Décision n° 63-AT-A-2003

le 12 février 2003

le 12 février 2003

DEMANDE présentée par Paul Leger, en vertu des paragraphes 172(1) et (3) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, concernant le niveau de service/d'assistance et les dommages causés à son fauteuil roulant fait sur mesure sur le vol no 3855 d'Air Canada qui était exploité en utilisant l'équipement et l'équipage de bord des Lignes aériennes Canadien International ltée exerçant son activité sous le nom commercial de Lignes aériennes Canadien International ou Canadi*n entre Moncton (Nouveau-Brunswick) et Toronto (Ontario) le 26 août 2000.

Référence no U3570/00-70


DEMANDE

Le 1er septembre 2000, Mary Leger, au nom de son mari Paul Leger, a déposé une demande auprès de l'Office des transports du Canada (ci-après l'Office) concernant les difficultés qu'ils ont éprouvées au cours du vol no 3855 d'Air Canada et a précisé que les détails de la plainte suivraient.

Le 8 septembre 2000, l'Office a reçu une télécopie de Mme Leger et une copie d'une lettre décrivant les détails de la plainte datée le 30 août 2000 qui a été envoyée au président et directeur général des Lignes aériennes Canadien International ltée exerçant son activité sous le nom de Lignes aériennes Canadien International ou Canadi*n (ci-après Canadi*n), copie qui a aussi été envoyée à Air Canada.

Le 16 octobre 2000, Mme Leger a demandé à l'Office de donner suite à la demande puisqu'elle n'avait pas reçu de réponse du transporteur aérien. Par la suite, le personnel de l'Office a demandé, par téléphone, certaines précisions à Mme Leger et les renseignements obtenus ont été envoyés aux transporteurs le 18 octobre 2000.

Le 17 novembre 2000, Air Canada, en son nom et au nom de Canadi*n, a déposé sa réponse à la demande. Air Canada a aussi fourni une copie du dossier passager (DP) de M. Leger, la politique d'Air Canada sur les procédures de manipulation des fauteuils roulants (CIC 70/6) et la réponse de Canadi*n datée le 25 octobre 2000 à la plainte initiale de Mme Leger. Le 23 novembre 2000, cette dernière a déposé sa réplique à la réponse.

Aux termes du paragraphe 29(1) de la Loi sur les transports au Canada (ci-après la LTC), l'Office est tenu de rendre sa décision au plus tard 120 jours après la date de réception de la demande, sauf s'il y a accord entre les parties pour une prolongation du délai. Dans le cas présent, les parties ont convenu de prolonger le délai pour une période indéterminée.

OBSERVATION PRÉLIMINAIRE

Air Canada et Canadi*n ont d'abord reçu les copies de la demande aux fins de commentaire, puisqu'Air Canada et Canadi*n étaient en voie d'intégrer leurs opérations. Comme la réponse d'Air Canada, déposée le 17 novembre 2000, traite de tous les aspects de la demande que l'Office doit examiner, l'Office procédera avec la demande contre Air Canada.

Même si M. Leger a d'abord soulevé des préoccupations à propos des services d'enregistrement à l'aéroport international du Grand Moncton (ci-après l'aéroport de Moncton), du siège qui lui a été assigné et du fauteuil roulant de remplacement, il n'a pas traité de ces questions au cours des plaidoiries. Par conséquent, l'Office ne tiendra pas compte de ces aspects de la demande.

QUESTIONS

L'Office doit déterminer si le niveau d'assistance offert à M. Leger au comptoir de récupération des bagages à l'aéroport international Pearson de Toronto (ci-après l'aéroport de Toronto), les dommages causés au fauteuil roulant de M. Leger au cours du transport et la manière dont la réclamation en dommages-intérêts a été traitée ont constitué des obstacles abusifs aux possibilités de déplacement de ce dernier et, le cas échéant, quelles mesures correctives devraient être prises.

FAITS

M. Leger est incapable de se déplacer seul et dépend d'un fauteuil roulant fait sur mesure pour ses déplacements. Le 26 août 2000, M. Leger a voyagé entre Moncton (Nouveau-Brunswick) et Toronto (Ontario) sur le vol no 3855 d'Air Canada. Après avoir attendu dans une longue file au comptoir d'enregistrement à l'aéroport de Moncton parce qu'il n'y a pas de comptoir de « services spéciaux » pour les personnes ayant une déficience, on a informé M. Leger qu'il serait assis à huit rangées du siège de sa femme au cours du vol. Cependant, une fois à bord de l'aéronef, il a pu s'asseoir à côté de sa femme après qu'un autre passager ait accepté de changer de siège avec lui.

À son arrivée à Toronto, le fauteuil roulant de M. Leger a été conduit à la porte de l'aéronef et c'est à ce moment qu'il a remarqué que le cadre tubulaire en acier avait été plié. Le fauteuil roulant a été ouvert de force et M. Leger l'a utilisé pour se rendre à l'aire de récupération des bagages.

Au comptoir de récupération des bagages d'Air Canada, un agent a informé M. Leger que, puisque le vol d'Air Canada en question était exploité en utilisant un aéronef et un équipage de Canadi*n, sa réclamation pour les dommages causés à son fauteuil roulant devait être traitée par l'agent de récupération des bagages de Canadi*n.

Comme il n'y avait pas d'agent de récupération des bagages de Canadi*n au bureau, M. Leger a choisi de s'asseoir par terre afin de tenter de réparer son fauteuil roulant lui-même. Après avoir attendu une heure, M. Leger a pu intercepter une employée de Canadi*n et il lui a demandé de l'aider.

L'employée de Canadi*n a rempli un formulaire de réclamation par ordinateur, lui a trouvé un fauteuil roulant de remplacement et lui a donné le nom et l'adresse de l'entreprise de réparation de fauteuils roulants qu'utilise le transporteur aérien.

En communiquant avec l'entreprise de réparation à Brampton, l'agente de Canadi*n a été informée que l'entreprise était fermée les samedis et que le fauteuil roulant de M. Leger serait réparé uniquement s'il pouvait être livré à l'entreprise. M. Leger a fait les arrangements nécessaires pour la livraison.

Le 28 août 2000, l'entreprise de réparation a communiqué avec M. Leger et l'a informé que son fauteuil roulant était réparé. Cependant, on a mentionné à M. Leger que puisque l'entreprise n'avait pas reçu de numéro de réclamation, elle ne pouvait pas facturer les réparations à Canadi*n. Par conséquent, M. Leger a accepté de régler la facture de réparation de 67,50 $. De plus, afin que le fauteuil roulant lui soit livré le même jour, M. Leger a payé 60 $ à un service de taxi afin qu'il soit livré à son hôtel à Toronto.

Le 16 octobre 2000, Mme Leger a avisé l'Office qu'ils n'avaient pas encore reçu le remboursement pour les réparations du fauteuil roulant endommagé ou pour les frais de taxi afin que le fauteuil roulant lui soit livré. Le 25 octobre 2000, Canadi*n a émis un chèque au montant de 127,50 $ pour couvrir les coûts de réparation et de livraison et a offert à M. Leger un crédit voyage de 150 $ pour témoigner de sa bonne foi.

POSITIONS DES PARTIES

M. Leger explique, qu'en plus d'avoir été dérangé par cet incident, il a subi des douleurs physiques, des souffrances morales et du stress provenant d'une dépense qu'il ne pouvait pas se permettre. M. Leger note que le retard qu'il a subi dans l'aire de récupération des bagages lui a causé des problèmes avec l'entreprise de location d'auto, avec laquelle il faisait affaires, ce qui a engendré d'autres retards, et que le fauteuil roulant de remplacement fourni par le transporteur aérien ne fournissait pas un niveau de service comparable à celui de son fauteuil roulant fait sur mesure. Il ajoute qu'il a été extrêmement déçu et croit que le transporteur aérien lui doit au moins des excuses ainsi que le remboursement des coûts engagés pour la réparation et la livraison de son fauteuil roulant.

Air Canada présente ses excuses les plus sincères à M. Leger pour le dommage à son fauteuil roulant et pour ne pas avoir fourni une assistance prompte après que l'incident ait eu lieu. Le manque de services dont a fait rapport M. Leger est, selon Air Canada, inacceptable et ne reflète pas les procédures qui sont en place pour s'assurer que les fauteuils roulants sont manipulés avec beaucoup de soin et qu'une aide immédiate est offerte aux passagers dont le fauteuil roulant a été endommagé. Air Canada note que ces procédures de manipulation des fauteuils roulants (CIC 70/6) ont maintenant été appliquées à Canadi*n.

La politique d'Air Canada concernant les dommages causés aux aides à la mobilité indique que le personnel de l'aéroport doit prendre des dispositions avec les agences de location locales d'aides à la mobilité pour fournir des remplacements convenables, aux frais d'Air Canada, pour les aides à la mobilité perdues ou endommagées. La politique prévoit aussi qu'Air Canada doit aviser le passager de ces dispositions au plus tard une heure après avoir été avisé du problème.

Air Canada affirme qu'elle a été incapable d'établir quelles étaient les circonstances exactes de la défaillance des services qui a eu lieu lorsque M. Leger a tenté d'obtenir de l'aide au comptoir de récupération des bagages à Toronto. Air Canada croit que le problème peut être attribué en partie aux problèmes de main-d'œuvre et d'exploitation qu'elle a éprouvés au début de l'intégration des opérations de Canadi*n. Air Canada explique qu'au cours d'une période de transition les employés d'Air Canada et de Canadi*n n'étaient pas interchangeables puisqu'ils étaient assujettis à différents contrats de travail et utilisaient des systèmes électroniques différents.

Air Canada soutient qu'elle se serait sûrement attendue à ce que son agent de récupération des bagages à qui M. Leger s'est d'abord adressé essaie de trouver un agent de Canadi*n pour lui offrir de l'aide rapidement. Air Canada note que depuis le 22 octobre 2000, elle a terminé l'intégration des systèmes de réservation et que tous ses agents de service à la clientèle peuvent maintenant aider les clients voyageant sur les vols d'Air Canada ou de Canadi*n. Air Canada affirme que la plupart des défaillances de services éprouvées lors de l'été 2000 sont maintenant réglées et que les malheureux incidents, comme ceux qu'a vécu M. Leger, ne se répéteront pas.

ANALYSE ET CONSTATATIONS

Pour en arriver à ses constatations, l'Office a tenu compte de tous les éléments de preuve soumis par les parties au cours des plaidoiries.

La demande doit être présentée par une personne ayant une déficience ou en son nom. M. Leger a une mobilité réduite et utilise un fauteuil roulant. Il est donc une personne ayant une déficience aux fins de l'application des dispositions d'accessibilité de la LTC.

Pour déterminer s'il existe un obstacle abusif aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience au sens du paragraphe 172(1) de la LTC, l'Office doit d'abord déterminer si les possibilités de déplacement de la personne qui présente la demande ont été restreintes ou limitées par un obstacle. Le cas échéant, l'Office doit alors décider si l'obstacle était abusif. Pour répondre à ces questions, l'Office doit tenir compte des circonstances de l'affaire dont il est saisi.

Les possibilités de déplacement ont-elles été restreintes ou limitées par un obstacle ?

L'expression « obstacle » n'est pas définie dans la LTC, ce qui donne à penser que le Parlement ne voulait pas limiter la compétence de l'Office compte tenu de son mandat d'éliminer les obstacles abusifs dans le réseau de transport de compétence fédérale. De plus, le terme « obstacle » a un sens large et s'entend habituellement d'une chose qui entrave le progrès ou la réalisation.

Pour déterminer si une situation constitue ou non un « obstacle » aux possibilités de déplacement d'une personne ayant une déficience dans un cas donné, l'Office se penche sur les déplacements de cette personne qui sont relatés dans la demande. Dans le passé, l'Office a conclu qu'il y avait eu des obstacles dans plusieurs circonstances différentes. Par exemple, dans certains cas des personnes n'ont pas pu voyager, d'autres ont été blessées durant leurs déplacements (notamment quand l'absence d'installations convenables durant le déplacement affecte la condition physique du passager) et d'autres encore ont été privées de leurs aides à la mobilité endommagées pendant le transport. De plus, l'Office a identifié des obstacles dans les cas où des personnes ont finalement été en mesure de voyager, mais les circonstances découlant de l'expérience ont été telles qu'elles ont miné leur sentiment de confiance, de dignité, de sécurité, situation qui pourrait décourager ces personnes de voyager à l'avenir.

Le cas présent

Niveau d'assistance au comptoir de récupération des bagages

Au comptoir de récupération des bagages d'Air Canada, l'agent d'Air Canada a refusé d'aider M. Leger parce que son vol d'Air Canada était exploité en utilisant un aéronef et un équipage de Canadi*n. Puisqu'il n'y avait pas d'agent de Canadi*n au bureau, M. Leger, après une heure d'attente, a intercepté une employée de Canadi*n et lui a demandé de l'aider. Parce que l'employée de Canadi*n n'était pas une agente de récupération des bagages et donc n'était pas familière avec les procédures pour traiter une réclamation pour dommages à un fauteuil roulant son problème fut long à régler. Le fait que l'agent de récupération des bagages d'Air Canada n'ait pas aidé M. Leger à trouver un agent de Canadi*n a contribué au stress et au dérangement qu'a subi M. Leger à la suite des dommages causés à son fauteuil roulant.

Compte tenu de ces faits, l'Office juge que le niveau de service fourni à M. Leger au comptoir de récupération des bagages a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement.

Les dommages au fauteuil roulant de M. Leger et la façon dont la réclamation en dommages-intérêts a été traitée par le transporteur aérien

Le cadre tubulaire en acier du fauteuil roulant de M. Leger a été endommagé au cours du transport sur un vol d'Air Canada. À la suite du dommage, le fauteuil roulant ne pouvait pas être ouvert de façon appropriée lorsqu'il a été amené à la porte de l'aéronef pour M. Leger à son arrivée à Toronto. Même si le fauteuil roulant de M. Leger a été réparé par l'entreprise de réparation des fauteuils roulants utilisée par le transporteur, M. Leger a dû livrer lui-même son fauteuil roulant à l'entreprise et il a dû prendre des dispositions afin que son fauteuil roulant soit livré à son hôtel. Le transporteur a remboursé M. Leger pour les frais de réparation et de livraison, mais seulement le 25 octobre 2000 après avoir reçu la plainte directement de M. Leger le 30 août et ensuite de l'Office le 18 octobre 2000.

L'Office est d'avis que les aides à la mobilité sont essentielles au déplacement des personnes ayant une déficience qui en dépendent et, par conséquent, elles doivent être traitées comme des bagages prioritaires par le personnel du transporteur. Cela dit, l'Office reconnaît que les aides à la mobilité sont parfois endommagées lors du transport par un transporteur et, lorsque c'est le cas, l'Office est d'avis que les réparations doivent être effectuées de façon à ce que cela soit le moins dérangeant et le moins coûteux possible pour la personne ayant une déficience qui dépend de cette aide. À cette fin, l'Office a adopté la partie VII du Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58, modifié (ci-après le RTA), énonçant les conditions de transport des personnes ayant une déficience, qui, entre autres, requiert que les transporteurs prennent des dispositions et paient pour la réparation des aides à la mobilité qui sont endommagées au cours du transport et fournissent une aide de remplacement temporaire aux personnes pendant que leur aide est en réparation.

Dans le cas présent, même si le transporteur a payé pour les réparations du fauteuil roulant de M. Leger, ce dernier a dû prendre des dispositions pour la livraison du fauteuil roulant à destination et en provenance de l'entreprise de réparation et a été obligé de payer pour les réparations afin d'obtenir à nouveau son fauteuil roulant. L'Office remarque que Canadi*n a attendu jusqu'au 25 octobre 2000 afin de rembourser M. Leger pour un incident qui a eu lieu le 26 août 2000. La façon dont a été traité sa réclamation en dommages-intérêts est inacceptable puisqu'elle a entraîné des dérangements et du stress pour M. Leger. Par conséquent, l'Office juge que la façon dont le personnel d'Air Canada a traité la réclamation en dommages-intérêts a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement.

L'obstacle était-il abusif ?

À l'instar du terme « obstacle », l'expression « abusif » n'est pas définie dans la LTC, ce qui permet à l'Office d'exercer sa discrétion pour éliminer les obstacles abusifs dans le réseau de transport de compétence fédérale. Le mot « abusif » a également un sens large et signifie habituellement que quelque chose dépasse ou viole les convenances ou le bon usage (excessif, immodéré, exagéré). Comme une chose peut être jugée exagérée ou excessive dans un cas et non dans un autre, l'Office doit tenir compte du contexte de l'allégation d'obstacle abusif. Dans cette approche contextuelle, l'Office doit trouver un juste équilibre entre le droit des passagers ayant une déficience d'utiliser le réseau de transport de compétence fédérale sans rencontrer d'obstacles abusifs, et les considérations et responsabilités commerciales et opérationnelles des transporteurs. Cette interprétation est conforme à la politique nationale des transports établie à l'article 5 de la LTC et plus précisément au sous-alinéa 5g)(ii) de la LTC qui précise, entre autres, que les modalités en vertu desquelles les transporteurs ou modes de transport exercent leurs activités ne constituent pas, dans la mesure du possible, un obstacle abusif aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience.

L'industrie des transports élabore ses services pour satisfaire aux besoins des utilisateurs. Les dispositions d'accessibilité de la LTC exigent quant à elles que les fournisseurs de services de transport du réseau de transport de compétence fédérale adaptent leurs services dans la mesure du possible aux besoins des personnes ayant une déficience. Certains empêchements doivent toutefois être pris en considération, par exemple les mesures de sécurité que les transporteurs doivent adopter et appliquer, les horaires qu'ils doivent s'efforcer de respecter pour des raisons commerciales, la configuration du matériel et les incidences d'ordre économique qu'aura l'adaptation d'un service sur les transporteurs aériens. Ces empêchements peuvent avoir une incidence sur les personnes ayant une déficience. Ainsi, ces personnes ne pourront pas nécessairement embarquer dans l'aéronef avec leur propre fauteuil roulant, elles peuvent devoir arriver à l'aérogare plus tôt aux fins de l'embarquement et elles peuvent devoir attendre plus longtemps pour obtenir de l'assistance au débarquement que les personnes n'ayant pas de déficience. Il est impossible d'établir une liste exhaustive des obstacles qu'un passager ayant une déficience peut rencontrer et des empêchements que les fournisseurs de services de transport connaissent dans leurs efforts pour satisfaire aux besoins des personnes ayant une déficience. Il faut en arriver à un équilibre entre les diverses responsabilités des fournisseurs de services de transport et le droit des personnes ayant une déficience à voyager sans rencontrer d'obstacle, et c'est dans cette recherche d'équilibre que l'Office applique le concept d'obstacle abusif.

Le cas présent

Niveau d'assistance

L'Office, ayant conclu que le niveau d'assistance offert à M. Leger dans l'aire de récupération des bagages à l'aéroport de Toronto a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement, doit maintenant déterminer si l'obstacle était abusif.

L'Office croit, même si les employés d'Air Canada et de Canadi*n n'étaient pas interchangeables au début de la phase d'intégration des deux transporteurs aériens, qu'Air Canada aurait dû prévoir les difficultés auxquelles feraient face les personnes ayant une déficience en essayant d'obtenir l'assistance dont ils ont besoin pour répondre à leurs préoccupations relatives à leur mobilité. L'Office est d'avis qu'un passager a le droit de s'attendre à recevoir un minimum d'assistance de la part des employés du transporteur aérien du vol sur lequel il voyage, peu importe les problèmes qui existent au travail. L'Office juge que les problèmes de main-d'œuvre et d'exploitation qui ont eu lieu lors du début de l'intégration d'Air Canada et de Canadi*n ne justifient pas l'attitude de l'agent de récupération des bagages d'Air Canada. L'Office juge, d'après la preuve au dossier, que les difficultés éprouvées par M. Leger lorsqu'il a essayé d'obtenir de l'assistance au comptoir de récupération des bagages auraient pu facilement être évitées si Air Canada s'était assurée que les comptoirs de récupération des bagages desservant ses passagers étaient, en tout temps, dotés adéquatement et que l'agent de récupération des bagages d'Air Canada trouve un employé de Canadi*n qui pourrait fournir l'assistance requise par M. Leger.

L'Office est préoccupé par des situations comme celle-ci, dans lesquelles les employés d'un transporteur aérien ne répondent pas en temps opportun aux besoins particuliers des personnes ayant une déficience et où les employés du transporteur aérien n'adhèrent pas aux politiques et aux programmes de formation pour l'assistance des personnes ayant une déficience.

En conséquence, l'Office juge que le manque d'assistance offerte à M. Leger dans la zone de récupération des bagages a constitué un obstacle abusif à ses possibilités de déplacement.

Les dommages au fauteuil roulant de M. Leger et la façon dont a été traité la réclamation en dommages-intérêts par le transporteur aérien

L'Office, ayant jugé que la façon dont a été traitée la réclamation en dommages-intérêts par le personnel d'Air Canada a constitué un obstacle, examinera maintenant si elle a aussi constitué un obstacle abusif.

L'article 155 du RTA, qui est applicable à Air Canada dans ce cas, se lit, en partie, comme suit :

  1. Sous réserve des paragraphes (2) et (3), lorsque le transporteur aérien accepte de transporter une aide visée aux alinéas 148(1)a), b) ou c) et que celle-ci est endommagée au cours du transport ou n'est pas disponible à l'arrivée de la personne à destination, il doit fournir sans frais à celle-ci, dès son arrivée à destination, une aide de remplacement temporaire qui est convenable.
  2. Lorsque le transporteur aérien accepte de transporter une aide visée aux alinéas 148(1)a), b) ou c) et que celle-ci est endommagée au cours du transport et peut faire l'objet d'une réparation adéquate et prompte, il doit, en plus de se conformer au paragraphe (1), aussitôt faire réparer l'aide à ses frais, adéquatement et promptement, et la retourner le plus tôt possible, à ses frais, à la personne.

La politique d'Air Canada reflète cette exigence réglementaire. Les dispositions dans le RTA ainsi que dans la politique d'Air Canada concernant les dommages causés aux aides à la mobilité des passagers énoncent clairement que le transporteur a la responsabilité de prendre des dispositions pour la réparation des aides à la mobilité. Dans ce cas, M. Leger a dû lui-même faire les démarches pour la livraison de son fauteuil roulant, ce qui était un dérangement évident pour lui. L'incapacité du personnel du transporteur aérien d'agir conformément aux exigences réglementaires applicables et à la politique établie d'Air Canada était un dérangement évident et grave pour M. Leger et le fait d'avoir à payer des dépenses qu'il ne pouvait se permettre était une source de stress pour ce dernier.

D'après ce qui précède, l'Office juge que la manière dont a été traitée la réclamation en dommages-intérêts a constitué un obstacle abusif aux possibilités de déplacement de M. Leger.

De plus, l'incapacité d'Air Canada à prendre des dispositions pour la réparation du fauteuil roulant endommagé à ses frais et de le retourner à la personne est une infraction au paragraphe 155(2) du RTA.

CONCLUSION

À la lumière de ce qui précède, l'Office a déterminé que le manque d'assistance offerte à M. Leger au comptoir de récupération des bagages à l'aéroport de Toronto et la manière dont Air Canada a traité la réclamation en dommages-intérêts ont constitué des obstacles abusifs aux possibilités de déplacement de M. Leger.

L'Office a aussi conclu qu'Air Canada a contrevenu au paragraphe 155(2) du RTA puisque son personnel n'a pas pris de dispositions pour la réparation du fauteuil roulant endommagé et ne l'a pas retourné à M. Leger aux frais du transporteur aérien.

L'Office juge que le niveau d'assistance offert à M. Leger au comptoir de récupération des bagages à l'aéroport de Toronto et la manière dont Air Canada a traité la réclamation en dommages-intérêts ont constitué des obstacles abusifs aux possibilités de déplacement de M. Leger, mais l'Office est d'avis que ce sont les problèmes de main-d'œuvre et d'exploitation qui existaient au début de l'intégration des opérations d'Air Canada et Canadi*n qui ont entraîné cet incident. L'Office est aussi d'avis que puisque les problèmes de main-d'œuvre et d'exploitation ont été réglés, aucune mesure corrective n'est nécessaire en ce moment.

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