Décision n° 242-A-2001
le 14 mai 2001
Référence no M4110-33
PLAINTE
Le 24 janvier 2000, le Canadian Standard Travel Agent Registry (ci-après le CSTAR) a déposé une plainte auprès de l'Office des transports du Canada (ci-après l'Office) dans laquelle il demande à l'Office de prendre certaines mesures au sujet de redevances ayant trait aux services de sûreté aéroportuaire allemands et de divers suppléments (normalement désignés comme suppléments « Q ») perçus par Air Canada, American Airlines, Inc. (ci-après American Airlines), les Lignes aériennes Canadien International ltée (ci-après Canadi*n), Continental Airlines, Inc. faisant affaires sous la raison sociale de Continental Airlines (ci-après Continental), Delta Air Lines, Inc. (ci-après Delta), Lufthansa Aktiengesellschaft (Lufthansa German Airlines) (ci-après Lufthansa), Northwest Airlines, Inc. (ci-après Northwest) et United Air Lines, Inc. (ci-après United).
Outre ces transporteurs, l'Office a transmis la plainte du CSTAR à l'Association du transport aérien du Canada (ci-après l'ATAC) et à l'Association du transport aérien international (ci-après l'IATA).
Le 14 décembre 2000, le CSTAR a demandé la permission de déposer d'autres commentaires au sujet de sa plainte. Le 22 décembre 2000, l'Office a acquiescé à la demande du CSTAR et a invité les parties à lui faire part de leurs commentaires dans les délais fixés. Le 9 janvier 2001, Air Canada, en son propre nom, en celui de Canadi*n et de l'ATAC, a fait part de ses commentaires au sujet des documents déposés par le CSTAR. Le 26 janvier 2001, le CSTAR a répliqué à ces commentaires. Les présentations d'Air Canada et du CSTAR ont été déposées après les délais fixés par l'Office. De plus, par une lettre datée du 26 janvier 2001, Air Canada a déposé des commentaires au sujet de la présentation du CSTAR datée du même jour. Par une lettre datée du 1er février 2001, le CSTAR a répliqué à ces commentaires. L'Office, par une lettre datée du 16 février 2001, a accepté les présentations tardives d'Air Canada et du CSTAR, de même que les commentaires d'Air Canada du 26 janvier 2001.
Aux termes du paragraphe 29(1) de la Loi sur les transports au Canada, L.C., 1996, ch. 10 (ci-après la LTC), l'Office est tenu de rendre sa décision au plus tard 120 jours après la date de réception de la demande dont il est saisi, sauf s'il y a accord entre les parties pour une prolongation du délai. Dans le cas présent, les parties ont convenu de prolonger le délai jusqu'au 14 mai 2001.
QUESTION
L'Office doit déterminer si les frais perçus par les transporteurs susmentionnés pour recouvrer les redevances qui se rattachent aux services de sûreté aéroportuaire allemands et l'imposition de certains suppléments sont conformes aux exigences législatives ou réglementaires.
FAITS
Pour ce qui est des frais qui s'appliquent aux services de sûreté aéroportuaire allemands, avant de monter à bord d'un aéronef en Allemagne, tous les passagers et leurs bagages sont tenus de subir des contrôles de sûreté. En 1990, le gouvernement allemand a modifié le règlement, autorisant ainsi les autorités aéronautiques allemandes à imposer des frais de sûreté pour chaque passager embarqué. Ce règlement stipule que les frais perçus par les autorités aéronautiques doivent se situer dans une fourchette précise et que les transporteurs aériens doivent aviser les instances du nombre de passagers qui doivent subir un contrôle de sûreté. Le montant remis par les transporteurs aériens aux autorités aéronautiques est établi en fonction de ce nombre. Le règlement ne fixe pas la manière de percevoir les frais en question. Les autorités aéronautiques ont la possibilité de percevoir les frais directement auprès des passagers, par l'entremise des transporteurs aériens ou par tout autre moyen disponible. Les instances ont opté pour la formule selon laquelle ce sont les transporteurs aériens qui perçoivent ces frais.
Pour ce qui est de la question des suppléments, la résolution 722 de la Conférence des services aux passagers de l'IATA [Billets automatisés de transition (TAT)] prévoit l'impression de la mention « Q » sur les billets des passagers lorsqu'un supplément (autre que des frais d'escale et (ou) de correspondance) s'applique à un tronçon particulier. Ainsi, les suppléments « Q » désignent les frais qu'un transporteur ajoute au tarif de base. Ces suppléments servent notamment à amortir les hausses des prix du carburant et la dépréciation de la valeur du dollar canadien par rapport aux devises étrangères.
Le United States Standard Travel Agent Registry (ci-après le USTAR), organisme parent du CSTAR, a déposé une plainte analogue auprès du ministère des Transports des États-Unis.
POSITIONS DES PARTIES
CSTAR
Le CSTAR affirme que les transporteurs aériens abusent des procédures d'établissement des billets dans le calcul, le traitement, la documentation et la perception des frais, des suppléments, des taxes et des redevances se rapportant au transport aérien. Le CSTAR précise que, même s'il n'est pas contre l'idée que les transporteurs aériens puissent récupérer des coûts d'exploitation, il s'oppose à ce que les transporteurs n'utilisent pas les tarifs pour rendre compte de leurs coûts. Pour ce qui est de la perception des frais se rattachant aux services de sûreté aéroportuaire allemands, le CSTAR soutient que Lufthansa a perçu des montants qui dépassent les redevances autorisées et qu'elle a utilisé sa position au sein de l'IATA pour inciter d'autres transporteurs membres de l'IATA à percevoir des redevances analogues. Le CSTAR affirme par ailleurs que Lufthansa continue de tromper les passagers en apposant sur les billets des passagers le code confondu de « DE » désignant les frais de dossier et les redevances de sûreté, alors que ce code est exclusivement réservé aux sommes légiférées par le gouvernement. Pour ce qui est des suppléments, le CSTAR affirme que les transporteurs aériens utilisent une variété croissante de suppléments en vue de tromper les consommateurs quant aux coûts réels de transport; que ces suppléments permettent aux transporteurs de faire une concurrence déloyale aux transporteurs qui ne les perçoivent pas en raison de la position avantageuse que cela leur confère sur les affichages des systèmes informatisés de réservation; que les suppléments de carburant ne sont pas imposés de manière proportionnelle, ce qui signifie que certains consommateurs en subventionnent d'autres; et que les suppléments sont une pratique anticoncurrentielle car ils favorisent une conjoncture qui n'incite guère à faire preuve d'efficacité et à réduire les coûts.
Compte tenu de ce qui précède, le CSTAR a demandé à l'Office de prendre les mesures suivantes :
Pour ce qui est des frais se rattachant aux services de sûreté aéroportuaire allemands :
- sommer tous les transporteurs qui desservent l'Allemagne, et ceux qui émettent des billets en leur nom, de ramener les frais à un niveau qui soit juste et légitime;
- sommer les transporteurs de rembourser intégralement et immédiatement les consommateurs qui ont payé un trop-perçu;
- sommer l'IATA et (ou) les transporteurs qui en sont membres de maintenir et de fournir sur demande et gratuitement la preuve que les tarifs déposés auprès du Ticket Tax Box Service (TTBS)de l'IATA sont étayés par des documents confirmant que les taxes ou droits sur le transport aérien ont été approuvés par les gouvernements, et contraindre l'IATA à ouvrir une enquête pour s'assurer que tous les montants inclus dans le TTBS sont légitimes et à rendre compte de ses constatations d'écarts à l'Office dans les 45 jours suivant tout arrêté émis par l'Office au sujet de cette question;
- prendre les mesures jugées nécessaires à l'encontre de Lufthansa et de l'IATA, notamment l'imposition de mesures de redressement aux termes de la Loi sur la concurrence, L.R.C. (1985), ch. 34.
Pour ce qui est des suppléments « Q » :
- interdire aux transporteurs aériens d'utiliser des suppléments « Q » ou tout autre type de supplément en vue de récupérer des coûts d'exploitation directs ou indirects;
- obliger les transporteurs à inclure dans le montant du prix tous les coûts qu'ils désirent recouvrer, peu importe que ces coûts soient directs ou indirects;
- exiger que les tarifs affichés et les annonces destinées aux consommateurs précisent le coût total du transport aérien, seuls les taxes et les frais gouvernementaux étant indiqués séparément, mais divulgués au complet;
- obliger les transporteurs à rembourser, à la demande des consommateurs ou par le processus de remboursement normal, les taxes, les redevances d'utilisation, les suppléments de carburant, les redevances de navigation perçues par NavCan, les frais de prestations supplémentaires, les redevances de sûreté aéroportuaire ou tous autres frais d'utilisation ou de consommation figurant sur un billet, lorsque le passager décide de demander un remboursement sur un billet remboursable ou qu'il renonce à un billet non remboursable.
American Airlines
American Airlines a répliqué à la plainte déposée par l'USTAR auprès du ministère des Transports des États-Unis et elle invoque, dans sa réplique à la plainte du CSTAR, l'exposé du transporteur remis au ministère des Transports des États-Unis. American Airlines adopte par ailleurs la réponse d'Air Canada à la plainte du CSTAR dans la mesure où elle s'applique à American Airlines.
American Airlines soutient que les suppléments de carburant ne trompent ni les consommateurs ni les agents de voyages et ne constituent pas une méthode déloyale de concurrence, étant donné que les autres transporteurs ont le choix soit d'augmenter leurs tarifs, soit de ne rien faire.
Le transporteur fait observer que ses billets sont vendus au public par son propre système de réservation ou sur son site Internet, ou encore par le biais d'agents de voyages qui émettent des billets par le biais d'un système informatisé de réservation. American Airlines précise que les consommateurs ne voient pas les affichages des systèmes informatisés de réservation qu'utilisent les agents de voyages et que, par conséquent, ils ne peuvent pas être induits en erreur ou trompés par ces affichages. Le transporteur affirme que les agents de voyages n'ont aucun motif d'invoquer une concurrence déloyale à l'encontre des transporteurs aériens, étant donné qu'ils ne font pas concurrence aux transporteurs aériens. American Airlines reconnaît que certains affichages des systèmes informatisés de réservation n'indiquent pas les tarifs totaux pour chaque paire de villes desservie étant donné que les taxes, les redevances et les suppléments qui s'appliquent peuvent varier selon l'aéroport et l'itinéraire. Toutefois, le transporteur affirme que les agents de voyages ont recours à toute une variété d'outils dans un système informatisé de réservation pour déterminer le plus bas tarif qui existe sur un itinéraire donné. American Airlines constate également que les tarifs qui sont affichés sur un système informatisé de réservation contiennent du texte avertissant l'agent de voyages qu'il se peut que des suppléments, des redevances ou des taxes s'appliquent. Pour ce qui est de son site Web, American Airlines déclare qu'elle est assujettie à la réglementation du ministère des Transports des États-Unis relative à l'annonce des tarifs et qu'à ce titre, les tarifs doivent inclure les redevances et les suppléments, en dehors des taxes et des frais imposés par le gouvernement, qui viennent s'ajouter au tarif de base.
Pour ce qui est de la question des services de sûreté aéroportuaire en Allemagne, American Airlines affirme qu'elle a perçu ces frais en toute bonne foi d'après les renseignements qui lui ont été fournis par Lufthansa en vertu du processus de l'IATA.
American Airlines affirme n'avoir fait aucune déclaration frauduleuse ou trompeuse au sujet des questions soulevées par le CSTAR et que les suppléments contre lesquels le CSTAR s'élève sont justes et raisonnables, et qu'ils sont par ailleurs conformes au Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58, amélioré (ci-après le RTA).
American Airlines déclare qu'étant donné l'absence d'une allusion dans la plainte du CSTAR à la violation d'une loi par American Airlines, l'Office n'est pas habilité à traiter la plainte. De plus, American Airlines soutient que l'Office n'est pas investi du pouvoir légal de prendre certaines des mesures de redressement demandées par le CSTAR.
Lufthansa
Lufthansa soutient que la plainte du CSTAR manque de fondements factuels ou juridiques et qu'elle déborde l'objet et (ou) les pouvoirs territoriaux de l'Office. De plus, Lufthansa soutient qu'étant donné l'absence de toute allusion à une infraction d'une disposition législative ou réglementaire relevant des pouvoirs de l'Office, la plainte doit être rejetée.
Pour ce qui est des suppléments « Q », Lufthansa précise qu'elle ne perçoit pas ces suppléments sur ses services à destination et en provenance du Canada, et que la plainte du CSTAR ne contient aucune mention particulière contre le transporteur à cet égard.
Lufthansa déclare qu'avant le 1er janvier 2000, elle percevait un certain montant auprès des passagers qui comprenait les droits des services de sûreté aéroportuaire allemands et une redevance couvrant les coûts encourus par le transporteur dans la perception de ces droits, que d'autres transporteurs en font autant et que les autorités aéronautiques allemandes ne se sont jamais opposées à une telle pratique. Lufthansa fait également observer que, depuis le 1er janvier 2000, elle perçoit auprès des passagers le montant exact qu'elle est tenue de remettre aux autorités aéronautiques allemandes et, qu'à ce titre, elle agit conformément aux pratiques préconisées par le CSTAR. Pour ce qui est de la demande du CSTAR voulant que les consommateurs soient dédommagés du trop-perçu présumé au sujet des services de sûreté aéroportuaire allemands, Lufthansa soutient que l'Office n'a pas le pouvoir d'ordonner aux transporteurs d'agir ainsi. Lufthansa affirme qu'elle n'a pas enfreint la loi allemande et que la question même de savoir si elle l'a fait ou non relève des tribunaux allemands et non pas de l'Office.
Pour ce qui est de l'allégation du CSTAR voulant que Lufthansa ait exercé son influence auprès de l'IATA pour inciter d'autres transporteurs à fixer des prix illégalement, Lufthansa réfute l'allégation et soutient que le CSTAR n'a produit aucune preuve étayant une telle accusation.
United
United affirme qu'en général, les allégations du CSTAR et les mesures de redressement demandées n'ont aucune base factuelle.
Pour ce qui est des redevances se rattachant aux services de sûreté aéroportuaire allemands, le transporteur affirme qu'il n'a aucune raison de croire que les redevances qu'il a perçues vont à l'encontre de la loi allemande. United est d'avis par ailleurs que l'Office n'est pas investi du pouvoir d'enquêter sur la perception de ces redevances par United. Pour ce qui est du transport aérien international, United affirme que les pouvoirs de l'Office sont limités aux questions qui surviennent au Canada, peu importe qu'elles intéressent un transporteur étranger ou un transporteur canadien, et aux activités qui se déroulent à l'extérieur du Canada qui intéressent les transporteurs canadiens. United soutient que l'accord bilatéral de transport aérien conclu entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne interdit à l'Office d'intervenir unilatéralement en l'espèce.
United soutient que les transporteurs aériens ont de plus en plus recours aux suppléments pour contrebalancer les taxes, les redevances et autres frais imposés par les instances gouvernementales et aéronautiques. Le transporteur réfute l'affirmation du CSTAR selon laquelle ces suppléments sont anticoncurrentiels et qu'ils nuisent aux consommateurs. United soutient qu'en vertu de l'Accord bilatéral de transport aérien conclu entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis d'Amérique, l'Office n'a pas le pouvoir de réglementer les prix fixés par les transporteurs canadiens ou américains au titre des services de transport assurés entre le Canada et les États-Unis. United conseille par ailleurs à l'Office de prendre bonne note de la démarche adoptée par les instances de réglementation américaines dans la question des suppléments. Aux États-Unis, le ministère des Transports permet aux transporteurs d'imposer des suppléments, notamment en ce qui concerne le carburant, sous réserve que ces suppléments soient compris dans le tarif total annoncé au public, sauf lorsque le supplément a pour but de récupérer des taxes ou des redevances par passager approuvées par le gouvernement. United soutient que, pour autant qu'elle sache, les offres et les annonces de tarifs ont toujours respecté cette exigence. United affirme par ailleurs que les tarifs affichés sur les systèmes informatisés de réservation et que les produits et les procédures de réservation du site Internet du transporteur sont conformes aux exigences du ministère des Transports des États-Unis. Le transporteur ajoute que, lorsqu'une compagnie fixe certains frais séparément, au lieu de les incorporer dans les niveaux tarifaires, il est plus facile de réduire ou de supprimer ces redevances lorsque la conjoncture du marché change.
Delta
Delta est d'avis qu'en général, la plainte du CSTAR n'est pas justifiable par des raisons factuelles, juridiques ou, dans certains cas, juridictionnelles. De plus, le transporteur est d'avis que le CSTAR n'a pas réussi à étayer sa plainte par des fondements réglementaires ou législatifs et que certaines des mesures de redressement demandées par le CSTAR, notamment que l'Office somme les transporteurs de dédommager les consommateurs du trop-perçu relatif aux services de sûreté aéroportuaire allemands, ne relèvent pas des pouvoirs de l'Office.
Delta affirme que le CSTAR n'a fourni aucune preuve établissant que la perception des redevances se rapportant aux services de sûreté aéroportuaire allemands contrevient à la loi allemande et ajoute que les questions juridiques soulevées par le CSTAR relèvent des compétences des autorités allemandes. Le transporteur ajoute par ailleurs que les frais perçus par lui ne comportent aucun élément de recouvrement des coûts.
Pour ce qui est de la question des suppléments, Delta affirme que ces suppléments sont compris dans tous ses tarifs annoncés et que le système de suppléments donne de bons résultats à la fois pour les transporteurs et les consommateurs. Delta fait observer que le ministère des Transports des États-Unis autorise les suppléments, sous réserve qu'ils soient compris dans le tarif total annoncé et que les annonces du transporteur et les affichages des tarifs sur les systèmes informatisés de réservation soient conformes aux pratiques et aux lignes directrices du ministère des Transports des États-Unis. Delta affirme que les suppléments sont transparents pour les consommateurs et qu'ils ont des chances d'être supprimés advenant que la conjoncture qui a précipité leur adoption évolue dans le bon sens. Delta est d'avis qu'étant donné que les tarifs affichés sur les systèmes informatisés de réservation sont réservés à l'usage des agents de voyages, il est difficile de comprendre l'assertion du CSTAR selon laquelle les consommateurs sont induits en erreur par ces affichages. Le transporteur réfute par ailleurs l'idée que les suppléments nuisent à la concurrence ou vont à l'encontre de l'intérêt public. À cet égard, Delta fait observer que, puisque tous les transporteurs sont tenus de divulguer les suppléments, les consommateurs sont en mesure de comparer avec précision les tarifs globaux.
Pour ce qui est de l'argument du CSTAR selon lequel les suppléments de carburant doivent s'appliquer de manière proportionnelle, Delta soutient qu'un régime de réglementation se rattachant à une telle question serait contraire à la politique aérienne en vigueur.
Northwest
Northwest affirme que le CSTAR n'a fourni aucune preuve portant à croire que Northwest, ou tout autre transporteur, se soit livré à des pratiques trompeuses, ait nui à un concurrent ou ait enfreint la loi.
Northwest affirme avoir décidé seule de percevoir les frais se rattachant aux services de sûreté aéroportuaire allemands, et qu'une telle pratique, pour autant que le transporteur sache, est conforme à la loi allemande. Northwest déclare que, si le respect de la loi allemande est remis en question, il faut laisser les autorités allemandes trancher sur cette affaire.
Pour ce qui est des allégations du CSTAR dénonçant le caractère trompeur et anticoncurrentiel des suppléments « Q », Northwest déclare ne ménager aucun effort, par chacun de ses circuits de distribution, pour informer intégralement les consommateurs du prix total s'appliquant aux voyages aériens. À cet égard, le transporteur affirme que son système informatisé de réservation avertit clairement de l'imposition possible de divers suppléments, que le site Web de Northwest divulgue les frais supplémentaires et que les tarifs annoncés comprennent tous les frais applicables.
Northwest soutient que les mesures de redressement sollicitées par le CSTAR au sujet des services de sûreté aéroportuaire allemands ne relèvent pas de la compétence de l'Office. Le transporteur soutient par ailleurs qu'en ce qui concerne les actions correctives sollicitées par le CSTAR au sujet des suppléments, ces actions doivent être prises par des réformes de la réglementation et non pas par voie de plainte.
Air Canada
Répondant en son nom, au nom de Canadi*n et de l'ATAC, Air Canada déclare que le CSTAR n'a produit aucune preuve qui étaye la moindre de ses allégations.
Air Canada affirme qu'elle-même et Canadi*n ont perçu les redevances se rattachant aux services de sûreté aéroportuaire allemands en toute bonne foi en se fiant aux renseignements fournis par l'IATA, et que l'Office n'a pas la compétence voulue pour donner suite à la demande du CSTAR voulant que les passagers soient remboursés d'un présumé trop-perçu. Air Canada est d'avis par ailleurs que l'Office n'a pas les pouvoirs voulus pour sommer l'IATA de tenir une base de données au sujet des frais approuvés par les gouvernements ou d'enquêter pour savoir si certains frais sont légitimes ou non. Le transporteur soutient qu'en ce qui concerne la perception des redevances, le CSTAR n'a pas prouvé la moindre violation de la loi allemande et que les tribunaux allemands sont la seule tribune habilitée à déterminer si la loi a été enfreinte.
Pour ce qui est de la question des suppléments, Air Canada déclare qu'aucune disposition législative ou réglementaire administrée par l'Office ne stipule qu'un transporteur doit divulguer le prix total d'un service de transport dans l'annonce de ses tarifs. Le transporteur soutient que le recours aux suppléments est autorisé par le RTA, sous réserve que ces suppléments soient divulgués comme il se doit, ce qu'elle-même et Canadi*n font effectivement.
Continental
Continental affirme que la plainte du CSTAR n'a aucun fondement juridique ou factuel.
Pour ce qui est des redevances s'appliquant aux services de sûreté aéroportuaire allemands, Continental soutient avoir toujours suivi le calcul du supplément effectué par Lufthansa, n'avoir jamais été obligée par Lufthansa ou par l'IATA à percevoir un certain montant, ne pas avoir conspiré avec Lufthansa ou l'IATA en vue de tromper les passagers et n'avoir perçu aucun montant auquel elle n'avait pas droit en vertu de la loi allemande.
Continental soutient qu'en ce qui concerne les suppléments, ses pratiques sont conformes aux règlements et aux pratiques de l'industrie, et qu'elle n'a jamais cherché à dissimuler les prix aux yeux des consommateurs. Le transporteur affirme fournir des données complètes sur ses tarifs sur son site Web et que les utilisateurs des systèmes informatisés de réservation, principalement les agents de voyages, connaissent suffisamment bien les méthodes et le contenu des affichages de tarifs pour être en mesure de fournir aux consommateurs des renseignements complets sur les tarifs. Continental constate par ailleurs que le recours aux suppléments est autorisé en vertu du RTA, sous réserve que ces suppléments soient divulgués comme il se doit. Continental est d'avis que l'allégation du CSTAR selon laquelle les suppléments de carburant exercent une discrimination injuste à l'encontre de certains passagers est sans fondement et affirme que tous les consommateurs sont traités sur le même pied et que personne ne jouit d'un avantage abusif. Le transporteur affirme que le CSTAR n'a produit aucune preuve à l'appui de son assertion selon laquelle les suppléments induisent les consommateurs en erreur et sont anticoncurrentiels.
IATA
L'IATA estime que l'Office doit refuser de prendre la moindre mesure en ce qui concerne les questions soulevées par le CSTAR.
Pour ce qui est des allégations du CSTAR au sujet des services de sûreté aéroportuaire allemands, l'IATA soutient que le CSTAR n'a pas mentionné la moindre infraction à une loi, à un règlement, à un arrêté ou à une décision d'ordre administratif allemand, et que le CSTAR n'a pas produit la moindre preuve pour étayer son affirmation que les transporteurs, qui officient dans le cadre de l'IATA, induisent les passagers en erreur. L'IATA prétend que le CSTAR se méprend sur les fonctions qui incombent à l'IATA d'avertir les transporteurs des données qu'elle possède au sujet des taxes et des redevances. L'IATA affirme qu'elle ne peut se porter garante de l'exactitude des renseignements qui lui sont fournis par les transporteurs nationaux, car elle n'est pas en mesure de supporter le fardeau que représente l'interprétation des lois fiscales des pays du monde entier. Toutefois, l'IATA fait remarquer que, lorsque des questions évidentes sont soulevées ou sont signalées à son attention, elle demande alors des éclaircissements aux transporteurs concernés.
L'IATA affirme qu'au sujet de la question des suppléments, le CSTAR n'a pas produit la moindre preuve étayant son assertion voulant que, par le biais des suppléments, les transporteurs conspirent pour fixer les prix.
Réplique du CSTAR
Le CSTAR prétend que les transporteurs trompent les consommateurs en affirmant que les redevances qui se rattachent aux services de sûreté aéroportuaire allemands sont des taxes vu que ces redevances ne comportent pas seulement un montant ayant trait aux services de sûreté aéroportuaire, mais également un élément de recouvrement des coûts. Le CSTAR ajoute que les autorités allemandes n'ont jamais décrété que les transporteurs pouvaient incorporer cet élément de recouvrement des coûts dans les redevances de sûreté aéroportuaire. Le CSTAR réfute la notion que les transporteurs doivent s'en remettre à d'autres transporteurs pour fournir des renseignements sur les taxes et les redevances imposées par leurs États d'origine en soutenant qu'il incombe aux transporteurs qui assurent des services à destination de différents pays d'obtenir indépendamment les renseignements nécessaires. Le CSTAR réitère son point de vue selon lequel l'IATA, Lufthansa et d'autres transporteurs ont escroqué les passagers individuellement et conjointement. En réponse à l'argument selon lequel l'Office n'a pas les pouvoirs d'intervenir en l'espèce, ou que la question doit être tranchée par les autorités allemandes, le CSTAR affirme que l'Office est investi des pouvoirs nécessaires et qu'il est même obligé de protéger les Canadiens contre les pratiques frauduleuses.
Pour ce qui est des suppléments, le CSTAR affirme qu'aucun des répondants à sa plainte n'a fourni le moindre motif expliquant pourquoi ces montants sont exclus du tarif de base, à l'exception de United, qui a fait une vague allusion à cette question. Le CSTAR prétend qu'il ne cherche nullement à insinuer que l'Office doit s'ingérer dans la fixation des prix par les transporteurs, mais seulement que les prix doivent être représentés et diffusés de manière claire et exacte. Le CSTAR soutient que les affichages de tarifs comparatifs des systèmes informatisés de réservation sont sans doute l'instrument le plus utile qu'utilisent les agents de voyages pour déterminer les plus bas tarifs possible et que ces affichages ne fournissent que les tarifs de base applicables. Le CSTAR soutient qu'en excluant de ces affichages les redevances, comme celles qui ont trait au carburant et aux services de navigation, les transporteurs dénaturent le coût total du transport aérien et livrent une concurrence déloyale aux transporteurs qui ne perçoivent pas ces redevances.
Autres remarques
À l'appui de sa position voulant que les transporteurs abusent des suppléments, le CSTAR renvoie à un tarif d'Air Canada s'appliquant à un service de transport entre Toronto et Detroit où les taxes et les suppléments majorent d'environ 133 p. 100 le tarif de base. Le CSTAR ajoute par ailleurs qu'avec l'entrée en vigueur prévue de frais d'améliorations aéroportuaires de 10 $ à l'aéroport international Pearson de Toronto, les taxes et les suppléments majoreront d'environ 144 p. 100 le tarif susmentionné.
En réponse, Air Canada affirme qu'après avoir examiné ses tarifs publiés, elle n'a pas réussi à retrouver le tarif Toronto-Detroit auquel le CSTAR fait allusion, et que les taxes et les suppléments qui s'appliquent au tarif publié le plus bas du transporteur sur le faisceau Toronto-Detroit représentent 38 p. 100 du tarif.
Le CSTAR affirme que le tarif mentionné a été proposé par Air Canada comme « cyberaubaine » sur le site Internet du transporteur. Le CSTAR mentionne également un avis publié par le ministère des Transports des États-Unis le 18 janvier 2001 qui, à son avis, a un rapport avec sa plainte. Cet avis, intitulé « Prohibition on deceptive practices in the marketing of airfares to the public using the Internet » (Interdiction de pratiques trompeuses dans la commercialisation des tarifs aériens au public utilisant Internet), mentionne notamment que « les redevances et les suppléments non gouvernementaux, comme les suppléments de carburant et les redevances de services, de même que les taxes d'accise ad valorem, doivent être compris dans le tarif annoncé » (traduction).
Air Canada soutient que la page sur laquelle apparaît le tarif « cyberaubaine » indique clairement le prix total que le passager paie pour son transport, que les redevances qui s'ajoutent au tarif sont décrites comme des taxes et des suppléments et que ces déclarations sont conformes aux règlements des ministères des Transports des États-Unis et du Canada.
Le CSTAR affirme qu'en incorporant les taxes et les suppléments dans un même montant, Air Canada crée l'impression trompeuse que certains de ces suppléments sont rendus obligatoires par le gouvernement. Le CSTAR constate qu'Air Canada a publié des pages de tarifs « cyberaubaines » sur lesquelles tous les suppléments sont compris dans une section intitulée « taxes », et que des annonces imprimées d'Air Canada ont été publiées sans mentionner que les tarifs font l'objet de suppléments qui s'ajoutent à ceux qui ont un rapport avec les services de NavCan. Le CSTAR déclare par ailleurs qu'en fait, les pratiques d'Air Canada au sujet des tarifs « cyberaubaines » vont à l'encontre de l'avis du ministère des Transports des États-Unis publié le 18 janvier 2001.
ANALYSE ET CONSTATATIONS
Pour en arriver à ses constatations, l'Office a tenu compte de tous les éléments de preuve soumis par les parties au cours des plaidoiries et tient maintenant à traiter des questions qui suivent.
Redevances se rattachant aux services de sûreté aéroportuaire allemands
Les répondants ont tous déclaré qu'étant donné qu'il s'agit d'une question qui intéresse la loi allemande, l'Office ne doit pas s'en mêler. L'Office convient que la question de savoir si le fait de combiner les redevances de sûreté et de dossier contrevient à la loi allemande est une question sur laquelle doit statuer le système juridique allemand. Toutefois, l'Office peut enquêter sur cette question dans une optique canadienne, notamment pour savoir si, au Canada, il est trompeur ou injuste et déraisonnable d'indiquer que les redevances de sûreté et les frais de dossier sont mentionnés comme des redevances gouvernementales. À cet égard, l'Office renvoie à l'alinéa 18b) du RTA, qui dit ceci :
Les licences internationales service régulier et service à la demande sont subordonnées aux conditions suivantes :
b) le licencié ne fait publiquement aucune déclaration fausse ou trompeuse concernant son service aérien ou tout service connexe
Redressement demandé par le CSTAR
- Que l'Office somme tous les transporteurs qui desservent l'Allemagne, et ceux qui émettent des billets en leur nom, de ramener les redevances des services de sûreté allemands à un niveau juste et légitime.
Par une lettre datée du 28 février 2001 envoyée aux répondants à la plainte du CSTAR, l'Office constate que plusieurs transporteurs ont déclaré qu'en janvier 2000, ils ne percevaient que les redevances de sûreté sans inclure les frais de dossier administratif. L'Office a demandé à ces transporteurs de confirmer qu'il en est toujours ainsi et demande aux autres transporteurs de préciser s'ils continuent de percevoir sous une certaine forme des frais de dossier administratif dans le cadre des redevances de services de sûreté. En réponse, tous les transporteurs ont déclaré qu'ils ne perçoivent que les redevances des services de sûreté et qu'ils ne perçoivent pas de frais de dossier. Compte tenu de cette donnée, l'Office juge qu'il n'est pas nécessaire de prendre la mesure de redressement demandée par le CSTAR.
- Que l'Office somme les transporteurs aériens de rembourser intégralement et immédiatement les consommateurs du trop-perçu illégal des redevances des services de sûreté aéroportuaire allemands.
L'Office n'est pas habilité à accorder un tel remboursement dans ce cas.
- Que l'Office somme l'IATA et (ou) ses membres de maintenir et de fournir sur demande et gratuitement la preuve que les tarifs déposés auprès du Ticket Tax Box Service (TTBS) de l'IATA sont étayés par d'actuels documents juridiques d'intérêt local confirmant que l'imposition des taxes ou droits relatifs au transport aérien ont été approuvés ou sanctionnés par les gouvernements compétents, et qu'il contraigne l'IATA à mener immédiatement une enquête exhaustive pour s'assurer que tous les montants inclus dans le TTBS sont légitimes et justes à ce moment et rende compte de ses constatations d'écarts à l'Office dans les 45 jours suivant tout arrêté émis par l'Office au sujet de cette question.
Le CSTAR n'a pas convaincu l'Office qu'il était nécessaire d'acquiescer à cette requête. En particulier, l'Office est l'instance législative responsable de la réglementation économique des transporteurs aériens. Le rôle de l'Office consiste donc à s'assurer que les personnes et les compagnies qui se livrent à des activités de transport aérien se conforment aux dispositions de la LTC et du RTA. L'Office ne dispose d'aucun motif justifiant que l'IATA soit tenue d'entreprendre une telle enquête.
- Que l'Office prenne les mesures jugées nécessaires à l'encontre de Lufthansa et de l'IATA, notamment l'imposition de mesures de redressement prévues aux termes de la Loi sur la concurrence, pour le rôle qu'elles ont joué dans l'affaire entourant les redevances se rattachant aux services d'aéroport en Allemagne.
Compte tenu de ce qui précède, l'Office n'a pas l'intention de prendre de mesures contre Lufthansa ou l'IATA. En ce qui concerne les mesures correctives prévues par la Loi sur la concurrence, les activités de l'Office ne sont pas régies par cette loi. Le rôle de l'Office consiste à s'assurer que les personnes et les entreprises qui se livrent à des activités de transport aérien se conforment aux dispositions de la LTC et du RTA.
Suppléments en général
Redressement sollicité par le CSTAR
- Que l'Office interdise aux transporteurs aériens d'utiliser des suppléments « Q » ou tout autre type de supplément en vue de récupérer des coûts d'exploitation directs ou indirects.
- Que l'Office oblige les transporteurs à inclure dans le montant du prix tous les coûts recouvrés, peu importe qu'ils soient directs ou indirects.
- Que l'Office exige que les tarifs affichés et les annonces destinées aux consommateurs précisent le coût total et réel du transport aérien, seuls les taxes et les frais gouvernementaux étant indiqués séparément, mais à tout le moins divulgués au complet.
L'Office a soigneusement analysé les présentations du CSTAR et des transporteurs aériens, et il est d'avis que le CSTAR ne l'a pas convaincu d'une infraction à la LTC ou au RTA. Le CSTAR n'a pas fourni suffisamment de preuves indiquant que le public avait été lésé. Toutefois, l'Office est d'avis qu'au tout début du processus décisionnel, les transporteurs aériens doivent s'assurer que les consommateurs sont clairement avisés de tous les prix qui se rattachent au transport aérien et que, dans la mesure du possible, les transporteurs doivent tout faire pour incorporer les diverses redevances dans les niveaux tarifaires et éviter les suppléments.
Pour ce qui est de la question des affichages des tarifs, celle-ci relève du Règlement sur les systèmes informatisés de réservation (SIR) canadiens, DORS/95-275, qui est du ressort de Transports Canada.
- Que l'Office oblige les transporteurs à rembourser, à la demande expresse des consommateurs ou par le processus de remboursement normal, les taxes, les redevances d'utilisation, les suppléments de carburant, les redevances de navigation perçues par NavCan, les frais de prestations supplémentaires, les redevances de sûreté aéroportuaire ou tous autres frais d'utilisation ou de consommation, entre autres, spécifiés nommément sur un billet, lorsque le passager décide de demander un remboursement sur un billet remboursable ou qu'il renonce à (n'utilisera pas) un billet non remboursable, afin d'assurer de tels remboursements.
Le CSTAR n'a pas convaincu l'Office qu'une telle action corrective devait lui être accordée. Selon le règlement, les transporteurs aériens doivent clairement énoncer dans leurs tarifs leurs politiques au sujet des remboursements. Ces politiques ne sont acceptables que dans la mesure où elles sont conformes au RTA.
CONCLUSION
À la lumière des constatations ci-dessus, l'Office rejette par les présentes la plainte.
American Airlines avait également demandé le rejet de la plainte du CSTAR et l'adjudication des frais relatifs à la présente instance en vertu de l'article 25.1 de la LTC. À cet égard, l'Office, après étude de cette affaire, conclut que l'adjudication de tels frais n'est pas justifiée dans les circonstances.
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