Décision n° 122-AT-A-2003

le 6 mars 2003

Suivi - décision no 664-AT-A-2006

le 6 mars 2003

DEMANDE déposée par Genevieve Dinwoodie en vertu des paragraphes 172(1) et (3) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, concernant le niveau d'assistance qu'on lui a offert lors de ses correspondances à l'aéroport international de Vancouver au cours de son voyage aller-retour avec Air Canada entre Edmonton (Alberta), Canada, et Dallas, Texas, États-Unis, le 11 décembre 2000 et le 3 janvier 2001.

Référence no U 3570/01-28


DEMANDE

Le 16 mars 2001, Genevieve Dinwoodie a déposé auprès de l'Office des transports du Canada (ci-après l'Office) la demande énoncée dans l'intitulé.

Air Canada a déposé sa réponse à la demande le 26 avril 2001 et des renseignements supplémentaires le 27 avril 2001. Mme Dinwoodie a déposé sa réplique à la réponse du transporteur le 10 mai 2001.

Aux termes du paragraphe 29(1) de la Loi sur les transports au Canada (ci-après la LTC), l'Office est tenu de rendre sa décision au plus tard 120 jours après la date de réception de la demande, sauf s'il y a accord entre les parties pour une prolongation du délai. Dans le cas présent, les parties ont convenu de prolonger le délai pour une période indéterminée.

QUESTION

L'Office doit déterminer si les éléments suivants ont constitué des obstacles abusifs aux possibilités de déplacement de Mme Dinwoodie et, le cas échéant, quelles mesures correctives devraient être prises :

  1. Le niveau d'assistance qu'Air Canada a fourni à Mme Dinwoodie lors de ses correspondances à l'aéroport international de Vancouver le 11 décembre 2000 et le 3 janvier 2001.
  2. L'absence d'un fauteuil roulant à l'arrivée du vol de retour de Mme Dinwoodie à Vancouver le 3 janvier 2001 afin de l'aider à se rendre aux douanes et à la porte d'embarquement pour sa correspondance.

FAITS

Mme Dinwoodie a 89 ans et une mobilité réduite. Elle a besoin d'assistance avec fauteuil roulant pour se déplacer dans les aéroports puisqu'elle a de la difficulté à marcher. Mme Dinwoodie a voyagé d'Edmonton à Dallas via Vancouver le 11 décembre 2000 et est revenue le 3 janvier 2001.

Le module 1 du programme de formation d'Air Canada en matière de services aux clients ayant une déficience qui porte sur la sensibilisation établit les procédures et les directives précises que doivent suivre les employés qui ont la responsabilité de fournir de l'assistance aux personnes ayant une déficience. L'article 4.2 de ce programme de formation traite des mesures à suivre afin de fournir un service de qualité qui réponde aux besoins des personnes à mobilité réduite et il y est prévu, en partie, ce qui suit :

Au comptoir et au point d'embarquement :

- [traduction] Si vous poussez une personne dans un fauteuil roulant et que vous devez laisser la personne seule, évitez de placer le client face à un mur. Dites lui à quel moment vous allez revenir ou quelles seront les prochaines étapes.

Air Canada publie une brochure d'information intitulée Nous offrons des services spéciaux pour les besoins particuliers. Cette brochure affirme, en partie que : « Même si nous vous demandons un préavis de 48 heures, nous ferons tout en notre pouvoir pour accéder aux demandes faites à l'intérieur de ce délai. »

Le 11 décembre 2000, au moment de l'enregistrement à Edmonton, Mme Dinwoodie a demandé de l'assistance avec fauteuil roulant à Vancouver pour se rendre aux douanes et à la porte d'embarquement pour sa correspondance vers Dallas. À son arrivée à Vancouver, un agent l'a amené dans une voiturette jusqu'à l'aire de récupération des bagages. Lorsque Mme Dinwoodie est arrivée à l'aire de récupération des bagages, l'agent lui a dit d'attendre et que quelqu'un viendrait l'aider.

Pendant qu'elle attendait, Mme Dinwoodie a indiqué à l'agent au bureau de sécurité qu'elle avait peur de manquer sa correspondance vers Dallas. L'officier de sécurité a suggéré qu'elle parle à l'agent d'Air Canada près de l'aire des bagages. Lorsque l'agent a réalisé le peu de temps que Mme Dinwoodie avait pour prendre sa correspondance, il a trouvé une voiturette, pris les bagages et l'a escorté jusqu'aux douanes. Après s'être rendu aux douanes, l'agent est parti et Mme Dinwoodie a été laissée à elle-même pour trouver la bonne porte d'embarquement. Mme Dinwoodie a trouvé son chemin jusqu'à la salle d'attente de la correspondance à temps pour embarquer sur le vol.

Pour le vol de retour du 3 janvier 2001, Mme Dinwoodie devait voyager de Dallas à Edmonton avec une escale de 67 minutes à Vancouver avant de prendre une correspondance vers Edmonton, qui devait partir à midi. Le 2 janvier 2001, un jour avant le vol de retour, le fils de Mme Dinwoodie a appelé Air Canada et a demandé de l'assistance pour Mme Dinwoodie au moment de l'arrivée du vol à Vancouver. Les employés d'Air Canada ont comme directive, une fois avisés des besoins du passager, de mettre à jour le dossier passager (ci-après le DP). Cependant, cela n'a pas été effectué dans le cas de Mme Dinwoodie. Par conséquent, le système de réservation électronique d'Air Canada ne rendait pas compte de la demande de Mme Dinwoodie pour de l'assistance avec fauteuil roulant sur de longues distances et les employés de Vancouver n'ont pas été avisés à l'avance.

Le vol no 3189 entre Dallas et Vancouver, qui devait partir de Dallas à 8 h 25 a été retardé et est arrivé à Vancouver plus tard que prévu. À l'arrivée du vol à Vancouver, il n'y avait pas de fauteuil roulant pour aider Mme Dinwoodie à se rendre aux douanes et à la porte d'embarquement pour sa correspondance. Lorsque l'agent d'Air Canada est venu à la rencontre de Mme Dinwoodie, l'agent a dû chercher l'emplacement de l'ascenseur dans la zone d'arrivée d'Air Canada et Mme Dinwoodie a dû marcher une longue distance avant qu'ils arrivent à un escalier roulant sur un autre niveau où un fauteuil roulant était disponible.

Après avoir été amenée en fauteuil roulant aux douanes et à l'aire de récupération des bagages, on a informé Mme Dinwoodie qu'elle avait manqué sa correspondance vers Edmonton et qu'un nouveau billet devait être émis. À ce moment, l'agent est parti et Mme Dinwoodie a été laissée seule pour trouver son chemin jusqu'à la prochaine porte d'embarquement. Mme Dinwoodie a pris le vol suivant à destination d'Edmonton vers 13 h 35. Parce que Mme Dinwoodie a manqué sa correspondance, une amie qui devait la rencontrer à Edmonton a dû payer 5 $ de stationnement en l'attendant. Son amie a aussi téléphoné au fils de Mme Dinwoodie à Dallas pour savoir où elle se trouvait. Mme Dinwoodie a pris un taxi de l'aéroport jusque chez elle, ce qui a coûté 42 $.

POSITIONS DES PARTIES

Mme Dinwoodie soutient que le fait qu'elle ait été laissée seule le 11 décembre 2000 lorsqu'elle est arrivée à l'aire de récupération des bagages et aux douanes indique que les employés sont mal formés. Mme Dinwoodie croit que le nouvel aéroport international de Vancouver est problématique pour les voyageurs internationaux âgés. Mme Dinwoodie affirme que même si l'affichage dans la nouvelle partie de l'aérogare indiquant l'emplacement des aires de départ peut être considéré intéressant, il ne comprend pas d'information directionnelle. Mme Dinwoodie ajoute que si elle avait pris plus de temps à trouver le salon d'attente, elle aurait manqué sa correspondance vers Dallas.

Mme Dinwoodie est d'avis que la situation était encore pire pour son vol de retour le 3 janvier 2001. Mme Dinwoodie affirme que l'agent qui a eu de la difficulté à trouver l'ascenseur est un autre exemple d'un employé mal formé. Elle explique que tous les déplacements qu'elle a dû effectuer pour atteindre le deuxième escalier roulant lui ont causé des ampoules à son pied gauche. Mme Dinwoodie croit que l'arrivée retardée du vol no 3189 est un facteur qui a grandement contribué au fait qu'elle a manqué son vol de correspondance. Elle affirme que selon Air Canada le vol est arrivé à Vancouver à 11 h 28, 35 minutes plus tard que prévu. Mme Dinwoodie suggère qu'un enquête soit effectuée sur le temps réel d'arrivée.

Mme Dinwoodie remet aussi en question les procédures d'Air Canada qui consistent à fournir l'assistance demandée par les personnes ayant une déficience après le débarquement de tous les autres passagers et non au moment de l'arrivée du vol. Selon elle, les retards comme celui qu'elle a subi augmentent la possibilité de manquer des correspondances. Mme Dinwoodie soutient qu'Air Canada devrait lui rembourser les dépenses qu'elle a engagées en conséquence de la correspondance manquée. Elle demande aussi une compensation financière pour les inconvénients et la détresse qu'elle a subis en raison du niveau inadéquat d'assistance qu'on lui a fourni au cours de son voyage aller-retour entre Edmonton et Dallas.

Air Canada mentionne que le 11 décembre 2000, Mme Dinwoodie a seulement demandé de l'assistance à son départ d'Edmonton au moment de l'enregistrement. Air Canada explique que puisque la dotation en personnel affecté à de tels services à l'aéroport est établie en fonction du nombre de demande de services spéciaux reçues, elle invite les clients à communiquer leurs besoins 48 heures avant le départ de leur vol afin de permettre au transporteur de tout planifier à l'avance.

Air Canada souligne que même si elle fait de son mieux pour répondre aux demandes de services faites moins de 48 heures avant le départ des vols, elle ne peut, dans de telles circonstances, garantir la fourniture du service demandé. Air Canada ajoute que lorsqu'elle connaît les besoins de ses clients à l'avance, elle peut offrir un service supérieur à ses clients.

À cet égard, Mme Dinwoodie croit qu'Air Canada la blâme pour le service médiocre qu'elle a reçu. Mme Dinwoodie soutient que le grand public ne connaît pas l'exigence de l'avis de 48 heures d'Air Canada et que les passagers ne devraient pas être blâmés s'ils ne se conforment pas à cette règle. Air Canada affirme que Mme Dinwoodie a reçu de l'assistance de son personnel même s'il ne s'agissait pas du niveau auquel elle s'attendait.

En ce qui concerne les difficultés éprouvées par son agent le 3 janvier 2001 pour trouver l'ascenseur et déterminer le chemin le plus direct au salon d'attente, Air Canada mentionne qu'elle a été incapable d'identifier l'agent qui a fourni de l'assistance à Mme Dinwoodie. Cependant, elle croit que le problème était lié aux travaux de construction qui avaient lieu à l'aérogare des vols intérieurs de l'aéroport international de Vancouver au moment du voyage. Air Canada explique qu'à cause des différentes phases de construction, ses voiturettes ne pouvaient pas, temporairement, accéder aux ascenseurs. Air Canada indique qu'avec l'arrivée retardée du vol no 3189, Mme Dinwoodie n'avait plus le temps minimum requis pour une correspondance transfrontalière.

En réponse aux préoccupations soulevées par Mme Dinwoodie sur sa politique de débarquement, Air Canada explique que la raison pour laquelle elle demande que les personnes ayant une déficience restent dans leur siège jusqu'à ce que tous les autres passagers soient débarqués est de permettre l'identification immédiate, par ses employés, des personnes qui ont besoin d'assistance et de fournir plus de temps et d'espace pour procéder au débarquement de la personne. Pour ce qui est de l'affichage et des directions dans la nouvelle partie de l'aéroport indiquant l'emplacement des aires de départ, Air Canada mentionne que son service Solutions clientèle a transmis les commentaires de Mme Dinwoodie à l'administration de l'aéroport international de Vancouver à des fins d'examen. Air Canada ajoute que son service Solutions clientèle remettra à Mme Dinwoodie un certificat de voyage de 50 $ pour couvrir les dépenses qu'elle a engagées en conséquence de sa correspondance manquée.

Air Canada regrette de ne pas avoir été capable de répondre aux attentes de Mme Dinwoodie après qu'elle et son fils aient communiqué ses besoins.

ANALYSE ET CONSTATATIONS

Pour en arriver à ses constatations, l'Office a tenu compte de tous les éléments de preuve soumis par les parties au cours des plaidoiries.

La demande doit être présentée par une personne ayant une déficience ou en son nom. Mme Dinwoodie a 89 ans et une mobilité réduite. Elle est donc une personne ayant une déficience aux fins de l'application des dispositions d'accessibilité de la LTC.

Pour déterminer s'il existe un obstacle abusif aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience au sens du paragraphe 172(1) de la LTC, l'Office doit d'abord déterminer si les possibilités de déplacement de la personne qui présente la demande ont été restreintes ou limitées par un obstacle. Le cas échéant, l'Office doit alors décider si l'obstacle était abusif. Pour répondre à ces questions, l'Office doit tenir compte des circonstances de l'affaire dont il est saisi.

Les possibilités de déplacement ont-elles été restreintes ou limitées par un obstacle ?

L'expression « obstacle » n'est pas définie dans la LTC, ce qui donne à penser que le Parlement ne voulait pas limiter la compétence de l'Office compte tenu de son mandat d'éliminer les obstacles abusifs dans le réseau de transport de compétence fédérale. De plus, le terme « obstacle » a un sens large et s'entend habituellement d'une chose qui entrave le progrès ou la réalisation.

Pour déterminer si une situation constitue ou non un « obstacle » aux possibilités de déplacement d'une personne ayant une déficience dans un cas donné, l'Office se penche sur les déplacements de cette personne qui sont relatés dans la demande. Dans le passé, l'Office a conclu qu'il y avait eu des obstacles dans plusieurs circonstances différentes. Par exemple, dans certains cas des personnes n'ont pas pu voyager, d'autres ont été blessées durant leurs déplacements (notamment quand l'absence d'installations convenables durant le déplacement affecte la condition physique du passager) et d'autres encore ont été privées de leurs aides à la mobilité endommagées pendant le transport. De plus, l'Office a identifié des obstacles dans les cas où des personnes ont finalement été en mesure de voyager, mais les circonstances découlant de l'expérience ont été telles qu'elles ont miné leur sentiment de confiance, de dignité, de sécurité, situation qui pourrait décourager ces personnes de voyager à l'avenir.

Le cas présent

L'Office reconnaît les préoccupations de Mme Dinwoodie à propos de l'arrivée retardée du vol no 3189 d'Air Canada à Vancouver et du fait qu'elle a manqué son vol de correspondance.

Bien qu'il convienne que les retards de vols causent des ennuis à tous les passagers, l'Office fait observer que les répercussions d'un tel retard sur une personne qui, comme Mme Dinwoodie, a une mobilité réduite et besoin d'assistance avec fauteuil roulant peuvent être plus importantes, surtout lorsque cette personne est en transit et que le temps disponible pour faire la correspondance est limité. L'Office estime donc que, dans de telles circonstances, le transporteur a la responsabilité de faire le nécessaire pour minimiser les inconvénients qu'un tel retard pourrait causer à une personne ayant une déficience. Cependant, dans la présente affaire, l'Office constate qu'étant donné le temps dont disposait Mme Dinwoodie, il lui était impossible de prendre son vol de correspondance. L'Office n'en tiendra donc pas compte dans son examen de la présente affaire en vertu des paragraphes 172(1) et (3) de la LTC.

1. Le niveau d'assistance fourni à Mme Dinwoodie

D'après les renseignements au dossier, Mme Dinwoodie a une mobilité réduite et nécessite une assistance avec fauteuil roulant. L'Office note qu'Air Canada connaissait les besoins de Mme Dinwoodie le 11 décembre 2000 puisqu'à l'enregistrement à Edmonton elle avait demandé de l'assistance avec fauteuil roulant à Vancouver pour se rendre aux douanes et à la porte d'embarquement de son vol de correspondance. À son arrivée à Vancouver, Mme Dinwoodie a été amenée à l'aire de récupération des bagages dans une voiturette par un agent d'Air Canada. Lorsqu'ils sont arrivés sur place, l'agent est parti et a dit à Mme Dinwoodie que quelqu'un viendrait l'aider sans dire quand l'aide serait fournie. De plus, après avoir été accompagnée par un autre agent d'Air Canada aux douanes, l'agent l'a, lui aussi, laissée toute seule et elle a dû trouver son chemin jusqu'à la bonne porte d'embarquement.

L'Office note que le manquement de la part du personnel d'Air Canada d'informer Mme Dinwoodie de la situation lui a causé de l'anxiété et des préoccupations à propos de la possibilité de manquer son vol de correspondance. L'Office note aussi que Mme Dinwoodie a vécu une situation similaire à Vancouver le 3 janvier 2001 pour son vol de retour. Après avoir été amenée en fauteuil roulant aux douanes et avoir été avisée qu'elle avait manqué son vol de correspondance vers Edmonton, elle a été laissée seule et elle a dû trouver son chemin jusqu'à la porte d'embarquement pour son nouveau vol.

L'Office estime qu'il est raisonnable qu'un passager ayant une mobilité réduite qui a besoin d'assistance avec fauteuil roulant reçoive cette assistance et ne soit pas laissé seul et dans un état d'incertitude, comme cela s'est produit à trois occasions dans le cas de Mme Dinwoodie.

À la lumière de ce qui précède, l'Office détermine que le niveau d'assistance fourni à Mme Dinwoodie a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement.

2. L'absence d'un fauteuil roulant

L'Office remarque qu'à l'arrivée du vol de Mme Dinwoodie à l'aéroport international de Vancouver le 3 janvier 2001, il n'y avait pas de fauteuil roulant pour l'aider à se rendre aux douanes et à la porte d'embarquement pour le vol de correspondance. En l'absence d'un fauteuil roulant, Mme Dinwoodie a dû marcher une longue distance avec un agent d'Air Canada dans l'aérogare avant qu'un fauteuil roulant soit mis à sa disposition. Cette longue promenade lui a causé des ampoules à son pied gauche.

Air Canada connaissait bien les besoins de Mme Dinwoodie pour une assistance avec fauteuil roulant. Le 2 janvier 2001, un jour avant le vol de retour, le fils de Mme Dinwoodie a appelé Air Canada et a demandé de l'assistance avec fauteuil roulant à l'arrivée de son vol à Vancouver. L'Office explique que la demande du fils de Mme Dinwoodie pour une assistance avec fauteuil roulant n'apparaissait pas dans le DP de Mme Dinwoodie. À cet égard, l'Office estime qu'Air Canada n'a fourni aucune justification pour cet oubli. En l'absence d'une note dans le DP, les employés à Vancouver n'ont pas été avisés à l'avance du besoin de Mme Dinwoodie d'une assistance avec fauteuil roulant pour de longues distances. L'Office note aussi qu'Air Canada a été incapable d'identifier l'agent qui a fourni de l'assistance à Mme Dinwoodie.

L'Office estime que la non-fourniture d'un fauteuil roulant à une personne comme Mme Dinwoodie qui en a besoin crée un désavantage déraisonnable pour cette personne. Comme il a été démontré dans le présent dossier, en l'absence d'un fauteuil roulant, Mme Dinwoodie a dû marcher une longue distance et s'est blessée. L'Office reconnaît que la situation a été rendue déplaisante et douloureuse pour Mme Dinwoodie.

En conséquence, l'Office détermine que la non-fourniture d'un fauteuil roulant à Mme Dinwoodie à l'arrivée de son vol de retour à Vancouver a constitué un obstacle à ses possibilités de déplacement.

Les obstacles étaient-ils abusifs ?

À l'instar du terme « obstacle », l'expression « abusif » n'est pas définie dans la LTC, ce qui permet à l'Office d'exercer sa discrétion pour éliminer les obstacles abusifs dans le réseau de transport de compétence fédérale. Le mot « abusif » a également un sens large et signifie habituellement que quelque chose dépasse ou viole les convenances ou le bon usage (excessif, immodéré, exagéré). Comme une chose peut être jugée exagérée ou excessive dans un cas et non dans un autre, l'Office doit tenir compte du contexte de l'allégation d'obstacle abusif. Dans cette approche contextuelle, l'Office doit trouver un juste équilibre entre le droit des passagers ayant une déficience d'utiliser le réseau de transport de compétence fédérale sans rencontrer d'obstacles abusifs, et les considérations et responsabilités commerciales et opérationnelles des transporteurs. Cette interprétation est conforme à la politique nationale des transports établie à l'article 5 de la LTC et plus précisément au sous-alinéa 5g)(ii) de la LTC qui précise, entre autres, que les modalités en vertu desquelles les transporteurs ou modes de transport exercent leurs activités ne constituent pas, dans la mesure du possible, un obstacle abusif aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience.

L'industrie des transports élabore ses services pour répondre aux besoins des utilisateurs. Les dispositions d'accessibilité de la LTC exigent quant à elles que les fournisseurs de services de transport du réseau de transport de compétence fédérale adaptent leurs services dans la mesure du possible aux besoins des personnes ayant une déficience. Certains empêchements doivent toutefois être pris en considération, par exemple les mesures de sécurité que les transporteurs doivent adopter et appliquer, les horaires qu'ils doivent s'efforcer de respecter pour des raisons commerciales, la configuration du matériel et les incidences d'ordre économique qu'aura l'adaptation d'un service sur les transporteurs aériens. Ces empêchements peuvent avoir une incidence sur les personnes ayant une déficience. Ainsi, ces personnes ne pourront pas nécessairement embarquer dans l'aéronef avec leur propre fauteuil roulant, elles peuvent devoir arriver à l'aérogare plus tôt aux fins de l'embarquement et elles peuvent devoir attendre plus longtemps pour obtenir de l'assistance au débarquement que les personnes n'ayant pas de déficience. Il est impossible d'établir une liste exhaustive des obstacles qu'un passager ayant une déficience peut rencontrer et des empêchements que les fournisseurs de services de transport connaissent dans leurs efforts pour répondre aux besoins des personnes ayant une déficience. Il faut en arriver à un équilibre entre les diverses responsabilités des fournisseurs de services de transport et le droit des personnes ayant une déficience à voyager sans rencontrer d'obstacle, et c'est dans cette recherche d'équilibre que l'Office applique le concept d'obstacle abusif.

Le cas présent

Ayant déterminé que le niveau d'assistance fourni à Mme Dinwoodie et la non-fourniture d'un fauteuil roulant à celle-ci ont constitué des obstacles à ses possibilités de déplacement, l'Office doit maintenant déterminer si ces obstacles étaient abusifs.

1. Le niveau d'assistance fourni à Mme Dinwoodie

Même si Mme Dinwoodie a réussi à trouver son chemin à temps pour son vol de correspondance vers Dallas le 11 décembre 2000, l'Office estime, en raison de la courte période de temps que Mme Dinwoodie avait pour sa correspondance, qu'elle avait des raisons légitimes d'être préoccupée par la possibilité de manquer son vol.

L'Office note qu'à l'exception d'indiquer que Mme Dinwoodie avait seulement demandé de l'assistance avec fauteuil roulant à Vancouver au moment de l'enregistrement pour son vol de départ d'Edmonton, et non 48 heures avant le départ du vol, Air Canada n'a soumis aucune preuve du fait qu'il y avait des circonstances opérationnelles inhabituelles ce jour-là qui pourraient expliquer pourquoi Mme Dinwoodie a été laissée seule et sans information à deux reprises en attendant l'assistance demandée.

L'Office comprend que parfois une personne ayant une mobilité réduite peut être laissée seule dans un aéroport. Cependant, dans les cas où la personne est en transit et que le temps pour se rendre au vol de correspondance est limité, l'Office s'attend à ce que le transporteur s'assure que la personne n'est pas laissée seule et sans information.

À cet égard, l'Office note que la politique d'Air Canada indique clairement que dans des situations semblables, l'employé qui fournit l'assistance a la responsabilité d'informer la personne sur la manière dont la situation sera traitée. L'Office est préoccupé par les situations comme celle qu'a vécue Mme Dinwoodie lorsque les employés ne se conforment pas à une politique aussi importante si l'on considère que lors de leur formation les employés d'Air Canada reçoivent des directives et des principes directeurs précis afin de se familiariser et de se conformer aux politiques existantes d'Air Canada pour répondre aux besoins des personnes ayant une déficience.

L'Office est d'avis que si le personnel d'Air Canada, conformément aux dispositions de la politique d'Air Canada, avait discuté avec Mme Dinwoodie et l'avait informée de la situation, le niveau de préoccupation et d'anxiété subi par Mme Dinwoodie aurait pu être atténué.

À la lumière de ce qui précède, l'Office détermine que le niveau d'assistance qu'Air Canada a fourni à Mme Dinwoodie lors de ses correspondances à l'aéroport international de Vancouver a constitué un obstacle abusif à ses possibilités de déplacement.

2. L'absence d'un fauteuil roulant

De façon générale, l'Office est d'avis qu'un fauteuil roulant est un élément essentiel pour une personne ayant une déficience puisqu'il s'agit du seul moyen que cette personne a pour voyager de façon indépendante et sécuritaire sans compromettre ses possibilités de déplacement. L'Office juge que le cas de Mme Dinwoodie a démontré l'importance de la fourniture d'un fauteuil roulant à la personne et indique les conséquences qui découlent de la non-fourniture du fauteuil roulant pour cette personne.

L'Office estime que Mme Dinwoodie avait le droit de recevoir un fauteuil roulant en raison de son état de santé. L'Office reconnaît, vu la nature de l'industrie aérienne, qu'il n'est pas toujours possible, à l'arrivée d'un vol, de fournir immédiatement un fauteuil roulant et qu'un délai raisonnable peut avoir lieu dans certains cas. Cependant, l'Office note qu'Air Canada n'a pas fourni de justification, comme n'importe quelle situation hors du contrôle d'Air Canada, pour expliquer le fait qu'un fauteuil roulant n'ait pas été fourni, ce qui a eu pour conséquence que Mme Dinwoodie a dû marcher jusqu'au prochain ascenseur où un fauteuil roulant était disponible.

De plus, malgré le fait qu'un préavis n'avait pas été donné, l'Office est d'avis qu'une fois que Mme Dinwoodie s'est présentée à l'arrivée de son vol à Vancouver, l'agent d'Air Canada qui la rencontrait à l'arrivée avait la responsabilité de prendre les mesures nécessaires pour s'assurer qu'un fauteuil roulant soit mis à la disposition de Mme Dinwoodie.

L'Office note qu'Air Canada a reconnu la validité de cette approche puisque sa brochure intitulée Nous offrons des services spéciaux pour les besoins particuliers précise que si un préavis de 48 heures n'est pas donné, Air Canada fera tout en son pouvoir pour répondre aux demandes faites à l'intérieur de ce délai. À cet égard, l'Office soutient qu'Air Canada n'a déposé aucune preuve pour indiquer que des dispositions ont été prises par son agent pour trouver un fauteuil roulant pour Mme Dinwoodie.

L'Office est préoccupé par le fait que, même si le personnel du transporteur avait été avisé de ses besoins et qu'elle avait demandé de l'assistance, Mme Dinwoodie a dû marcher une longue distance sans l'assistance d'un fauteuil roulant. L'Office juge qu'en raison de l'état de santé de Mme Dinwoodie, les employés d'Air Canada auraient dû réaliser que le fait de ne pas fournir de fauteuil roulant à Mme Dinwoodie augmentait ses chances de se blesser.

À la lumière de ce qui précède, l'Office détermine que le fait qu'Air Canada n'ait pas fourni un fauteuil roulant à Mme Dinwoodie à l'arrivée de son vol de retour à Vancouver a constitué un obstacle abusif à ses possibilités de déplacement.

Indemnité

En ce qui concerne la demande de Mme Dinwoodie d'être remboursée pour les dépenses supplémentaires qu'elle a engagées en conséquence de la correspondance manquée à Vancouver le 3 janvier 2001, les seules dépenses qui peuvent être remboursées, en vertu du paragraphe 172(3) de la LTC, sont celles engagées par une personne ayant une déficience découlant d'un obstacle abusif. À cet égard, puisque les coûts du stationnement et du taxi n'étaient pas engagés à la suite d'un obstacle abusif, l'Office ne peut examiner la demande de remboursement de Mme Dinwoodie. Cependant, l'Office note qu'Air Canada a offert un certificat-voyage de 50 $ afin de couvrir les dépenses engagées par Mme Dinwoodie à la suite de la correspondance manquée.

Sur la question de la demande d'indemnité de Mme Dinwoodie pour les inconvénients et la détresse qu'elle a subis, l'Office n'a pas la compétence d'accorder des dommages à la suite de telles circonstances.

CONCLUSION

Compte tenu des constatations qui précèdent, l'Office conclut que le niveau d'assistance qu'Air Canada a fourni à Mme Dinwoodie à l'aéroport international de Vancouver lors de ses vols de correspondances et la non-fourniture par Air Canada d'un fauteuil roulant à Mme Dinwoodie à l'arrivée de son vol de retour à Vancouver ont constitué des obstacles abusifs à ses possibilités de déplacement. Par conséquent, l'Office ordonne par les présentes à Air Canada de prendre les mesures correctives suivantes trente (30) jours suivant la date de la présente décision :

  • publier un bulletin à l'intention de tous les employés des aéroports dans tous les bureaux qui s'occupent des personnes ayant une déficience décrivant les difficultés éprouvées par Mme Dinwoodie lorsqu'elle a été laissée seule et sans information en attendant pour de l'assistance avec la possibilité de manquer son vol de correspondance et leur rappelant l'importance, conformément à la politique existante d'Air Canada, de tenir les personnes ayant une déficience au courant de toute situation qui pourrait les toucher, et fournir une copie du bulletin à l'Office;
  • publier un bulletin à l'intention de tous les bureaux soulignant l'importance de fournir les services demandés par les personnes ayant une déficience à la lumière de l'incident qu'a vécu Mme Dinwoodie lorsque, en l'absence d'un fauteuil roulant, la passagère a dû marcher sur une longue distance et s'est blessée, et fournir une copie du bulletin à l'Office.

À la suite de son examen des documents requis, l'Office déterminera si d'autres mesures sont nécessaires dans ce dossier.

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