,14 $

768 $

54 $
6 %

0,01 $
1 %

127 $
169 %

0,22 $
156 %

-73 $
-10 %

Calgary-Grande Prairie

745 $

1,34 $

99 $

0,18 $

646 $

152 $
20 %

0,24 $
18 %

103 $
104 %

0,18 $
100 %

49 $
8 %

Rouyn-Noranda-Montréal

686 $

1,38 $

163 $

0,33 $

523 $

211 $
31 %

0,20 $
15 %

39 $
24 %

0,03 $
9 %

172 $
33 %

* R/K = Recettes générées par kilomètre

16 décembre 2009

Route

Prix le plus élevé

Prix le plus bas

Gamme de prix

Écart sur le plan du prix le plus élevé sur la route Toronto-Timmins par rapport aux routes similaires

Écart sur le plan du prix le plus bas sur la route Toronto-Timmins par rapport aux routes similaires

Écart dans la gamme de prix sur la route Toronto-Timmins par rapport aux routes similaires

Prix

R/K

Prix

R/K

Prix

Prix

R/K

Prix

R/K

Toronto-Timmins (route au sens de l’article 66)

907 $

1,60 $

221 $

0,39 $

686 $

Winnipeg-Thunder Bay

745 $

1,25 $

99 $

0,17 $

646 $

162 $
22 %

0,35 $
29 %

122 $
123 %

0,22 $
136 %

40 $
6 %

Cranbrook-Vancouver

813 $

1,51 $

103 $

0,19 $

710 $

94 $
12 %

0,09 $
6 %

118 $
115 %

0,20 $
104 %

-24 $
-3 %

Calgary-Grande Prairie

755 $

1,36 $

99 $

0,18 $

600 $

152 $
20 %

0,24 $
18 %

122 $
123 %

0,21 $
119 %

86 $
14 %

Rouyn-Noranda-Montréal

696 $

1,40 $

176 $

0,35 $

520 $

211 $
30 %

0,20 $
15 %

45 $
26 %

0,04 $
10 %

166 $
32 %

* R/K = Recettes générées par kilomètre

16 décembre 2010

Route

Prix le plus élevé

Prix le plus bas

Gamme de prix

Écart sur le plan du prix le plus élevé sur la route Toronto-Timmins par rapport aux routes similaires

Écart sur le plan du prix le plus bas sur la route Toronto-Timmins par rapport aux routes similaires

Écart dans la gamme de prix sur la route Toronto-Timmins par rapport aux routes similaires

Prix

R/K

Prix

R/K

Prix

Prix

R/K

Prix

R/K

Toronto-Timmins (route au sens de l’article 66)

964 $

1,70 $

281 $

0,50 $

683 $

Winnipeg-Thunder Bay

816 $

1,36 $

119 $

0,20 $

697 $

148 $
18 %

0,34 $
25 %

162 $
136 %

0,30 $
149 %

-14 $
-2 %

Cranbrook-Vancouver

814 $

1,52 $

99 $

0,18 $

715 $

150 $
18 %

0,18 $
12 %

182 $
184 %

0,32 $
169 %

-32 $
-4 %

Calgary-Grande Prairie

836 $

1,51 $

149 $

0,27 $

687 $

128 $
15 %

0,19 $
13 %

132 $
89 %

0,23 $
85 %

-4 $
-1 %

Rouyn-Noranda-Montréal

778 $

1,56 $

236 $

0,47 $

542 $

186 $
24 %

0,14 $
9 %

45 $
19 %

0,03 $
5 %

141 $
26 %

* R/K = Recettes générées par kilomètre

[53] Selon les tableaux ci-dessus, l’écart sur le plan de la fourchette de prix appliqués par Air Canada sur la route Toronto-Timmins et les quatre routes similaires est demeuré relativement stable entre le 16 décembre 2008 et le 16 décembre 2010. En termes absolus, la fourchette de prix appliqués sur la route Toronto-Timmins est proche de la fourchette de prix appliqués sur les autres routes similaires. Toutefois, on constate que, dans l’ensemble, les prix appliqués par Air Canada sur la route Toronto-Timmins sont supérieurs aux prix appliqués sur des routes similaires. En général, les prix plus bas traduisent un écart significatif. Même si l’on compare ces prix plus bas en fonction du prix par kilomètre, l’écart demeure significatif dans le cas de trois des routes intérieures similaires (soit les routes Winnipeg-Thunder Bay, Cranbrook-Vancouver et Calgary-Grande Prairie). Cela témoigne du fait que les différences de distance entre les routes ne sont pas significatives et ne justifient pas les prix plus élevés appliqués sur la route Toronto-Timmins.

3.Nombre de prix

[54] Le tableau suivant compare le nombre total de prix offerts par Air Canada sur la route Toronto-Timmins et sur chacune des routes intérieures similaires le 16 décembre de chacune des années 2008, 2009 et 2010.

Route

Nombre de prix offerts le 16 décembre 2008

Nombre de prix offerts le 16 décembre 2009

Nombre de prix offerts le 16 décembre 2010

Toronto-Timmins (route au sens de l’article 66)

15

13

12

Winnipeg-Thunder Bay

16

15

14

Cranbrook-Vancouver

16

13

14

Calgary-Grande Prairie

16

15

14

Rouyn-Noranda-Montréal

14

13

12

[55] Comme on peut le constater dans le tableau ci-dessus, le nombre de prix offerts sur la route Toronto-Timmins et sur les routes intérieures similaires n’est pas radicalement différent.

4.Rabais offerts par rapport au tarif de la classe Y

[56] Le tableau qui suit compare le pourcentage de rabais offerts par rapport au tarif Latitude le plus élevé (tarif de la classe Y) par Air Canada sur la route Toronto-Timmins et sur chacune des routes intérieures similaires.

16 décembre 2008

16 décembre 2009

16 décembre 2010

Rabais le plus élevé par rapport au tarif de la classe Y

Rabais le plus bas par rapport au tarif de la classe Y

Rabais le plus élevé par rapport au tarif de la classe Y

Rabais le plus bas par rapport au tarif de la classe Y

Rabais le plus élevé par rapport au tarif de la classe Y

Rabais le plus bas par rapport au tarif de la classe Y

Route

%

%

%

%

%

%

Toronto-Timmins (route au sens de l’article 66)

77

4

76

8

71

6

Winnipeg-Thunder Bay

87

7

87

5

85

6

Cranbrook-Vancouver

91

6

87

5

88

6

Calgary-Grande Prairie

87

7

87

5

82

6

Rouyn-Noranda-Montréal

76

9

75

4

70

6

[57] Au cours des trois années étudiées, la répartition des rabais offerts par rapport au tarif de la classe Y a été pratiquement la même sur les route Toronto-Timmins et Rouyn-Noranda-Montréal. Toutefois, en ce qui concerne les autres routes intérieures similaires, les prix les plus bas, dans la gamme des prix bénéficiant d’un rabais, ont été inférieurs par rapport à la route Toronto-Timmins. Par exemple, le 16 décembre 2010, les prix les plus bas offerts par Air Canada ont bénéficié d’un rabais de respectivement 88, 82 et 85 p. 100 par rapport au tarif de la classe Y sur les routes Cranbrook-Vancouver, Calgary-Grande Prairie et Winnipeg-Thunder Bay, et de seulement 71 p. 100 sur la route Toronto-Timmins.

5.Classes de tarifs

[58] Au cours de chacune des années étudiées, Air Canada a offert trois catégories de tarifs : Latitude, Tango Plus et Tango. Le tableau ci-dessous illustre le nombre de classes de tarifs offertes entre 2008 et 2010.

16 décembre 2008

16 décembre 2009

16 décembre 2010

Route

Nombre de classes : Latitude

Nombre de classes : Tango Plus

Nombre de classes : Tango

Nombre de classes : Latitude

Nombre de classes : Tango Plus

Nombre de classes : Tango

Nombre de classes : Latitude

Nombre de classes : Tango Plus

Nombre de classes : Tango

Toronto-Timmins (route au sens de l’article 66)

3

6

6

2

7

4

2

7

3

Winnipeg-Thunder Bay

2

7

7

2

8

5

2

8

4

Cranbrook-Vancouver

2

7

7

2

7

4

2

8

4

Calgary-Grande Prairie

2

7

7

2

8

5

2

8

4

Rouyn- Noranda-Montréal

2

6

6

2

7

4

2

7

3

[59] Les classes offertes sur la route Toronto-Timmins et sur les routes intérieures similaires sont comparables. Pour ce qui est des prix communs à toutes les routes, les conditions de transport qui se rattachent à chaque prix semblent analogues et, par conséquent, tout aussi restrictives sur toutes les routes intérieures similaires. Toutefois, Air Canada offrait un tarif distinctif supplémentaire moins élevé Tango Plus et Tango sur chacune des routes Winnipeg-Thunder Bay, Cranbrook-Vancouver et Calgary-Grande Prairie qui bénéficiaient d’un important rabais par rapport aux tarifs les plus bas Tango Plus et Tango offerts sur la route Toronto-Timmins.

[60] Par exemple, le 16 décembre 2010, le tarif Tango Plus le plus bas offert sur la route Toronto-Timmins (346 $) était nettement supérieur à celui qui était offert sur les routes Winnipeg-Thunder Bay (184 $, présentant un écart de 162 $ ou 88 p. 100), Cranbrook-Vancouver (164 $, présentant un écart de 182 $ ou 111 p. 100) et Calgary-Grande Prairie (214 $, présentant un écart de 132 $ ou 62 p. 100). De même, le 16 décembre 2010, le tarif Tango le plus bas offert sur la route Toronto-Timmins (281 $) était nettement supérieur à celui qui était offert sur les routes Winnipeg-Thunder Bay (119 $, présentant un écart de 162 $ ou 136 p. 100), Cranbrook-Vancouver (99 $, présentant un écart de 182 $ ou 184 p. 100) et Calgary-Grande Prairie (149 $, présentant un écart de 132 $ ou 89 p. 100).

6. Gammes historiques de prix

[61] Le tableau suivant illustre le pourcentage de variation dans les prix les plus élevés et les plus bas offerts par Air Canada sur la route Toronto-Timmins et sur chacune des routes intérieures similaires entre le 16 décembre 2008 et le 16 décembre 2010.

16 décembre 2008

16 décembre 2010

2010 contre 2008

Route

Prix le plus élevé

Prix le plus bas

Prix le plus élevé

Prix le plus bas

Variation du prix le plus élevé

Variation du prix le plus bas

Toronto-Timmins (route au sens de l’article 66)

897 $

202 $

964 $

281 $

7 %

39 %

Winnipeg-Thunder Bay

735 $

99 $

816 $

119 $

11 %

20 %

Cranbrook-Vancouver

843 $

75 $

814 $

99 $

-3 %

32 %

Calgary-Grande Prairie

745 $

99 $

836 $

149 $

12 %

51 %

Rouyn-Noranda-Montréal

686 $

163 $

778 $

236 $

13 %

45 %

[62] Comme on peut le constater dans le tableau ci-dessus, au cours des trois années étudiées, les variations des prix les plus élevés et les plus bas appliqués par Air Canada sur la route Toronto-Timmins sont comparables aux variations observées dans les prix les plus élevés et les plus bas qui ont été appliqués sur les routes intérieures similaires.

7. Résumé

[63] Air Canada a offert un nombre légèrement plus élevé de prix sur trois des quatre routes intérieures similaires (soit les routes Winnipeg-Thunder Bay, Cranbrook-Vancouver et Calgary-Grande Prairie).

[64] Tous les prix appliqués par Air Canada sur la route Toronto-Timmins étaient supérieurs à ceux appliqués sur les quatre routes intérieures similaires.

[65] Les prix des tarifs fortement réduits Tango Plus et Tango étaient nettement inférieurs sur la majorité des routes intérieures similaires (soit sur les routes Winnipeg-Thunder Bay, Cranbrook-Vancouver et Calgary-Grande Prairie).

[66] La répartition des rabais offerts par rapport au tarif de la classe Y est nettement plus avantageuse sur trois des routes intérieures similaires (soit les routes Winnipeg-Thunder Bay, Cranbrook-Vancouver et Calgary-Grande Prairie).

[67] L’écart de distance entre la route Toronto-Timmins et les autres routes intérieures similaires n’est guère important et ne justifie pas en soi les prix plus élevés observés sur la route Toronto-Timmins.

[68] Les hausses sur 12 mois des niveaux des prix appliqués sur la route Toronto-Timmins ne sont pas très différentes de celles enregistrées sur les autres routes intérieures similaires.

8.Constatations de l’Office

[69] Compte tenu de ce qui précède, l’Office détermine que la gamme des prix offerte par Air Canada à l’égard de ses services sur la route Toronto-Timmins le 16 décembre 2010 est insuffisante.

CONCLUSION

[70] À la lumière des constatations ci-dessus, l’Office accueille partiellement la plainte. L’Office somme Air Canada, aux termes du paragraphe 66(2) de la LTC, de modifier son tarif afin d’augmenter la gamme des prix en offrant un prix supplémentaire à l’extrémité inférieure de chacune des catégories de tarifs actuelles Latitude, Tango Plus et Tango. Chaque nouveau prix doit se situer aux niveaux suivants :

Latitude

[71] Air Canada doit proposer un tarif Latitude supplémentaire inférieur d’au moins 16 p. 100 à son tarif Latitude actuel le plus bas offert sur la route Toronto-Timmins. Ce pourcentage repose sur l’écart de prix constaté le 16 décembre 2010 entre le tarif Latitude le plus bas offert par Air Canada sur la route Toronto-Timmins (908 $) et le prix moyen le plus bas offert par Air Canada sur les quatre routes intérieures similaires analysées par l’Office (763 $).

Tango Plus

[72] Air Canada doit proposer un tarif Tango Plus supplémentaire inférieur d’au moins 37 p. 100 à son tarif Tango Plus actuel le plus bas offert sur la route Toronto-Timmins. Ce pourcentage repose sur l’écart de prix constaté le 16 décembre 2010 entre le tarif Tango Plus le plus bas offert par Air Canada sur la route Toronto-Timmins (346 $) et le prix moyen le plus bas offert par Air Canada sur les quatre routes intérieures similaires analysées par l’Office (216 $).

Tango

[73] Air Canada doit proposer un tarif Tango supplémentaire inférieur d’au moins 46 p. 100 à son tarif Tango actuel le plus bas offert sur la route Toronto-Timmins. Ce pourcentage repose sur l’écart de prix constaté le 16 décembre 2010 entre le tarif Tango le plus bas offert par Air Canada sur la route Toronto-Timmins (281 $) et le prix moyen le plus bas offert par Air Canada sur les quatre routes intérieures similaires analysées par l’Office (151 $).

Période

[74] Air Canada doit modifier son tarif pour offrir les prix plus bas mentionnés ci-dessus au plus tard 30 jours à compter de la date de la présente décision et fournir à l’Office une copie du nouveau tarif. Les nouveaux prix doivent demeurer en vigueur pendant un an.

1 Les chiffres relatifs à l’origine et à la destination reposent sur les données les plus récentes accessibles au public dans le Rapport sur le trafic intérieur : origine et destination des passagers aériens, 1999 (Ottawa, Canada : Ministre de l’Industrie pour Statistique Canada, 2001).

Membre(s)

Jean-Denis Pelletier, ing.
Raymon J. Kaduck
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