Décision n° 33-R-2011
le 9 février 2011
DEMANDE présentée par Greater Vancouver Sewerage and Drainage District conformément à l'article 101 de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée.
Référence no R8050/1144-003.50
Demande
[1] Greater Vancouver Sewerage and Drainage District (GVSDD) a déposé une demande auprès de l'Office des transports du Canada (Office) conformément à l'article 101 de la Loi sur les transports au Canada (LTC) lui demandant qu'il répartisse les coûts liés aux franchissements par pipeline désignés comme l'intercepteur Hollyburn et l'émissaire d'évacuation Hollyburn, entre 13th Street et Kew Road et entre 15th Street et 25th Street, sous et le long de la subdivision Squamish de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN), dans West Vancouver, en Colombie-Britannique.
[2] CN a déposé une requête de rejet de la demande. CN invoque deux raisons pour le rejet. D'abord, CN prétend que les dessertes ne sont pas des franchissements au sens des articles 100 et 101 de la LTC. Ensuite, CN demande que l'Office déclare que le recours prévu par l'article 101 de la LTC ne vise pas GVSDD parce que la question est régie par des conventions d'empiètement existantes.
Contexte
[3] GVSDD assume la responsabilité du traitement des eaux usées et du drainage ainsi que de l'élimination des déchets solides de 18 municipalités de la région du Grand Vancouver. L'intercepteur Hollyburn et l'émissaire d'évacuation Hollyburn font partie d'un important pipeline d'égout qui reçoit jusqu'à 69 millions de litres d'eau par jour. Ceux-ci se trouvent sous et le long de l'emprise du chemin de fer actuellement gérée et exploitée par CN.
[4] Lorsque les tronçons de l'intercepteur Hollyburn et de l'émissaire d'évacuation Hollyburn du pipeline ont été initialement conçus et construits, en 1960, quatre conventions d'empiètement relatives à la construction et à l'entretien ont été conclues entre GVSDD et BC Rail Ltd. ou BC Rail Partnership, ou son prédécesseur depuis lors. Ces conventions sont les suivantes :
- La convention d'empiètement n° 632 couvre l'intercepteur Hollyburn de 13th Street à 28th Street. L'entente initiale est intervenue entre GVSDD et Pacific Great Eastern Railway Company (PGERC) le 30 septembre 1960. L'entente la plus récente entre GVSDD et BC Rail Partnership remonte au 9 janvier 2002. Il s'y trouve une formule pour déterminer le coût de location annuel initial, mais l'entente précise que ce coût annuel peut être revu et rajusté par BC Rail le 1er décembre 2003 et à la fin de chaque période de deux ans par la suite.
- La convention d'empiètement no 1694 couvre l'intercepteur Hollyburn de 28th Street jusqu'à Kew Road. L'entente initiale est intervenue entre GVSDD et PGERC le 16 juin 1972. L'entente la plus récente entre GVSDD et BC Rail Partnership remonte au 3 juin 2002. Il s'y trouve une formule pour déterminer le coût de location annuel initial, mais l'entente précise que ce coût annuel peut être revu et rajusté par BC Rail le 1er janvier 2004 et à la fin de chaque période de deux ans par la suite.
- La convention d'empiètement no 2950 couvre la phase I de l'émissaire d'évacuation Hollyburn, de 15th Street à 19th Street. Cette entente est intervenue entre GVSDD et BC Rail Ltd. le 29 mai 1996. L'entente précise que le coût de location annuel peut être revu et rajusté le 1er janvier 1998 et tous les deux ans par la suite, en fonction d'une évaluation.
- La convention d'empiètement no 5437 couvre la phase II de l'émissaire d'évacuation Hollyburn, de 19th Street à 25th Street. L'entente la plus récente entre GVSDD et BC Rail Partnership remonte au 21 décembre 2001. Il s'y trouve une formule pour déterminer le coût de location annuel initial, mais l'entente précise que ce coût peut être revu et rajusté par BC Rail le 1er janvier 2004 et à la fin de chaque période de deux ans par la suite.
[5] L'Office note que lors de la conception des dessertes et de l'exécution du plan de leur construction, les quatre conventions d'empiètement activant le pipeline ont été conclues entre GVSDD et BC Rail Ltd. ou BC Rail Partnership, ou son prédécesseur. Les conventions d'empiètement existaient donc entre des sociétés d'État provinciales. Le 15 juillet 2004, il a été annoncé que CN prenait en charge la direction et l'exploitation de la propriété de BC Rail Co., ce qui comprenait l'emprise en cause.
Questions
[6] Les questions en litige sont les suivantes :
- Les tronçons de l'intercepteur Hollyburn et de l'émissaire d'évacuation Hollyburn du pipeline sont-ils des franchissements par desserte au sens des articles 100 et 101 de la LTC?
- Dans l'affirmative, existe-t-il des ententes entre les parties au sujet du paiement de l'indemnité à CN par GVSDD, sous la forme de droits d'empiètement pour les franchissements par desserte en question?
La loi
[7] L'article 100 de la LTC fournit les définitions pertinentes pour les dessertes en cause :
« franchissement par desserte » Franchissement par une desserte d'un chemin de fer par passage supérieur ou inférieur, ainsi que tous les éléments structuraux facilitant le franchissement ou nécessaires à la partie visée de la desserte.
« desserte » Ligne servant au transport de produits ou d'énergie ou à la fourniture de services, notamment par fil, câble ou canalisation.
[8] Le paragraphe 101(4) de la LTC prévoit que l'article 16 de la Loi sur la sécurité ferroviaire, L.R.C. (1985), ch. 32 (4e suppl.) s'applique s'il n'y a pas d'entente quant à la répartition des coûts de la construction ou de l'entretien du franchissement.
[9] Le paragraphe 16(1) de la Loi sur la sécurité ferroviaire précise ce qui suit :
Faute de recours prévu sous le régime de la partie III de la Loi sur les transports au Canada ou de la Loi sur le déplacement des lignes de chemin de fer et les croisements de chemin de fer, le promoteur et tout bénéficiaire des installations ferroviaires peuvent, avant ou après le début des travaux relatifs à la construction ou à la modification de ces installations, saisir l'Office de leur désaccord sur leurs obligations en ce qui concerne le coût de réalisation des travaux et les frais d'exploitation et d'entretien des installations.
Positions des parties et analyse
1. Les tronçons de l'intercepteur Hollyburn et de l'émissaire d'évacuation Hollyburn du pipeline sont-ils des franchissements par desserte au sens des articles 100 et 101 de la LTC?
[10] GVSDD prétend que les dessertes qui longent la voie ferrée sont des « franchissements par desserte » au sens des articles 100 et 101 de la LTC, comme le décrit la décision no 709-R-2006 (Décision).
[11] CN fait valoir que les tronçons de l'intercepteur Hollyburn et de l'émissaire d'évacuation Hollyburn du pipeline ne constituent pas des franchissements par desserte au sens des articles 100 et 101 de la LTC, car cette loi avait pour objet d'empêcher les corridors ferroviaires de devenir des murs virtuels qui ne pourraient être traversés et limiteraient le développement urbain ou économique.
[12] CN prétend que ni la Décision ni l'affaire Cie de chemin de fer Canadien Pacifique c. Canada (Office des transports du Canada), [2008] A.C.F. No. 175 (QL) [arrêt ATCO], n'abordaient la question générale à savoir si le pipeline d'ATCO était un franchissement au sens de la LTC, car l'enjeu portait sur deux valves de sécurité au-dessus du sol sur l'emprise de CN. Celle-ci fait une distinction entre la construction de valves de sécurité sur le pipeline et celle du pipeline en question.
[13] Selon CN, une interprétation stricte de l'article 101 de la LTC devrait aboutir à la conclusion que le Parlement avait l'intention de ne régir que les franchissements par desserte. CN prétend que, par leur conception, les dessertes construites le long des lignes ferroviaires ne traversent pas une ligne ferroviaire mais empruntent plutôt des terres ferroviaires aux fins des services d'utilité publique.
[14] Dans la Décision, l'Office conclut que l'emprise du chemin de fer fait partie intégrante d'une « ligne de chemin de fer ». Donc, par définition, le terme « franchissement par desserte », au sens de l'article 100 de la LTC, englobe les dessertes qui longent la voie ferrée et qui empiètent sur les terres formant les emprises de la compagnie de chemin de fer. Au paragraphe 12 de la Décision, l'Office a déclaré que « [l]'Office abordera donc en premier lieu la question de savoir si le pipeline existant constitue un franchissement au sens de la LTC ». Au paragraphe 20 de la Décision, l'Office conclut que les valves « sont considérées comme des ouvrages liés à un franchissement par desserte ». Dans la Décision, l'Office ne fait pas de distinction entre les valves et le pipeline en question.
[15] La Décision a été portée en appel. Au paragraphe 16 de l'arrêt ATCO, la Cour d'appel fédérale a déclaré ce qui suit lorsqu'elle a invoqué la position de l'Office devant la Cour : « Il s'ensuit que la définition de « desserte » engloberait toute partie du gazoduc qui se trouve au-dessus de l'emprise de la voie ferrée ou en dessous de cette dernière. » Au paragraphe 21 de l'arrêt ATCO, la Cour d'appel fédérale a exprimé son accord avec l'Office en ces mots :
Compte tenu du contexte de la Loi, l'interprétation retenue par l'Office confère à la définition de « desserte » un sens que l'on peut raisonnablement attribuer à ce terme et qui est compatible avec son objet. À mon sens, l'interprétation que l'Office donne de la définition du terme « desserte » est raisonnable. Je ne vois aucune raison qui justifierait l'intervention de notre Cour.
[16] Compte tenu des précédents créés par la Décision de l'Office et l'arrêt de la Cour d'appel fédérale, l'Office conclut que les tronçons de l'intercepteur Hollyburn et de l'émissaire d'évacuation Hollyburn du pipeline sont des franchissements par desserte au sens de la LTC.
2. Existe-t-il des ententes entre les parties au sujet du paiement de l'indemnité à CN par GVSDD, sous la forme de droits d'empiètement pour les franchissements par desserte en question?
[17] Aucune des parties ne conteste le fait que quatre conventions d'empiètement ont été conclues au sujet des tronçons de l'intercepteur Hollyburn et de l'émissaire d'évacuation Hollyburn du pipeline.
[18] GVSDD déclare qu'elle a appris de CN que les quatre conventions d'empiètement ont été cédées à CN par BC Rail Co. lors de l'acquisition par CN de BC Rail Co., tout comme le droit d'exploitation sur sa plate-forme aux termes d'un bail à long terme. Toutefois, GVSDD soutient qu'elle n'a pas été en mesure de confirmer que ces cessions ont bel et bien eu lieu.
[19] CN fait valoir que les conventions sont en vigueur et lient les parties, et qu'elle a soumis tous les documents nécessaires pour prouver que les cessions ont eu lieu. CN déclare que, lorsqu'il y a contrat, les parties doivent honorer leurs obligations. CN ajoute que le but de conclure des contrats est d'acquérir une certitude quant aux affaires à propos desquelles il y a eu entente, pour la durée prévue du contrat, et d'assurer une prévisibilité dans les relations entre les parties.
[20] CN affirme que la « Compagnie de chemin de fer » a permis à GVSDD d'occuper une partie considérable de son emprise, et que GVSDD a accepté de payer des droits d'empiètement qui seraient rajustés en fonction de conditions que GVSDD a acceptées librement.
[21] L'Office note la déclaration de CN selon laquelle les conventions d'empiètement sont en vigueur et lient les parties. L'Office s'est penché sur des questions similaires dans les décisions nos 310-R-2003 et 65-R-2005. L'Office a déclaré ce qui suit dans la décision no 310-R-2003 :
[...] En règle générale, l'Office n'intervient pas lorsque de telles ententes ont été signées. L'Office estime que toute entente contractuelle conclue librement entre les parties les lie l'une à l'autre et les oblige à en respecter les modalités. Toutefois, l'Office peut intervenir pour trancher une question faisant l'objet d'une dispute entre les parties et qui n'est pas prévue dans toute entente signée et en vigueur. [...]
[22] Par conséquent, l'Office doit déterminer si des conventions d'empiètement régissent les parties.
[23] Les conventions nos 632, 1694 et 5437 prévoient des cessions en ces termes : « Cette convention s'appliquera à l'avantage des parties en cause et liera celles-ci, les successeurs et les cessionnaires de BC Rail, ainsi que les successeurs et les cessionnaires autorisés du demandeur. » [traduction] La convention no 2950 prévoit que « Cette convention s'appliquera à l'avantage des parties en cause et liera celles-ci, les successeurs et les cessionnaires de la compagnie de chemin de fer, ainsi que les héritiers, les exécuteurs, les administrateurs, les successeurs et les cessionnaires du demandeur. » [traduction] Il s'agit de dispositions sur lesquelles se sont entendues BC Rail Partnership, BC Rail Ltd. et GVSDD. Par conséquent, les conventions prévoient qu'elles lieront les cessionnaires de BC Rail Partnership et de BC Rail Ltd.
Transactions d'entreprises
[24] Afin de déterminer si les conventions ont été cédées à CN par BC Rail Partnership et BC Rail Ltd., l'Office doit examiner les transactions touchant ces sociétés. Les éléments de preuve démontrent que la convention de transaction réitérée a été conclue entre BC Rail Co., BCR Properties Ltd., CN et CN Acquisition Limited le 25 novembre 2003. La convention de transaction réitérée indique ceci :
BC Rail Co. détient 25 pour cent des actions émises et en circulation du capital de BC Rail Ltd. et 5 pour cent des unités de partenariat émises et en circulation de BC Rail Partnership.
BCR Properties Ltd. détient 75 pour cent des actions émises et en circulation du capital de BC Rail Ltd. et 5 pour cent des unités de partenariat émises et en circulation de BC Rail Partnership.
BC Rail Ltd. détient 90 pour cent des unités de partenariat émises et en circulation de BC Rail Partnership. [traduction]
[25] Par conséquent, BC Rail Co. et BCR Properties Ltd. possédaient 100 pour cent des unités de BC Rail Ltd. et 10 pour cent des unités de BC Rail Partnership. BC Rail Ltd. détenait 90 pour cent des unités de BC Rail Partnership.
[26] L'Office note que l'article 2.1 de la convention de transaction réitérée précise que BC Rail Co. et BCR Properties Ltd. ont convenu de vendre, de céder et de transférer à CN les actions de BC Rail Ltd. et les unités de BC Rail Partnership, et CN accepte de les acheter. Par conséquent, le 25 novembre 2003, CN a acquis toutes les unités de partenariat de BC Rail Partnership et de BC Rail Ltd, de sorte que CN détient 100 pour cent des unités de partenariat de BC Rail Partnership. CN a présenté des éléments de preuve qui démontrent qu'elle possède effectivement 99 pour cent des unités de partenariat de BC Rail Partnership et que 1 pour cent des unités de partenariat appartient à CN Acquisition Limited.
[27] GVSDD a soulevé une question au sujet de la dissolution de BC Rail Ltd. Elle fait valoir que le territoire de constitution de BC Rail Ltd. a été transféré le 26 novembre 2004; la personne morale relève maintenant de la compétence fédérale, et le nom de la société a été changé. GVSDD ajoute que cette nouvelle société a été dissoute le 5 juillet 2005 et se demande si les biens de la société ont été distribués avant la dissolution de celle-ci. Selon GVSDD, si CN ne peut démontrer que la convention d'empiètement no 2950 a été cédée à CN avant la dissolution, cette convention d'empiètement est maintenant détenue par l'État fédéral. L'Office est convaincu que CN a acquis les actions de BC Rail Ltd. le 25 novembre 2003. De plus, CN a fourni une entente de distribution qui démontre que les biens ont été répartis le 30 décembre 2004, avant la dissolution de la société. L'Office est d'avis qu'il n'y a pas de litige entourant la dissolution de BC Rail Ltd.
Cession des conventions d'empiètement
[28] En vertu du paragraphe 46(1) de la British Columbia Railway Act, R.S.B.C., 1996, c. 36, BC Rail Co. peut accorder ou céder un ou plus d'un bail pour n'importe laquelle de ses propriétés ferroviaires ou toutes, aux conditions et pour les motifs que la société juge appropriés. Si BC Rail Co. cède un bail, elle le fait à l'aide d'une convention de revitalisation. L'expression « Revitalization Agreement » (convention de revitalisation) est définit comme suit à l'article 1 de la British Columbia Railway Act : « toute convention à laquelle il est fait référence à l'article 46, en vertu de laquelle la société [BC Rail Co.] accorde ou cède quelque chose en vertu du paragraphe 46(1) ». [traduction]
[29] Le sous-alinéa E(iii) de la convention de transaction réitérée indique que BC Rail Co. louera, sous-louera, cédera, licenciera ou sous-licenciera à BC Rail Partnership la propriété de l'assiette des rails en vertu de la convention de revitalisation. Elle indique également que BC Rail Co. cédera à BC Rail Ltd. et BC Rail Partnership l'entente cédée aux termes de la convention de revitalisation.
[30] Le 9 juillet 2004, BC Rail Co. et BC Rail Partnership, sociétés qui, d'après la convention de transaction réitérée en date du 25 novembre 2003, appartenaient à 99 pour cent à CN, ont conclu la convention de revitalisation. Cette convention est le principal document qui régit la relation entre BC Rail Partnership et BC Rail Co. et, par la suite, entre BC Rail Partnership, locataire, et BC Rail Co., propriétaire.
[31] En vertu de l'alinéa 4.1(a) de la convention de revitalisation, BC Rail Co. a cédé à BC Rail Partnership tous ses droits, titres et intérêts de l'ensemble des ententes cédées. L'article 4 de la convention de revitalisation, lu conjointement avec la définition d'ententes cédées, à savoir « […] les baux et les ententes en faveur de tiers décrits à l'annexe C […] » [traduction] ce qui englobe les quatre conventions d'empiètement visées en l'espèce, indiquent clairement que les parties de la convention de revitalisation avaient l'intention de céder à BC Rail Partnership les conventions d'empiètement nos 632, 1694, 2950 et 5437. L'Office convient que CN détient 99 pour cent des unités de partenariat de BC Rail Partnership, et que CN Acquisition Ltd. détient l'autre 1 pour cent. Par conséquent, CN détient aussi les droits de la convention d'empiètement no 2950 initialement conclue entre GVSDD et BC Rail Ltd., ainsi que des conventions d'empiètement nos 632, 1694 et 5437, initialement conclues entre GVSDD et BC Rail Partnership.
[32] GVSDD fait valoir qu'un document, avis et directives, démontre que la position de CN ne cadre pas avec son explication liée à la convention de transaction réitérée et à la convention de revitalisation. Toutefois, l'Office est en désaccord avec l'interprétation de GVSDD relative à l'avis. Cet avis dispose que BC Rail Ltd. et/ou BC Rail Partnership a ou ont transféré et cédé tous ses ou leurs droits, titres et intérêts à BC Rail Co. et, à son tour, BC Rail Co. a loué, sous-loué, licencié ou sous-licencié la propriété à BC Rail Partnership. L'Office estime que cet avis reflète les deux ententes décrites ci-dessus.
[33] À la lumière de ce qui précède, l'Office conclut qu'il existe des conventions d'empiètement entre les parties et que CN a fourni suffisamment d'éléments de preuve pour démontrer la cession des quatre ententes en question, soit de BC Rail Co. à BC Rail Partnership, société dans laquelle CN détient 99 pour cent des unités de partenariat.
Coûts de location annuels
[34] L'Office doit également déterminer si les conventions initiales ou des parties de celles-ci ne sont plus en vigueur et si les parties s'entendent pour les remplacer. Si tel est le cas, l'Office peut exercer son pouvoir discrétionnaire en vertu de l'article 101 de la LTC.
[35] GVSDD prétend que, même si les conventions d'empiètement elles-mêmes ne sont pas expirées, les parties sont liées aux coûts de location annuels initiaux qui ont été convenus. GVSDD allègue qu'il n'y a pas d'entente entre CN et GVSDD au sujet de l'augmentation de l'indemnité que demande actuellement CN. GVSDD allègue en outre que les périodes de renouvellement des conventions d'empiètement entre GVSDD et la compagnie de chemin de fer ont expiré sans qu'il y ait eu entente entre les parties quant aux coûts de location annuels pour les périodes de renouvellement. Par conséquent, GVSDD fait valoir que le paragraphe 101(4) de la LTC s'applique à la répartition des coûts en l'espèce.
[36] GVSDD fait valoir que CN a abandonné la disposition de renouvellement de la location prévue dans les conventions d'empiètement et modifié unilatéralement l'entente convenue entre GVSDD, BC Rail Partnership et BC Rail Ltd. au sujet des coûts de location à payer. GVSDD fait valoir que trois des conventions contiennent une formule que CN n'a pas utilisée, et que CN a plutôt choisi d'abandonner la formule et d'opter pour sa propre base de détermination des coûts de location. GVSDD maintient que CN a changé unilatéralement les coûts de location qui étaient prévus dans les conventions existantes, et ce, sans le consentement de GVSDD et sans se conformer à la marche à suivre énoncée dans ces conventions.
[37] CN affirme que la détermination de sa conformité aux conventions n'est pas du ressort de l'article 101 de la LTC. CN ajoute que l'interprétation contractuelle des conventions est une question que GVSDD pourrait soumettre aux tribunaux. CN indique également que chacune des conventions d'empiètement contient une disposition en vertu de laquelle la compagnie de chemin de fer peut augmenter les coûts à des intervalles de deux ans et que les conventions n'ont pas de date d'expiration.
[38] L'Office s'est déjà penché sur les répercussions de conventions existantes portant sur des croisements ferroviaires dans le cadre de demandes déposées en vertu de l'article 101 de la LTC. Au paragraphe 22 de la décision no 65-R-2005, l'Office a déterminé ce qui suit :
Comme l'indique la décision no 310-R-2003, l'Office reconnaît qu'en règle générale, il n'intervient pas lorsque des ententes contractuelles ont été conclues librement entre les parties et qu'elles les lient bien l'une à l'autre et les obligent vraiment à en respecter les modalités. Cependant, et comme il l'a indiqué dans cette même décision, l'Office fait observer qu'il peut intervenir pour trancher une question faisant l'objet d'un différend entre les parties en cause et qui n'est pas prévue dans une entente signée et en vigueur. De plus, il estime qu'il peut exercer son pouvoir discrétionnaire en vertu de l'article 101 de la LTC s'il conclut que l'ensemble ou certaines dispositions de l'entente initiale ne sont plus en vigueur et que les parties ne parviennent pas à s'entendre sur leur remplacement. [soulignement ajouté]
[39] L'Office doit distinguer la décision no 65-R-2005 du cas en l'espèce. Dans la décision no 65-R-2005, St. Catharines Hydro Utility Services Inc. (SCH) avait déposé une demande auprès de l'Office, en vertu des paragraphes 101(3) et (4) de la LTC, pour obtenir une décision sur le paiement de l'indemnité imposée par CN sous forme de droits de licence annuels pour des franchissements par desserte. Ces ententes de licence étaient en place depuis de nombreuses années. En ce qui concerne les ententes de licence nos 44995 et 63421, les droits de licence avaient expiré. CN avait proposé de facturer le même coût de location pour une période de 10 ans, aux mêmes conditions que celles des ententes de licence initiales.
[40] SCH avait fait valoir que l'Office pouvait intervenir puisque les parties ne s'entendaient pas sur le point spécifique des droits en cause et que CN continuait de facturer SCH pour les franchissements par desserte visés. CN avait soutenu qu'il y avait en vigueur des ententes valides liant les parties puisqu'il n'y avait pas de dates d'expiration. CN avait ajouté que les ententes comprenaient le paiement de droits par SCH à CN et que ces droits pouvaient être révisés.
[41] L'Office avait noté que les ententes de licence ne prévoyaient pas de date d'expiration. Toutefois, les éléments de preuve indiquaient que la disposition relative au paiement des droits avait été renégociée et renouvelée pour une période de 10 ans. Cette période de renouvellement des ententes de licence nos 63421 et 44995 était expirée depuis, sans qu'il y ait eu d'entente entre les parties sur les droits de renouvellement. Par conséquent, l'Office a déterminé que l'affaire relevait de sa compétence.
[42] Dans le cas en l'espèce, GVSDD fait valoir que, comme pour les deux ententes de licence visées dans la décision no 65-R-2005, les périodes de renouvellement des conventions d'empiètement conclues entre GVSDD et CN ont pris fin sans qu'il y ait entente entre les parties à propos des droits d'empiètement applicables durant les périodes de renouvellement. Dans la décision no 65-R-2005, la période de 10 ans était écoulée. Toutefois, il n'y a pas de telle période fixe dans les conventions d'empiètement visées dans le cas en l'espèce. La seule disposition pertinente a trait à l'examen et au rajustement des droits d'empiètement par BC Rail Co. ou la compagnie de chemin de fer à des périodes spécifiques, ce qui signifie que BC Rail Partnership ou BC Rail Ltd., et maintenant CN, peut à ces périodes revoir et rajuster les droits.
[43] Dans les conventions d'empiètement nos 632, 1694 et 5437, il y a une formule pour le calcul des droits d'empiètement. L'Office est d'avis que l'interprétation la plus logique à donner à cette formule est qu'elle a servi à déterminer les droits d'empiètement initiaux puisqu'il ne s'y trouve pas de variable pouvant aider les parties à calculer les rajustements. En ce qui a trait à la convention d'empiètement no 2950, il n'y a pas de telle formule. Pour toutes les conventions d'empiètement, toute augmentation future est régie par un examen et un rajustement par BC Rail Partnership, donc CN, à des périodes spécifiques. Les conventions n'exigent pas le consentement de GVSDD avant que BC Rail Partnership n'effectue tout rajustement.
[44] L'Office est d'avis que GVSDD et CN ont convenu, conformément aux conditions des quatre conventions, que les droits d'empiètement sont assujettis à un examen et à un rajustement par la compagnie de chemin de fer ou à des rajustements fondés sur une évaluation demandée au besoin par la compagnie de chemin de fer, à la fin de chaque période de deux ans. L'Office conclut que CN a modifié unilatéralement les droits d'empiètement, se fondant sur le libellé des conventions d'empiètement et que ces conventions régissent effectivement l'affaire soulevée dans la demande.
[45] En outre, aucune preuve ne démontre qu'une des parties a mis un terme à l'une des conventions d'empiètement conformément aux conditions décrites dans ces conventions. Par conséquent, l'Office conclut que CN est légalement autorisé à réclamer des paiements en vertu des quatre conventions d'empiètement et d'exercer les pouvoirs que lui confèrent ces conventions.
Conclusion
[46] L'Office conclut que les deux parties demeurent assujetties aux conditions énoncées dans les quatre conventions d'empiètement, y compris toute condition portant sur les rajustements des droits d'empiètement effectués par CN.
[47] Puisque les conventions d'empiètement existent encore, l'Office n'est pas habilité à examiner la demande de répartition des coûts en vertu du paragraphe 101(4) de la LTC et, par conséquent, l'Office rejette la demande.
[48] Advenant la résiliation des conventions, GVSDD pourra, au besoin, déposer une nouvelle demande en vertu de l'article 101 de la LTC, auquel moment l'Office trancherait sur toute question litigieuse. Cela inclurait la détermination de la réparation à accorder, le cas échéant, si un simple droit de passage est créé sans dommage réel ou important pour CN ou sa propriété.
Membres
- Raymon J. Kaduck
- Jean-Denis Pelletier, ing.
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