Lettre-décision n° LET-AT-A-11-2018
Demande présentée par Donna Jodhan contre l’Autorité aéroportuaire du Grand Toronto (GTAA) en vertu du paragraphe 172(1) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée (LTC).
CONTEXTE
Le 22 novembre 2017, l'Office des transports du Canada (Office) a émis la décision no LET AT A 78 2017 (décision) dans laquelle il a conclu que Mme Jodhan est une personne ayant une déficience et qu'elle a rencontré un obstacle à ses possibilités de déplacement. À la lumière de son Initiative de modernisation de la réglementation, l'Office a suspendu son examen de la question à savoir si l'obstacle peut être éliminé sans que la défenderesse se voit imposer une contrainte excessive.
À titre de mesure provisoire pendant la suspension du cas, l'Office a ordonné à la GTAA de tenir des consultations pour trois raisons : évaluer l'efficacité des dispositions actuelles qui sont prises pour offrir une aide liée à l'accessibilité aux personnes aveugles qui transitent par l'aéroport international Pearson de Toronto (aéroport Pearson); déterminer les aspects à améliorer; et déterminer comment des mesures appropriées seront mises en œuvre et surveillées.
Plus précisément, l'Office a ordonné à la GTAA de prendre les mesures suivantes au plus tard le 22 janvier 2018 :
- déposer, aux fins d'examen par l'Office, un rapport sur les résultats des consultations;
- présenter, aux fins d'approbation par l'Office, une description des mesures appropriées à mettre en œuvre à l'aéroport Pearson, comme l'indique le rapport de consultation, avec leur date de mise en œuvre, et la manière dont la GTAA entend les surveiller.
Positions des parties
GTAA
Le 18 janvier 2018, la GTAA a répondu à la décision en faisant valoir que le délai imposé par l'Office pour mener à bien le processus de consultation était impossible à respecter, et elle n'a pas déposé de requête de prolongation du délai. La GTAA fait également valoir qu'elle n'a pas le pouvoir d'exiger que des transporteurs aériens ou d'autres parties participent à une étude qui pourrait avoir une incidence sur leurs intérêts et ceux de leurs employés et des agents négociateurs. La GTAA laisse entendre que l'Office serait mieux placé pour réaliser une telle étude, avec l'appui de la GTAA et d'autres parties concernées.
Mme Jodhan
Mme Jodhan indique que par l'intermédiaire de ce processus, elle est intéressée à collaborer avec la GTAA pour définir et mettre en œuvre des politiques et des procédures meilleures, plus rigoureuses et plus efficaces relativement à l'aide offerte aux personnes aveugles qui transitent par l'aéroport Pearson. Elle fait toutefois valoir que la GTAA a choisi de ne pas exécuter l'ordonnance de la décision dans laquelle l'Office lui exigeait seulement de mener des consultations.
Mme Jodhan affirme qu'en vertu de l'article 33 de la LTC, l'Office devrait faire en sorte que l'ordonnance dans la décision soit homologuée par la Cour fédérale et qu'il en demande l'exécution. Mme Jodhan ajoute que la GTAA devrait être invitée à justifier pourquoi elle ne devrait pas être sanctionnée pour non-exécution d'une ordonnance, conformément à l'alinéa 174b) de la LTC.
Analyse et déterminations
L'Office a compétence pour protéger le droit fondamental des personnes ayant une déficience à des services liés aux transports accessibles dans tout le réseau de transport fédéral, y compris dans les aéroports.
Le paragraphe 28(2) de la LTC prévoit que l'Office « peut prendre un arrêté provisoire et se réserver le droit de compléter sa décision lors d'une audience ultérieure ou d'une nouvelle demande». Pour déterminer s'il doit prendre un arrêté provisoire, l'Office doit tenir compte de la prépondérance des inconvénients pour les parties. Dans le cas présent, tout inconvénient causé à la GTAA par l'obligation de tenir des consultations et, potentiellement, de modifier ses pratiques existantes, serait certainement dérisoire comparativement à l'inconvénient subi par des personnes ayant une déficience qui pourraient ne pas avoir accès à l'aéroport Pearson.
La GTAA n'explique pas quel type de pouvoir il lui faudrait pour entreprendre de telles consultations. Les exploitants d'aérogare et les transporteurs ont l'obligation de veiller à ce que les services de transport aérien soient accessibles aux personnes ayant une déficience, et rien ne démontre que quoi que ce soit empêcherait la GTAA d'ouvrir le dialogue avec des organismes de défense des droits des personnes ayant une déficience et les parties qui contribuent à la fourniture de services liés à l'accessibilité à l'aéroport Pearson.
ORDONNANCE
L'Office réitère l'ordonnance énoncée dans la décision et exige que la GTAA exécute son ordonnance au plus tard le 28 mars 2018. Compte tenu du délai qui s'est écoulé depuis l'émission de la décision, l'Office encourage la GTAA à faire tout son possible pour s'y conformer bien avant cette date. Comme la GTAA n'a pas exécuté l'ordonnance avant l'expiration du délai initial, l'Office ouvrira, en temps voulu, des actes de procédure en vue d'une adjudication possible de frais à Mme Jodhan.
L'Office fait remarquer que le personnel de son Centre d'expertise sur les transports accessibles peut offrir de l'aide en ce qui a trait aux initiatives en matière d'accessibilité, si la GTAA en a besoin.
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