Lettre-décision n° LET-AT-C-A-21-2020
Requête d'Air Canada visant un sursis à l'exécution de la décision no LET-AT-C-A-51-2019 afin de reporter la date de conformité aux deuxième et troisième éléments de l'ordonnance émise dans le cadre de la décision no 12-AT-C-A-2019 (arrêté), conformément à l'article 41 des Règles de l'Office des transports du Canada (Instances de règlement des différends et certaines règles applicables à toutes les instances), DORS/2014-104 (Règles pour le règlement des différends), et la révision de la décision no 12-AT-C-A-2019, conformément à l'article 32 de la Loi sur les transports au Canada, L.C. 1996, ch. 10, modifiée (LTC).
CONTEXTE
Dans la décision no 12-AT-C-A-2019, l’Office des transports du Canada (Office) a conclu qu’Air Canada n’avait pas fait d’efforts raisonnables pour aviser le demandeur de la raison du retard sur l’aire de trafic, comme l’exige la Règle 80(C)(3) de son tarif international énonçant les règles applicables aux passagers et au prix, NTA(A) no 458 (tarif). L’Office a également conclu que, lorsqu’Air Canada a omis d’offrir au demandeur la possibilité de débarquer, elle n’a pas respecté la Règle 80(C)(5)(c) de son tarif. Ces manquements constituent une violation du paragraphe 110(4) du Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58, modifié.
À la lumière de ces constatations, l’Office a ordonné à Air Canada de :
- rappeler par écrit à ses commandants qu’en cas de retard sur l’aire de trafic, ils doivent aviser les passagers de la raison du retard, si elle est connue, conformément à la règle 80(C)(3) de son tarif;
- aviser le centre de contrôle des opérations du système et les commandants que, lorsque le seuil de temps pour offrir aux passagers la possibilité de débarquer est atteint, cette offre doit être faite de façon proactive, même si, pour des raisons pratiques (comme les capacités limitées de la salle d’attente de l’aérogare), il n’est possible de débarquer qu’un certain nombre de passagers plutôt que tous;
- élaborer des critères pour déterminer quels passagers seront débarqués lors d’un retard sur l’aire de trafic, si le nombre de passagers qui manifestent le désir de le faire dépasse les capacités d’accueil dans la salle d’attente de l’aérogare. Ces critères devraient inclure l’existence de déficiences qui occasionnent de l’inconfort ou d’autres difficultés aux passagers pendant un retard prolongé sur l’aire de trafic, même si ces déficiences ne sont portées à l’attention du personnel d’Air Canada que pendant le retard sur l’aire de trafic.
L’arrêté enjoignait à Air Canada de fournir une copie des documents susmentionnés au dirigeant principal, Conformité, de l’Office d’ici le 17 mai 2019.
Le 17 mai 2019, Air Canada a présenté, conformément à l’article 40 de la LTC, une requête au gouverneur en conseil lui demandant d’annuler ou de modifier la décision no 12-AT-C-A-2019 (décision initiale). À la même date, Air Canada a demandé que la date de conformité à la décision initiale soit reportée de façon à ce qu’elle corresponde à la date d’entrée en vigueur prévue du Règlement sur la protection des passagers aériens, DORS/2019-150 (RPPA).
Dans la décision no LET-AT-C-A-51-2019 (décision de report), rendue le 9 juillet 2019, l’Office a ordonné à Air Canada de déposer le document mentionné au premier élément de l’arrêté, étant donné qu’il s’agissait d’une exigence du RPPA qui entrait en vigueur le 15 juillet 2019. Rien ne justifiait donc le report de la date d’entrée en vigueur de cet élément à une date ultérieure. Air Canada s’est conformée à cette exigence.
Toutefois, l’Office a accordé un sursis concernant les deuxième et troisième éléments de l’arrêté jusqu’au 15 décembre 2019, date à laquelle Air Canada devait déposer une copie des documents connexes auprès du dirigeant principal, Conformité, de l’Office.
Le 3 février 2020, Air Canada a déposé auprès de l’Office une requête demandant un sursis à l’exécution de la décision de report et la prorogation de la date limite de conformité aux deuxième et troisième éléments de la décision initiale jusqu’à ce que le gouverneur en conseil rende une décision sur sa requête ou jusqu’au 15 décembre 2020. À titre subsidiaire, Air Canada a demandé une révision de l’arrêté, conformément à l’article 32 de la LTC.
Pour les raisons énoncées ci-dessous, l’Office accorde un sursis à l’exécution de la décision initiale et de la décision de report jusqu’à ce que le gouverneur en conseil rende sa décision à l’égard de la requête d’Air Canada.
LA LOI
Le paragraphe 41(2) des Règles pour le règlement des différends énonce les cas dans lesquels l’Office peut, sur requête, surseoir à l’exécution de sa décision ou de son arrêté :
- l’Office considère la possibilité de mener une révision ou une nouvelle audience en vertu de l’article 32 de la Loi;
- le gouverneur en conseil considère la possibilité de mener une révision en vertu de l’article 40 de la Loi;
- une demande d’autorisation d’interjeter appel a été présentée devant la Cour d’appel fédérale en vertu de l’article 41 de la Loi;
- il l’estime juste et raisonnable.
POSITION D’AIR CANADA
Air Canada fait valoir qu’elle satisfait au critère en trois étapes pour l’octroi d’un sursis qui est énoncé par la Cour suprême du Canada dans la décision RJR – MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311. Air Canada soutient que la charge de travail additionnelle découlant de divers événements majeurs fait en sorte qu’il est difficile pour son personnel de travailler à l’élaboration de nouvelles politiques. Air Canada indique qu’elle manque actuellement de ressources pour élaborer d’autres options de conformité aux décisions, car elle gère actuellement les éléments suivants :
- des changements structurels en matière de TI liés à la mise en œuvre d’un nouveau système pour les réservations, les itinéraires et la billetterie, ce qui nécessitera la formation de 13 000 membres du personnel d’Air Canada;
- la conformité au Règlement sur les transports accessibles aux personnes handicapées, DORS/2019-244, qui entre en vigueur le 25 juin 2020;
- la crise du coronavirus (COVID-19), qui a obligé Air Canada à suspendre temporairement ses vols vers la Chine et à redéployer son personnel;
- l’immobilisation au sol des appareils Boeing 737 Max.
ANALYSE ET DÉTERMINATIONS
Conformément à l’alinéa 41(2)d) des Règles de l’Office, l’Office peut, sur requête, surseoir à l’exécution de sa décision ou de son arrêté dans les cas où il « l’estime juste et raisonnable ».
L’Office estime qu’il est juste et raisonnable de reporter la date limite pour la conformité d’Air Canada aux deuxième et troisième éléments de l’arrêté dans la décision initiale, étant donné que le gouverneur en conseil n’a pas encore répondu à la requête d’Air Canada et, surtout, compte tenu des défis opérationnels importants et imprévus auxquels Air Canada est confrontée depuis que la décision de report a été prise, notamment les perturbations majeures liées à la pandémie de la COVID-19.
CONCLUSION
L’Office, conformément à l’alinéa 41(2)b) des Règles pour le règlement des différends, accorde un sursis à l’exécution de la décision initiale et de la décision de report, jusqu’à ce que le gouverneur en conseil réponde à la requête d’Air Canada.
Pour le moment, l’Office ne prendra pas en considération la proposition d’Air Canada de réviser l’arrêté en vertu de l’article 32 de la LTC, étant donné qu’elle a été présentée comme solution de rechange à un sursis. Toutefois, l’Office note qu’Air Canada a indiqué qu’elle a entrepris une analyse plus approfondie des répercussions de l’arrêté et des autres moyens d’atteindre les objectifs de l’arrêté. Si Air Canada souhaite faire une présentation plus complète à cet égard, l’Office déterminera si la présentation introduit des faits nouveaux ou une évolution des circonstances qui justifieraient une modification de l’arrêté, conformément à l’article 32 de la LTC.
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