Lettre-décision n° LET-R-26-2022

le 12 juillet 2022

Demandes de traitement confidentiel par la Ville de Vancouver (Vancouver) et la Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique (CP), au titre de la section 4 de l’Annexe A des Lignes directrices relatives aux demandes de détermination de la valeur nette de récupération (Lignes directrices).

Numéro de cas : 
18-04065

CONTEXTE

[1] Le 16 mars 2022, l’Office des transports du Canada (Office) a émis la décision LET-R-13-2022, dans laquelle il s’est penché sur les demandes de traitement confidentiel faites par Vancouver et CP.

[2] L’Office a accédé à la demande de traitement confidentiel de Vancouver en ce qui a trait aux renseignements relatifs à l’évaluation foncière et à certains montants en dollars estimés qui se trouvent dans les rapports qu’elle a déposés.

[3] L’Office a également accordé à CP l’occasion de déposer une présentation supplémentaire concernant sa demande de traitement confidentiel.

[4] Enfin, l’Office a informé les parties qu’il avait l’intention d’utiliser des valeurs cumulées pour les éléments d’actif de la voie dans sa décision publique finale, et les deux parties ont eu l’occasion de déposer des représentations si elles étaient en désaccord avec son approche.

[5] Le 30 mars 2022, Vancouver et CP ont toutes deux déposé leur réponse respective à la décision LET-R-13-2022.

POSITIONS DES PARTIES

Présentation de Vancouver

[6] Vancouver affirme qu’elle ne s’oppose pas à ce que l’Office utilise des valeurs cumulées pour les éléments d’actif de la voie dans sa décision publique finale, à condition que :

- la détermination de l’Office concernant la valeur nette de récupération (VNR) totale de la ligne Van Horne (ligne) ainsi que toute autre
  valeur qui permettrait à un lecteur de calculer la valeur foncière de la propriété en question demeure confidentielle;

- si l’Office détermine que les coûts pour démanteler la portion restante du pont ferroviaire Marpole seront considérés dans le cadre de la
  détermination de la VNR de la ligne, les montants en dollars des coûts estimés pour enlever ou démanteler le pont demeurent
  confidentiels.

[7] Vancouver soutient, comme elle l’a affirmé dans ses précédentes demandes de traitement confidentiel, que les renseignements relatifs à l’évaluation foncière concernant l’acquisition, la cession ou l’expropriation de biens-fonds ou d’améliorations sont le genre de renseignements dont Vancouver préserve particulièrement la confidentialité au titre de l’alinéa 165.2(1)e) de la Vancouver Charter, SBC 1953, c 55 (Charte de Vancouver). De façon similaire, Vancouver soutient que les renseignements liés aux coûts pour enlever ou démanteler le pont sont des renseignements dont elle préserve particulièrement la confidentialité au titre de l’alinéa 165.2(1)e) de la Charte de Vancouver.

[8] Vancouver indique que le préjudice direct précis que causerait la divulgation de ces renseignements l’emporterait sur l’intérêt public en ce qui a trait à la divulgation de ces renseignements. Selon Vancouver, l’intérêt public est servi par la divulgation du processus et de la méthodologie utilisés en vue de déterminer la VNR et non par la divulgation des montants précis liés à la détermination d’une VNR en particulier.

Présentation de CP

[9] CP affirme qu’elle ne s’oppose pas à ce que l’Office utilise des valeurs cumulées pour les éléments d’actif de la voie dans sa décision publique finale.

[10] CP demande de nouveau à ce que les documents suivants demeurent confidentiels dans leur intégralité :

- l’entente d’indemnisation pour la voie d’accès industrielle (onglet 3);

- le rapport d’évaluation (onglet 12);

- l’évaluation environnementale (onglet 18);

- les ententes de ventes et les offres relatives aux voies ferroviaires antérieures (onglets 21 et 22);

- les ententes confidentielles de prestation de services (onglets 24, 27, et 28);

- le contrat de location et le calcul de la valeur actuelle nette du contrat de location (onglets 30 et 31).

[11] Cependant, CP soutient que l’entente d’indemnisation pour la voie d’accès industrielle (onglet 3) devrait être retirée des archives étant donné qu’elle n’est pas pertinente puisque l’Office a déterminé dans la décision LET-R-71-2019 que l’intérêt relatif à l’emprise de chemin de fer statutaire de CP ne sera pas inclus dans la demande concernant la VNR. CP indique qu’elle a inclus cette entente dans sa demande de traitement confidentiel au cas où l’Office déterminerait que ce document est pertinent et qu’il doit être versé dans ses archives.

[12] Selon CP, les documents énumérés ci-dessus ne devraient pas être versés dans les archives publiques de l’Office puisque leur contenu respecte les critères établis dans Sherman (Succession) c Donovan, 2021 CSC 25 [Sherman (Succession)].

[13] CP soutient que la divulgation publique de ces documents pose un risque sérieux pour un intérêt public important puisqu’ils comprennent des renseignements commerciaux confidentiels et que l’Office a imposé leur divulgation au titre des Lignes directrices. CP fait référence au paragraphe 41 de Sherman (Succession), qui énonce que l’intérêt commercial général dans la protection des renseignements confidentiels constitue un intérêt important en raison de son caractère public. CP affirme qu’elle a dû fournir ces documents puisqu’ils contiennent des renseignements pertinents aux fins du calcul de la VNR par l’Office et qu’au titre du paragraphe 4(1) [4(2)] de l’Annexe A des Lignes directrices, « nul ne peut refuser de déposer un document en se fondant uniquement sur le fait qu’une demande de traitement confidentiel a été présentée à son égard ».

[14] CP affirme que ces documents comprennent des renseignements financiers et commerciaux de nature sensible et que leur divulgation lui nuirait puisqu’elle fournirait à ses concurrents, à ses expéditeurs et à ses fournisseurs des connaissances qui compromettraient sa position dans le cadre de négociations et de transactions commerciales. CP soutient que le traitement confidentiel est nécessaire en vue de protéger non seulement ses intérêts commerciaux, mais également ceux des tiers avec qui elle collabore.

[15] CP soutient également que l’intérêt public ne l’emporte pas sur la divulgation de ses renseignements financiers et commerciaux de nature sensible. Elle affirme que le public pourrait quand même comprendre le raisonnement de l’Office dans sa détermination de la VNR, comme le témoignent des déterminations de VNR antérieures dans le cadre desquelles une ordonnance de confidentialité protège des documents similaires et, par conséquent, que l’incidence serait minime.

LA LOI ET LES LIGNES DIRECTRICES

[16] Selon le principe de la publicité des débats judiciaires, à quelques exceptions près, les instances et les dossiers connexes doivent être rendus publics. Ce principe s’applique à l’Office lorsque celui-ci entame une instance de règlement d’un différend en sa qualité de tribunal quasi judiciaire. Par conséquent, l’Office doit verser toute présentation déposée ou tout document déposé dans le cadre de l’instance dans ses archives publiques à moins qu’une demande de traitement confidentiel n’ait été présentée et acceptée par l’Office.

[17] L’article 4 de l’Annexe A des Lignes directrices reflète ce principe en énonçant que l’Office verse dans ses archives publiques les documents concernant une instance qui sont déposés auprès de lui, à moins que la personne qui les dépose ne présente une demande de traitement confidentiel conformément au présent article et que l’Office n’accepte cette demande de traitement confidentiel. Il établit la procédure qui s’applique aux demandes de traitement confidentiel présentées dans le cadre d’une instance portant sur une VNR.

[18] En vue d’évaluer la confidentialité des renseignements, l’Office évalue d’abord si ceux-ci sont pertinents à l’égard de l’instance. Si l’Office détermine que les renseignements ne sont pas pertinents, il peut décider de ne pas les verser dans ses archives. S’il juge que les renseignements sont pertinents, l’Office doit appliquer les critères relatifs aux limites discrétionnaires à la publicité des débats judiciaires.

[19] L’article 25 de la Loi sur les transports au Canada, LC 1996, c 10, confère à l’Office de vastes pouvoirs, y compris le pouvoir d’émettre des ordonnances concernant la confidentialité des documents. L’Office exerce ce pouvoir d’une manière compatible avec la jurisprudence de la Cour suprême du Canada.

[20] La Cour suprême du Canada a récemment examiné les exigences relatives aux limites discrétionnaires à la publicité des débats judiciaires au public et aux médias dans Sherman (Succession), et elle y a reformulé le critère de confidentialité. Selon les principes établis dans Sherman (Succession), la personne qui demande de limiter la présomption de publicité doit établir que :

  1. la publicité des débats judiciaires pose un risque sérieux pour un intérêt public important;
  2. l’ordonnance sollicitée est nécessaire pour écarter ce risque sérieux pour l’intérêt mis en évidence, car d’autres mesures raisonnables ne permettront pas d’écarter ce risque;
  3. du point de vue de la proportionnalité, les avantages de l’ordonnance l’emportent sur ses effets négatifs.

[21] Un intérêt commercial peut constituer un intérêt public important pour l’application du critère, mais l’intérêt en question doit être exprimé en tant qu’intérêt public. Pour l’emporter sur l’intérêt public dans le contexte de la publicité des débats judiciaires, l’intérêt relatif à la confidentialité des renseignements commerciaux ne doit pas se rapporter uniquement et spécifiquement à la partie qui demande l’ordonnance de confidentialité, comme il est indiqué dans Sherman (Succession) au para 41, citant Sierra Club du Canada c Canada (Ministre des Finances), 2002 CSC 41 [Sierra Club] au para 55. Autrement dit, un principe général doit entrer en jeu. De plus, le risque en cause doit être réel et important, en ce qu’il est bien étayé par la preuve et menace gravement l’intérêt commercial en question (Sierra Club au para 54).

ANALYSE ET DÉTERMINATIONS

Demande de traitement confidentiel de Vancouver

[22] Les renseignements liés aux montants en dollars du coût pour enlever le pont ferroviaire Marpole se trouvent dans les rapports présentés par Vancouver. Ils sont donc visés par l’ordonnance de confidentialité rendue par l’Office dans la décision LET-R-13-2022.

[23] L’Office conclut que la VNR totale de la ligne et toute autre valeur qui pourrait permettre à un lecteur de calculer la valeur foncière de la propriété sont pertinentes à l’égard de l’instance et, par conséquent, il doit appliquer le cadre établi dans Sherman (Succession).

1. RISQUE SÉRIEUX POUR UN INTÉRÊT PUBLIC IMPORTANT

[24] Dans la décision LET-13-2022, l’Office a reconnu que les résultats des futures négociations et transactions commerciales auxquelles Vancouver participera auront une incidence sur le public et que, dans ce contexte, la protection des renseignements commerciaux de nature sensible est un intérêt public important. L’Office y a également conclu que la divulgation publique des chiffres provenant des évaluations foncières de Vancouver poserait un risque important pour sa position dans le cadre de négociations et de transactions commerciales concernant l’acquisition, la cession ou l’expropriation de biens-fonds. L’Office conclut que la VNR totale de la ligne, tout comme toute valeur qui permettrait au public de calculer la valeur foncière de la propriété, sont des renseignements de la même nature et que leur divulgation poserait similairement un risque sérieux pour un intérêt public important.

2. NÉCESSITÉ

[25] La demande de Vancouver concerne les montants précis qui seront utilisés dans la détermination finale. Compte tenu de l’importance de ces chiffres, il semble impossible de restreindre la portée de la demande et il ne semble pas y avoir d’autres mesures permettant de prévenir le risque sérieux.

3. PROPORTIONNALITÉ

[26] Vancouver soutient que l’intérêt public est servi par la divulgation du processus et de la méthodologie utilisés en vue de déterminer la VNR et non par la divulgation des montants précis. Cependant, l’Office conclut que la VNR totale de la ligne, tout comme tout renseignement relatif à une évaluation foncière, sont des renseignements essentiels pour répondre à la question que Vancouver a portée à l’attention de l’Office. Il y a une justification fondamentale à la divulgation de ces éléments essentiels à la détermination de la VNR finale par l’Office, soit d’assurer la confiance dans l’administration de la justice en faisant preuve de transparence. De plus, la VNR finale déterminée par l’Office dans des cas antérieurs a toujours été rendue publique puisqu’il considère que sa détermination de la VNR finale et les calculs connexes sont tout aussi importants pour le public que le processus et la méthodologie utilisés en vue de la déterminer.

[27] L’Office conclut que la présentation déposée par Vancouver ne permet pas d’établir que les avantages liés au fait de garder la VNR totale de la ligne et toute évaluation foncière connexe utilisée pour déterminer la VNR totale confidentielles l’emportent sur les incidences négatives d’une ordonnance de confidentialité sur le principe de la publicité des débats judiciaires. Par conséquent, l’Office refuse la nouvelle demande de traitement confidentiel de Vancouver.

Demandes de traitement confidentiel de CP

A. L’ENTENTE D’INDEMNISATION POUR LA VOIE D’ACCÈS INDUSTRIELLE (ONGLET 3)

[28] Dans la décision LET-R-59-2019, l’Office a déterminé qu’en ce qui a trait à la portion de la ligne visée par une emprise de chemin de fer statutaire, seule la valeur des éléments d’actif de la voie et du coût pour les enlever est applicable aux fins de la VNR. Par conséquent, l’Office conclut que l’entente d’indemnisation pour la voie d’accès industrielle (onglet 3), qui comprend les conditions de l’intérêt de CP relatif à son emprise de chemin de fer statutaire, n’est pas pertinente à l’égard de la présente instance. L’Office ne versera donc pas ce document dans ses archives.

B. LES ENTENTES DE VENTE ET LES OFFRES RELATIVES AUX VOIES FERROVIAIRES ANTÉRIEURES (ONGLETS 21 ET 22), LES ENTENTES DE PRESTATION DE SERVICES (ONGLETS 24, 27 ET 28) ET LE CONTRAT DE LOCATION (ONGLETS 30 ET 31)

[29] Les ententes de vente et les offres relatives aux voies ferroviaires antérieures (onglets 21 et 22), les ententes de prestation de services (onglets 24, 27 et 28) et le contrat de location (onglets 30 et 31) sont des ententes commerciales conclues entre CP et des tiers qui ne sont pas des parties dans l’instance portant sur la VNR. CP affirme que leur contenu est confidentiel et que sa divulgation n’aurait pas seulement une incidence sur sa position lors de négociations, mais également sur la position concurrentielle des tiers.

[30] L’Office conclut que ces ententes sont pertinentes à l’égard de la présente instance étant donné que l’Office tient compte des valeurs représentant l’intérêt dans tous les contrats et les ententes qui devraient survivre au transfert de la ligne de chemin de fer pour déterminer une VNR. Par conséquent, l’Office examinera la demande de traitement confidentiel de CP concernant ces documents à l’aide du cadre établi dans Sherman (Succession).

1. Risque sérieux pour un intérêt public important

[31] Dans Sierra Club, la Cour suprême du Canada a indiqué que la préservation de renseignements commerciaux confidentiels constitue un intérêt commercial suffisamment important dès que certaines conditions relatives aux renseignements soient réunies (para 59). Le demandeur doit démontrer que les renseignements en question ont toujours été traités comme des renseignements confidentiels; que, selon la prépondérance des probabilités, il est raisonnable de penser que leur divulgation risquerait de compromettre ses droits exclusifs, commerciaux et scientifiques; et qu’ils ont été recueillis dans l’expectative raisonnable qu’ils resteront confidentiels (Sierra Club, para 59 et 60).

[32] Dans le cas présent, CP et les tiers n’ont pas rendu publics les renseignements compris dans les ententes commerciales. CP affirme que les conditions de ces ententes sont confidentielles et que la publication de ces renseignements commerciaux de nature sensible n’aurait pas seulement une incidence sur sa position lors de négociations et sur sa position concurrentielle, mais également sur celles des tiers. De plus, certaines de ces ententes comprennent des dispositions de confidentialité. À la lumière de ce qui précède, l’Office conclut que les renseignements compris dans les ententes ont toujours été traités comme des renseignements confidentiels par CP et les tiers; qu’il est raisonnable de penser que leur divulgation risquerait de compromettre leurs intérêts commerciaux; et qu’ils ont été recueillis dans l’expectative raisonnable qu’ils resteront confidentiels. Par conséquent, l’Office conclut que la divulgation du contenu des ententes poserait un risque sérieux pour un intérêt public important, à savoir la protection de renseignements commerciaux confidentiels.

2. Nécessité

[33] L’Office conclut que, puisque ces ententes ont été entièrement traitées comme des ententes confidentielles, il ne semble pas y avoir d’autres mesures raisonnables à ce qu’elles soient déposées sous une ordonnance de confidentialité.

3. Proportionnalité

[34] Le fait de verser ces ententes dans les archives confidentielles de l’Office n’empêcherait pas le public de comprendre les raisons de la détermination de la VNR par l’Office. Au contraire, leur divulgation nuirait de façon importante à l’intérêt de protéger des renseignements commerciaux confidentiels. Par conséquent, l’Office conclut que les avantages d’accéder à la demande de traitement confidentiel l’emportent sur toute incidence négative.

[35] À la lumière de ce qui précède, l’Office accède à la demande de traitement confidentiel de CP en ce qui concerne les ententes de vente et les offres relatives aux voies ferroviaires antérieures (onglets 21 et 22), les ententes de prestation de services (onglets 24, 27 et 28) et le contrat de location (onglets 30 et 31).

C. LE RAPPORT D’ÉVALUATION (ONGLET 12)

[36] CP affirme que le rapport d’évaluation comprend des renseignements décrivant la qualité des biens-fonds de CP allant au-delà de ce qui se trouve dans les archives publiques. De plus, CP affirme avoir convenu de la publication des montants comme il a été convenu dans des demandes antérieures concernant la VNR, mais que l’analyse ayant mené à ces montants est confidentielle. En outre, CP est d’avis qu’en raison de ce qui a été décidé dans la décision LET-R-71-2019, la majorité du rapport concernant l’emprise de chemin statutaire ne sera pas comprise dans la détermination de la VNR et, par conséquent, que celui-ci n’est pas pertinent.

[37] Le Rapport d’évaluation a été réalisé par un tiers à la demande de CP et contient une estimation de la valeur marchande actuelle de 12 propriétés, y compris la parcelle en fief simple appartenant à CP et 11 zones visées par une emprise de chemin de fer statutaire dans le secteur du sud de l’île de Vancouver et de la zone industrielle de Van Horne et Bridgeport, ainsi que les méthodes, les approches et l’analyse utilisées pour faire ces calculs. CP propose de supprimer l’intégralité du rapport de 123 pages, à l’exception de la page titre et de la troisième page, qui comprend un résumé des estimations des valeurs totales des propriétés sur le marché.

[38] En ce qui a trait aux renseignements concernant les 11 biens-fonds visés par une emprise de chemin de fer statutaire, l’Office conclut qu’ils ne sont pas pertinents à la présente instance étant donné que l’Office a décidé dans la décision LET-71-2019 que toute estimation de la valeur foncière de biens-fonds visés par une emprise de chemin de fer statutaire devrait être exclue du calcul de la VNR. Par conséquent, l’Office ne versera pas ces renseignements dans ses archives.

[39] Les portions restantes du rapport d’évaluation sont pertinentes à la présente instance puisque l’Office doit considérer les renseignements concernant la parcelle en fief simple appartenant à CP dans le cadre de sa détermination de la VNR.

[40] Selon la présentation déposée par CP, le rapport d’évaluation comprend des renseignements qui sont déjà dans les archives publiques; des renseignements confidentiels, décrits par CP comme l’analyse ayant permis d’établir tous les montants; et des renseignements qui ne sont pas pertinents en vue de déterminer la VNR, décrits par CP comme représentant la majorité du rapport concernant les biens-fonds visés par une emprise de chemin de fer statutaire. CP n’a pas fait de distinction entre ces ensembles de renseignements dans le rapport, ce qui rend difficile pour l’Office d’appliquer le cadre établi dans Sherman (Succession).

[41] L’Office est d’avis que l’ordonnance de confidentialité demandée par CP pour l’ensemble du document n’aurait pas une incidence minimale sur le principe de publicité des débats judiciaires, particulièrement à la lumière de la présentation déposée par CP selon laquelle ce document comprend des renseignements qui sont déjà dans les archives publiques. Même si l’Office concluait que la divulgation pose un risque sérieux pour un intérêt public important, la demande actuelle de CP ne satisfait pas à la deuxième étape du critère, qui exige que l’Office examine s’il existe des mesures autres que l’ordonnance demandée et à restreindre l’ordonnance autant qu’il est raisonnablement possible de le faire pour écarter le risque sérieux, comme il est indiqué dans Sherman (Succession) au para 105 et Sierra Club au para 57.

[42] À la lumière de ce qui précède, l’Office ordonne à CP de déposer :

  1. une version publique du rapport d’évaluation dans laquelle tout renseignement public ou non confidentiel n’est pas supprimé et les renseignements désignés comme étant confidentiels sont supprimés;
  2. une version confidentielle du rapport d’évaluation qui contient les renseignements désignés comme étant confidentiels, qui porte la mention « comprend des renseignements confidentiels » dans le haut de chaque page et qui indique les portions qui ont été supprimées du document mentionné ci-dessus;
  3. des commentaires supplémentaires concernant ces renseignements en vue de permettre à l’Office d’examiner la demande de CP à l’aide du cadre établi dans Sherman (Succession).

[43] Tous les renseignements concernant les 11 biens-fonds visés par une emprise de chemin de fer statutaire devraient être retirés des deux versions du rapport d’évaluation déposé par CP.

D. L’ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE (ONGLET 18)

[44] CP affirme que l’évaluation environnementale comprend des renseignements concernant la situation des biens-fonds de CP, y compris des rapports historiques, une reconnaissance des sols et une évaluation des sols. De plus, CP affirme qu’elle utilise ses biens-fonds à des fins commerciales et que chacune des 371 pages du document devrait être supprimée.

[45] L’évaluation environnementale est pertinente à la présente instance étant donné qu’elle fait partie de la preuve en ce qui a trait aux considérations environnementales dont l’Office doit tenir compte en vue de déterminer si des coûts de remédiation devraient être considérés dans la détermination globale de la VNR.

[46] L’Office note que ce document comprend des renseignements qui sont déjà dans les archives publiques ou qui ne sont pas de nature très sensible. Par exemple, il comprend des renseignements qui se trouvent sur les sites Web du gouvernement du Canada et de la Province de la Colombie-Britannique. CP n’a pas fait de distinction entre les renseignements confidentiels et les renseignements publics ou non confidentiels, ce qui rend difficile pour l’Office d’appliquer le critère établi dans Sherman (Succession).

[47] Comme il a déjà été mentionné, l’Office est d’avis que CP n’a pas adapté sa demande pour qu’elle ait une incidence minimale sur le principe de publicité des débats judiciaires et que la confidentialité de l’ensemble de l’évaluation environnementale ne satisferait pas au critère établi dans Sherman (Succession).

[48] À la lumière de ce qui précède, l’Office ordonne à CP de déposer :

  1. une version publique de l’évaluation environnementale dans laquelle tout renseignement public ou non confidentiel n’est pas supprimé et les renseignements désignés comme étant confidentiels sont supprimés;
  2. une version confidentielle de l’évaluation environnementale qui contient les renseignements désignés comme étant confidentiels, qui porte la mention « comprend des renseignements confidentiels » dans le haut de chaque page et qui indique les portions qui ont été supprimées du document mentionné ci-dessus;
  3. des commentaires supplémentaires concernant ces renseignements en vue de permettre à l’Office d’examiner la demande de CP à l’aide du cadre établi dans Sherman (Succession).

ORDONNANCE

[49] CP a jusqu’à 17 h, heure locale de Gatineau, le 22 juillet 2022 pour déposer des versions publiques et confidentielles du rapport d’évaluation et de l’évaluation environnementale conformément aux directives de l’Office décrites ci-dessus. Cela inclut des commentaires supplémentaires concernant les renseignements désignés comme étant confidentiels pour permettre à l’Office d’examiner la demande de CP à l’aide du cadre établi dans Sherman (Succession).

[50] Si CP n’a pas respecté l’ordonnance de l’Office au plus tard le 22 juillet 2022, l’Office versera les versions confidentielles actuelles des documents dans ses archives publiques.

[51] Toute correspondance et tout acte de procédure doit référer au cas 18-04065 et être déposé par l’intermédiaire de l’adresse courriel du Secrétariat de l’Office à secretariat@otc-cta.gc.ca.
 


ANNEXE À LA DÉCISION NO LET-R-26-2022

La section 4 de l’Annexe A des Lignes directrices prévoit :

  1. L’Office verse dans ses archives publiques les documents concernant une instance qui sont déposés auprès de lui, à moins que la personne qui les dépose ne présente une demande de traitement confidentiel conformément au présent article et que l’Office n’accepte cette demande de traitement confidentiel.
  2. Nul ne peut refuser de déposer un document en se fondant uniquement sur le fait qu’une demande de traitement confidentiel a été présentée à son égard.
  3. Quiconque présente une demande de traitement confidentiel doit déposer :
    1. une version des documents desquels les renseignements confidentiels ont été retirés, qu’une opposition ait été présentée ou non aux termes de l’alinéa (4)(b);
    2. une version des documents qui porte la mention « contient des renseignements confidentiels » au haut de chaque page et qui indique les passages qui ont été retirés de la version visée à l’alinéa (3)(a).
  4. La personne qui demande le traitement confidentiel doit indiquer :
    1. les raisons de sa demande et, le cas échéant, la nature et l’ampleur du préjudice direct que lui causerait vraisemblablement la divulgation du document;
    2. les raisons qu’elle a, le cas échéant, de s’opposer à ce que soit versée dans les archives publiques la version des documents desquels les renseignements confidentiels ont été retirés.
  5. L’Office verse dans ses archives publiques le document faisant l’objet d’une demande de traitement confidentiel s’il estime que le document est pertinent à l’égard de l’instance et que sa divulgation ne causerait vraisemblablement pas de préjudice direct, ou que l’intérêt du public à le divulguer l’emporte sur le préjudice direct qui pourrait en résulter.
  6. Si l’Office conclut que le document faisant l’objet de la demande de traitement confidentiel n’est pas pertinent à l’égard de l’instance, le document ne sera pas versé aux archives publiques et l’Office le retournera.
  7. Si l’Office conclut que le document faisant l’objet de la demande de traitement confidentiel est pertinent à l’égard de l’instance et qu’une telle demande est justifiée en raison du préjudice direct que pourrait causer sa divulgation, il peut, selon le cas :

a. ordonner que le document ne soit pas versé dans ses archives publiques mais qu’il soit conservé de façon à en préserver la confidentialité;

b. ordonner qu’une version ou une partie du document ne contenant pas de renseignements confidentiels soit versée dans les archives publiques;

c. ordonner que tout ou une partie du document soit fourni aux parties ou à leurs avocats seulement, et que le document ne soit pas versé dans les archives publiques;

d. prendre tout autre arrêté qu’il juge indiqué.

Membre(s)

Elizabeth C. Barker
Mary Tobin Oates
Mark MacKeigan
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