Décision n° 284-AT-A-2000
le 25 avril 2000
DEMANDE déposée par Golda R. Rosenberg conformément au paragraphe 172(1) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, au sujet du niveau d'assistance avec fauteuil roulant fournie par Air Canada lors du vol de retour entre Montréal (Québec) et New York (New York), le 4 décembre 1999.
Référence no U 3570/99-69
DEMANDE
Le 29 décembre 1999, Golda R. Rosenberg a déposé une demande auprès de l'Office des transports du Canada (ci-après l'Office) relativement à l'affaire énoncée dans l'intitulé.
Air Canada a déposé sa réponse le 7 février 2000 et Mme Rosenberg y a répliqué le 17 février 2000. Air Canada a fourni des observations supplémentaires le 29 février 2000.
QUESTION PRÉLIMINAIRE
Même si Air Canada a déposé sa réponse après le délai prévu à cette fin, l'Office, conformément à l'article 6 des Règles générales de l'Office national des transports, DORS/88-23, l'accepte comme étant pertinente et nécessaire à l'examen de la présente affaire.
QUESTION
L'Office doit déterminer si le niveau d'assistance fournie par Air Canada a constitué un obstacle abusif aux possibilités de déplacement de Mme Rosenberg et, le cas échéant, les mesures correctives devant être prises.
FAITS
Mme Rosenberg a une mobilité réduite et, lorsqu'elle voyage, elle a besoin d'assistance avec fauteuil roulant pour se rendre jusqu'à l'aéronef et depuis celui-ci au débarquement. Elle a confirmé, auprès d'un agent de voyages, une réservation pour un vol entre Montréal et New York avec Air Canada le 25 novembre 1999, avec retour le 4 décembre 1999.
Le dossier passager entré par l'agent de voyages dans le système de réservation informatisé d'Air Canada ne faisait pas état du besoin d'assistance avec fauteuil roulant de Mme Rosenberg. Toutefois, au moment de l'enregistrement à l'aéroport de Dorval, Mme Rosenberg a demandé et reçu l'assistance requise. L'assistance demandée lui a également été prodiguée à son arrivée à New York.
Au moment de s'enregistrer pour le vol de retour à l'aéroport La Guardia de New York, Mme Rosenberg a dû de nouveau demander l'assistance avec fauteuil roulant parce que le dossier d'Air Canada ne comportait aucune mention à cet effet. Après le départ du vol, le personnel d'Air Canada à New York a transmis la demande d'assistance à Montréal par téléscripteur électronique.
Avant l'atterrissage, le pilote a communiqué avec les employés d'Air Canada à l'aéroport de Dorval pour s'informer de la demande d'assistance avec fauteuil roulant de Mme Rosenberg. Toutefois, à son arrivée à Montréal à 18 h, personne n'attendait pour prêter assistance à Mme Rosenberg avec un fauteuil roulant. Le pilote est demeuré avec Mme Rosenberg et s'est enquis de la demande d'assistance pendant que le commissaire de bord tentait de trouver un fauteuil roulant. Vingt minutes plus tard, un autre employé d'Air Canada s'est présenté avec un fauteuil roulant.
POSITIONS DES PARTIES
Mme Rosenberg fait valoir que lorsqu'elle s'est enregistrée à l'aéroport de Dorval, elle a informé le transporteur de son besoin d'assistance avec fauteuil roulant. Le préposé à l'enregistrement lui a assuré que l'assistance requise lui serait fournie à New York de même qu'à son retour à Montréal puisque les renseignements nécessaires seraient entrés dans le système informatisé d'Air Canada.
Mme Rosenberg estime qu'à son retour à Montréal, on ne lui a pas rapidement fourni l'assistance avec fauteuil roulant, même si le service avait été demandé à l'avance. Elle déclare que les personnes ayant une déficience qui se présentent à l'aéroport de Dorval sont traitées comme des bagages non réclamés. Mme Rosenberg demande une lettre d'excuse et une indemnité et suggère à Air Canada de prendre les mesures nécessaires pour améliorer le niveau du service qu'elle offre aux personnes ayant une déficience.
Air Canada est dans l'impossibilité de vérifier si, au moment de l'enregistrement pour le vol de départ, Mme Rosenberg a fait une demande d'assistance avec fauteuil roulant pour son vol de retour, puisqu'elle ne connaît pas l'identité de l'agent qui s'est occupé d'elle. D'autre part, le transporteur précise qu'il n'a plus accès à l'information que renfermait son système électronique de contrôle des départs au sujet du vol en question.
Air Canada indique que l'enregistrement des passagers se fait au moyen du système de contrôle des départs et que les données entrées dans ce système ne sont pas automatiquement entrées dans le dossier passager, comme cela se fait dans le système de réservation. Air Canada précise que les préposés à l'enregistrement ont accès au système de réservation, mais il leur faut suivre une procédure spéciale pour y accéder. Cette procédure est cependant rarement utilisée en raison de contraintes de temps au comptoir d'enregistrement. Air Canada ajoute que la demande de la passagère a peut-être été entrée dans le système de contrôle des départs mais non pas dans le dossier passager. En conséquence, le personnel d'Air Canada n'a pu avoir accès à la demande d'assistance de Mme Rosenberg au moment du vol de retour.
Selon Air Canada, c'est un malheureux problème de communication qui est à l'origine de l'incident. Même si elle n'a pas été en mesure de déterminer dans quelles circonstances on a tardé à fournir l'assistance avec fauteuil roulant, elle a l'impression que les messages de l'aéroport La Guardia et du pilote ont été reçus à Montréal après que les agents ont examiné les demandes de services spéciaux pour le vol de retour et établi les préparatifs nécessaires. Air Canada ajoute que trois agents avaient été affectés au vol en question parce que deux demandes de fauteuil roulant avaient été faites. Il se peut également qu'aucun fauteuil roulant n'était disponible dans le secteur parce qu'il s'agissait d'une période particulièrement chargée de la journée, et que cela aurait obligé l'agent à se rendre dans d'autres secteurs de l'aéroport pour en trouver un.
Air Canada déclare qu'elle s'engage à fournir les services aux passagers ayant une déficience lorsque les demandes lui parviennent au moins 48 heures avant le départ. Elle précise toutefois que tous les efforts nécessaires sont déployés pour répondre aux demandes dont elle est saisie à l'intérieur de la période visée, mais que des circonstances comme la réception tardive des renseignements peuvent l'empêcher de fournir certains services en temps utile. Elle ajoute qu'un autre passager à bord du même vol a promptement reçu l'assistance requise puisque sa demande d'assistance avec fauteuil roulant avait été formulée au moment de la réservation. Il lui a cependant fallu un peu plus de temps pour fournir à Mme Rosenberg l'assistance demandée en raison du court préavis qui lui avait été donné.
Air Canada regrette ne pas avoir répondu aux attentes de Mme Rosenberg. Toutefois, elle estime que des efforts raisonnables ont été déployés pour lui fournir un fauteuil roulant malgré un léger retard.
ANALYSE ET CONSTATATIONS
Pour en arriver à ses constatations, l'Office a examiné tous les documents présentés par les parties au cours des plaidoiries.
L'Office note que la procédure normale d'Air Canada pour la fourniture d'assistance avec fauteuil roulant consiste à extraire les messages à cet effet du dossier passager. Même si un tel message n'avait pas été indiqué dans le dossier passager de Mme Rosenberg au moment de la réservation, Air Canada a eu l'occasion de remédier à la situation après son enregistrement à l'aéroport de Dorval, mais elle ne l'a pas fait.
L'Office note aussi qu'en raison de contraintes de temps, les agents d'enregistrement ont recours au système de contrôle des départs au lieu du dossier passager. Même si le système de contrôle des départs a pu être modifié pour y ajouter la demande d'assistance avec fauteuil roulant de Mme Rosenberg, le dossier passager est demeuré inchangé. Selon l'Office, malgré les contraintes de temps qui ont pu empêcher l'agent de modifier le dossier passager de Mme Rosenberg à son enregistrement, il avait tout le temps voulu avant le vol de retour, neuf jours plus tard, pour le faire. Si un message avait été ajouté dans le dossier passager de Mme Rosenberg relativement à l'assistance requise, les employés d'Air Canada à l'aéroport de Dorval auraient été plus à même de répondre à ses besoins lors de son retour de New York.
L'Office détermine que le fait que le dossier passager de Mme Rosenberg n'a pas été modifié après que celle-ci a avisé le préposé à l'enregistrement à l'aéroport de Dorval de son besoin d'assistance, et avant son vol de retour, a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement du fait qu'elle a dû, de nouveau, demander l'assistance requise avec fauteuil roulant au préposé à l'enregistrement de New York et au personnel de bord. De plus, pendant l'attente de 20 minutes à l'aéroport de Dorval, Mme Rosenberg s'est demandée si l'assistance nécessaire lui serait fournie. Cet obstacle est jugé abusif car il aurait pu être facilement évité si le préposé à l'enregistrement à Montréal avait pris les mesures nécessaires pour assurer l'ajout d'un message faisant état de la demande d'assistance avec fauteuil roulant dans le dossier passager de Mme Rosenberg. Ainsi, ce message aurait été à la disposition des agents au moment des préparatifs pour répondre aux besoins des personnes ayant une déficience qui se trouvaient à bord du vol de retour.
Air Canada devrait donc être tenue d'aviser l'Office des mesures qu'elle prendra pour s'assurer que son personnel affecté aux services à la clientèle à l'aéroport de Dorval soit informé de l'incident visé aux présentes et pour s'assurer que ses agents vérifient que l'information reçue au moment de l'enregistrement concernant les besoins des passagers ayant des déficiences, dont l'assistance avec fauteuil roulant, soit ajoutée dans les dossiers passagers.
Quant à la question d'indemnisation, il importe de noter qu'après avoir déterminé qu'il y a eu obstacle abusif aux possibilités de déplacement d'une personne ayant une déficience, l'Office peut, conformément au paragraphe 172(3) de la Loi sur les transports au Canada, exiger le versement d'une indemnité pour couvrir les frais supportés par cette personne en raison de l'obstacle abusif. L'Office constate que Mme Rosenberg n'a engagé aucune dépense en raison de l'obstacle abusif.
CONCLUSION
Compte tenu de ce qui précède, l'Office conclut que le fait que le dossier passager de Mme Rosenberg n'a pas été modifié après que celle-ci a avisé le préposé à l'enregistrement à l'aéroport de Dorval de son besoin d'assistance, et avant son vol de retour, a constitué un obstacle abusif à ses possibilités de déplacement. Par conséquent, Air Canada est tenue d'aviser l'Office des mesures qu'elle prendra pour s'assurer que son personnel affecté aux services à la clientèle à l'aéroport de Dorval soit informé de l'incident et pour s'assurer que ses agents vérifient que l'information reçue au moment de l'enregistrement concernant les besoins des passagers ayant des déficiences, dont l'assistance avec fauteuil roulant, soit ajoutée dans les dossiers passagers. Air Canada est tenue de remettre à l'Office, dans les 30 jours suivant la date de cette décision, un rapport sur les mesures prises.
- Date de modification :