Détermination n° R-2020-166
DEMANDE présentée par la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) en vertu de l’article 98 de la Loi sur les transports au Canada, LC 1996, c 10 (LTC) pour déplacer une partie de la subdivision Champlain afin de permettre l’aménagement de la promenade Samuel-De Champlain sur la rive du fleuve Saint-Laurent.
QUESTIONS
[1] Pour déterminer si l’Office peut accorder l’autorisation en vertu de l’article 98 que CN demande pour déplacer une partie de sa subdivision Champlain située entre les points milliaires 2,67 et 3,88 vers les nouveaux points milliaires entre les points 2,67 et 4,16, il doit décider :
- si la Couronne s’est acquittée de son devoir de consulter les peuples autochtones qui pourraient être touchés par le déplacement, et si cette autorisation était susceptible d’avoir un effet préjudiciable sur des droits ancestraux;
- si le déplacement est convenable, compte tenu des besoins en matière de service et d’exploitation ferroviaires et des intérêts des localités qui seront touchées par la ligne de chemin de fer.
REQUÊTE D’INTERVENTION
[2] Le 15 septembre 2020, la Commission de la capitale nationale du Québec (CCNQ) a déposé une requête d’intervention dans le cadre de cette instance. L’Office accepte que la CCNQ ait un intérêt substantiel et direct dans l’instance étant donné que le déplacement de la subdivision Champlain est une composante du projet d’infrastructure à grande échelle de la CCNQ, soit le projet « Aménagement de la promenade Samuel-De Champlain ». Les présentations de la CCNQ pourraient aider l’Office dans sa détermination. L’Office accorde la requête d’intervention de la CCNQ en versant ses lettres datées du 9 septembre 2020 ainsi que du 15 septembre 2020 dans le dossier de la présente instance.
CONSTATATIONS
[3] L’Office, lorsqu’il agit au nom de la Couronne, a l’obligation de consulter les peuples autochtones lorsqu’il envisage de prendre des décisions ou des mesures susceptibles d’avoir un effet préjudiciable sur des droits ancestraux ou issus de traités, établis ou potentiels. L’Office a fait parvenir un avis du projet aux groupes autochtones qui pourraient être touchés par le déplacement, leur a remis une copie de la demande et leur a donné l’occasion d’exprimer leurs préoccupations ou de formuler des commentaires. L’Office, après avoir examiné les renseignements au dossier, conclut que les consultations ont été suffisantes pour lui permettre de rendre une décision éclairée.
[4] L’Office est convaincu que les mesures prises par CN et la CCNQ, de même que les processus de consultations et de mobilisation continus en ce qui concerne l’aménagement de la promenade Samuel-De Champlain, permettent de répondre efficacement aux préoccupations que les groupes autochtones ont soulevées. En fonction d’un examen des éléments de preuve qui lui ont été présentés, l’Office conclut que l’autorisation du déplacement n’est pas susceptible d’avoir un effet préjudiciable sur des droits ancestraux.
[5] L’Office a examiné les renseignements au dossier, dont ceux obtenus au cours de consultations publiques dans les différentes localités, y compris auprès des groupes autochtones, ainsi que les besoins en matière de service et d’exploitation ferroviaires proposés, et il est convaincu que le déplacement de la ligne de chemin de fer est convenable.
DÉTERMINATION
[6] L’Office, en vertu du paragraphe 98(2) de la LTC, autorise le déplacement de la subdivision Champlain située entre les points milliaires 2,67 et 3,88 vers les nouveaux points milliaires entre les points 2,67 et 4,16, sous réserve des conditions incluses dans la présente détermination.
[7] Les motifs détaillés de la présente détermination de l’Office suivront sous pli distinct.
CONDITIONS
Bruit
[8] CN devra prendre toutes les mesures raisonnables pour limiter les répercussions localisées que pourrait avoir sur les localités le bruit causé par la construction, les travaux et les véhicules. Pendant la phase de construction, CN devra :
- proactivement tenir informée la collectivité locale de chaque étape de la construction et des activités à être réalisées sur le site (par l’intermédiaire, notamment, d’un site Web, des avis envoyés par courriel, des lignes d’information dédiées, y compris un numéro de téléphone et une adresse courriel);
- surveiller les niveaux de bruit durant chaque étape de construction du projet. Pour ce faire, CN devra utiliser des équipements de mesure en bon état de fonctionnement et des méthodes d’analyse reconnues par des organismes de normalisation compétents. CN devra prendre des mesures efficaces pour atténuer le bruit aux endroits où les niveaux calculés dépasseront les limites établies.
Stabilité des talus
[9] CN devra prendre toutes les mesures raisonnables pour limiter les effets néfastes des travaux de construction et de l’exploitation sur la stabilité des talus et mettre en œuvre des mesures efficaces pour protéger la santé, la sécurité et le bien-être des personnes, ainsi que les propriétés et l’environnement au sein des localités de tout effet néfaste possible.
Ressources archéologiques et culturelles
[10] CN devra prendre toutes les mesures raisonnables pour veiller à ce que la construction du chemin de fer pour le déplacement de la subdivision Champlain n’entraine pas l’endommagement ou la perte de ressources archéologiques et culturelles sur son tracé. CN devra suivre le protocole d’intervention archéologique et tout autre engagement en matière d’archéologie pris par la CCNQ pour le projet « Aménagement de la promenade Samuel-De Champlain ».
Date d’entrée en vigueur
[11] La présente détermination entre en vigueur le 22 septembre 2020, date à laquelle elle a été communiquée par courriel à CN.
MOTIFS DE LA DÉTERMINATION No R-2020-166
le 22 décembre 2020
INTRODUCTION
[1] Le 12 juin 2019, CN a déposé une demande auprès de l’Office des transports du Canada (Office) en vertu du paragraphe 98(2) de la LTC pour obtenir l’approbation de déplacer une partie de la subdivision Champlain (déplacement Champlain) à Québec (Québec). Du 8 novembre 2019 au 13 mai 2020, CN a déposé des renseignements supplémentaires pour compléter sa demande, y compris les résultats de ses consultations en ligne qui ont été menées en collaboration avec la Commission de la capitale nationale du Québec (CCNQ).
[2] Du 30 juin 2020 au 12 août 2020, l’Office a mené des consultations publiques au sujet de la demande et a invité les groupes autochtones qui pourraient être touchés à soumettre leurs commentaires, y compris ceux sur les effets que le déplacement proposé pourrait avoir sur leurs intérêts. La consultation auprès des groupes autochtones a eu lieu du 6 juillet 2020 au 17 août 2020.
[3] Le 22 septembre 2020, dans la détermination n° R-2020-166 (détermination), l’Office a conclu que :
- pour le compte de la Couronne fédérale (Couronne), les consultations auprès des peuples autochtones qui pourraient être touchés par le déplacement Champlain ont été adéquates pour lui permettre de rendre une décision éclairée;
- l’approbation du déplacement Champlain n’est pas susceptible d’avoir un effet préjudiciable sur des droits ancestraux;
- le déplacement Champlain est convenable compte tenu des besoins en matière de service et d’exploitation ferroviaires et des intérêts des localités qui seront touchées par la ligne de chemin de fer.
[4] En vertu du paragraphe 98(2) de la LTC, autorise le déplacement de l’embranchement Champlain, sous réserve des conditions incluses dans la détermination. Les motifs de la détermination sont énoncés ci-dessous.
APERÇU DU DÉPLACEMENT CHAMPLAIN
[5] La subdivision Champlain permet à CN d’accéder au Port de Québec. Le déplacement Champlain permettra de rapprocher une partie de la ligne de chemin de fer existante de CN de la falaise adjacente, ce qui l’éloignera du fleuve Saint-Laurent. Il s’agira d’environ 2,4 kilomètres de nouvelle voie principale dans une nouvelle emprise ferroviaire adjacente que le Québec transférera à CN.
[6] Le déplacement Champlain permettra à CN de continuer à assurer le service dans sa subdivision Champlain et à la CCNQ de réaliser la phase 3 de son projet d’aménagement de la promenade Samuel-De Champlain, entre Côte de Sillery et Côte Gilmour à Québec (projet de réaménagement), sur les terrains actuellement occupés par l’emprise actuelle de la subdivision Champlain de CN.
[7] En 2013, le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) du Québec a mené une étude environnementale et une audience publique sur le projet de réaménagement, qui comprenait l’examen du déplacement de la voie principale de CN.
[8] Une évaluation du déplacement Champlain n’a pas été requise au titre de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (2012), LC 2012, c 19, art 52, qui a été abrogée le 28 août 2019, et une évaluation n’est pas non plus requise au titre de la Loi sur l’évaluation d’impact, LC 2019, c 28, car moins de 50 kilomètres de nouvelle emprise sont nécessaires.
QUESTIONS
[9] Pour déterminer si l’Office peut accorder l’autorisation en vertu du paragraphe 98(2), il doit décider :
- si la Couronne s’est acquittée de son devoir de consulter les peuples autochtones qui pourraient être touchés par le déplacement, et si cette autorisation était susceptible d’avoir un effet préjudiciable sur des droits ancestraux;
- si le déplacement est convenable, compte tenu des besoins en matière de service et d’exploitation ferroviaires et des intérêts des localités qui seront touchées par la ligne de chemin de fer.
1. SI LA COURONNE S’EST ACQUITTÉE DE SON DEVOIR DE CONSULTER LES PEUPLES AUTOCHTONES QUI POURRAIENT ÊTRE TOUCHÉS PAR LE DÉPLACEMENT CHAMPLAIN, ET SI CETTE AUTORISATION ÉTAIT SUSCEPTIBLE D’AVOIR UN EFFET PRÉJUDICIABLE SUR DES DROITS ANCESTRAUX
[10] L’Office, pour le compte de la Couronne, a l’obligation de consulter les peuples autochtones et, au besoin, de les accommoder lorsqu’il envisage de prendre des décisions ou des mesures susceptibles d’avoir un effet préjudiciable sur des droits ancestraux ou des intérêts, établis ou potentiels. La Couronne pourrait faire appel aux processus de l’Office pour remplir son obligation parce que l’Office peut entendre et déterminer toutes les questions pertinentes de fait et de droit avant de rendre ses décisions, et l’Office dispose de pouvoirs en matière de procédure qui lui permettent de mener des consultations et de pouvoirs de réparation qui lui permettent, par exemple, d’assortir une autorisation de conditions, dans le but d’atténuer des effets préjudiciables sur des droits.
[11] Pour déterminer si une consultation a été adéquate et quelles mesures d’accommodement peuvent être nécessaires, l’Office a tenu compte des activités de mobilisation du promoteur du projet ainsi que de ses propres consultations auprès de communautés et de groupes autochtones.
Consultations
[12] La CCNQ a consulté cinq communautés autochtones dans le cadre du projet de réaménagement, y compris le déplacement Champlain : la Nation huronne-wendat (Wendats), la Première nation innue d’Essipit, la Première nation innue de Pessamit, la Première nation des Pekuakamiulnuatsh Takuhikan et la Première nation malécite de Viger. Parmi ces groupes, seuls les Wendats ont soulevé des préoccupations à la CCNQ à propos du projet.
[13] Une fois qu’il a estimé que la demande était complète, l’Office a ciblé et contacté six groupes autochtones qui, d’après le Système d’information sur les droits ancestraux et issus de traités du gouvernement du Canada, ont établi ou revendiqué des droits ancestraux ou des intérêts dans un rayon de 100 kilomètres du déplacement Champlain, soit les cinq groupes qui avaient participé aux consultations de la CCNQ et les Mohawks de Kahnawá:ke (Mohawks).
[14] Le 6 juillet 2020, l’Office a invité les Wendats et les Mohawks à participer aux consultations de l’Office, par l’entremise de la décision no LET-R-48-2020. L’Office leur a fourni une copie de la demande de CN, les a informés du rôle de l’Office dans l’examen et l’approbation du projet de déplacement de la ligne de chemin de fer et les a invités à fournir leurs commentaires d’ici le 17 août 2020.
[15] De plus, le 6 juillet 2020, l’Office a rendu la décision no LET-R-49-2020 pour informer les quatre autres groupes autochtones concernés de l’examen de l’Office et pour leur indiquer que, dans le cadre de ses délibérations, l’Office examinerait leurs confirmations écrites à la CCNQ selon lesquelles ils n’ont aucune préoccupation concernant le projet.
SUJETS DE PRÉOCCUPATION
[16] Lors des consultations de la CCNQ, les Wendats et la Première Nation innue d’Essipit ont exprimé de l’intérêt à l’égard de tout patrimoine archéologique associé au site du projet de réaménagement. La CCNQ a entrepris une étude archéologique du secteur du projet en 2010 qui a permis de relever des zones particulières ayant un potentiel archéologique préhistorique et historique qui pourraient être touchées par le projet de réaménagement.
[17] Le 1er mai 2018, les Wendats ont fait part de leurs préoccupations concernant les répercussions potentielles du projet de réaménagement sur leur patrimoine archéologique et ont manifesté leur intérêt à devenir membre du comité d’interprétation de la CCNQ. Les Wendats ont également souligné l’importance pour leur communauté d’avoir un accès permanent au fleuve Saint-Laurent.
[18] Le 22 janvier 2019, la CCNQ a confirmé aux Wendats que ces derniers participeront à toutes les activités archéologiques et découvertes archéologiques potentielles liées au projet et qu’ils conserveront leur accès permanent au fleuve. La CCNQ a également confirmé à l’Office qu’un protocole d’intervention archéologique avec les Wendats était en place, lequel assure la présence continue d’un représentant des Wendats sur le terrain, avec l’équipe archéologique du gouvernement provincial, pour suivre le processus d’excavation du projet.
[19] Le 24 août 2020, le grand chef des Wendats a écrit à l’Office pour exprimer son soutien au déplacement Champlain, soulignant que la CCNQ avait répondu aux préoccupations des Wendats et qu’elle avait proposé des mesures d’accommodement qui leur étaient acceptables.
[20] Bien que la Première nation innue d’Essipit n’ait pas soulevé de préoccupations concernant le projet, elle a dit souhaiter être informée de toute découverte archéologique dans le secteur, et la CCNQ a accepté cette demande.
[21] Aucun autre groupe autochtone n’a fait part à l’Office de préoccupations concernant le déplacement Champlain.
Conclusion
[22] Après avoir examiné ces éléments de preuve, l’Office a conclu que le processus de consultation auprès des groupes autochtones qui pourraient être touchés avait été suffisant pour lui permettre de rendre une décision éclairée.
[23] En se fondant sur les éléments de preuve dont il dispose, l’Office a conclu que le déplacement Champlain n’était pas susceptible d’entraîner un effet préjudiciable sur des droits ancestraux. L’Office a été convaincu que les mesures prises par la CCNQ jusqu’à ce jour, de même que les processus continus de mobilisation et de consultation en ce qui concerne le déplacement Champlain, permettent de répondre efficacement aux préoccupations soulevées. Étant donné l’importance que les groupes autochtones accordent à toute découverte archéologique pendant le processus de construction, l’Office a exigé que CN prenne toutes les mesures raisonnables pour veiller à ce que la construction du chemin de fer n’entraîne pas l’endommagement ou la perte de ressources archéologiques et culturelles sur son tracé. L’Office a également exigé que CN suive le protocole d’intervention archéologique et tout autre engagement en matière d’archéologie pris par la CCNQ pour le projet de réaménagement.
2. SI LE DÉPLACEMENT EST CONVENABLE, COMPTE TENU DES BESOINS EN MATIÈRE DE SERVICE ET D’EXPLOITATION FERROVIAIRES ET DES INTÉRÊTS DES LOCALITÉS QUI SERONT TOUCHÉES PAR LA LIGNE DE CHEMIN DE FER
[24] Le paragraphe 98(2) de la LTC énonce que :
Sur demande de la compagnie, l’Office peut accorder l’autorisation s’il juge que l’emplacement de la ligne est convenable, compte tenu des besoins en matière de service et d’exploitation ferroviaires et des intérêts des localités qui seront touchées par celle-ci.
[25] Pour déterminer si l’emplacement du déplacement Champlain était convenable, l’Office a examiné la demande de CN et les documents supplémentaires déposés concernant les besoins en matière de service et d’exploitation ferroviaires, ainsi que les commentaires des peuples autochtones et du public concernant les besoins en matière de service et d’exploitation ferroviaires et les intérêts des localités qui seront touchées par la ligne de chemin de fer.
Emplacement de la ligne de chemin de fer
[26] Le déplacement Champlain a pour but de permettre à CN de continuer à assurer un service jusqu’au Port de Québec de manière à répondre aux besoins opérationnels tout en facilitant le projet de réaménagement. L’Office accepte la conclusion du BAPE selon laquelle le déplacement de la ligne de chemin de fer est souhaitable et profitable pour améliorer l’accès au fleuve.
[27] Le déplacement Champlain consistera à construire une nouvelle voie principale d’environ 2,4 kilomètres pour déplacer une partie de la subdivision Champlain existante de CN entre les points milliaires 2,67 et 3,88 vers une nouvelle emprise ferroviaire. La nouvelle ligne de chemin de fer déviera de l’emprise existante de CN au point milliaire 2,67, et se dirigera vers l’est en direction du Port de Québec pour revenir à son emprise existante au point milliaire 4,16. Les zones situées en dehors de cette partie de la subdivision Champlain ne seront pas modifiées par le projet de réaménagement.
[28] Plusieurs options concernant le tracé du déplacement Champlain ont été envisagées lors de la planification du projet de réaménagement. CN a proposé le tracé autorisé par le gouvernement du Québec, qui réduit l’impact sur les terrains marécageux. Le tracé de cette nouvelle emprise est situé sur des terrains que CN recevra du Québec aux fins de la construction et de l’exploitation de la ligne de chemin de fer et passe entre la falaise adjacente et le fleuve Saint-Laurent. La topographie locale se caractérise par une plaine unie délimitée par une falaise abrupte au nord et par le fleuve au sud. Le fleuve Saint-Laurent, situé au sud de la nouvelle emprise, se trouve environ entre 65 mètres et 285 mètres de la limite sud de l’emprise de CN.
[29] L’Office accepte l’alignement proposé par CN, car le corridor entre la falaise et le fleuve est étroit et ne permet pas de trouver d’autres itinéraires.
Intérêts des localités
[30] Les intérêts des localités dont l’Office tient compte pour décider s’il autorise la construction d’une ligne de chemin de fer comprennent les préoccupations des résidents, des propriétaires fonciers, des propriétaires d’entreprises et des peuples autochtones dans les quartiers, les collectivités, les cantons et les municipalités qui pourraient être touchés par l’emplacement de cette ligne de chemin de fer ou par des activités liées à sa construction ou à son exploitation.
[31] Il est question de l’examen des intérêts des peuples autochtones par l’Office à la première question ci-dessus.
Consultations
[32] Au cours des phases de planification du projet de réaménagement, les localités ont eu l’occasion d’exprimer leurs préoccupations au sujet du déplacement Champlain dans le cadre des activités de mobilisation du public menées par la CCNQ; lors des audiences publiques du BAPE en 2013;dans le cadre des consultations en ligne menées par la CCNQ et CN, du 27 mars 2020 au 10 avril 2020 et pendant la période de consultation publique de l’Office, du 30 juin 2020 au 12 août 2020.
[33] La consultation en ligne menée par la CCNQ et CN au printemps 2020 portait précisément sur l’emplacement de la ligne de chemin de fer. La consultation en ligne a été diffusée sur le site Web de la CCNQ et annoncée dans le Journal de Québec et par des envois postaux à 1 372 domiciles dont le code postal commence par G1S et G1T. Selon CN, cinq résidents et le Syndicat de copropriété Le Châtelain (Châtelain) ont envoyé des commentaires.
[34] L’Office a sollicité les commentaires du public au sujet de la demande de CN par l’entremise d’un avis publié le 30 juin 2020 dans le Journal de Québec. L’Office n’a reçu aucun commentaire.
SUJETS DE PRÉOCCUPATION
[35] Au cours de la consultation en ligne menée par la CCNQ et CN, des préoccupations ont été soulevées concernant les arbres fruitiers, les voies piétonnières et les escaliers pour permettre aux piétons de se rendre de la falaise au secteur riverain réaménagé ainsi que la sécurité aux passages à niveau existants. Les commentaires relatifs à la plantation d’arbres et aux passages pour piétons sur la ligne de chemin de fer ont été soumis à la CCNQ pour examen, car ces questions ne font pas partie du projet de déplacement Champlain dont CN est responsable. CN a fait remarquer que le passage à niveau qui a suscité des préoccupations se trouve en dehors de la zone du projet de déplacement Champlain. L’Office n’a donc pas examiné ce point dans le cadre de la présente demande.
[36] Les localités ont également fait part de leurs préoccupations concernant la stabilité de la pente et le bruit et les vibrations. Ces préoccupations ont été examinées, et les conclusions de l’Office à leur sujet sont établies ci-dessous.
Besoins en matière de service et d’exploitation ferroviaires
[37] Les « besoins en matière de service et d’exploitation ferroviaires » sont ceux qui permettent à une compagnie de chemin de fer d’offrir des services à ses clients et concernent des enjeux tels que l’utilisation efficace du matériel, de l’infrastructure et des équipes ferroviaires existants, ainsi que les besoins opérationnels, notamment les pentes de la voie, pour permettre le transport du volume de trafic offert.
SERVICES FERROVIAIRES
[38] Le BAPE a examiné s’il était nécessaire de conserver le tracé, compte tenu de la présence d’un tunnel ferroviaire appartenant à Chemins de fer Québec-Gatineau (CFQG), et a constaté qu’il était toujours en service. L’Office reconnaît qu’il est important de maintenir des accès multiples au Port de Québec et accepte que, dans le cadre de son réseau, CN doive maintenir son propre accès au port plutôt que de se fier au tunnel de CFQG.
[39] Les trains circulant dans la subdivision Champlain de CN desservent des clients sur la propriété du Port de Québec et transportent actuellement différentes marchandises, qui peuvent inclure des marchandises dangereuses. L’Office souligne que le transport des marchandises dangereuses est réglementé par Transports Canada. Le déplacement Champlain ne devrait pas changer le type de marchandises transportées sur la ligne de chemin de fer existante, y compris les marchandises dangereuses. CFQG a accepté d’effectuer les manœuvres de CN au Port de Québec au moyen de son tunnel ferroviaire pendant la durée de la phase de construction du déplacement Champlain.
[40] L’Office conclut que CN et la CCNQ ont proposé des mesures raisonnables pour régler les problèmes de sécurité publique et de sûreté qui pourraient survenir, étant donné que le projet de réaménagement devrait attirer le public dans le secteur riverain à proximité de la ligne de chemin de fer. Notamment, la CCNQ s’est engagée à installer une clôture du côté sud le long de la ligne de chemin de fer proposée, comme mesure de sécurité, et à installer une clôture du côté nord de la ligne de chemin de fer si, après la construction de la ligne de chemin de fer, une clôture est nécessaire pour des raisons de sécurité.
ACTIVITÉS FERROVIAIRES
[41] CN a indiqué qu’actuellement, environ six trains de marchandises empruntent la ligne de chemin de fer existante par semaine. L’Office accepte la présentation de CN selon laquelle le volume, la longueur et la vitesse des trains ne devraient pas changer une fois le déplacement Champlain terminé.
MODIFICATIONS À L'INFRASTRUCTURE ET AU SOL
[42] Le déplacement Champlain nécessitera le démantèlement de la ligne de chemin de fer existante ainsi que de toutes les infrastructures associées et la reconstruction au nord de son emplacement actuel. Le projet de réaménagement prévoit également le déplacement d’une partie du boulevard Champlain (route 136) immédiatement adjacent à la ligne de chemin de fer déplacée afin de permettre l’amélioration de la zone littorale pour une utilisation récréative publique.
[43] L’Office note qu’il n’y a pas de cours d’eau situés dans les limites du projet de réaménagement, par conséquent, aucune modification ne sera apportée aux étangs, chenaux, nouveaux tracés de chenaux, cours d’eau ou canaux.
[44] CN a déposé le plan no 091-50992-01 et les dessins de la série 800 illustrant les infrastructures et les modifications de terrain proposées. Après avoir examiné ces documents, l’Office constate qu’aucune activité d’ingénierie extraordinaire n’est requise. Les murs antibruit ne font pas partie de la construction prévue, mais l’Office aborde les problèmes de bruit potentiels ci-dessous. L’Office est convaincu que l’infrastructure proposée est appropriée, y compris les systèmes de signaux et de communication, les passages à niveau, les mesures de sécurité, les systèmes de drainage routier et ferroviaire, les franchissements par desserte, les ponceaux, les remblais de chemin de fer, les dispositifs de drainage et le matériel de voie.
ACTIVITÉS DE CONSTRUCTION
[45] CN a indiqué que les travaux de construction commenceront dès que possible après que l’Office ait approuvé le déplacement Champlain et seront achevés d’ici la fin de 2023. Les activités de construction devraient avoir lieu entre les mois d’avril et de décembre, principalement pendant la journée, bien que certains travaux puissent avoir lieu en soirée ou tôt le matin pour coïncider avec les marées. La CCNQ et CN se sont départagé les responsabilités de divers éléments du projet de réaménagement et du déplacement Champlain. Notamment, CN ne sera pas responsable de la démolition et de la reconstruction du saut-de-mouton où le boulevard Champlain passe sur la ligne de chemin de fer.
[46] Seuls des travaux préliminaires minimes seront nécessaires, car la ligne de chemin de fer sera déplacée dans une zone déjà aménagée. CN procédera à l’enlèvement des voies par rail ou par camion et conformément à la réglementation fédérale. Les matériaux de construction, tels que les nouvelles voies, les traverses et autres matériaux de voie, seront livrés par wagons à la gare de triage de CN ou sur le site du projet, le plus près possible des activités de construction. Les camions transportant des matériaux de construction sont censés emprunter les voies publiques.
[47] Comme c’est le cas pour les travaux d’entretien régulier sur l’ensemble du réseau de CN, les nouvelles voies seront disposées le long de la voie existante dans la partie de l’emprise de l’embranchement Champlain, en dehors des limites du projet, car la ligne de chemin de fer ne sera pas exploitée pendant la durée des travaux. À partir de ce point, les rails seront acheminés par de l’équipement circulant dans l’emprise de l’embranchement jusqu’au site d’installation au fur et à mesure de l’avancement de la construction de la nouvelle voie.
[48] Les traverses devraient être livrées à la gare de triage de CN à Sainte-Foy et seront ensuite acheminées par camion sur le chantier en utilisant les accès routiers habituels sur les routes locales. Ces camions seront placés dans l’emprise, mais ils seront triés à Sainte-Foy pour réduire le volume de camions présents en même temps dans la zone du réalignement.
[49] CN a déclaré que le ballast nécessaire pour élever la ligne de chemin de fer au niveau requis sera apporté par train sur la nouvelle voie, puisqu’on utilise habituellement cette méthode pour la construction de nouvelles voies.
[50] Le battage de pieux peut être nécessaire pour la construction du saut-de-mouton près du point milliaire 3,80. Des activités de dynamitage ne sont pas prévues pour le déplacement Champlain. Au besoin, ces activités seraient entreprises par des entrepreneurs spécialisés qui seront engagés par la CCNQ.
[51] Bien que le déplacement Champlain ne soit pas situé dans une zone à forte densité de population, la clôture proposée comme mesure de sécurité peut être mise en place le long de la ligne de chemin de fer pendant la construction afin de limiter l’accès à la zone de construction. La CCNQ sera responsable de l’installation si une clôture est nécessaire.
[52] À la lumière de ce qui précède, l’Office conclut que les activités de construction sont appropriées pour la construction ferroviaire standard.
BRUIT ET VIBRATIONS
[53] Des niveaux déraisonnables de bruit et de vibrations ferroviaires résultant de la construction et de l’exploitation d’une ligne de chemin de fer peuvent nuire à la santé, à la sécurité et au bien-être des personnes, ainsi qu’aux propriétés et à l’environnement. L’Office souligne que le représentant du Châtelain et d’autres résidents vivant actuellement au sommet de la falaise surplombant le déplacement Champlain ont fait part de leurs préoccupations à la CCNQ et à CN en ce qui concerne le bruit et les vibrations des trains et des activités de construction.
[54] Dans le cadre de sa demande, CN a déposé une étude sur le bruit et les vibrations (étude) associée au projet de réaménagement qui a pris en compte les niveaux de bruit des activités d’exploitation ferroviaire une fois le déplacement Champlain terminé. Cette étude a été réalisée en utilisant la méthodologie suivante :
- des levés sonores pris 24 heures par jour à quatre emplacements dans des zones résidentielles proches;
- des relevés sonores du passage d’un train à proximité de la ligne de chemin de fer existante;
- l’élaboration d’un modèle informatique pour le calcul de la propagation du son à l’aide du logiciel CadnaA 2.6;
- des simulations de la contribution sonore de la voie ferrée existante et du projet proposé;
- des mesures de vibrations et des calculs de propagation des vibrations de la ligne de chemin de fer existante.
[55] L’Office conclut que les hypothèses appliquées dans l’étude ainsi que les méthodes et la modélisation utilisées sont raisonnables. L’Office accepte la conclusion de l’étude selon laquelle aucune mesure de réduction du bruit n’est nécessaire pour l’exploitation des trains. En ce qui concerne les préoccupations particulières soulevées par les résidents, l’Office est convaincu que le bruit et les vibrations pendant l’exploitation de la ligne de chemin de fer resteront les mêmes pour les résidences du secteur de Côte de Sillery. Pour les résidences situées dans les secteurs des avenues James-LeMoine et Maire‑Beaulieu, le déplacement de la ligne de chemin de fer près de la falaise devrait entraîner une réduction du niveau sonore généré par le passage des trains.
[56] L’étude a évalué la propagation des vibrations générées par le passage des trains du déplacement Champlain près de Côte de Sillery. Des mesures de vibrations ont été effectuées à 5 mètres et à 10 mètres de l’axe central des voies ferrées existantes. L’Office note que les résultats de ces mesures ont démontré qu’à des distances de 10 mètres ou plus des voies ferrées, les niveaux de vibration devraient être inférieurs à 0,14 mm/s, ce qui représente le seuil maximal acceptable selon les Lignes directrices applicables aux nouveaux aménagements à proximité des activités ferroviaires de la Fédération canadienne des municipalités et de l’Association des chemins de fer du Canada, datées de mai 2013. Étant donné que les résidences les plus proches seront situées à plus de 60 mètres de la future ligne de chemin de fer, l’Office conclut que le seuil maximal sera conforme aux normes de vibration établies.
[57] L’Office note que les effets sonores de la construction sur les localités n’ont pas été évalués parce que les plans de construction n’étaient pas disponibles au moment où la CCNQ a étudié les problèmes potentiels liés au bruit et aux vibrations. L’Office ne prévoit pas d’effets sonores au-delà des inconvénients normaux de la construction, car les activités de construction utiliseront des méthodes normalisées qui comprennent des techniques bien établies d’atténuation du bruit. Les activités de construction auront lieu principalement pendant le jour, et le site du projet n’est pas situé dans une zone à forte densité de population.
[58] À la lumière des activités de construction qui ont été identifiées, l’Office a exigé de CN qu’elle prenne toutes les mesures raisonnables pour limiter les effets sonores localisés des activités de construction, des travaux et des véhicules sur les localités. Pendant la phase de construction, CN est expressément tenu de :
- proactivement tenir informée la collectivité de chaque étape de construction et des activités à être réalisés sur le site (par l’entremise, notamment, d’un site Web, des avis envoyés par courriel, des lignes d’information dédiées, y compris un numéro de téléphone et une adresse courriel);
- surveiller les niveaux de bruit à chaque étape de construction du projet. Pour ce faire, CN devra utiliser des équipements de mesure en bon état de fonctionnement et des méthodes d’analyse reconnus par les organismes de normalisation compétents. CN devra prendre des mesures efficaces pour atténuer le bruit aux endroits où les niveaux calculés dépasseront les limites établies.
STABILITÉ DU TALUS
[59] La construction et l’exploitation de la ligne de chemin de fer déplacée risquent de nuire à la stabilité du talus de la falaise abrupte au nord du déplacement Champlain, ce qui pourrait avoir des conséquences néfastes pour les localités. Les résidents qui vivent actuellement au sommet de la falaise surplombant le déplacement Champlain ont exprimé des inquiétudes quant à la stabilité du talus.
[60] CN et la CCNQ ont proposé des séquences de travail, des méthodes d’excavation, des techniques de consolidation du roc et des mesures de protection du roc superficielles afin d’assurer la stabilité du talus adjacent à l’emprise ferroviaire. Notamment, CN compte sur les mesures que la CCNQ prendra dans le cadre du projet de réaménagement pour protéger la falaise adjacente contre l’effondrement. Ces mesures comprennent l’utilisation de boulons à rocher ancrés dans le talus pour l’installation d’une clôture en treillis métallique sur la surface de la falaise qui fournira une résistance au glissement en
cisaillement, ou « glissement », de la paroi rocheuse et retiendra toute roche se détachant, l’empêchant de tomber ou de glisser le long de la falaise sur les voies en dessous.
[61] L’Office reconnaît que le système proposé par la CCNQ a démontré qu’il améliorait la stabilité du talus, et il est convaincu qu’il permettra de faire face aux risques identifiés. En outre, dans la détermination, l’Office a exigé que CN prenne toutes les mesures raisonnables pour limiter les effets néfastes des travaux de construction et de l’exploitation sur la stabilité du talus. L’Office a également exigé que CN mette en œuvre des mesures efficaces pour protéger la santé, la sécurité et le bien-être des personnes, ainsi que les propriétés et l’environnement dans les localités de tout effet néfaste possible.
CONCLUSION
[62] À la lumière de ce qui précède, l’Office a conclu que le déplacement Champlain est raisonnable, compte tenu des besoins en matière de service et d’exploitation ferroviaires ainsi que des intérêts des localités qui seront touchées par la ligne de chemin de fer, et sous réserve des conditions incluses dans la détermination.
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