Décision n° 76-C-A-2019

le 1 novembre 2019

DEMANDE présentée par Nicholaos Nassios (demandeur) contre Air Canada.

Numéro de cas : 
19-00582

RÉSUMÉ

[1] Le demandeur a déposé une demande auprès de l’Office des transports du Canada (Office) contre Air Canada concernant un retard dans la livraison de ses bagages survenu lors de son voyage de Toronto (Ontario) à Washington, D.C., États-Unis d’Amérique. Il demande le remboursement des frais de bagages de même qu’une indemnité pour la douleur, la souffrance et la perte de jouissance qu’il a éprouvées.

[2] Le 20 juin 2019, l’Office a émis la décision no LET-A-47-2019 (décision) en vertu du paragraphe 42(2) des Règles de l’Office des transports du Canada (Instances de règlement des différends et certaines règles applicables à toutes les instances), DORS/2014-104 (Règles pour le règlement des différends).

[3] Dans la décision, l’Office a indiqué être d’avis préliminaire que la demande comportait un défaut fondamental puisque le demandeur n’avait pas affirmé ni prouvé :

  1. qu’Air Canada n’a pas appliqué les conditions de transport énoncées dans son tarif intitulé International Passenger Rules and Fares Tariff, NTA(A) No. 458 (tarif), ou qu’elle a appliqué des conditions qui n’y figuraient pas;
  2. que les conditions énoncées dans le tarif d’Air Canada sont injustes et déraisonnables;
  3. que les conditions énoncées dans le tarif d’Air Canada sont injustement discriminatoires; ou
  4. que les conditions énoncées dans le tarif d’Air Canada sont imprécises.

[4] Par conséquent, l’Office a donné l’occasion au demandeur de justifier pourquoi l’Office ne devrait pas rejeter sa demande. Le demandeur a déposé une réponse le 2 juillet 2019.

[5] Pour les motifs énoncés ci-après, l’Office rejette la demande.

CONTEXTE

[6] Le demandeur a voyagé à bord d’un vol d’Air Canada de Toronto à Washington le 1er novembre 2018. Les bagages enregistrés du demandeur étaient en retard à son arrivée à destination et ils lui ont été livrés deux jours plus tard. Pendant qu’il attendait ses bagages, le demandeur a acheté des articles de remplacement temporaire. Lorsque le demandeur a reçu ses bagages, leur contenu était saturé d’eau, et il a dû faire nettoyer ses vêtements à sec. Le demandeur a également engagé des frais de taxi pour se déplacer de l’aéroport national Ronald Reagan de Washington à son hôtel ainsi que des frais pour des services de nettoyage à sec.

[7] Air Canada a versé une indemnité de 630 CAD au demandeur pour les frais de taxi, ainsi que ceux pour les articles de remplacement temporaire et les services de nettoyage à sec.

OBSERVATION PRÉLIMINAIRE

[8] Dans sa réponse à la décision, le demandeur soulève deux cas où des renseignements médicaux n’avaient pas été supprimés des documents à l’appui de la demande comme le prévoyait la décision. L’Office supprimera les renseignements des documents à l’appui conformément à la décision, et les versions non épurées seront retirées des archives.

LA LOI ET LES DISPOSITIONS TARIFAIRES PERTINENTES

[9] Le paragraphe 110(4) du Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58, modifié (RTA) exige que le transporteur aérien, lors de l’exploitation d’un service international, applique correctement les conditions de transport énoncées dans son tarif.

[10] Si l’Office conclut qu’un transporteur aérien n’a pas correctement appliqué son tarif, l’article 113.1 du RTA confère à l’Office le pouvoir d’ordonner au transporteur :

  1. de prendre les mesures correctives qu’il estime indiquées;
  2. de verser des indemnités à quiconque pour toutes dépenses qu’il a supportées en raison de la non-application de ces prix, taux, frais ou conditions de transport.

[11] La règle 60(A)(5)(b) du tarif prévoit ce qui suit, relativement à la perception et à la remise des bagages :

[Traduction]

Le bagage enregistré est remis au détenteur du bulletin de bagages contre paiement de toutes les sommes dues au transporteur selon le contrat de transport ou le tarif.

[…]

[12] La règle 5(A)(2) du tarif prévoit, en partie, ce qui suit :

[Traduction]

Le transport international est assujetti aux règles de responsabilité et à toutes les autres dispositions de la Convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international, signée à Varsovie le 12 octobre 1929, ou de la Convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international (Convention de Montréal de 1999), ou de ces mêmes conventions telles qu’elles ont été modifiées, selon celle des deux qui s’applique au transport en cause. Les dispositions des règles qui vont à l’encontre des dispositions de ladite convention seront, dans cette mesure, mais uniquement dans cette mesure, inapplicables au transport international.

[13] L’article 19 de la Convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international – Convention de Montréal(Convention de Montréal) définit la responsabilité en ce qui a trait aux dommages occasionnés par un retard dans le transport de bagages :

Le transporteur est responsable du dommage résultant d’un retard dans le transport aérien de passagers, de bagages ou de marchandises. Cependant, le transporteur n’est pas responsable du dommage causé par un retard s’il prouve que lui, ses préposés et mandataires ont pris toutes les mesures qui pouvaient raisonnablement s’imposer pour éviter le dommage, ou qu’il leur était impossible de les prendre.

[14] Le paragraphe 2 de l’article 22 de la Convention de Montréal définit les limites de responsabilité relatives aux retards, aux bagages et aux marchandises :

Dans le transport de bagages, la responsabilité du transporteur en cas de destruction, perte, avarie ou retard est limitée à la somme de 1 131 droits de tirage spéciaux par passager, sauf déclaration spéciale d’intérêt à la livraison faite par le passager au moment de la remise des bagages enregistrés au transporteur et moyennant le paiement éventuel d’une somme supplémentaire. Dans ce cas, le transporteur sera tenu de payer jusqu’à concurrence de la somme déclarée, à moins qu’il prouve qu’elle est supérieure à l’intérêt réel du passager à la livraison.

POSITION DU DEMANDEUR

[15] Dans la demande initiale, le demandeur a demandé d’être indemnisé pour les dépenses suivantes :

  • 387,89 USD pour trois nuits d’hébergement à l’hôtel, parce qu’il soutient qu’il n’aurait pas engagé cette dépense s’il avait su à l’avance que ses bagages allaient être livrés en retard;
  • 200 CAD parce qu’il n’avait pas accès à ses médicaments et à un dispositif médical qui se trouvaient dans les bagages qui ont été livrés en retard;
  • 700 CAD pour le temps passé à faire nettoyer ses vêtements à sec et à acheter des articles de remplacement temporaire;
  • 31,50 CAD pour les frais de bagages enregistrés.

[16] En réponse à la décision, le demandeur soutient qu’il est déraisonnable que le tarif d’Air Canada ne permette pas que le transporteur soit tenu responsable de la perte d’une part considérable du temps de vacances personnelles de ses passagers. Le demandeur soutient également qu’il est déraisonnable que le tarif d’Air Canada permette au transporteur de livrer des bagages enregistrés alors que leur contenu est mouillé, ou autrement inutilisable, et n’exige pas que le transporteur rembourse les frais de bagages au passager touché.

Analyse et déterminations

[17] Dans la décision, l’Office a relevé certaines lacunes liées à la demande et a donné au demandeur l’occasion de préciser la nature de sa demande, la façon dont celle-ci est liée au mandat et à la compétence de l’Office, ainsi qu’aux obligations légales d’Air Canada.

[18] La règle 5(A)(2) du tarif prévoit qu’aux fins du transport international, la Convention de Montréal définit les règles de responsabilité en ce qui a trait aux dommages occasionnés par un retard dans la livraison des bagages. L’article 19 de la Convention de Montréal prévoit que le transporteur est responsable du dommage résultant d’un retard dans le transport aérien de passagers, de bagages ou de marchandises. L’article 22 de la Convention de Montréal définit les limites de responsabilité en cas de destruction, de perte, d’avarie ou de retard des bagages à la somme de 1 131 droits de tirage spéciaux (approximativement 2 059,58 CAD) par passager dans la plupart des cas.

[19] Le demandeur indique qu’Air Canada lui a déjà versé une indemnité de 630 CAD pour les frais de taxi, ainsi que ceux pour les articles de remplacement temporaire et les services de nettoyage à sec. Ce faisant, Air Canada a indemnisé le demandeur pour les frais qu’il a engagés en raison du retard dans la livraison de ses bagages et des dommages causés à ses bagages, comme l’exige son tarif.

[20] Outre la demande d’indemnisation concernant les frais de bagages enregistrés, toutes les autres demandes du demandeur concernent l’obtention d’une indemnisation pour la douleur, la souffrance ou la perte de jouissance. L’Office n’a pas la compétence pour ordonner le versement d’une indemnité pour la douleur, la souffrance ou la perte de jouissance, comme il l’a indiqué dans la décision no 361-C-A-2007.

[21] La règle 60(A)(5)(b) du tarif d’Air Canada porte sur les frais de bagages et indique ce qui suit : [traduction] « Le bagage enregistré est remis au détenteur du bulletin de bagages contre paiement de toutes les sommes dues au transporteur selon le contrat de transport ou le tarif ». Selon le tarif, des frais doivent être payés à Air Canada pour la remise des bagages, même si celle-ci est effectuée en retard. Ni le fait que le contenu des bagages enregistrés était mouillé ni le retard dans la remise de ces bagages ne constituent des motifs justifiant le remboursement des frais de bagages enregistrés selon le tarif.

[22] Les dispositions du Règlement sur la protection des passagers aériens, DORS/2019-150, qui est entré en vigueur le 15 juillet 2019, exigent que le transporteur verse une indemnité égale ou supérieure à la somme des frais payés pour le bagage, si le bagage est endommagé.

[23] Toutefois, comme ces dispositions n’étaient pas en vigueur au moment du voyage du demandeur, elles ne peuvent être appliquées rétroactivement.

[24] Par conséquent, l’Office conclut que le demandeur n’a pas démontré qu’Air Canada avait agi contrairement au RTA au moment de l’incident et que le demandeur n’a pas fourni suffisamment d’éléments de preuve ou d’arguments pour justifier pourquoi l’Office ne devrait pas rejeter sa demande.

CONCLUSION

[25] L’Office rejette la demande.

Membre(s)

J. Mark MacKeigan
Heather Smith
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