Décision n° 24-AT-C-A-2021

le 12 avril 2021

DEMANDE présentée par Karl McKinnon contre Air Canada, en vertu du paragraphe 172(1) de la Loi sur les transports au Canada, LC 1996, c 10 (LTC), concernant ses besoins liés à sa déficience, et en vertu du paragraphe 110(4) du Règlement sur les transports aériens, DORS/88-58 (RTA), concernant la classe de service.

Numéro de cas : 
19-03223

RÉSUMÉ

[1] Karl McKinnon a déposé une demande auprès de l’Office des transports du Canada (Office) contre Air Canada en vertu du paragraphe 172(1) de la LTC et du paragraphe 110(4) du RTA concernant ses besoins liés à sa déficience et la classe de service pour un voyage effectué le 13 août 2018, de Montréal (Québec) à Barcelone, Espagne.

[2] Dans la présente décision, l’Office se penchera sur les questions suivantes :

  1. M. McKinnon est-il une personne ayant une déficience?
  2. M. McKinnon a-t-il rencontré un obstacle à sa mobilité?
  3. Air Canada a-t-elle correctement appliqué les conditions énoncées dans son tarif international intitulé International Passenger Rules and Fares Tariff No. AC-2 Containing Local and Joint Rules, Regulations, Fares and Charges on Behalf of Air Canada Applicable to the Transportation of Passengers and Baggage Between Points in Canada/USA and Points in Areas 1/2/3 and Between the USA and Canada, NTA(A) No. 458 (tarif), comme l’exige le paragraphe 110(4) du RTA?

[3] Pour les motifs énoncés ci-après, l’Office conclut que :

  1. M. McKinnon est une personne ayant une déficience;
  2. M. McKinnon n’a pas rencontré d’obstacle à ses possibilités de déplacement lorsqu’un siège-lit ne lui a pas été assigné;
  3. Air Canada a correctement appliqué les conditions énoncées dans son tarif.

[4] Par conséquent, l’Office rejette la demande.

CONTEXTE

[5] Le 13 août 2018, M. McKinnon a voyagé de Montréal à Barcelone. M. McKinnon soutient avoir acheté un billet avec Air Canada pour voyager en classe affaire dans un siège-lit. Il indique qu’Air Canada a changé l’exploitant du vol pour Air Canada Rouge et qu’il a voyagé dans la classe « Premium Rouge » dans un aéronef qui ne comprenait pas de sièges-lits. Il indique également que l’absence de sièges-lits lui a causé des douleurs physiques.

[6] M. McKinnon réclame une indemnisation de 15 000 CAD, « plus intérêts, plus des dommages-intérêts, plus des dommages-intérêts punitifs » pour la souffrance physique endurée pendant tout le voyage. Il ajoute qu’il a dû débourser plus de 1 000 CAD en frais de physiothérapie.

[7] Le 15 octobre 2020, l’Office a émis la décision no LET-AT-C-A-64-2020 dans laquelle il a conclu que la requête d’Air Canada visant le rejet de la demande en vertu de l’article 42 des Règles de l’Office des transports du Canada (Instances de règlement des différends et certaines règles applicables à toutes les instances), DORS/2014-104 (Règles) était rejetée. L’Office a ordonné que la demande suive son cours normal. L’Office a également conclu qu’il n’avait pas la compétence pour ordonner une indemnité pour la douleur, la souffrance ou la perte de jouissance.

OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES

Juridiction

[8] Dans sa demande, M. McKinnon fait référence à la Loi sur la protection du consommateur, RLRQ c P-40.1. De plus, il soumet une copie du formulaire de mise en demeure qu’il a fait parvenir à l’Office de la protection du consommateur du Québec.

[9] Cependant, l’Office est responsable de l’administration de certaines lois et réglementations fédérales, et non des lois provinciales. Par conséquent, l’Office ne tiendra pas compte de ces observations au moment de considérer la demande.

Document déposé hors délai par Air Canada

[10] Le 27 novembre 2020, M. McKinnon a déposé sa réplique à la réponse d’Air Canada, déposée le 20 novembre 2020, au moyen de deux courriels identiques envoyés séparément à Air Canada et à l’Office. La réplique de M. McKinnon contenait une requête dans laquelle il demande qu’Air Canada réponde à des questions écrites aux termes de l’article 24 des Règles. Le 9 décembre 2020, Air Canada a déposé son opposition à la requête de M. McKinnon dans laquelle il lui demande de répondre à des questions écrites.

[11] L’article 24 des Règles prévoit que la partie qui souhaite s’opposer à une question doit déposer une opposition dans un délai de cinq jours ouvrables suivant la date de réception de la copie de l’avis. Malgré cela, l’Office accepte l’opposition d’Air Canada déposée le 9 décembre 2020 conformément au paragraphe 3 de l’article 24 des Règles et la verse au dossier.

[12] Dans ce cas-ci, Air Canada soutient, dans son opposition, qu’elle ne pouvait pas savoir que le courriel de M. McKinnon, qui contenait la requête dans laquelle il demandait à Air Canada de répondre à des questions écrites, était la réplique, puisque M. McKinnon n’avait pas copié le Secrétariat de l’Office lors de son envoi. Pourtant, M. McKinnon a indiqué au début de son courriel qu’il s’agissait de sa réplique à la réponse d’Air Canada et l’article 8 des Règles n’exige pas de la partie qui dépose un document par courriel de copier la partie adverse dans la même transmission du courriel. L’article 8 des Règles exige seulement que la personne qui dépose un document envoie le même jour une copie de ce document à chaque partie.

Document déposé hors délai par M. McKinnon

[13] Le 14 décembre 2020, M. McKinnon a déposé un document supplémentaire, non prévu par les Règles, en réponse à l’opposition d’Air Canada à la requête dans laquelle il demande à Air Canada de répondre à des questions écrites. L’article 34 des Règles prévoit qu’une personne qui souhaite déposer un document dont le dépôt n’est pas prévu par les Règles doit déposer une requête en ce sens. Le document supplémentaire de M. McKinnon n’était pas accompagné d’une requête conformément à l’article 34 des Règles. Air Canada ne s’est pas opposée au dépôt de ce document supplémentaire.

[14] Dans un souci d’efficacité et puisque l’Office considère que les parties ne subiront pas de préjudice si le document supplémentaire est ajouté au dossier, l’Office accepte le document supplémentaire déposé par M. McKinnon le 14 décembre 2020 et le verse au dossier. L’Office s’appuie sur les articles 4 et 5 des Règles et conclut que les plaidoiries en lien avec la requête de M. McKinnon dans laquelle il demande à Air Canada de répondre à des questions sont donc closes. L’Office examinera maintenant ladite requête.

Requête de M. McKinnon dans laquelle il demande à Air Canada de répondre à des questions

POSITION DES PARTIES

M. McKinnon

[15] M. McKinnon demande qu’Air Canada fournisse des renseignements sur l’aéronef utilisé pour exploiter le vol no AC1912 de Montréal à Barcelone le 13 août 2018. Il demande également à Air Canada de fournir la description de l’aéronef, les dates d’entrée et du retrait de service de l’aéronef, son âge, ses années de service ainsi que son état général, sa feuille de route d’entretien avec une description de l’état intérieur de l’aéronef, y compris les sièges de la classe affaire.

Air Canada

[16] Air Canada s’oppose à la demande de renseignements de M. McKinnon. Air Canada allègue que les questions de M. McKinnon ne sont pas pertinentes, puisqu’elles se rattachent, entre autres, à la date d’entrée en service de l’aéronef, son âge, ses années de service et à l’entretien général de l’aéronef. Air Canada soutient que ces renseignements n’ont pas de liens avec le fait que M. McKinnon ait effectué sa réservation dans une classe sans sièges-lits.

ANALYSE ET DÉTERMINATION

[17] L’article 32 des Règles prévoit que la partie qui souhaite contester l’opposition à sa demande peut déposer une requête pour demander que la partie à qui l’avis a été donné fournisse une réponse complète. Dans ce cas-ci, M. McKinnon n’a pas déposé une telle requête.

[18] De plus, l’Office considère que les questions posées par M. McKinnon à Air Canada ne sont pas pertinentes pour l’examen par l’Office des questions en litige. Comme il est décrit ci-dessus, l’Office doit déterminer si M. McKinnon est une personne ayant une déficience; le cas échéant, s’il a rencontré un obstacle à ses possibilités de déplacements; et finalement, si Air Canada a correctement appliqué les conditions énoncées dans son tarif en ce qui concerne la classe de service. Les renseignements en lien avec la date d’entrée en service de l'aéronef utilisé pour exploiter le vol no AC1912, son âge, ses années de service et l’entretien général de l'aéronef ne sont pas pertinents pour que l’Office examine ces questions.

[19] En conséquence, l’Office conclut qu’il n’y a pas lieu d’exiger qu’Air Canada réponde aux questions posées par M. McKinnon et rejette la requête de M. McKinnon. Les plaidoiries sur la première partie des procédures, qui sont décrites dans la lettre d’ouverture des actes de procédures, sont closes. L’Office procèdera maintenant à l’examen de la demande.

LA LOI ET LES DISPOSITIONS TARIFAIRES PERTINENTES

[20] M. McKinnon soulève des questions liées à l’accessibilité et à l’application du tarif d’Air Canada.

Accessibilité

[21] La demande a été déposée en vertu du paragraphe 172(1) de la LTC qui, au moment des faits en question dans la demande, indiquait ce qui suit :

Même en l’absence de disposition réglementaire applicable, l’Office peut, sur demande, enquêter sur toute question relative à l’un des domaines visés au paragraphe 170(1) pour déterminer s’il existe un obstacle abusif aux possibilités de déplacement des personnes ayant une déficience.

[22] L’Office détermine s’il y a un obstacle abusif aux possibilités de déplacement d’une personne ayant une déficience au moyen d’une approche en deux parties :

Partie 1 : Il incombe à la partie demanderesse de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle :

- a une déficience au sens de la partie V de la LTC;

et

- a rencontré un obstacle. Un obstacle est une règle, une politique, une pratique ou une structure physique qui a pour effet de refuser à une personne un accès égal aux services accessibles à d’autres passagers dans le réseau de transport fédéral.

Partie 2 : S’il est déterminé que la partie demanderesse est une personne ayant une déficience et qu’elle a rencontré un obstacle, il incombe alors à la partie défenderesse de prendre l’une ou l’autre des mesures suivantes :

- expliquer, en tenant compte des solutions proposées par la partie demanderesse, comment elle propose d’éliminer l’obstacle en apportant une modification générale à la règle, à la politique, à la pratique ou à la structure physique visée ou, si la modification générale n’est pas possible, en adoptant une mesure d’accommodement personnalisée;

ou

- démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle ne peut pas éliminer l’obstacle sans se voir imposer une contrainte excessive.

[23] Dans cette décision, l’Office traitera les questions de la première partie de l’approche décrite ci-dessus.

Tarif

[24] Le paragraphe 110(4) du RTA exige que le transporteur aérien, lors de l’exploitation d’un service international, applique correctement les conditions de transport énoncées dans son tarif.

[25] Si l’Office conclut qu’un transporteur aérien n’a pas correctement appliqué son tarif, l’article 113.1 du RTA confère à l’Office le pouvoir d’ordonner au transporteur :

  1. de prendre les mesures correctives qu’il estime indiquées;
  2. de verser des indemnités à quiconque pour toutes dépenses qu’il a supportées en raison de la non-application de ces prix, taux, frais ou conditions de transport.

[26] Les dispositions pertinentes du tarif sont énoncées dans l’annexe.

1. M. MCKINNON EST-IL UNE PERSONNE AYANT UNE DÉFICIENCE?

Positions des parties

M. MCKINNON

[27] M. McKinnon affirme être reconnu comme étant totalement invalide par Anciens Combattants Canada. Il indique en outre qu’il est une personne âgée, qu’il a de graves problèmes de dos et qu’il avait subi deux opérations aux jambes, peu de temps avant le voyage, qui avaient nécessité une hospitalisation de 56 jours.

AIR CANADA

[28] Air Canada reconnaît que M. McKinnon souffre d’ostéoarthrite et d’arthrose sévère aux genoux, mais fait valoir que de tels problèmes de santé sont considérés comme une déficience seulement s’ils entraînent une limitation des activités ou une restriction de la participation de la personne ayant une déficience dans le réseau de transport. Air Canada souligne que les documents déposés par M. McKinnon n’incluent aucune preuve selon laquelle ses problèmes de santé l’empêchaient de voyager au même titre qu’une autre personne n’ayant pas une déficience. Air Canada souligne que ces documents indiquent, au contraire, que la plus récente de ses opérations aux genoux a été quatre mois avant le vol, que ses douleurs ont grandement diminué depuis ces interventions et qu’il a pu terminer son voyage. Air Canada soutient de ce fait que M. McKinnon n’a pas démontré qu’il est une personne ayant une déficience aux termes de la partie V de la LTC.

Analyse et déterminations

[29] Les preuves de M. McKinnon montrent qu’il a une mobilité réduite parce qu’il a de l’ostéoarthrite et de l’arthrose sévère dans les deux genoux. Même si ces problèmes de santé ont été soulevés après l’incident avec Air Canada, la preuve déposée par M. McKinnon démontre qu’ils sont chroniques. L’Office conclut donc que M. McKinnon était une personne ayant une déficience aux termes de la partie V de la LTC au moment de son voyage.

2. M. MCKINNON A-T-IL RENCONTRÉ UN OBSTACLE À SA MOBILITÉ?

Positions des parties et constatation de faits

M. MCKINNON

[30] M. McKinnon soutient qu’il avait besoin d’un siège-lit pour un voyage de cette distance en raison de ses graves problèmes de dos et des opérations récentes qu’il a subies. Il explique que voyager dans le siège renfoncé d’Air Canada Rouge lui a fait passer « une nuit d’enfer » sur les plans physique et psychologique, au point où il a dû recevoir un traitement médical, ce qui a entraîné des frais.

[31] M. McKinnon soutient qu’il a mentionné sa déficience à Aéroplan lorsqu’il a acheté son billet et lors de ses appels avec Aéroplan et Air Canada concernant la classe de service désigné sur son itinéraire.

[32] M. McKinnon indique qu’Air Canada n’a demandé aucune documentation médicale et qu’il n’y a eu aucune correspondance écrite concernant sa déficience.

AIR CANADA

[33] Air Canada soutient que M. McKinnon n’a pas démontré qu’il avait besoin de mesures d’accommodement et que ces dernières n’auraient pas été fournies par Air Canada.

[34] Air Canada soutient que M. McKinnon ne l’a pas contactée avant son voyage pour lui faire part de ses besoins d’accommodement et que son équipe MEDA n’a pas de dossier à ce nom. Air Canada précise que les discussions téléphoniques avec M. McKinnon portaient seulement sur la classe de service et le fait qu’il n’y aurait pas de sièges-lits à bord de l’aéronef exploité pour le vol qu’il avait choisi, comme il est indiqué dans les enregistrements de ces discussions.

[35] Air Canada affirme que M. McKinnon a fait savoir après son voyage qu’il avait été incommodé par l’absence d’un siège-lit en raison de sa déficience. Air Canada indique qu’elle lui a offert, en guise de geste de bonne volonté, un code promotionnel de 20 %.

[36] Toutefois, Air Canada fait valoir que les autres passagers n’ont pas eu accès aux sièges-lits. Air Canada affirme que cette absence n’a pas eu d’incidences sur la mobilité de M. McKinnon et que cela signifie que l’absence de siège-lit ne peut pas constituer un obstacle.

CONSTATATION DE FAITS

[37] La version de M. McKinnon sur la teneur des conversations téléphoniques entre lui et Aéroplan diffère de celle d’Air Canada. Dans la décision no 426-C-A-2013 (Gibbins c Société Air France), l’Office a établi que lorsque des versions contradictoires des événements sont présentées par les parties, il doit déterminer laquelle des versions est la plus probable, selon la prépondérance des preuves.

[38] Dans le cas présent, les parties conviennent que M. McKinnon a contacté Aéroplan au sujet de la classe de service désigné sur son itinéraire avant son voyage, mais elles ne s’accordent pas sur la raison de sa préférence pour un siège-lit. L’Office ne trouve aucune preuve à l’appui de l’affirmation de M. McKinnon qu’il a mentionné lors de ses appels qu’il s’agissait d’une mesure d’accommodement plutôt qu’une question de confort. Bien que M. McKinnon mentionne avoir informé les agents d’Air Canada qu’il s’attendait à un siège-lit, Air Canada n’a aucune trace d’une demande d’accommodement. De plus, selon les courriels déposés par M. McKinnon, ce n’est qu’après son voyage qu’il a informé Air Canada des incidences d’un siège régulier sur sa condition physique. L’Office conclut donc que M. McKinnon n’avait pas indiqué avant son voyage qu’il est une personne ayant une déficience et qu’il n’a pas demandé un siège-lit pour accommoder ses besoins liés à sa déficience.

Analyse et déterminations

[39] Les fournisseurs de services de transport ont l’obligation d’offrir un accommodement aux personnes ayant une déficience. Une personne ayant une déficience rencontre un obstacle à ses possibilités de déplacement si elle démontre qu’elle a besoin d’un accommodement qu’on ne lui a pas fourni, ce qui revient à la priver de l’égalité d’accès aux services accessibles aux autres passagers dans le réseau de transport fédéral.

[40] Il incombe à la partie demanderesse de fournir des preuves suffisamment convaincantes pour établir son besoin d’accommodement et prouver que ce besoin n’a pas été satisfait ainsi que de démontrer qu’elle a rencontré un obstacle. Le fardeau de la preuve qui s’applique dans ce cas est la prépondérance des probabilités.

[41] Si M. McKinnon a besoin d’un siège-lit en tant qu’accommodement pour répondre aux besoins liés à sa déficience, il doit en informer explicitement le transporteur, et ce, suffisamment longtemps avant le vol pour être en mesure de produire des documents médicaux justificatifs si le transporteur l’exige. Du fait que M. McKinnon n’a pas fait connaître ses besoins liés à sa déficience à Air Canada avant de voyager, cette dernière n’a pas eu l’occasion de répondre aux besoins liés à la déficience de M. McKinnon et ne peut être tenue responsable des inconvénients subis par M. McKinnon.

[42] À la lumière de ce qui précède, l’Office conclut que M. McKinnon ne s’est pas acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait de démontrer qu’il avait rencontré un obstacle à ses possibilités de déplacement. Par conséquent, l’Office rejette cette partie de la demande.

 

3. AIR CANADA A-T-ELLE CORRECTEMENT APPLIQUÉ LES CONDITIONS ÉNONCÉES DANS SON TARIF COMME L’EXIGE LE PARAGRAPHE 110(4) DU RTA?

Positions des parties

M. MCKINNON

[43] M. McKinnon indique qu’il a acheté des billets en classe affaire afin de profiter du confort des sièges-lits annoncés par Air Canada pour les longs vols. Il affirme qu’il a téléphoné à Aéroplan pour corriger son billet après avoir reçu une confirmation de son itinéraire sur laquelle il était indiqué que la classe de service pour le vol no AC1912 était « Économie Privilège » et que l’itinéraire qui lui avait été envoyé à la suite de cet appel indiquait que le vol était exploité par Air Canada Rouge et que son billet était en classe « Premium Rouge ».

[44] M. McKinnon soutient qu’Air Canada et Air Canada Rouge sont des entités juridiques différentes qui offrent des services différents. Il soutient également qu’il n’a pas reçu, en voyageant avec Air Canada Rouge, un niveau de confort équivalent à celui pour lequel il a payé lorsqu’il a acheté un billet pour un vol avec Air Canada. Il affirme qu’il n’a pas eu accès au salon d’Air Canada, qu’il a été informé qu’il n’était pas en classe affaire et qu’il n’y avait pas des sièges-lits dans l’aéronef exploité pour son vol à Barcelone le jour du départ. M. McKinnon soutient être lésé par la confusion créée par les noms des classes et des services et les vols de longue distance sur lesquels il y a des sièges-lits.

AIR CANADA

[45] Air Canada affirme qu’il n’y a pas eu de changement de classe de service à la suite de la réservation initiale; que le vol no AC1912 était exploité par Air Canada Rouge et que le billet était dans la classe « Économie Privilège », comme il est indiqué dans l’itinéraire du 18 avril 2018 envoyé à M. McKinnon. Air Canada explique que la classe « Économie Privilège » d’Air Canada Rouge n’offre pas de sièges-lits, contrairement à la classe affaire d’Air Canada dans certains de ses aéronefs.

[46] Air Canada soutient que cette information a été fournie plusieurs fois à M. McKinnon lors de la réservation initiale et lors d’une discussion téléphonique avant le vol, comme il est indiqué dans l’extrait du dossier passager déposé par Air Canada à l’appui de sa réponse.

[47] Air Canada soutient que M. McKinnon a donc effectué sa réservation dans une classe sans sièges-lits, qu’il a été avisé que le vol no AC1912 n’offrait pas de sièges-lits et qu’il a voyagé dans le siège de la classe « Économie Privilège » qu’il a acheté. Air Canada indique qu’elle lui a néanmoins offert, en guise de geste de bonne volonté, un code promotionnel.

Analyse et déterminations

[48] Le fardeau de la preuve repose sur la partie demanderesse, qui doit établir, selon la prépondérance des probabilités, que le transporteur n’a pas correctement appliqué les conditions de transport énoncées dans son tarif.

[49] La règle 25(G) du tarif prévoit que les billets d’Air Canada sont valables pour le transport entre les aéroports de départ et de destination au moyen de l’itinéraire figurant sur le billet, pour la classe du service applicable et pendant la période précisée. Selon la règle 30(B)(2), les classes « Économie Privilège » et « Premium Rouge » sont une sous-catégorie de la classe affaire.

[50] Il n’est pas contesté qu’Air Canada a fourni à M. McKinnon un transport dans la classe « Économie Privilège » ou « Premium Rouge ». L’Office note que M. McKinnon a peut-être été déçu de voyager dans une cabine sans sièges-lits, mais la règle 30(B)(2)(a) du tarif précise que ce type de sièges est en service principalement en classe affaire pour certains aéronefs généralement utilisés sur les routes de l’Amérique du Nord et des Caraïbes. En outre, la règle 30(B) du tarif prévoit que la disponibilité de certains produits et services offerts en fonction de la classe de service n’est pas garantie et qu’aucune indemnisation ne sera offerte en cas de non-disponibilité de ces produits ou services, ce que l’Office a jugé raisonnable dans la décision n° 61-C-A-2020 (Borsato c Air Canada).

[51] Étant donné que le tarif d’Air Canada ne garantit pas un type particulier de siège, l’Office conclut qu’Air Canada a respecté son tarif lorsqu’elle a transporté M. McKinnon dans la classe « Premium Rouge », comme il est indiqué sur le billet.

CONCLUSION

[52] L’Office conclut que M. McKinnon était une personne ayant une déficience aux termes de la partie V de la LTC au moment de son voyage. Cependant, l’Office conclut que M. McKinnon ne s’est pas acquitté du fardeau de preuve qui lui incombait, car il n’a pas démontré qu’il avait rencontré un obstacle à ses possibilités de déplacement parce qu’il n’a pas informé Air Canada qu’il est une personne ayant une déficience et qu’il avait besoin d’un siège-lit pour répondre à ses besoins liés à sa déficience. Par conséquent, l’Office rejette cette partie de la demande déposée en vertu du paragraphe 172(1) de la LTC.

[53] L’Office conclut également qu’Air Canada a correctement appliqué la règle 25(G) du tarif, comme l’exige le paragraphe 110(4) du RTA.

[54] Par conséquent, l’Office rejette la demande.
 


ANNEXE À LA DÉCISION No 24-AT-C-A-2021

International Passenger Rules and Fares Tariff No. AC-2 Containing Local and Joint Rules, Regulations, Fares and Charges on Behalf of Air Canada applicable to the Transportation of Passengers and Baggage Between Points in Canada/USA Areas 1/2/3 and between the USA and Canada, NTA(A) No. 458

Remarque : Le tarif a été déposé en anglais seulement.

RULE 5 – APPLICATION OF TARIFF

(A) General

(1) This tariff shall apply to carriage of passengers and baggage, and to all services incidental thereto:

(a) Performed and marketed (carrying an AC flight number) by AC, including when flights are operated in conjunction with other participating carriers under joint fares, rates and charges contained in tariffs which make specific reference to this tariff for governing rules, regulations and conditions of carriage, and

(b) For carriage on flights marketed by AC but operated by another carrier, unless otherwise stated in this tariff.

....

RULE 25 – TICKETS

….

(G) Ticket validity

General
The ticket is good for carriage from the airport at the place of departure to the airport at the place of destination via the route shown therein and for the applicable class of service and is valid for the period of time specified or referred to below. Each flight coupon will be accepted for carriage on the date and flight for which a confirmed reservation has been made.
….

RULE 30 – FARE BRANDS, CLASSES OF SERVICE AND UPGRADES

….

(B) Class of service
Certain complimentary products and services are offered depending on class of service, or fare brand purchased, such as separate check-in, in-flight entertainment, use of headsets/player, reading material, meals, beverages (some alcoholic), etc. These products and services are amenities and their availability is not guaranteed. No compensation will be offered for their unavailability, including for unavailability of in-flight entertainment and choice of meal.
….

(2) Business class/Premium Economy/Premium Rouge

(a) Business class service is provided to passengers paying the Business Class fares for transportation in the Business Class cabin on certain flights operated by Air Canada and certain flights operated by Air Canada Express. Business class offer recliner seats available on aircraft usually used on routes between Canada and North America/Caribbean/Mexico.

(b) Passengers seated in the Business Class cabin will (when flight times permit) be afforded in-flight amenities such as complimentary meals and beverages (including cocktails, beer or wine) and complimentary use of headsets/player for audio/visual entertainment (where such feature is provided inflight).

(c) Premium Economy/Premium Rouge service is provided to passengers paying the Premium Economy/Premium Rouge fares for transportation on certain flights operated by Air Canada and Air Canada Rouge with a Premium Economy/Premium Rouge cabin.

(d) Passengers seated in the Premium Economy/Premium Rouge cabin will (when flight times permit) be afforded in-flight amenities such as complimentary meals and beverages (including cocktails, beer or wine) and complimentary use of headsets/player for audio/visual entertainment (where such feature is provided inflight).

….

Membre(s)

Elizabeth C. Barker
Mary Tobin Oates
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