Décision n° 148-W-2012
DEMANDE présentée par Global Marine Systems Limited, en vertu de la Loi sur le cabotage, L.C. (1992), ch. 31, en vue d’obtenir une licence.
INTRODUCTION
Demande
[1] Global Marine Systems Limited (GMSL) a déposé une demande, par l’entremise de son représentant canadien, en vue d’obtenir une licence pour l’utilisation du « WAVE VENTURE » afin d’effectuer les réparations, et tous les travaux subséquents de réparation et d’entretien au besoin, sur le système sous-marin de câbles de fibre optique du Canada NEPTUNE (NEPTUNE), dans les eaux canadiennes occidentales du détroit de Juan de Fuca, à l’ouest de l’île de Vancouver, en Colombie-Britannique, commençant le 15 mars 2012 et se terminant le 14 mars 2013.
[2] GMSL a présenté des documents justificatifs au nom d’Ocean Networks Canada (ONC), l’exploitant canadien du NEPTUNE, relativement aux détails des services visés. ONC indique qu’en septembre 2011, elle a subi une défaillance dans son infrastructure principale dans la région du nœud Folger (son nœud le plus près des côtes) nécessitant des réparations d’urgence (réparation au nœud Folger). Tyco Electronics Subsea Communications a déposé une demande et s’est vu accorder une licence temporaire (décision no 405-W-2011), mais en raison d’une détérioration des conditions météorologiques et de mauvaises prévisions à long terme, l’expédition a dû être annulée. ONC indique qu’elle prévoit retourner au site du nœud Folger à la fin d’avril 2012 afin de terminer la réparation au nœud Folger. ONC indique également qu’en plus de la réparation au nœud Folger, elle veut être en mesure de planifier et d’intervenir en cas de future situation d’urgence.
Avis et offre
[3] Le 17 février 2012, le personnel de l’Office des transports du Canada (Office) a donné avis de la demande à l’industrie du transport maritime du Canada.
[4] Le 28 février 2012, ITB Marine Projects LLP (ITB) a offert le « ITB 45 », un navire immatriculé au Canada, pour être affecté à l’activité décrite dans la demande.
Conclusion
[5] Pour les motifs énoncés ci-après, l’Office conclut, à la lumière des éléments de preuve, qu’il existe un navire canadien à la fois adapté et disponible pour être affecté aux activités dans les eaux canadiennes.
OBSERVATION PRÉLIMINAIRE
[6] En vertu de l’alinéa 4(1)a) et du paragraphe 8(1) de la Loi sur le cabotage, le mandat de l’Office consiste à déterminer s’il existe un navire canadien à la fois adapté et disponible pour être affecté à une activité dans les eaux canadiennes lorsqu’une demande est déposée pour l’utilisation d’un navire étranger.
[7] En vertu du paragraphe 2(1) de la Loi sur le cabotage, « eaux canadiennes » signifie les eaux internes, les eaux intérieures et la mer territoriale du Canada.
[8] Les articles 4 et 5 de la Loi sur les océans, L.C. (1996), ch. 31 indiquent que la mer territoriale du Canada est composée d’une zone maritime allant de la côte à une distance de 12 milles marins. Par conséquent, la décision de l’Office doit se limiter aux activités comprises dans la limite territoriale marine de 12 milles marins.
[9] En l’espèce, l’Office note que le service proposé comprend deux activités distinctes :
- l’achèvement de la réparation au nœud Folger (situé dans les eaux canadiennes);
- tous les travaux subséquents de réparation et d’entretien au NEPTUNE.
[10] Les activités menées à l’extérieur des eaux canadiennes ne constituent pas des activités de cabotage aux termes de la Loi sur le cabotage, et ne seront pas traitées dans la présente décision. C’est pourquoi l’Office estime que la détermination qu’il doit faire en l’espèce se limite à ce qui suit :
- l’activité liée à l’achèvement de la réparation au nœud Folger;
- tous les travaux subséquents de réparation et d’entretien dans les eaux canadiennes.
QUESTION
[11] Y-a-t-il un navire canadien à la fois adapté et disponible pour être affecté aux activités dans les eaux canadiennes?
CONTEXTE LÉGISLATIF
[12] L’alinéa 4(1)a) de la Loi sur le cabotage prévoit ce qui suit :
4(1) Sous réserve de l’article 7, sur demande d’un résident du Canada agissant au nom d’un navire étranger, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile délivre une licence pour le navire s’il est convaincu à la fois :
a. que l’Office a déterminé qu’il n’existe pas de navire canadien ou de navire non dédouané qui soit à la fois adapté et disponible pour assurer le service ou être affecté aux activités visées dans la demande.
[13] Le paragraphe 8(1) de la Loi sur le cabotage dispose ce qui suit :
À l’occasion de l’étude d’une demande de licence, l’Office procède aux déterminations visées aux alinéas 4(1)a) et b) et 5a) et b).
[14] Le but de la Loi sur le cabotage est de permettre l’utilisation de navires étrangers dans les eaux canadiennes lorsqu’il n’y a pas de navire canadien ou de navire non dédouané qui soit à la fois adapté et disponible pour être affecté à une activité proposée. À la lumière des éléments de preuve soumis, l’Office doit déterminer si, selon la prépondérance des probabilités, il y a un navire canadien qui soit à la fois adapté et disponible pour être affecté aux activités proposées. Le fardeau de la preuve appartient au demandeur, GMSL dans le cas présent, de démontrer que le navire offert n’est pas adapté ni disponible pour assurer le service ou être affecté à l’activité. Il incombe également au demandeur de démontrer que toute exigence supplémentaire indiquée dans la demande est nécessaire pour exécuter les activités requises.
ADAPTABILITÉ TECHNIQUE
[15] ITB a offert le « ITB 45 », et indique qu’il est adapté au niveau technique et commercial pour être affecté à l’activité décrite dans la demande pour l’achèvement de la réparation au nœud Folger. ITB fait remarquer qu’elle possède plusieurs années d’expérience avec l’installation, la récupération et la réparation de câbles sous-marins, et qu’elle a des contrats permanents sur la côte ouest avec BC Hydro et Telus.
[16] En ce qui a trait à l’adaptabilité technique du « ITB 45 » pour effectuer l’activité liée à la réparation au nœud Folger, GMSL indique que le véhicule télécommandé d’ITB, le Oceanic Explorer, n’est pas en mesure de localiser, de nettoyer au jet, de couper ou de tenir le câble, le cas échéant, pour ce genre de travail, comme l’enfouissement correctif, qu’il ne satisfait pas aux critères requis par le client et qu’il n’est pas assez puissant à cette fin. GMSL indique également que ce véhicule télécommandé est un équipement spécialisé, qui doit être configuré et que, dans une petite industrie comme celle-ci, il n’est pas facile à obtenir.
[17] ITB n’est pas d’accord avec les affirmations de GMSL et fait valoir que le « ITB 45 » est capable de récupérer et de tenir le câble associé à la réparation au nœud Folger, et possède plusieurs sources pour des véhicules télécommandés équivalents nécessaires pour les travaux spécialisés de réparation de câbles qui peuvent être mobilisés à Vancouver à court préavis. ITB indique également que le véhicule télécommandé est une pièce d’équipement auxiliaire et que la plupart des navires de construction sous-marine sont polyvalents et ne peuvent pas avoir tout le matériel à bord, et souligne que pour des tâches particulières, un équipement auxiliaire peut être ajouté au navire au besoin.
[18] GMSL indique que le « WAVE VENTURE » sera nécessaire pour effectuer les réparations à l’ensemble du système, à l’intérieur des eaux territoriales et jusqu’à la zone économique exclusive, à environ 2 600 mètres, et que le « ITB 45 » ne serait pas en mesure d’effectuer de manière sécuritaire les réparations aux câbles de fibre optique à une telle distance de la côte ou dans des situations en haute mer. GMSL indique également que le « ITB 45 » est une plateforme de travail près du littoral, qu’il semble n’avoir aucun logement ou service de type hôtelier, qu’il nécessiterait un transfert du personnel en mer vers et depuis la barge, ce qui présente un grand risque, et qu’il poserait un problème pour la sécurité. GMSL est d’avis que ce navire prendrait beaucoup de temps et qu’il serait peu pratique ou même impossible de l’utiliser pour effectuer les réparations en eau profonde.
[19] ITB indique que le « ITB 45 » est une barge de ligne de charge en mer certifiée par Transports Canada munie de tout l’équipement de sécurité nécessaire, notamment des remorqueurs de réserve conformément aux exigences et aux règlements pertinents. ITB ajoute que le « ITB 45 » a été spécifiquement conçu et équipé pour l’installation de câbles et les travaux de construction dans les eaux canadiennes côtières et près des côtes.
Analyse et constatations
[20] Pour déterminer si un navire canadien est adapté pour être affecté à une activité, l’Office établit si le navire est en mesure d’effectuer les travaux, et non s’il s’agit du meilleur navire disponible.
[21] En ce qui a trait à l’allégation de GMSL selon laquelle le Oceanic Explorer n’est pas en mesure de respecter les exigences pour effectuer la réparation au nœud Folger, l’Office tient compte d’une détermination établie dans la décision no 184-W-2001, où le demandeur affirmait qu’aucun des navires canadiens offerts n’offrait un certain équipement particulier et qu’ils n’étaient donc pas adaptés aux activités proposées. La décision no 184-W-2001 indique ce qui suit :
L’Office constate que l’équipage des navires canadiens est conforme aux exigences et aux règlements canadiens en la matière et que le personnel spécialisé est disponible. Tous les navires canadiens offerts sont considérés comme étant adaptés pour être affectés aux manœuvres de pose et de réparation de câbles car ils ont tous déjà été utilisés pour effectuer de tels travaux dans le passé et on peut les pourvoir des équipements spécialisés nécessaires à tout moment.
[22] Dans le même ordre d’idées, le « ITB 45 » est un navire battant pavillon canadien certifié par Transports Canada ayant l’équipement de base nécessaire pour effectuer les travaux en toute sécurité, ainsi que l’équipement spécialisé et le personnel disponible au besoin, et il est adapté pour effectuer la réparation au nœud Folger.
[23] Les éléments de preuve démontrent qu’ITB possède l’expérience pour effectuer la réparation au nœud Folger et la capacité de s’approvisionner en équipement nécessaire, le cas échéant. GMSL n’a pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, que le « ITB 45 » n’est pas adapté pour être affecté à l’activité en question. En conséquence, l’Office conclut que le « ITB 45 » est adapté sur le plan technique pour effectuer la réparation au nœud Folger.
[24] Pour ce qui est de la capacité de le « ITB 45 » à effectuer les travaux subséquents de réparation et d’entretien dans les eaux canadiennes au besoin, l’Office estime que même si le navire canadien offert a une taille et un équipement qui diffèrent de ceux du navire étranger, le « ITB 45 » a été utilisé pour de nombreuses activités d’entretien et de réparation de câbles de fibre optique par le passé et un équipement spécialisé peut être ajouté après une évaluation complète des travaux nécessaires.
[25] De plus, l’Office note qu’aucun besoin réel n’est indiqué par rapport aux travaux subséquents de réparation et d’entretien relatifs au NEPTUNE et, par conséquent, GMSL n’a pas fourni les arguments ou les preuves à l’appui concernant des exigences supplémentaires spécifiques applicables à cette activité. Ainsi, l’Office conclut qu’un navire canadien est adapté sur le plan technique à tous les travaux subséquents de réparation et d’entretien, au besoin, au NEPTUNE dans les eaux canadiennes.
ADAPTABILITÉ COMMERCIALE
[26] GMSL indique qu’ONC est signataire du North Zone maintenance agreement (accord d’entretien de la zone nord-américaine) [accord ZNA], qui accorde aux membres l’accès à un câblier spécialisé, en cas de défaillance du système. Selon GMSL, l’accord ZNA exige que le « WAVE VENTURE » soit en disponibilité de façon continue tout au long de l’année et, à ce titre, il y a des frais de mise en attente. GMSL fait valoir que cela signifie que les coûts de réparation ne deviennent jamais excessifs et qu’une mobilisation minimale de personnel ou d’équipement supplémentaire est nécessaire.
[27] GMSL indique que si ITB était chargée d’effectuer de telles réparations, la quantité de travail liée à la planification et à la mobilisation de l’équipement et du personnel et le fait qu’elle ne possède pas de câblier adapté aux travaux de réparation de câbles entraîneraient une situation où les coûts de réparation deviendraient non rentables.
[28] ITB réfute ces présentations en indiquant que l’accord ZNA est un accord d’entretien commercial et n’a aucune incidence sur la Loi sur le cabotage.
[29] GMSL indique que la déclaration d’ITB selon laquelle d’autres véhicules télécommandés pourraient être fournis par ITB pour effectuer l’activité requise pourrait être trompeuse, puisqu’il serait [traduction] « trop dispendieux de faire une soumission concurrentielle pour les travaux ».
Analyse et constatations
[30] Les Lignes directrices de l’Office des transports du Canada relatives au traitement des demandes de licence de cabotage précisent qu’il incombe au demandeur de prouver clairement que l’utilisation d’un navire canadien rendrait l’activité non viable sur les plans du commerce et de la rentabilité. La décision no 450-W-2009 indique ce qui suit :
En ce qui a trait à la question des coûts additionnels, l’Office a déjà déterminé « qu’il n’est pas suffisant que les demanderesses prétendent que les coûts d’utilisation d’un navire canadien sont plus élevés pour démontrer qu’un navire n’est pas adapté; elles doivent plutôt faire la preuve que le projet serait non rentable et commercialement non viable si elles utilisaient le navire canadien offert » (décision nº 352-W-2005). Dans la même décision, l’Office a renvoyé à la décision nº 427-W-2003, dans laquelle il a déterminé que « Dans un cas [...] où le demandeur soutient que l’utilisation du navire canadien offert placerait un fardeau financier inacceptable sur ses épaules, le demandeur a la tâche de fournir les renseignements financiers qui prouveraient ces allégations ».
[31] Dans ce cas, l’Office note que l’exigence d’une mise en attente de façon continue est fondée sur l’accord ZNA, un marché conclu par ONC, et ne constitue pas une exigence nécessaire pour effectuer les activités. L’Office conclut donc que GMSL n’a pas prouvé que l’utilisation du « ITB 45 » entraînerait un important fardeau financier.
[32] En outre, GMSL n’a pas fourni de renseignements financiers démontrant que les coûts d’utilisation d’un véhicule télécommandé lui imposeraient un fardeau financier inacceptable, ni que l’utilisation du navire canadien offert rendrait l’activité non viable sur les plans du commerce et de la rentabilité. Par conséquent, l’Office conclut que GMSL n’a pas démontré que l’utilisation du « ITB 45 » rendrait les activités non viables sur le plan du commerce.
DISPONIBILITÉ
[33] Comme il est indiqué précédemment, l’Office a déterminé que la première activité identifiée dans cette demande est l’achèvement de la réparation au nœud Folger. En outre, l’Office note qu’ONC prévoit retourner sur le site à la fin d’avril 2012 pour terminer les travaux de réparation au moyen du « WAVE VENTURE ».
[34] GMSL indique qu’ITB a affirmé avoir retiré son objection à la première demande de réparation au nœud Folger (décision no 405-W-2011) parce qu’elle n’a pas été en mesure de respecter les échéances de mobilisation nécessaires.
[35] ITB réplique que le « ITB 45 » est aisément disponible pour exécuter les travaux et qu’elle a retiré son objection car elle croyait comprendre que les futures demandes de dispense de pavillon seraient spécifiques à une tâche.
[36] ITB indique également qu’elle n’a pas accepté de retirer son objection en raison d’une incapacité à exécuter les travaux, mais à cause de la nature urgente alléguée des réparations. ITB soutient aussi qu’elle a appris que le nœud Folger ne fonctionnait pas depuis plusieurs mois, à la suite des dommages survenus à la fin de l’été 2011, mais les réparations ne sont pas encore terminées. ITB indique que les premières réparations ne constituaient pas des réparations d’urgence et que le délai d’exécution actuel des réparations n’est pas adéquat.
[37] En ce qui a trait aux travaux de réparation subséquents, ITB fait remarquer qu’il n’y a pas de détails particuliers sur le type ou la nature des travaux prévus ou attendus au-delà de l’achèvement de la réparation au nœud Folger, et soutient que la délivrance d’une dispense générale de pavillon pour le « WAVE VENTURE » pour une période d’un an sans détails particuliers sur la portée des travaux éliminera toute occasion pour ITB d’offrir le « ITB 45 » pour des travaux relatifs au NEPTUNE dans les eaux canadiennes.
Analyse et constatations
[38] En ce qui a trait à la disponibilité du « ITB 45 » pour effectuer la réparation au nœud Folger, l’Office est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que le « ITB 45 » est disponible pour être affecté à l’activité.
[39] Concernant la deuxième activité, les travaux subséquents de réparation et d’entretien au NEPTUNE dans les eaux canadiennes, il incombe à GMSL de fournir des renseignements quant au moment où le navire canadien devra être disponible pour être affecté à l’activité. Même si l’Office reconnaît l’importance de la rapidité des réparations, au besoin, aucune date n’a encore été fixée pour les travaux. C’est pourquoi l’Office conclut que le « ITB 45 » est disponible pour être affecté à l’activité.
[40] Si des réparations d’urgence doivent être effectuées dans les eaux canadiennes et que GMSL estime qu’il est nécessaire d’utiliser un navire étranger, elle peut en faire la demande auprès de l’Office en présentant les détails des travaux nécessaires à ce moment-là.
[41] À la lumière des éléments de preuve soumis, l’Office est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que le « ITB 45 » est disponible pour être affecté aux deux activités susmentionnées.
DÉTERMINATION
[42] À la lumière des constatations qui précèdent, l’Office détermine, conformément au paragraphe 8(1) de la Loi sur le cabotage, qu’il existe un navire canadien qui est à la fois adapté et disponible pour être affecté aux activités.
[43] L’Office communiquera cette détermination au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.
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