Décision n° 65-A-2012

le 21 février 2012

DEMANDE présentée par Ethiopian Airlines Enterprise exerçant son activité sous le nom d’Ethiopian Airlines, en vertu de l’article 32 de la Loi sur les transports au Canada, L.C. (1996), ch. 10, modifiée.

No de référence : 
M4212/E362-4

DEMANDE

[1] Le 8 février 2012, Ethiopian Airlines Enterprise exerçant son activité sous le nom d’Ethiopian Airlines (Ethiopian Airlines) a demandé à l’Office des transports du Canada (Office) une révision de l’arrêté no 2012-A-35 (arrêté).

CONTEXTE

[2] Le 14 septembre 2011, Ethiopian Airlines a demandé à l’Office une exemption de l’application de l’article 59 de la Loi sur les transports au Canada (LTC) afin de lui permettre de vendre, directement ou indirectement, un service aérien international régulier entre l’Éthiopie et le Canada, ou d’en faire l’offre publique de vente, au Canada, sans détenir une licence.

[3] Ethiopian Airlines a indiqué qu’elle avait l’intention de commencer à commercialiser son service au Canada le 15 décembre 2011 et qu’elle avait entamé les procédures auprès de Transports Canada visant la délivrance d’un certificat canadien d’exploitant aérien étranger (CCEAÉ), document requis pour que la demande de licence soit considérée complète. Ethiopian Airlines a indiqué que l’exemption demandée lui permettrait d’entamer la commercialisation du service proposé suffisamment à l’avance pour en assurer la rentabilité. Ethiopian Airlines a ajouté qu’elle n’anticipait pas qu’un CCEAÉ lui serait délivré avant novembre 2011.

[4] Ethiopian Airlines a par la suite, à différentes reprises, avisé l’Office du report de la date à laquelle devait avoir lieu l’inspection par Transports Canada de la base d’exploitation, laquelle inspection est requise avant qu’un CCEAÉ soit délivré. Lorsque l’arrêté a été rendu, Ethiopian Airlines a confirmé qu’il était prévu que cette inspection aurait lieu en avril 2012, mais aucune date précise n’avait été fixée. Ethiopian Airlines a également indiqué que l’inauguration du service était prévue pour juin 2012.

[5] Le 27 janvier 2012, par l’arrêté, l’Office a soustrait Ethiopian Airlines à l’application de l’article 59 de la LTC, à compter de la date à laquelle le personnel de Transports Canada entreprendrait l’inspection de la base d’exploitation d’Ethiopian Airlines jusqu’au 30 juin 2012, de façon à permettre à Ethiopian Airlines, durant cette période, de vendre, directement ou indirectement, et de faire l’offre publique de vente, au Canada, d’un service aérien international régulier entre l’Éthiopie et le Canada, sans détenir la licence requise, sous réserve de certaines conditions.

CONTEXTE LÉGISLATIF

[6] En vertu de l’article 32 de la LTC :

L’Office peut réviser, annuler ou modifier ses décisions ou arrêtés, ou entendre de nouveau une demande avant d’en décider, en raison de faits nouveaux ou en cas d’évolution, selon son appréciation, des circonstances de l’affaire visée par ces décisions, arrêtés ou audiences.

QUESTION

[7] Y a-t-il eu des faits nouveaux ou une évolution des circonstances depuis que l’arrêté a été rendu qui justifie une révision, une annulation ou une modification de l’arrêté?

CONCLUSION

[8] Comme il est indiqué dans les motifs qui suivent, l’Office conclut que la date prévue pour l’inspection de la base par Transports Canada constitue un fait nouveau en ce qui a trait à l’arrêté depuis qu’il a été rendu, mais ce fait nouveau ne justifie pas une révision, une annulation ou une modification de l’arrêté.

POSITION D’ETHIOPIAN AIRLINES

[9] Ethiopian Airlines indique qu’une date pour l’inspection de la base par Transports Canada a maintenant été fixée pour la semaine du 16 au 20 avril 2012. Ethiopian Airlines ajoute qu’il s’agissait d’un fait qui n’était pas connu au moment où l’arrêté a été rendu, et demande que l’arrêté entre en vigueur immédiatement.

[10] À l’appui de sa demande, Ethiopian Airlines présente également les arguments qui suivent :

  1. L’Office a fixé la période d’exemption de la prévente pour qu’elle ne commence qu’à la date où l’inspection de la base débutera, plutôt que d’appliquer sa pratique de longue date d’autoriser l’exemption de prévente à compter de la date à laquelle l’inspection de la base est fixée par Transports Canada.
  2. Pendant une longue période après que l’article 59 ait été établi, l’article était seulement appliqué aux nouveaux transporteurs intérieurs et non pas aux transporteurs internationaux.
  3. Les transporteurs internationaux, comme Ethiopian Airlines, sont en mesure de fournir des services de rechange s’ils n’obtiennent pas l’autorisation d’exploiter leurs services au Canada, puisque ces transporteurs fournissent des services réguliers quotidiens vers des points américains raisonnablement accessibles. La capacité de rétrofacturation des systèmes de cartes de crédit est le principal moyen de protection pour les achats de voyage à l’avance dans l’économie actuelle.
  4. Les transporteurs internationaux, comme Ethiopian Airlines, ont une bien meilleure viabilité financière que les nouveaux transporteurs canadiens, pour lesquels cette exigence de protection a été créée à l’origine.
  5. La période de réservation pour des voyages en Éthiopie et dans les pays subsahariens avoisinants est bien avancée et constitue le principal marché pour le service proposé. Il ne s’agit pas d’un marché majeur pour les autres transporteurs. Une période de commercialisation préalable de moins de 60 jours n’est pas adéquate pour offrir un quelconque degré de viabilité initiale. Ethiopian Airlines subit une sanction économique inéquitable sur le lancement de son service imposée par l’Office, une condition qui n’a pas été révélée à Ethiopian Airlines lors du processus de négociation bilatérale.
  6. Air Canada a eu le droit d’accéder immédiatement au marché éthiopien. Aucune restriction n’a été imposée par le gouvernement éthiopien au transporteur canadien pour qu’il ait accès immédiatement, puisqu’aucun retard n’était exercé par l’Office sur les demandes de partage de codes.
  7. Les articles de tous les accords bilatéraux de services aériens, y compris l’accord canadien avec l’Éthiopie, exigent que chaque partie fournisse au transporteur de la partie opposée un accès selon les conditions les plus favorables offertes aux transporteurs de l’autre pays.
  8. Ethiopian Airlines n’est pas traitée équitablement dans ce marché par l’arrêté.

ANALYSE ET CONSTATATIONS

[11] La procédure de révision prévue à l’article 32 de la LTC n’accorde à l’Office qu’un pouvoir limité de revenir sur ses décisions ou arrêtés. En fait, l’Office ne peut exercer le pouvoir qui lui est conféré en vertu de cet article que s’il y a eu, dans son opinion, des faits nouveaux ou une évolution des circonstances entourant l’affaire visée par une décision ou un arrêté en particulier depuis que celle-ci ou celui-ci a été rendu.

[12] La décision no 488-C-A-2010 fournit certaines directives pour l’application de l’article 32 de la LTC. L’Office doit d’abord déterminer s’il y a eu un changement des faits ou une évolution des circonstances de l’affaire visée par la décision et, le cas échéant, il doit déterminer si cette évolution ou ce changement est suffisant pour justifier une révision, une annulation ou une modification de la décision.

[13] Comme il est mentionné dans la décision no 488-C-A-2010, le libellé de l’article 32 doit généralement être interprété comme intéressant seulement les faits ou les circonstances qui n’existaient pas au moment de la demande initiale ou qui n’étaient pas susceptibles d’être découverts par le demandeur à ce moment. Si le fait était connu du demandeur ou qu’il pouvait être découvert en exerçant une diligence raisonnable au moment de la demande initiale, il ne peut alors constituer un changement des faits ou une évolution des circonstances. Une demande présentée en vertu de l’article 32 n’est pas la solution qui convient pour compléter le dossier ou débattre à nouveau d’une affaire. Un changement réel doit s’être produit dans les faits ou les circonstances depuis la décision ou l’arrêté initial.

[14] Le fardeau de la preuve impose au demandeur qui demande la révision de fournir à l’Office des éléments de preuve et des explications prouvant qu’un changement présumé des faits ou des circonstances s’est produit depuis que la décision ou l’arrêté a été rendu. Le demandeur doit aussi expliquer en quoi le changement présumé a une incidence sur l’issue de l’affaire.

[15] Dans le cas présent, même s’il pouvait être anticipé qu’une date d’inspection de la base serait éventuellement fixée par Transports Canada, Ethiopian Airlines ne connaissait pas cette date et ne pouvait pas la connaître au moment où la demande d’exemption de l’article 59 était devant l’Office. Par conséquent, l’Office conclut que la date de l’inspection de la base constitue un changement des faits depuis que l’arrêté a été rendu.

[16] Pour ce qui est des autres arguments déposés à l’appui de la demande, l’Office conclut qu’Ethiopian Airlines ne présente pas de changement des faits ou des circonstances, mais apporte plutôt des arguments supplémentaires et donne des opinions à l’appui de sa demande initiale. Par conséquent, l’Office ne tiendra pas compte de ces arguments, puisqu’une demande présentée en vertu de l’article 32 n’est pas la solution qui convient pour compléter le dossier ou débattre à nouveau d’une affaire.

[17] L’Office doit maintenant déterminer si l’établissement de la date de l’inspection de la base entre les 16 et 20 avril 2012 constitue un changement de faits suffisant pour justifier une révision, une annulation ou une modification de l’arrêté.

[18] L’Office, dans l’arrêté, a tenu compte de l’intention de protection du consommateur de l’article 59 de la LTC, des retards précédents dans le cadre de la demande et du fait qu’une date d’inspection de la base confirmée n’avait pas été fournie pour justifier une exemption de l’application de l’article 59 d’une durée limitée. L’Office a aussi reconnu que l’inspection de la base était prévue pour avril 2012. De plus, l’Office a envisagé qu’une date serait fixée pour l’inspection de la base, comme il est indiqué dans la première condition de l’arrêté. En tenant compte du fait que l’établissement de la date pour entreprendre une inspection était donc déjà envisagé dans l’arrêté et que l’arrêté indique clairement que l’exemption de l’application de l’article 59 de la LTC n’entrerait en vigueur qu’à partir de la date où l’inspection de la base serait réellement entreprise, Ethiopian Airlines n’a pas démontré comment l’établissement d’une date d’inspection aurait eu une incidence sur le résultat de la demande initiale ou de l’arrêté.

[19] À la lumière de ce qui précède, l’Office conclut qu’il y a eu un fait nouveau depuis que l’arrêté a été rendu, mais ce fait nouveau ne justifie pas une révision, une annulation ou une modification de l’arrêté au sens de l’article 32 de la LTC.

CONCLUSION

[20] Par conséquent, l’Office rejette la demande d’Ethiopian Airlines.

Membre(s)

Raymon J. Kaduck
John Scott
Date de modification :