Décision n° 153-C-A-2007
Suivi - décision no 372-C-A-2007
le 28 mars 2007
RELATIVE à la décision no 319-C-A-2006 du 1er juin 2006, dans laquelle l'Office des transports du Canada a statué sur la plainte déposée par Darren et Beth Jakubec au sujet du décès de Sila, leur chien de compagnie, pendant le vol d'Air Canada de Smithers (Colombie-Britannique) à Winnipeg (Manitoba), via Vancouver (Colombie-Britannique), le 4 janvier 2004, et aux mesures qu'Air Canada a prises en réponse à la décision précitée.
Référence no M4370/04-7454
Contexte
[1] Darren et Beth Jakubec (ci-après les plaignants) ont déposé une plainte auprès de l'Office des transports du Canada (ci-après l'Office) relativement à l'affaire énoncée dans l'intitulé. Dans la décision no LET-C-A-64-2006 du 9 mars 2006, l'Office a énoncé ses constatations préliminaires et donné l'occasion aux parties de les commenter. Air Canada et les plaignants ont déposé des mémoires et l'Office a par la suite rendu la décision no 319-C-A-2006 dans laquelle il a statué sur cette affaire.
[2] Dans ces décisions, l'Office s'ést penché sur la question de savoir si certaines dispositions du tarif d'Air Canada régissant le transport intérieur, nommément le Canadian Domestic General Rules Tariff, Airline Tariff Publishing Company, Agent [les Règles générales de transport intérieur au Canada ] (ci-après le tarif d'Air Canada), sont déraisonnables ou injustement discriminatoires, ou les deux, au sens du paragraphe 67.2(1) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10 (ci-après la LTC). Dans la décision no 319-C-A-2006, l'Office a conclu que les dispositions du tarif d'Air Canada qui limitent la responsabilité du transporteur à l'égard du transport d'animaux n'étaient pas déraisonnables. L'Office a également conclu qu'il n'avait aucune preuve pouvant lui laisser croire que les limites de responsabilité d'Air Canada relatives au transport d'animaux étaient discriminatoires ou qu'elles avaient été appliquées de façon discriminatoire.
[3] L'Office a toutefois conclu que la description de la responsabilité d'Air Canada qui figure à son tarif relativement aux articles « fragiles » ou « périssables », laquelle est également affichée sur le site Web d'Air Canada et sur les reçus-itinéraires remis aux passagers, n'est pas claire et qu'elle est ambiguë. L'Office a notamment statué que les avis applicables ne suffisent pas à aviser adéquatement les passagers à l'égard des limites de responsabilité d'Air Canada quant au transport d'animaux. Bien que l'Office ait reconnu qu'Air Canada a modifié son site Web pour y inclure une déclaration indiquant que le transporteur n'accepte aucune responsabilité pour « la perte, le délai, les blessures, la maladie ou la mort de tout animal qu'il accepte de transporter », il a également indiqué que cette déclaration ne concorde pas avec l'affirmation voulant que « Air Canada ne limite pas sa responsabilité en ce qui a trait aux dommages directs ou dans les cas de négligence grave ou d'acte intentionnel ».
[4] Pour les raison précitées, l'Office a rejeté la règle 230(B)(1) du tarif d'Air Canada, estimant qu'Air Canada avait omis de donner un avis opportun suffisant au public en ce qui a trait aux limites de responsabilité du transporteur relatives au transport d'animaux. L'Office a exigé qu'Air Canada remédie à cette faute et qu'elle démontre comment elle comptait intégrer un tel avis à son site Web, à sa publicité et aux renseignements relatifs au transport d'animaux, de même qu'aux documents fournis aux passagers qui prévoient la responsabilité du transporteur en ce qui a trait aux bagages (tels que les itinéraires et les billets électroniques). Fondamentalement, l'Office a statué que les avis doivent refléter précisément les limites de responsabilité d'Air Canada (inclusions et exclusions) et qu'elles doivent être indiquées d'une façon claire et non ambigüe.
[5] Le rejet de la disposition tarifaire devait entrer en vigueur trente (30) jours à compter de la date de la décision no 319-C-A-2006 ou avant et devait coïncider avec l'entrée en vigueur d'une nouvelle version de la règle 230(B)(1) acceptée par l'Office.
[6] Air Canada a déposé des commentaires à l'égard de cette question les 21 septembre et 18 décembre 2006, auxquels les plaignants ont répliqué le 22 septembre et les 18 et 28 décembre 2006.
Observation préliminaire
[7] Dans leurs mémoires, en plus de commenter le tarif ou les avis de changements, les plaignants ont demandé une révision de la décision no 319-C-A-2006. L'Office traitera de cette affaire avant de se prononcer sur la réponse d'Air Canada concernant la pertinence de son tarif ou des changements apportés à ses avis.
[8] En vertu de l'article 32 de la LTC :
L'Office peut réviser, annuler ou modifier ses décisions ou arrêtés, ou entendre de nouveau une demande avant d'en décider, en raison de faits nouveaux ou en cas d'évolution, selon son appréciation, des circonstances de l'affaire visée par ces décisions, arrêtés ou audiences.
[9] L'article 32 de la LTC n'accorde à l'Office qu'un pouvoir de révision limité à l'égard de ses décisions. En fait, l'Office ne peut exercer ce pouvoir que si des faits ou des circonstances entourant une décision ont changé depuis que cette décision a été rendue. Donc, l'Office doit d'abord déterminer s'il y a eu des faits nouveaux ou si les circonstances ont évolué depuis qu'il a rendu sa décision. Dans l'affirmative, il doit déterminer si ces changements sont suffisants pour justifier une révision, une annulation ou une modification de la décision.
[10] Les plaignants indiquent que les faits nouveaux en l'instance sont l'aveu d'Air Canada voulant qu'elle accepte la responsabilité pour les actes intentionnels. Pour cette raison, les plaignants demandent que l'Office révise la décision no 319-C-A-2006 puisqu'ils prétendent que l'Office ne connaissait pas tous les faits concernant les tarifs d'Air Canada, leur interprétation et leur application lorsqu'il a rendu sa décision initialement.
[11] Après examen des plaidoiries dans cette affaire, l'Office note qu'Air Canada a accepté la responsabilité pour les actes intentionnels et que cela a été reconnu par l'Office dans la décision no 319-C-A-2006. Ainsi, les faits sur lesquels reposent la demande de révision des plaignants ne sont pas nouveaux et, par conséquent, l'Office rejette la demande de révision de la décision no 319-C-A-2006.
Question
[12] L'Office doit déterminer si Air Canada s'est conformée aux exigences de la décision no 319-C-A-2006 de l'Office.
Analyse et constatations
[13] Pour en arriver à ses constatations, l'Office a examiné tous les éléments de preuve soumis par les parties, y compris la règle du tarif d'Air Canada révisée et les documents à l'appui.
[14] La version modifiée de la règle 230(B)(1) du tarif d'Air Canada applicable au transport intérieur se lit maintenant comme suit :
(B) exclusion de responsabilité
(1) Le transporteur ne sera pas tenu responsable de la perte, du délai, des blessures, de la maladie ou de la mort d'un animal domestique qu'il accepte de transporter. Le propriétaire de l'animal domestique accepte toute responsabilité quant à la conformité aux règles et aux restrictions gouvernementales. Le transporteur n'est pas responsable dans le cas où on interdit l'entrée ou le passage à tout animal domestique dans n'importe quel pays, état ou territoire. Les limites de responsabilité d'Air Canada à l'égard du transport d'animaux domestiques sont communiquées aux passagers sur les pages d'information du site Web d'Air Canada à l'adresse aircanada.com et dans la section « renseignements importants » des reçus et des itinéraires remis par le transporteur. [traduction libre]
[15] Air Canada a également modifié ses reçus-itinéraires, émis lorsque les réservations sont effectuées par l'entremise du centre d'appels ou du site Web du transporteur, de façon à y afficher la disposition suivante :
Avis de limite de responsabilité pour le transport d'animaux
Air Canada n'assume aucune responsabilité pouvant découler de la perte, du délai, des blessures, de la maladie ou de la mort d'un animal qu'elle accepte de transporter.
[16] Air Canada inclut également l'avis suivant dans ses reçus-itinéraires qui sont émis lors des réservations effectuées par l'entremise de son site Web :
Transport d'animaux domestiques
Veuillez prendre connaissance des renseignements importants concernant le transport d'animaux domestiques dans la section Voyager avec son animal domestique.
[17] En ce qui a trait à la publicité du transporteur, Air Canada déclare qu'elle ne promeut pas ses services relatifs au transport d'animaux et donc qu'aucun renvoi n'est fait à de la publicité dans sa règle tarifaire modifiée.
[18] Les plaignants indiquent que l'Office devrait exiger qu'Air Canada accentue ses limites de responsabilité dans sa documentation, et plus précisément, que le personnel du transporteur qui traite avec les clients devrait fournir des avis verbaux et écrits en ce qui concerne les limites de responsabilité du transporteur quant au transport des animaux domestiques. Bien que cette solution s'avérerait idéale, elle n'est pas nécessaire dans ce cas. L'Office estime plutôt que les changements apportés à ce jour par Air Canada sont raisonnables puisqu'ils concernent les avis relatifs aux exclusions du tarif, c'est-à-dire leur pertinence et le temps opportun dans lequel ils sont donnés.
[19] En ce qui a trait à la teneur de l'avis, les plaignants demandent à l'Office de s'assurer qu'Air Canada fournisse un avis spécifique aux clients qui prévoient transporter des animaux sur l'étendue des exclusions de sa responsabilité lorsque (i) les animaux sont laissés aux soins d'Air Canada et (ii) le transporteur est pris en défaut. Air Canada fait remarquer que sa limite de responsabilité est énoncée en termes clairs et non ambigus et que le transporteur n'exclut pas sa responsabilité en cas d'« acte intentionnel ».
[20] L'Office estime qu'Air Canada n'a pas énoncé clairement l'étendue de sa responsabilité. Dans la décision no 319-C-A-2006, l'Office a déterminé qu'une déclaration sur le site Web d'Air Canada allait à l'encontre de sa déclaration voulant que « Air Canada ne limite pas sa responsabilité en ce qui a trait aux dommages directs ou dans les cas de négligence grave ou d'acte intentionnel ». L'Office a ordonné à Air Canada de s'assurer que les avis concernant sa responsabilité quant au transport d'animaux domestiques soient énoncés dans un langage clair et non ambigu, mais cette dernière a failli à la tâche. Notamment, elle a omis d'inclure la déclaration précitée dans son tarif, sur son site Web et sur les reçus-itinéraires remis aux passagers. Sans ce langage clair, le message aux clients demeure flou et ambigu.
[21] En termes simples, en raison de la nature disculpatoire générale du tarif comme il est actuellement formulé, plusieurs clients du transporteur ne saisiront pertinemment pas l'étendue de la responsabilité de ce dernier. Par exemple, sans avis spécifique dans le tarif lui-même, les clients peuvent penser que le transporteur est exempt de toute responsabilité même dans les cas de négligence grave de sa part ou de la part de ses agents. L'Office estime que des précisions sont nécessaires et ordonne à Air Canada de modifier son tarif, dans les soixante (60) jours de la date de cette décision, pour clarifier qu'Air Canada ne limite pas sa responsabilité en ce qui a trait aux dommages directs ou dans les cas de négligence grave dont elle ou ses agents pourraient faire preuve ou les actes intentionnels qu'ils pourraient poser. Cette modification devrait également être reflétée dans les documents connexes du transporteur, soit son site Web, et ses reçus-itinéraires remis aux passagers.
Membres
- Mary-Jane Bennett
- Guy Delisle
- Gilles Dufault
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