Décision n° 319-AT-A-2005
Suivi - décision no 612-AT-A-2006
le 25 mai 2005
DEMANDE présentée par Roberto Breno en vertu des paragraphes 172(1) et (3) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, concernant les difficultés qu'il a éprouvées relativement à son vol avec Alitalia-Linee Aeree Italiane S.p.A. entre Toronto (Ontario), au Canada, et Lamezia, en Italie, le 10 septembre 2003.
Référence no U3570/04-25
DEMANDE
[1] Le 27 avril 2004, Roberto Breno a déposé auprès de l'Office des transports du Canada (ci-après l'Office) la demande énoncée dans l'intitulé.
[2] Dans sa décision no LET-AT-A-157-2004 du 10 juin 2004, l'Office a enjoint à Alitalia-Linee Aeree Italiane S.p.A. (ci-après Alitalia) de fournir sa réponse à la demande, y compris une copie du dossier de réservation ainsi que tous les dossiers et documents concernant la réservation, l'enregistrement et le vol de M. Breno. Dans la même décision, l'Office enjoignait également à M. Breno de fournir plus d'information au sujet de l'aide attendue de son aide-soignant, relativement à sa déficience, pendant l'attente de son vol à l'Aéroport international Lester B. Pearson - Toronto (ci-après l'aéroport de Toronto) et de fournir une copie du certificat médical qui révélait ses besoins en matière de siège. M. Breno a déposé des mémoires les 12 et 28 juin 2004 en réponse à cette décision.
[3] Dans sa décision no LET-AT-A-158-2004 du 10 juin 2004, l'Office a demandé des clarifications de la part de Cianfarani Travel Inc. (ci-après Cianfarani Travel) au sujet de l'information qui a été échangée lorsque les préparatifs du voyage de M. Breno ont été faits, ainsi que l'information échangée à la suite de l'incident. Cianfarani Travel a déposé sa réponse le 28 juin 2004.
[4] Le 29 juin 2004, Alitalia a déposé sa réponse à la demande, y compris une copie du dossier passager (ci-après le DP) de M. Breno. M. Breno a déposé sa réplique à la réponse du transporteur le 5 juillet 2004.
[5] Dans sa décision no LET-AT-A-228-2004 du 16 août 2004, l'Office a demandé de nouveau à Alitalia de déposer l'information requise dans la décision no LET-AT-A-157-2004. Les 25 août et 2 septembre 2004, Alitalia a demandé à l'Office une prorogation du délai imparti pour déposer sa réponse. L'Office, dans sa décision no LET-AT-A-239-2004 du 27 août 2004, puis dans la décision no LET-AT-A-260-2004 du 10 septembre 2004, a accordé à Alitalia jusqu'au 1er octobre 2004 pour le faire.
[6] Le 1er octobre 2004, Alitalia a déposé l'information requise dans la décision no LET-AT-A-157-2004. M. Breno a déposé des commentaires le 5 octobre 2004.
[7] Aux termes du paragraphe 29(1) de la Loi sur les transports au Canada (ci-après la LTC), l'Office est tenu de rendre sa décision au plus tard 120 jours après la date de réception de la demande, sauf s'il y a accord entre les parties pour une prolongation du délai. Dans le cas présent, les parties ont convenu de prolonger le délai pour une période indéterminée.
OBSERVATION PRÉLIMINAIRE
[8] Même si le mémoire déposé par M. Breno le 28 juin 2004 en réponse à la décision no LET-AT-A-157-2004 a été reçu après le délai prescrit, l'Office, en vertu de l'article 5 des Règles générales de l'Office des transports du Canada, DORS/2005-35, l'accepte le jugeant pertinent et nécessaire à son examen de cette affaire.
QUESTION
[9] L'Office doit déterminer si le refus d'embarquement et l'assignation du siège fourni à M. Breno ont constitué des obstacles abusifs à ses possibilités de déplacement et, le cas échéant, quelles mesures correctives devraient être prises.
FAITS
[10] M. Breno a une discopathie dégénérative. Il a aussi de la difficulté à entendre dans les endroits bruyants et, lorsqu'il voyage par avion, il demande l'assignation d'un siège qui procure suffisamment d'espace pour allonger les jambes. Il a besoin d'un aide-soignant pour l'aider à la maison, lorsqu'il magasine, pour se rendre à ses rendez-vous médicaux et chez le dentiste et dans l'accomplissement d'autres tâches.
[11] Le 20 août 2003, l'aide-soignant de M. Breno a, par l'entremise de Cianfarani Travel, réservé le voyage de M. Breno avec Alitalia prévoyant son transport de Toronto à Lamezia, via Rome, le 10 septembre 2003. La réservation de M. Breno a été confirmée sur le vol no AZ 7651, partant à 20 h 30, qui était exploité par Air Canada en vertu d'un accord de partage des codes de vol avec Alitalia. Le jour du voyage, M. Breno s'est rendu à l'aéroport de Toronto accompagné de son aide-soignant et s'est enregistré vers 16 h. Le vol no AZ 7651 était surréservé et tous les sièges avaient été assignés avant le moment où M. Breno s'est enregistré. M. Breno a voyagé sur le vol d'Air Canada no AC 862, qui devait partir à 22 h 15. On lui a assigné le siège 31D. Une fois arrivé à son siège, M. Breno a constaté qu'il ne procurait pas suffisamment d'espace pour lui permettre d'allonger ses jambes.
[12] M. Breno a déposé les documents suivants : un certificat médical de son médecin qui indique qu'il a une discopathie dégénérative et besoin d'un siège près cloison lui permettant d'allonger les jambes; une carte d'embarquement qui indique que l'embarquement pour le vol no AC 862 devait avoir lieu à 22 h 10; un billet d'avion modifié qui indique que le vol no AC 862 devait partir à 22 h 15; et un reçu de stationnement qui indique que M. Breno et son aide-soignant sont arrivés à l'aéroport à 15 h 53 et que l'aide-soignant de M. Breno est sorti du stationnement à 22 h 34.
[13] L'aide-soignant a appelé la soeur de M. Breno en Italie, qui devait aller chercher M. Breno à l'aéroport, afin de l'aviser des changements de vol dans l'itinéraire de M. Breno.
[14] Le système informatique d'Alitalia génère un DP pour chaque vol qui contient de l'information à propos des passagers, y compris les passagers ayant des besoins précis. Le DP qui rend compte du vol que devait prendre M. Breno ne fait état d'aucune demande de siège à l'avance.
[15] Selon les politiques et procédures d'Alitalia concernant l'assignation des sièges, les personnes ayant une déficience qui « déambulent » [traduction] devraient obtenir un siège à proximité d'une issue au premier niveau, dans n'importe quelle partie de la cabine, de préférence un siège côté allée, mais jamais à côté d'une issue ou sur le pont supérieur. Les procédures générales d'enregistrement d'Alitalia prévoient que lorsqu'un siège ne peut être assigné lors de la réservation, il devrait l'être au moment de l'enregistrement, sur demande du passager, et à condition que l'assignation du siège demandé ne nuise pas aux exigences de sécurité et techniques/opérationnelles du transporteur.
[16] La politique d'Alitalia concernant l'indemnisation pour le refus d'embarquement énonce, en partie, ce qui suit :
Lorsqu'il est impossible d'embarquer tous les passagers qui ont réservé, la priorité absolue doit être donnée aux passagers qui ont une mobilité réduite et aux mineurs non accompagnés.
Les passagers qui se voient refuser l'embarquement seront admissibles à une indemnisation.
En plus de l'indemnisation en argent, les passagers qui se voient refuser l'embarquement se verront offrir des services complémentaires comme : un appel téléphonique/télex/fax au point de destination; tous les breuvages, les repas, l'hébergement à l'hôtel et le transport aéroport/hôtel/aéroport nécessaires en attendant leur départ sur un autre vol, conformément à la réglementation applicable aux changements d'itinéraire involontaires.
[17] La règle 87 du tarif d'Alitalia énonçant les règles et les prix applicables au transport international des passagers no NTA (A) 210, prévoit, en partie, ce qui suit :
(B) PRIORITÉS D'EMBARQUEMENT(1) En cas de survente d'un vol, aucun passager ne peut se voir refuser involontairement l'embarquement si SU n'a pas au préalable demandé si des passagers étaient prêts à céder leur place sur une base volontaire.
(2) Si le nombre de passagers volontaires est insuffisant, d'autres passagers pourront se voir involontairement refuser l'embarquement, en conformité avec la politique de priorité d'embarquement de SU. Les passagers ayant des réservations confirmées et qui n'ont pas reçu de carte d'embarquement seront autorisés à monter à bord de l'aéronef dans l'ordre suivant, jusqu'à ce que tous les sièges disponibles soient occupés :
(a) Les passagers ayant une déficience physique et les enfants non accompagnés âgés de moins de 12 ans.
[...]
NOTE : Les passagers ayant une déficience physique et les enfants non accompagnés de moins de 12 ans seront exemptés de l'ordre de retrait, au besoin, pour éviter les préjudices abusifs. [traduction]
POSITIONS DES PARTIES
[18] M. Breno affirme avoir fait une demande de siège avant le voyage. Toutefois, il a été informé par son agent de voyage que les sièges près cloison ne pouvaient pas être assignés à l'avance car cela était seulement fait au comptoir d'enregistrement à l'aéroport. M. Breno déclare qu'on lui a conseillé d'apporter une note de son médecin indiquant son besoin d'un siège près cloison et de la présenter à l'enregistrement.
[19] M. Breno soutient être arrivé à l'aéroport de Toronto vers 16 h, accompagné de son aide-soignant. Il avait été prévu que son aide-soignant resterait avec lui pendant une heure et qu'Alitalia s'occuperait de lui par la suite. M. Breno affirme qu'après qu'on lui ait refusé l'embarquement sur le vol no AZ 7651, il a demandé à son aide-soignant de rester avec lui à l'aéroport pour l'aider en raison de sa « déficience partielle » [traduction], et parce qu'il ne maîtrise pas l'anglais et qu'il a de la difficulté à entendre dans les endroits bruyants. M. Breno ajoute que son aide-soignant est demeuré à l'aéroport au cas où d'autres problèmes surviendraient.
[20] M. Breno indique que de plus en plus de personnes s'assemblaient dans la salle d'attente de l'aéroport et il fait observer que pour pouvoir entendre ce qui se passait, il s'est contraint à rester debout pendant de longues périodes près du comptoir étant donné qu'il n'y avait pas de sièges à proximité. M. Breno précise que cela lui a causé des douleurs au dos.
[21] M. Breno note qu'à 22 h, on lui a offert une place sur un vol d'Air Canada vers l'Italie via Londres. Bien qu'il ait dû se rendre rapidement à la porte d'embarquement pour prendre ce vol, malgré tout l'inconfort ressenti, M. Breno fait savoir que l'aéronef n'est parti de Toronto pour Londres qu'un peu avant minuit.
[22] M. Breno indique que la note du médecin qu'il a présentée au comptoir d'enregistrement a été ignorée et que le siège qu'on lui a assigné sur le vol n'a été pour lui qu'une source additionnelle d'inconfort.
[23] M. Breno affirme avoir trouvé l'expérience effrayante, misérable, douloureuse, inquiétante et contrariante. M. Breno signale que même après avoir été informée de la situation, Alitalia n'a jamais exprimé de regrets et n'a jamais reconnu les préoccupations de M. Breno. Il explique qu'il a voyagé à destination et en provenance de l'Italie, en préférant Alitalia, au cours des vingts dernières années et qu'il n'a jamais subi un aussi mauvais traitement.
[24] En raison des incidents décrits ci-dessus, M. Breno voudrait obtenir des excuses, une indemnisation pour souffrances morales et angoisse et le remboursement des dépenses suivantes :
- Frais de l'aide-soignant - 420,00 $CAN (60,00 $ par heure pendant 7 heures)
- Droits de stationnement - 21,75 $CAN
- Appel téléphonique en Italie - 10,00 $CAN
- Total - 451,75 $CAN
[25] M. Breno note qu'Alitalia lui a offert un bon de voyage de 500 $CAN ou une indemnisation pour le refus d'embarquement de 240 $CAN. Toutefois, M. Breno souligne que le fait d'accepter le bon offert par Alitalia laissait entendre qu'il était prêt à voyager avec Alitalia à l'avenir et cela n'est pas le cas. M. Breno note qu'il a accepté l'indemnisation pour le refus d'embarquement de 240 $CAN puisqu'il y avait un délai de 21 jours pour accepter l'offre.
[26] Dans sa réponse, Alitalia indique qu'elle regrette sincèrement les inconvénients que M. Breno a subis le 10 septembre 2003. Alitalia explique qu'elle comprend la frustration de M. Breno au sujet de la situation vécue et assure à M. Breno que toutes les précautions sont prises afin d'éviter d'incommoder les passagers. Alitalia offre des excuses pour la frustration et les dérangements que M. Breno a vécus le 10 septembre 2003 et explique qu'il est très rare qu'un passager se voie refuser l'embarquement car Alitalia a pour objectif de fournir de bons et fiables services de transport aérien. Alitalia affirme que dans ce cas, elle a payé une indemnisation pour le refus d'embarquement à M. Breno et qu'on lui a offert une place sur le prochain vol disponible vers sa destination finale.
[27] Alitalia note qu'il n'y a aucune indication dans le DP de M. Breno signalant qu'il est une personne ayant une déficience ou qu'il a demandé l'assignation d'un siège particulier à l'avance. Alitalia soutient que, dans les circonstances, le transporteur ne connaissait pas les besoins de M. Breno. Alitalia affirme que les difficultés éprouvées par M. Breno n'auraient pas eu lieu si M. Breno avait été identifié comme une personne ayant une déficience et des besoins spéciaux. Alitalia souligne qu'elle aurait fourni à M. Breno un siège en priorité si elle avait reçu l'information pertinente en temps opportun et elle explique que lorsque M. Breno s'est présenté au comptoir d'enregistrement de l'aéroport de Toronto, tous les sièges avaient déjà été assignés.
[28] Alitalia souligne que le vol de M. Breno devait partir à 20 h 30 et, donc, l'enregistrement aurait commencé entre 15 h 30 ou 16 h, approximativement. Alitalia fait observer qu'il aurait été peu probable que le vol soit déjà survendu lorsque M. Breno s'est présenté au comptoir d'enregistrement à 16 h. Toutefois, Alitalia précise que, peu importe l'heure ou si le vol était en effet survendu, M. Breno a accepté de voyager sur le prochain vol comme l'ont fait plusieurs autres passagers.
[29] Alitalia signale qu'il est devenu absolument nécessaire que tous les transporteurs aériens adoptent la pratique de surréservation afin de parer au problème des sièges réservés inutilisés. Alitalia déclare qu'aucun transporteur et/ou autre organisme ne fournit une indemnisation pour les services donnés par les aides-soignants. Alitalia croit que si une personne choisit d'avoir un aide-soignant, il s'agit d'un choix strictement personnel et, donc, pour lequel le transporteur n'est pas responsable.
[30] En ce qui a trait à la politique d'Alitalia portant sur l'indemnisation pour le refus d'embarquement, le transporteur précise que pour être admissibles à l'indemnisation les passagers doivent s'être présentés à l'enregistrement dans les délais prescrits selon les « Conditions générales de transport ».
[31] Alitalia fait observer qu'elle ignore si Air Canada a désigné des sièges comme étant les plus accessibles pour les personnes ayant une déficience ou identifié quels sièges fournissent plus d'espace pour les jambes. Alitalia explique qu'elle ne sait pas si les sièges les plus accessibles pour les personnes ayant une déficience avaient été, en effet, assignés à des personnes ayant une déficience puisque les seuls plans de cabine auxquels Alitalia avait accès pour les vols exploités par Air Canada sont ceux apparaissant sur le site Web d'Air Canada.
[32] Dans sa réplique à la réponse du transporteur, M. Breno fait valoir que la déclaration d'Alitalia qu'aucune assignation de siège n'a été demandée est fausse. M. Breno répète qu'il a demandé l'assignation d'un siège précis à son agent de voyage le jour où il a réservé son billet. M. Breno souligne qu'il a été informé par l'agent de voyage que le siège demandé ne pouvait lui être assigné qu'au moment de l'enregistrement. De plus, M. Breno note que son certificat médical n'a pas attiré l'attention ou reçu une réponse quelconque quand il l'a présenté au comptoir d'enregistrement.
[33] De plus, M. Breno soutient que lorsqu'il a informé l'employé d'Alitalia des dépenses qu'il avait engagées en raison du retard du vol, l'agent lui a déclaré qu'il devait réunir tous ses reçus et les présenter plus tard à Alitalia puisqu'elle connaissait bien les problèmes que les clients du vol avaient subis. M. Breno demande qu'Alitalia informe ses agents à propos de sa politique sur le remboursement des dépenses qu'un passager engage par suite d'un refus d'embarquement afin que les agents puissent fournir l'information pertinente aux clients.
[34] M. Breno estime que ce sont les actions d'Alitalia qui ont fait en sorte qu'il a eu besoin des services de son aide-soignant plus longtemps que ce qui avait été prévu à l'origine. M. Breno croit aussi que tout partenariat ou accord de partage des codes de vol entre Alitalia et un autre transporteur est le problème d'Alitalia et que celle-ci ne devrait pas pouvoir en faire le problème des passagers.
[35] M. Breno affirme qu'il s'est enregistré plusieurs heures avant l'heure prévue du départ de son vol. Il ne sait donc pas à quoi Alitalia renvoie lorsqu'elle précise qu'il faut s'enregistrer « en temps opportun » [traduction].
Position de Cianfarani Travel
[36] Cianfarani Travel affirme que le 9 août 2003, l'aide-soignant de M. Breno a fait les réservations pour le voyage de M. Breno. Cianfarani Travel note que le 20 août 2003, au moment d'effectuer le paiement du billet, l'aide-soignant de M. Breno a demandé un siège près cloison côté allée près des toilettes en raison des « troubles médicaux » de M. Breno. Cianfarani Travel explique qu'il a communiqué avec Alitalia pour demander un siège près cloison pour M. Breno et que l'agent d'Alitalia a indiqué que le dossier de M. Breno serait annoté puisque les sièges près cloison sont sous le contrôle de l'aéroport et qu'Alitalia ne pouvait pas assigner de tels sièges à l'avance.
[37] De plus, Cianfarani Travel explique que l'agent d'Alitalia a mentionné que M. Breno devrait obtenir une note de son médecin indiquant qu'il avait besoin d'un siège près cloison en raison de « troubles médicaux » et que, le jour du voyage, M. Breno devrait arriver à l'aéroport tôt et présenter la note du médecin au personnel du comptoir d'enregistrement. Cianfarani Travel affirme que cette information a été relayée à l'aide-soignant de M. Breno.
ANALYSE ET CONSTATATIONS
[38] Pour en arriver à ses constatations, l'Office a tenu compte de tous les éléments de preuve soumis par les parties au cours des plaidoiries.
[39] La demande doit être présentée par une personne ayant une déficience ou en son nom. En l'espèce, l'Office note que M. Breno a une discopathie dégénérative, qu'il a une déficience auditive, qu'il nécessite l'aide d'un aide-soignant et qu'il a besoin d'un siège qui procure suffisamment d'espace pour allonger les jambes lorsqu'il voyage par avion. Il est donc une personne ayant une déficience aux fins de l'application des dispositions d'accessibilité de la LTC.
[40] Pour déterminer s'il existe un obstacle abusif aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience au sens du paragraphe 172(1) de la LTC, l'Office doit d'abord déterminer si les possibilités de déplacement de la personne qui présente la demande ont été restreintes ou limitées par un obstacle. Le cas échéant, l'Office doit alors décider si l'obstacle était abusif. Pour répondre à ces questions, l'Office doit tenir compte des circonstances de l'affaire dont il est saisi.
Les possibilités de déplacement ont-elles été restreintes ou limitées par un obstacle ?
[41] L'expression « obstacle » n'est pas définie dans la LTC, ce qui donne à penser que le Parlement ne voulait pas limiter la compétence de l'Office compte tenu de son mandat d'éliminer les obstacles abusifs dans le réseau de transport de compétence fédérale. De plus, le terme « obstacle » a un sens large et s'entend habituellement d'une chose qui entrave le progrès ou la réalisation.
[42] Pour déterminer si une situation constitue ou non un « obstacle » aux possibilités de déplacement d'une personne ayant une déficience dans un cas donné, l'Office se penche sur les déplacements de cette personne qui sont relatés dans la demande. Dans le passé, l'Office a conclu qu'il y avait eu des obstacles dans plusieurs circonstances différentes. Par exemple, dans certains cas des personnes n'ont pas pu voyager, d'autres ont été blessées durant leurs déplacements (notamment quand l'absence d'installations convenables durant le déplacement affecte la condition physique du passager) et d'autres encore ont été privées de leurs aides à la mobilité endommagées pendant le transport. De plus, l'Office a identifié des obstacles dans les cas où des personnes ont finalement été en mesure de voyager, mais les circonstances découlant de l'expérience ont été telles qu'elles ont miné leur sentiment de confiance, de dignité, de sécurité, situation qui pourrait décourager ces personnes de voyager à l'avenir.
Le cas présent
Refus d'embarquement
[43] Bien qu'il n'y avait pas de note au dossier de réservation de M. Breno signalant qu'il est une personne ayant une déficience ou qu'il avait demandé l'assignation d'un siège près cloison, l'Office considère qu'Alitalia a été informé, au moment de l'enregistrement, que M. Breno était une personne ayant une déficience une fois qu'il a présenté le certificat médical. Dans le cas présent, le vol no AZ 7651 était survendu et M. Breno s'est vu refuser l'embarquement sur ce vol.
[44] L'Office accepte la preuve de M. Breno que le fait d'être resté debout durant de longues périodes près de la porte d'embarquement dans la salle d'attente de l'aéroport, et ce parce qu'il n'y avait pas de sièges à proximité où il aurait pu entendre ce qui se passait et recevoir les instructions, lui a causé des douleurs au dos. L'Office note qu'à 22 h, M. Breno s'est vu offrir une place sur un vol d'Air Canada vers l'Italie, via Londres.
[45] L'Office accepte la déclaration de M. Breno que son expérience avec Alitalia a été préoccupante, stressante, frustrante et qu'elle lui a causé des douleurs. L'Office reconnaît que même si M. Breno a voyagé, les difficultés éprouvées étaient telles qu'elles ont nui à son expérience de voyage.
[46] À la lumière de ce qui précède, l'Office détermine que le refus d'embarquement de M. Breno sur le vol no AZ 7651 a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement.
Assignation des sièges
[47] L'Office note que M. Breno a une discopathie dégénérative, et qu'il a fourni un certificat médical lors de son enregistrement recommandant qu'on lui assigne un siège près cloison de sorte qu'il puisse allonger les jambes. Néanmoins, l'Office constate que M. Breno n'a pas obtenu un siège près cloison sur le vol no AC 862 ou, encore, un siège qui offrait un plus grand dégagement aux jambes.
[48] À la lumière de ce qui précède, l'Office détermine que le siège assigné à M. Breno sur le vol no AC 862 a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement.
L'obstacle était-il abusif ?
[49] À l'instar du terme « obstacle », l'expression « abusif » n'est pas définie dans la LTC, ce qui permet à l'Office d'exercer sa discrétion pour éliminer les obstacles abusifs dans le réseau de transport de compétence fédérale. Le mot « abusif » a également un sens large et signifie habituellement que quelque chose dépasse ou viole les convenances ou le bon usage (excessif, immodéré, exagéré). Comme une chose peut être jugée exagérée ou excessive dans un cas et non dans un autre, l'Office doit tenir compte du contexte de l'allégation d'obstacle abusif. Dans cette approche contextuelle, l'Office doit trouver un juste équilibre entre le droit des passagers ayant une déficience d'utiliser le réseau de transport de compétence fédérale sans rencontrer d'obstacles abusifs, et les considérations et responsabilités commerciales et opérationnelles des transporteurs. Cette interprétation est conforme à la politique nationale des transports établie à l'article 5 de la LTC et plus précisément au sous-alinéa 5g)(ii) de la LTC qui précise, entre autres, que les modalités en vertu desquelles les transporteurs ou modes de transport exercent leurs activités ne constituent pas, dans la mesure du possible, un obstacle abusif aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience.
[50] L'industrie des transports élabore ses services pour répondre aux besoins des utilisateurs. Les dispositions d'accessibilité de la LTC exigent quant à elles que les fournisseurs de services de transport du réseau de transport de compétence fédérale adaptent leurs services dans la mesure du possible aux besoins des personnes ayant une déficience. Certains empêchements doivent toutefois être pris en considération, par exemple les mesures de sécurité que les transporteurs doivent adopter et appliquer, les horaires qu'ils doivent s'efforcer de respecter pour des raisons commerciales, la configuration du matériel et les incidences d'ordre économique qu'aura l'adaptation d'un service sur les transporteurs aériens. Ces empêchements peuvent avoir une incidence sur les personnes ayant une déficience. Ainsi, ces personnes ne pourront pas nécessairement embarquer avec leur propre fauteuil roulant, elles peuvent devoir arriver à l'aérogare plus tôt aux fins de l'embarquement et elles peuvent devoir attendre plus longtemps pour obtenir de l'assistance au débarquement que les personnes n'ayant pas de déficience. Il est impossible d'établir une liste exhaustive des obstacles qu'un passager ayant une déficience peut rencontrer et des empêchements que les fournisseurs de services de transport connaissent dans leurs efforts pour répondre aux besoins des personnes ayant une déficience. Il faut en arriver à un équilibre entre les diverses responsabilités des fournisseurs de services de transport et le droit des personnes ayant une déficience à voyager sans rencontrer d'obstacle, et c'est dans cette recherche d'équilibre que l'Office applique le concept d'obstacle abusif.
Le cas présent
Refus d'embarquement
[51] Ayant déterminé que le refus d'embarquement de M. Breno sur le vol no AZ 7651 a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement, l'Office doit maintenant déterminer si cet obstacle était abusif.
[52] L'Office accepte la preuve d'Alitalia à savoir qu'il n'y a aucune mention dans le dossier de réservation d'Alitalia ni dans le dossier de M. Breno qui l'identifie comme une personne ayant une déficience. Cependant, l'Office note que M. Breno a fourni un certificat médical au moment de son enregistrement, soit plus de quatre heures et trente minutes avant l'heure prévue du départ de son vol, signalant ainsi à l'agent d'Alitalia qu'il était une personne ayant une déficience et qu'il avait des besoins précis en matière de siège.
[53] De plus, l'Office note que la politique d'Alitalia sur l'indemnisation pour le refus d'embarquement déclare, en partie, que lorsqu'il est impossible de laisser embarquer tous les passagers qui ont réservé, la priorité doit être donnée aux passagers ayant une déficience et aux mineurs non accompagnés. La politique déclare aussi que les passagers doivent s'être présentés à l'enregistrement dans les délais prescrits selon les « Conditions générales de transport ». L'Office note aussi que la politique d'indemnisation pour le refus d'embarquement d'Alitalia est conforme à son tarif en ce qui a trait aux surréservations et à la priorité lors de l'assignation des sièges. En ce qui concerne les priorités d'embarquement dans le cas de surréservations, la règle 87B du tarif international d'Alitalia prévoit que « les passagers ayant une déficience physique et les enfants non accompagnés de moins de 12 ans seront exemptés de l'ordre de retrait, au besoin, pour éviter les préjudices abusifs » [traduction]. L'Office note que l'enregistrement a débuté entre 15 h 30 et 16 h pour le vol de M. Breno partant à 20 h 30. À cet égard, l'Office note aussi que M. Breno s'est enregistré vers 16 h.
[54] L'Office estime que lorsque M. Breno s'est vu refusé l'embarquement, les agents d'enregistrement d'Alitalia savaient qu'il était une personne ayant une déficience et, donc, conformément à la politique sur l'indemnisation pour le refus d'embarquement d'Alitalia et son tarif international, M. Breno n'aurait pas dû se voir refuser l'embarquement et aurait dû obtenir la priorité sur le vol no AZ 7651. L'Office est préoccupé par des situations comme celle-ci puisqu'elles démontrent un manque de connaissance, de la part des employés d'Alitalia, de ses politiques concernant le refus d'embarquement, y compris des dispositions tarifaires d'Alitalia au sujet des priorités d'embarquement et du transport des personnes ayant une déficience.
[55] À la lumière de ce qui précède, l'Office détermine que le refus d'embarquement de M. Breno sur le vol no AZ 7651 a constitué un obstacle abusif à ses possibilités de déplacement.
[56] En outre, l'Office souligne que les dispositions du Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58, modifié (ci-après le RTA), s'appliquent aux routes internationales que dessert Alitalia et, à cet égard, il fait observer que le paragraphe 110(4) du RTA prévoit, en partie, que « (...) les taxes et les conditions de transport [que le tarif contient] (...) prennent effet à la date indiquée dans le tarif, et le transporteur aérien doit les appliquer à compter de cette date. »
[57] En ce qui a trait à la politique d'Alitalia sur l'indemnisation pour le refus d'embarquement, le tarif d'Alitalia qui énonce les règles et les prix applicables au transport international des passagers précise que, dans les cas de surréservations, les passagers ayant une déficience physique « seront exemptées de l'ordre de retrait ». Le refus d'embarquement de M. Breno constitue donc un défaut de la part d'Alitalia de se conformer aux dispositions de son tarif et, ainsi, une contravention au paragraphe 110(4) du RTA.
[58] L'Office attire l'attention d'Alitalia sur le Règlement sur les textes désignés (Office des transports du Canada), DORS/99-244, qui désigne les dispositions de la LTC et des règlements connexes pour lesquels une amende pourrait être exigible. Une contravention au paragraphe 110(4) du RTA est désignée comme une infraction de niveau 3 qui s'accompagne d'une sanction pécuniaire maximale de 10 000 $. Une première violation ferait normalement l'objet d'un avertissement de la part d'un agent d'application en vertu du programme de sanctions administratives pécuniaires.
Assignation des sièges
[59] Ayant déterminé que le siège assigné à M. Breno sur le vol no AC 862 a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement, l'Office doit maintenant déterminer si cet obstacle était abusif.
[60] L'Office note qu'il n'y avait aucune indication dans le DP de M. Breno signalant qu'il avait demandé l'assignation d'un siège précis. L'Office reconnaît que sans l'information dans le DP de M. Breno, le transporteur aérien pouvait ne pas connaître les besoins de M. Breno. Toutefois, l'Office estime qu'Alitalia a été informée lors de l'enregistrement, à tout le moins, du besoin de M. Breno qu'on lui assigne un siège fournissant assez d'espace pour lui permettre d'allonger les jambes. L'Office prend note de l'affirmation d'Alitalia qu'elle aurait fourni à M. Breno un siège en priorité si elle avait reçu cette information en temps opportun et de la déclaration du transporteur que lorsque M. Breno est arrivé au comptoir d'enregistrement de Toronto, tous les sièges avaient déjà été assignés.
[61] L'Office note aussi que M. Breno et Alitalia ont présenté différentes versions des événements au sujet de l'assignation du siège. D'un côté, Alitalia souligne que rien n'indiquait dans le DP de M. Breno qu'il était une personne ayant une déficience ou qu'il avait besoin d'un siège près cloison. De l'autre côté, M. Breno a affirmé qu'il a été informé par son agent de voyage qu'Alitalia n'était pas en mesure de lui assigner un siège près cloison à l'avance puisque ces sièges sont sous le contrôle de l'aéroport et peuvent seulement être assignés au moment de l'enregistrement. À cet égard, l'Office note que cet élément de preuve a été corroboré par Cianfarani Travel. Par ailleurs, l'Office note que le jour du voyage, M. Breno est arrivé à l'aéroport plus de quatre heures et trente minutes avant l'heure prévue du départ de son vol et qu'il a présenté un certificat médical au comptoir d'enregistrement qui indiquait qu'il avait besoin d'un siège près cloison.
[62] L'Office constate aussi que la politique d'Alitalia sur l'assignation des sièges pour les personnes ayant une déficience précise que si un siège demandé ne peut être assigné lors de la réservation, il doit l'être à l'enregistrement, sur demande du passager, et à condition que le siège demandé ne nuise pas aux exigences de sécurité et techniques/opérationnelles du transporteur. L'Office détermine donc que les politiques et procédures du transporteur relativement à l'assignation des sièges pour les personnes ayant une déficience n'ont pas été suivies.
[63] À cet égard, l'Office a longtemps reconnu l'importance pour les personnes ayant une déficience qu'elles obtiennent un siège convenable en raison de leur déficience, y compris la capacité de choisir le siège qui répond le mieux à leurs besoins, lorsqu'elles utilisent le réseau de transport de compétence fédérale. Ce principe est reflété dans les décisions précédentes de l'Office ainsi que dans la partie VII du RTA, laquelle énonce les conditions de transport des personnes ayant une déficience en avion et requiert que les transporteurs aériens offrant des services intérieurs s'assurent qu'avant d'assigner un siège à une personne ayant une déficience, cette personne doit être informée des sièges qui sont le plus accessible pour elle à bord de l'avion, et que les sièges désignés comme étant accessibles aux passagers ayant une déficience doivent être les derniers sièges assignés aux passagers qui n'ont pas de déficience. Le RTA déclare aussi que lorsqu'une demande de service lui est présentée par un passager ayant une déficience, le transporteur aérien doit déployer des efforts raisonnables pour fournir le service demandé. Même si la partie VII du RTA ne s'applique pas aux transporteurs aériens exploitant des services internationaux, l'Office souligne que les principes inclus dans ce dernier sont tout aussi importants pour le transport international.
[64] L'Office estime que l'assignation d'un siège qui leur convient est essentielle pour les personnes ayant une déficience lorsqu'elles voyagent. L'Office reconnaît qu'il n'est pas toujours possible pour les personnes ayant une déficience de réserver un siège précis avant le voyage et que, dans de telles circonstances, il est souvent difficile de le faire lors de l'enregistrement étant donné que le siège demandé a peut-être déjà été assigné à un autre passager. Il est également souvent difficile, voire impossible, d'effectuer des changements de sièges au moment de l'enregistrement afin de fournir à la personne ayant une déficience un siège répondant à ses besoins; et le fait d'être obligée d'occuper un siège qui ne répond pas à ses besoins peut présenter pour la personne ayant une déficience une source d'inconfort et lui causer des blessures et des douleurs. L'Office juge que les personnes ayant une déficience devraient savoir avant leur voyage que le siège qui répond le mieux à leurs besoins leur sera fourni, qu'il s'agisse d'un siège procurant plus d'espace pour les jambes ou d'un siège situé près d'une toilette.
[65] Dans le cadre de son examen de la présente affaire, l'Office a aussi examiné le tarif international d'Alitalia. L'Office note que la règle 87 du tarif d'Alitalia énonçant les règles et les prix applicables au transport international des passagers no NTA (A) 210 traite du transport des passagers ayant une déficience. Toutefois, le tarif comprend de l'information limitée au sujet de l'assignation des sièges pour les personnes ayant une déficience par rapport à ce qui est établi dans la politique d'assignation des sièges d'Alitalia. L'Office note aussi que même si le tarif d'Alitalia reconnaît les besoins des personnes ayant une déficience, le tarif, comme publié, ne mentionne pas la fourniture de sièges accessibles aux passagers ayant une déficience. L'Office estime que le tarif d'un transporteur devrait préciser les services qui sont fournis aux passagers ayant une déficience, y compris l'assignation de sièges pour les personnes ayant une déficience. L'Office reconnaît que l'importance d'obtenir un siège convenable peut être le facteur déterminant pour une personne ayant une déficience à savoir si elle va vraiment voyager, avec quel transporteur et sur quel vol.
[66] De plus, l'Office estime qu'il est raisonnable de s'attendre à ce qu'Alitalia connaisse les sièges les plus accessibles pour les passagers ayant une déficience, même si les vols sont exploités par un autre transporteur. Par ailleurs, l'Office estime que le promoteur du service aérien (dans ce cas, Alitalia) avait la responsabilité de savoir quels services et aménagements peuvent être fournis par le transporteur exploitant, y compris quels sièges sont les plus accessibles pour les personnes ayant une déficience. L'Office reconnaît aussi qu'il serait impossible pour Alitalia de fournir des sièges répondant aux besoins des personnes ayant une déficience si Alitalia ne sait pas quels sièges sont disponibles pour les personnes ayant une déficience.
[67] À la lumière de ce qui précède, l'Office détermine que le siège assigné à M. Breno sur le vol no AC 862 a constitué un obstacle abusif à ses possibilités de déplacement.
INDEMNISATION ET CORRECTIFS DEMANDÉS
[68] En ce qui concerne la demande d'indemnisation de M. Breno pour souffrances morales et angoisse, la LTC ne comprend pas de dispositions qui permettraient à l'Office d'accorder des dommages-intérêts découlant de souffrances morales ou d'angoisse subies.
[69] En ce qui a trait à la demande de M. Breno voulant des excuses de la part d'Alitalia, l'Office note qu'Alitalia a fait ses excuses à M. Breno.
[70] Pour ce qui est de la demande de remboursement soumise par M. Breno, l'Office note que les seules dépenses qui peuvent être remboursées en vertu du paragraphe 172(3) de la LTC sont celle engagées par une personne ayant une déficience en raison d'un obstacle abusif. À la suite de l'examen de la demande de remboursement de M. Breno, l'Office a déterminé que les dépenses qu'il a engagées en raison du refus d'embarquement (l'appel téléphonique en Italie, les frais de stationnement et les frais de l'aide-soignant) répondent aux exigences de la LTC et, par conséquent, sont admissibles car elles ont été engagées comme la conséquence directe du refus d'embarquement que l'Office a déterminé comme un obstacle abusif.
[71] L'Office note aussi la position d'Alitalia que si une personne choisit d'avoir un aide-soignant, il s'agit d'un choix strictement personnel pour lequel le transporteur n'est pas responsable. À cet égard, l'Office prend note que M. Breno avait payé son aide-soignant pour lui prêter assistance à l'aéroport. Toutefois, M. Breno s'est vu refuser l'embarquement et les services de son aide-soignant ont donc été rendus nécessaires pour une période plus longue que prévu en raison du refus d'embarquement que l'Office a déterminé comme un obstacle abusif.
[72] En ce qui a trait au montant précis qui doit être remboursé pour les frais de l'aide-soignant de M. Breno, l'Office note que M. Breno et son aide-soignant sont arrivés à l'aéroport vers 16 h, et que M. Breno avait prévu et retenu les services de son aide-soignant pendant une heure. À cet égard, l'Office estime que M. Breno, selon la preuve, aurait payé son aide-soignant jusqu'à 17 h. Toutefois, M. Breno n'a obtenu une carte d'embarquement que vers 22 h, et l'Office note que le billet de stationnement fourni par M. Breno indique que son aide-soignant a quitté l'aéroport à 22 h 34. L'Office juge donc que M. Breno a droit au remboursement pour les frais de son aide-soignant de 17 h à 22 h 30, compte tenu du défaut de la part d'Alitalia d'avoir appliqué correctement sa politique et ses procédures concernant le refus d'embarquement.
[73] À la lumière de ce qui précède, l'Office estime qu'Alitalia doit rembourser à M. Breno le coût de l'appel téléphonique (10 $CAN), les dépenses de stationnement (21,75 $CAN) et les frais de l'aide-soignant (330 $CAN = 60 $CAN x 5,5 heures).
CONCLUSION
[74] Compte tenu des constatations qui précèdent, l'Office a déterminé que l'assignation des sièges et le refus d'embarquement ont constitué des obstacles abusifs aux possibilités de déplacement de M. Breno.
[75] Par conséquent, Alitalia est par les présentes tenue de prendre les mesures suivantes :
- Distribuer un bulletin à tous ses agents de réservation et d'enregistrement résumant l'incident vécu par M. Breno, sans mentionner son nom, et soulignant l'importance d'être suffisamment conscient des besoins particuliers des passagers ayant une déficience et d'y être sensible. De plus, le bulletin doit
- insister sur l'importance de suivre les politiques et procédures du transporteur relativement à la prestation de services aux personnes ayant une déficience et de s'assurer que ces politiques sont comprises clairement;
- rappeler aux représentants du transporteur que, lors de la réservation du voyage, de même qu'à l'enregistrement, on doit accorder avant tout la priorité aux passagers ayant une déficience au moment de procéder à l'assignation des sièges près cloison;
- souligner l'importance que les représentants entament un dialogue avec la personne ayant une déficience pour s'assurer que la personne pourra choisir le siège qui, à son avis, répondra le mieux à ses besoins.
- Incorporer dans son programme de formation la situation qui a eu lieu dans le cas des difficultés éprouvées par M. Breno, sans mentionner son nom, et aviser l'Office des mesures qu'elle a prises pour s'assurer que la politique d'Alitalia sur l'indemnisation pour le refus d'embarquement et les politiques et procédures sur l'assignation des sièges à l'avance sont clairement comprises et suivies par ses agents de réservation et d'enregistrement et informer l'Office des démarches qui ont été faites.
- Clarifier ses politiques et procédures concernant l'assignation des sièges accessibles aux personnes ayant une déficience au moment de la réservation et lors de l'enregistrement, en ce qui a trait aux vols exploités par Alitalia et en ce qui a trait aux vols exploités au nom d'Alitalia par d'autres transporteurs.
- Examiner et modifier son tarif énonçant les règles et les prix applicables au transport international des passagers no NTA (A) 210, versé au dossier de l'Office, afin d'y refléter clairement la politique d'Alitalia au sujet de l'assignation des sièges pour les personnes ayant une déficience, y compris le choix des sièges à l'avance.
- Rembourser à M. Breno les dépenses suivantes qui ont été engagées en raison de l'obstacle abusif et qui se chiffrent à 361,75 $CAN : 10 $CAN pour l'appel téléphonique en Italie; 21,75 $CAN pour les frais de stationnement; et 330 $CAN pour les frais de l'aide-soignant.
[76] Alitalia est tenue de confirmer à l'Office, dans les trente (30) jours suivant la date de la présente décision, qu'elle a remboursé M. Breno. Alitalia est aussi tenue de fournir à l'Office une copie du bulletin susmentionné, comme publié, dans les trente (30) jours suivant la date de la présente décision.
[77] En ce qui a trait aux autres mesures correctives, Alitalia est tenue de soumettre à l'Office des copies des documents énumérés ci-dessus, sous forme de version préliminaire, dans les quatre-vingt dix (90) jours suivant la date de la présente décision, avant la prise des mesures correctives susmentionnées par Alitalia. L'Office examinera ces documents et informera Alitalia s'ils sont satisfaisants et l'Office fixera aussi les délais pour la prise des mesures correctives.
[78] Par ailleurs, l'Office conclut qu'Alitalia a également contrevenu au paragraphe 110(4) du RTA. À cet égard, l'Office fait observer que la délivrance de la présente décision ne soustrait aucunement Alitalia à toute mesure qui pourrait être prise contre elle conformément au Règlement sur les textes désignés (Office des transports du Canada).
[79] Après avoir examiné les mesures prises par Alitalia, l'Office déterminera si d'autres mesures sont nécessaires.
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