Décision n° 353-C-A-2012
PLAINTE déposée par Sampa Shetty contre Air Canada.
INTRODUCTION ET QUESTION
Introduction
[1] Sampa Shetty a déposé une plainte auprès de l’Office des transports du Canada (Office) au sujet du refus d’Air Canada de rembourser les achats de vêtements qu’elle a effectués à la suite de la livraison tardive de ses bagages alors qu’elle voyageait de Toronto à Timmins (Ontario).
Question
[2] Air Canada a-t-elle correctement appliqué les conditions énoncées dans son tarif intitulé Domestic Passenger General Rules Tariff No. CDGR-1 (tarif) ayant trait à la responsabilité à l’égard des bagages, conformément au paragraphe 67(3) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée (LTC)?
Conclusion
[3] Comme il est indiqué dans les motifs qui suivent, l’Office conclut que :
- Air Canada n’a pas correctement appliqué les conditions ayant trait à la responsabilité à l’égard des bagages énoncées dans le tarif;
- Mme Shetty a droit à une indemnisation au montant de 800,52 $. Puisque Air Canada lui a déjà donné 100 $, elle a maintenant droit à une indemnisation de 700,52 $.
CONTEXTE
[4] Le 3 octobre 2011, Mme Shetty a voyagé avec Air Canada de Toronto à Timmins à bord du vol AC7833. Elle est arrivée à Timmins vers 0 h 30 le 4 octobre 2011. Puisque ses bagages n’étaient pas là, Air Canada a fourni à Mme Shetty un formulaire de suivi des bagages en retard avec un numéro de suivi pour lui permettre d’assurer un suivi de ses bagages manquants. Ses bagages ont été livrés à son hôtel vers 14 h le 4 octobre 2011.
[5] Mme Shetty a acheté des articles de remplacement pour une valeur de 800,52 $, et elle a demandé une indemnisation à Air Canada pour ce montant. À l’appui de sa demande d’indemnisation, elle a fourni à l’Office une copie des factures pour ses achats. En réponse, Air Canada lui a accordé une indemnisation de 100 $.
EXTRAITS LÉGISLATIFS ET TARIFAIRES APPLICABLES
[6] Les extraits applicables en l’espèce figurent en annexe.
POSITIONS DES PARTIES
[7] Mme Shetty fait valoir qu’elle s’est rendue à Timmins pour participer à des réunions quotidiennes ayant trait à son travail et à un dîner le 4 octobre 2011. Elle explique que lorsqu’elle est arrivée à son hôtel après minuit le 4 octobre 2011, elle n’avait pas ses bagages puisqu’ils n’étaient pas arrivés avec elle à Timmins. Elle affirme que le matin, elle a attendu jusqu’à 9 h, espérant que ses bagages arriveraient, avant d’aller à la pharmacie la plus près pour acheter des articles de toilette. Mme Shetty soutient que lorsqu’elle est retournée à son hôtel vers 9 h 45 et qu’elle a découvert que ses bagages n’étaient toujours pas arrivés, elle a annulé et reporté ses rendez-vous du matin et s’est rendue à un magasin pour acheter des vêtements et du maquillage. Mme Shetty affirme qu’elle avait besoin de vêtements pour ses rendez-vous de l’après-midi et le dîner et ajoute qu’elle a seulement acheté des vêtements qui étaient convenables pour ces événements. Mme Shetty indique qu’après avoir magasiné, elle n’est pas retournée à l’hôtel puisqu’elle devait se rendre rapidement à ses rendez-vous, et qu’elle n’est pas arrivée à son hôtel avant 22 h.
[8] Air Canada fait valoir qu’elle ne devrait pas assumer les coûts qui découlent de la décision de Mme Shetty d’acheter des produits non essentiels et une quantité déraisonnable de vêtements si l’on tient compte du temps pendant lequel ses bagages ont été retardés. Air Canada affirme que, dans la loi, les plaignants ont l’obligation d’atténuer leurs dommages et de prendre des mesures raisonnables pour minimiser leurs coûts. Air Canada fait valoir que les conditions de remboursement des dépenses provisoires déboursées dans le cas de bagages en retard, comme il est énoncé à la règle 230AC du tarif, sont assujetties aux principes généraux du droit, comme l’obligation du plaignant d’atténuer les dommages subis. À cet égard, Air Canada soutient que Mme Shetty n’a pas pris de mesures raisonnables pour atténuer ses dommages puisque dans une période de 12 heures, elle a dépensé un total de 800,52 $. Air Canada note aussi que, en raison de l’heure où elle a reçu ses bagages, Mme Shetty aurait pu retourner les articles qu’elle avait achetés.
[9] Air Canada indique que bien qu’elle n’ait pas enfreint son tarif, pour faire preuve de bonne volonté, elle est prête à donner à Mme Shetty 200 $ en plus des 100 $ qu’elle lui avait donnés en novembre 2011. Air Canada soutient que les 300 $ couvrent les dépenses raisonnables engagées.
[10] Mme Shetty explique que si on l’avait assuré que ses bagages lui seraient livrés à 14 h le 4 octobre 2011, elle n’aurait pas acheté des vêtements pour le dîner, une chemise de nuit et des pantalons en molleton. Elle ajoute que puisqu’elle ne savait pas si elle récupérerait ses bagages le même jour ou dans 10 jours, elle devait au moins acheter une chemise de nuit et des pantalons pour sortir.
ANALYSE ET CONSTATATIONS
[11] L’Office note que la règle 230AC du tarif, qui établit la responsabilité d’Air Canada relative aux bagages, prévoit que la responsabilité à l’égard des dommages aux bagages, de leur livraison tardive ou de leur perte ne doit en aucun cas dépasser 1 500 $, à moins que le passager n’ait déclaré au préalable une valeur excédentaire et n’ait acquitté des frais supplémentaires.
[12] Mme Shetty a soumis une réclamation d’un total de 800,52 $, qui comprend des dépenses pour des vêtements afin qu’elle puisse se rendre à ses rendez-vous quotidiens et à un dîner, ainsi que des articles de toilette, et des produits pour les cheveux et la peau. L’Office note que Mme Shetty a fourni des preuves à l’appui de l’achat des articles.
[13] L’Office est d’avis que ce qui est raisonnable dans une situation ne l’est peut-être pas dans une autre. Chaque situation doit être évaluée selon ses propres mérites à la lumière des circonstances précises du cas. L’Office est d’avis que, dans les circonstances, Mme Shetty a fourni une explication raisonnable pour les achats qu’elle a effectués. L’Office accepte qu’au moment où elle est allée magasiner pour acheter des articles de remplacement, Mme Shetty ne pouvait pas être certaine du moment où elle récupérerait ses bagages.
[14] L’Office n’accepte pas l’argument d’Air Canada voulant que Mme Shetty ait acheté des produits non essentiels et une quantité déraisonnable de vêtements si l’on tient compte du temps pendant lequel ses bagages ont été retardés. À cet égard, l’Office est satisfait que Mme Shetty a atténué ses dommages en limitant ses dépenses à des vêtements de remplacement pour les rendez-vous qu’elle avait au cours de l’après-midi et pour le dîner auquel elle devait prendre part en soirée. Par conséquent, l’Office conclut que les dépenses de Mme Shetty d’un total de 800,52 $ représentent une dépense provisoire raisonnable. L’Office note qu’Air Canada a déjà fourni à Mme Shetty une indemnisation de 100 $.
[15] À la lumière de ce qui précède, l’Office conclut qu’en omettant d’indemniser Mme Shetty conformément à la règle 230AC, Responsabilité – Bagages, du tarif, Air Canada a enfreint le paragraphe 67(3) de la LTC.
CONCLUSION
[16] L’Office, en vertu de l’alinéa 67.1b) de la LTC, ordonne à Air Canada, dans les 30 jours suivant la présente décision, d’indemniser Mme Shetty d’un montant de 700,52 $ et d’aviser l’Office lorsqu’elle aura indemnisé Mme Shetty.
ANNEXE À LA DÉCISION No 353-C-A-2012
EXTRAITS LÉGISLATIFS ET TARIFAIRES APPLICABLES
Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée
Paragraphe 67(3)
Le titulaire d’une licence intérieure ne peut appliquer à l’égard d’un service intérieur que le prix, le taux, les frais ou les conditions de transport applicables figurant dans le tarif en vigueur publié ou affiché conformément au paragraphe (1).
Article 67.1
S’il conclut, sur dépôt d’une plainte, que le titulaire d’une licence intérieure a, contrairement au paragraphe 67(3), appliqué à l’un de ses services intérieurs un prix, un taux, des frais ou d’autres conditions de transport ne figurant pas au tarif, l’Office peut, par ordonnance, lui enjoindre :
- d’appliquer un prix, un taux, des frais ou d’autres conditions de transport figurant au tarif;
- d’indemniser toute personne lésée des dépenses qu’elle a supportées consécutivement à la non-application du prix, du taux, des frais ou des autres conditions qui figuraient au tarif;
- de prendre toute autre mesure corrective indiquée.
Disposition tarifaire
RÈGLE 230AC, RESPONSABILITÉ – BAGAGES
(A)(1)(Applicable uniquement pour le transport à l’intérieur du Canada et non conjointement à un trajet international.) La responsabilité à l’égard des dommages aux bagages et aux autres effets personnels, de leur livraison tardive ou de leur perte, ne doit en aucun cas dépasser 1 500 $ par passager, à moins que le passager n’ait déclaré au préalable une valeur excédentaire et n’ait acquitté des frais supplémentaires, conformément aux règles du transporteur, selon la définition prévue au paragraphe C). En pareil cas, la responsabilité du transporteur se limite à cette valeur excédentaire déclarée. En aucun cas la responsabilité du transporteur ne doit dépasser la perte réelle subie par le passager. Toutes les réclamations sont sous réserve de la preuve du montant de la perte subie. Ces limites s’appliquent également aux bagages ou autres effets personnels (comme ils ont été définis à la règle 195) que le transporteur a accepté d’entreposer temporairement dans une agence urbaine ou un bureau aéroportuaire, ou à tout autre endroit avant ou après le voyage.
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