Décision n° 468-W-2012

le 7 décembre 2012

DEMANDE présentée par Global Marine Systems Limited, en vertu de la Loi sur le cabotage, L.C. (1992), ch. 31, en vue d’obtenir une licence.

No de référence : 
W9125/12-04312

INTRODUCTION

Demande

[1] Global Marine Systems Limited (GMSL) a déposé, par l’entremise de son représentant canadien une demande en vue d’obtenir, une licence pour l’utilisation du « WAVE VENTURE » afin de réparer et d’entretenir le réseau de câble sous-marin à fibres optiques American 1 (réseau American 1), au besoin, dans les eaux canadiennes occidentales du détroit Juan de Fuca, du détroit Haro, du passage Boundary et du détroit de Georgia, commençant le 31 août 2012 et se terminant 30 août 2013.

Avis et offre

[2] Le 17 août 2012, le personnel de l’Office des transports du Canada (l’Office) a donné un avis de la demande à l’industrie du transport maritime du Canada.

[3] Le 28 août 2012, ITB Marine Projects LLP (ITB) a proposé le « ITB 45 », un navire canadien, pour être affecté à l’activité.

Conclusion

[4] Pour les motifs énoncés ci-après, l’Office conclut, à la lumière des éléments de preuve, qu’il existe un navire canadien à la fois adapté et disponible pour être affecté à l’activité.

QUESTION

[5]  Y a-t-il un navire canadien à la fois adapté et disponible pour être affecté à l’activité?

CONTEXTE LÉGISLATIF

[6] L’alinéa 4(1)a) de la Loi sur le cabotage prévoit ce qui suit :

4(1) Sous réserve de l’article 7, sur demande d’un résident du Canada agissant au nom d’un navire étranger, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile délivre une licence pour le navire s’il est convaincu à la fois :

a) que l’Office a déterminé qu’il n’existe pas de navire canadien ou de navire non dédouané qui soit à la fois adapté et disponible pour assurer le service ou être affecté aux activités visées dans la demande;

[7] Le paragraphe 8(1) de la Loi sur le cabotage dispose ce qui suit :

À l’occasion de l’étude d’une demande de licence, l’Office doit procéder aux déterminations visées aux alinéas 4(1)a) et b) et 5a) et b).

[8] Le but de la Loi sur le cabotage est de permettre l’utilisation de navires étrangers dans les eaux canadiennes lorsqu’il n’y a pas de navire canadien ou de navire non dédouané qui soit à la fois adapté et disponible pour être affecté à une activité proposée. À la lumière des éléments de preuve soumis, l’Office doit déterminer si, selon la prépondérance des probabilités, il y a un navire canadien qui soit à la fois adapté et disponible pour être affecté aux activités proposées. Le fardeau de la preuve appartient au demandeur, GMSL dans le cas présent, de démontrer que le navire offert n’est pas adapté ni disponible pour assurer le service ou être affecté à l’activité. Il incombe également au demandeur de démontrer que toute exigence supplémentaire indiquée dans la demande est nécessaire pour exécuter les activités requises.

ADAPTABILITÉ TECHNIQUE ET OPÉRATIONNELLE

[9] ITB a proposé le « ITB 45 » en réponse à la demande, et soutient que la section des eaux canadiennes du réseau American 1 est située dans les eaux protégées à proximité du littoral, et que le « ITB 45 » convient parfaitement aux travaux à effectuer dans ces eaux.

[10] ITB indique qu’une dispense générale de pavillon d’une durée d’un an ne peut être délivrée pour des travaux qui ne sont pas précisés et qui, selon toute vraisemblance, pourraient être effectués par le « ITB 45 » qui a été conçu, construit et déployé pour la récupération et la réparation de câbles sous‑marins.

[11] GMSL indique que ITB ne possède pas d’installation pour offrir l’hébergement à bord du « ITB 45 », et étant donné que les réparations des câbles durent habituellement cinq jours (selon un horaire de 24 heures par jour), un transfert de personnel devra avoir lieu au moins deux fois par jour pour que le ITB soit en mesure d’entreprendre ce genre de travaux. GMSL soutient que cela augmenterait le risque pour la sécurité des gens de les transférer vers un navire d’hébergement, possiblement dans l’obscurité et dans des conditions météorologiques défavorables. Elle soutient également que si les conditions rendaient impossible un tel transfert, cela aurait de graves répercussions sur la sécurité de l’équipage laissé sur la plate-forme de travail.

[12] ITB indique que le « ITB 45 » peut effectuer les réparations et transférer les travailleurs en toute sécurité conformément aux normes internationales, et que le « WAVE VENTURE » n’est pas en mesure d’entreprendre les réparations nécessaires à certaines sections près du rivage en raison de restrictions relatives au tirant d’eau.

[13] GMSL affirme qu’elle possède du personnel à bord hautement qualifié et bien formé et disponible en tout temps en cas d’appel pour des réparations urgentes. En comparaison, GMSL soutient que ITB devrait trouver du personnel, en particulier à ce qui a trait à l’assemblage de la fibre optique et à l’essai des câbles.

[14] GMSL indique que ITB reconnaît qu’elle ne possède pas l’équipement nécessaire pour l’activité et affirme qu’il ne serait pas possible pour ITB de l’obtenir à court préavis. GMSL demande que des preuves soient présentées pour démontrer que cet équipement pourrait être obtenu rapidement et de façon rentable.

[15] Selon GMSL, le véhicule sous-marin téléguidé (VTG) de ITB, le « Oceanic Explorer », n’a pas la capacité de répondre aux besoins pour faciliter une réparation de câbles dans le type de conditions prévues et l’assertion audacieuse de ITB selon laquelle d’autres VTG pourraient être fournis est trompeuse, puisque ce type d’équipement n’est pas facilement disponible dans une industrie petite, mais ayant une portée mondiale, et qu’il serait trop dispendieux de faire une soumission concurrentielle pour les travaux. GMSL soutient que même s’il était possible d’obtenir un autre VTG, il est probable qu’il ne serait pas conforme aux spécifications du VTG télécommandé de série ST200 utilisé à bord du « WAVE VENTURE ». En outre, GMSL estime peu probable que ITB puisse livrer ce type d’équipement à son navire à 24 heures d’avis.

[16] ITB affirme qu’elle peut obtenir, et obtiendra, l’équipement et les travailleurs requis pour effectuer les réparations au besoin de manière efficace et sécuritaire, et souligne que le « ITB 45 » a travaillé avec succès dans le cadre de projets complexes de câbles sous-marins dans les eaux où est positionné le réseau American 1. ITB ajoute qu’elle ne croit pas qu’il convient de répondre aux demandes de spécifications techniques faites par GMSL, puisque la majorité de ces spécifications concernent des réparations de câbles en haute mer, alors que le réseau American 1 se trouve dans des eaux protégées à proximité du littoral où les exigences pour les navires sont très différentes et pour lesquelles le « ITB 45 » est tout à fait qualifié. En outre, ITB soutient que le « ITB 45 » est conçu pour travailler dans les eaux à proximité du littoral, et qu’il est totalement inapproprié de comparer un câblier DP2 comme le « ITB 45 » à un câblier qui fait de longs voyages en haute mer.

[17] GMSL soutient que le « ITB 45 » n’a pas d’antécédent de réparation de câbles à fibres optiques selon les renseignements fournis par ITB, et puisque le navire ne se spécialise pas uniquement dans l’entretien de câbles à fibres optiques, cela signifie que ITB ne possède pas l’équipement requis pour l’essai ou l’assemblage des câbles ni le personnel hautement qualifié nécessaire pour réparer le réseau American 1.

[18] ITB soutient qu’elle a effectué des travaux d’installation, de réparation et d’inspection de câbles sous-marins de l’Alaska à l’État de Washington depuis 1965, et que le « ITB 45 » a travaillé avec succès dans le cadre de projets complexes de câbles sous-marins dans les eaux où est positionné le réseau American 1.

Analyse et constatations

[19] Pour déterminer si un navire canadien est adapté et disponible pour être affecté à une activité, l’Office évalue l’adaptabilité du navire en fonction des spécifications techniques et opérationnelles de l’activité et de la capacité du navire canadien de la mener à bien.

[20] En ce a trait à l’allégation de GMSL selon laquelle le « ITB 45 » n’est pas en mesure de respecter les exigences pour effectuer l’entretien et la réparation du réseau American 1, au besoin, l’Office tient compte d’une détermination établie dans la décision no 148-W-2012, où GMSL a présenté une demande de licence de cabotage en vue d’utiliser le « WAVE VENTURE » pour des travaux de réparation et d’entretien, au besoin, conformément à une des activités proposées dans la demande. Le paragraphe 25 de la décision no 148-W-2012 indique ce qui suit :

De plus, l’Office note qu’aucun besoin réel n’est indiqué par rapport aux travaux subséquents de réparation et d’entretien relatifs au NEPTUNE et, par conséquent, GMSL n’a pas fourni les arguments ou les preuves à l’appui concernant des exigences supplémentaires spécifiques applicables à cette activité. Ainsi, l’Office conclut qu’un navire canadien est adapté sur le plan technique à tous les travaux subséquents de réparation et d’entretien, au besoin, au NEPTUNE dans les eaux canadiennes.

[21] À la lumière des preuves produites, l’Office est d’avis que, même si ITB n’a pas fourni tous les détails concernant la façon dont le « ITB 45 » satisferait aux spécifications techniques élevées indiquées par GMSL, aucun besoin réel n’est indiqué pour l’instant, et aucune preuve n’a été fournie à l’appui des spécifications de GMSL.

[22] L’Office conclut donc que GMSL n’a pas prouvé que, selon toute probabilité, le « ITB 45 » n’est pas adapté pour réparer et entretenir le réseau American 1, au besoin, et qu’il existe un navire canadien adapté sur le plan technique pour être affecté à l’activité proposée.

ADAPTABILITÉ COMMERCIALE ET ÉCONOMIQUE

[23] GMSL indique que la demande vise à fournir des services de réparation urgente et d’entretien connexe dans le cadre de l’accord d’entretien de la zone nord-américaine (accord ZNA).

[24] Selon ITB, l’accord ZNA est un accord commercial d’entretien qui couvre certains câbles de télécommunication sous-marins du Pacifique Nord à l’Équateur. Il ne peut pas se substituer à la Loi sur le cabotage et il est n’est pas pertinent à cette demande.

[25] GMSL réplique que l’accord ZNA ne se substitue aucunement à la Loi sur le cabotage et qu’il s’agit seulement de la solution d’entretien disponible la plus rentable et qui respecte les spécifications techniques. GMSL soutient que l’accord ZNA est nécessaire non seulement pour les économies d’échelle, mais aussi pour effectuer des travaux d’entretien sur un câble en particulier dans le cadre d’un seul accord, simplifiant ainsi le processus.

[26] ITB fait valoir que selon l’accord ZNA, le « WAVE VENTURE » reçoit un tarif de mise en attente très important pour fournir des services à 24 heures d’avis.

[27] GMSL soutient qu’au contraire, les frais de mise en attente auxquels ITB se rapporte sont minimes afin de s’assurer que l’entretien des câbles soit une option viable pour les exploitants canadiens. GMSL ajoute que ITB ne possède pas de câblier adapté aux travaux de réparation de câbles et que la quantité de travail liée à la planification et à la mobilisation de l’équipement et du personnel créerait une situation où les coûts de réparation deviendraient non viables.

[28] ITB indique que le « ITB 45 » peut être disponible, et le sera, pour un appel de service pourvu que les frais appropriés de mise en attente soient payés et qu’elle a identifié la nécessité d’un service de câblier DP2 dans les eaux de la côte ouest du Canada, tel que le « ITB 45 » pour répondre aux exigences sur la côte ouest.

[29] GMSL fait valoir que les détails des coûts et de la durée des réparations du réseau American 1 n’ont pas été fournis par ITB, et demande que ITB fournisse des preuves de ses fournisseurs d’équipement et de personnel approuvés à l’échelle internationale et les délais dans lesquels elle prévoit se procurer l’équipement auquel elle allègue avoir accès.

Analyse et constatations

[30] Les Lignes directrices de l’Office des transports du Canada relatives au traitement des demandes de licence de cabotage précisent qu’il incombe au demandeur de prouver clairement que l’utilisation d’un navire canadien rendrait l’activité non viable sur les plans commercial et économique. La décision no 450-W-2009 indique ce qui suit :

En ce qui a trait à la question des coûts additionnels, l’Office a déjà déterminé « qu’il n’est pas suffisant que les demanderesses prétendent que les coûts d’utilisation d’un navire canadien sont plus élevés pour démontrer qu’un navire n’est pas adapté; elles doivent plutôt faire la preuve que le projet serait non rentable et commercialement non viable si elles utilisaient le navire canadien offert » (décision nº 352-W-2005). Dans la même décision, l’Office a renvoyé à la décision nº 427-W-2003, dans laquelle il a déterminé que « Dans un cas [...] où le demandeur soutient que l’utilisation du navire canadien offert placerait un fardeau financier inacceptable sur ses épaules, le demandeur a la tâche de fournir les renseignements financiers qui prouveraient ces allégations ».

[31] En ce qui concerne la présentation de GMSL selon laquelle ITB ne possède pas de câblier adapté affecté exclusivement à la réparation de câbles et la quantité de travail liée à la planification et à la mobilisation de l’équipement et du personnel créerait une situation où les coûts de réparations deviendraient non viables, l’Office est d’avis que, étant donné qu’aucun travail n’a été précisé, GMSL n’a pas démontré que le projet serait non viable sur les plans commercial et économique en utilisant le navire canadien offert.

[32] De plus, l’Office note que le fait d’exiger que ITB fournisse des détails sur les coûts et la durée des réparations hypothétiques au réseau American 1 serait déraisonnable, et que GMSL n’a pas fourni les renseignements financiers nécessaires pour prouver ses allégations.

[33] En ce qui concerne l’accord ZNA, l’Office prend note du paragraphe 31 de la décision no 148‑W-2012, où l’Office a déterminé que l’exigence d’une mise en attente de façon continue s’appuie sur l’accord ZNA et n’est pas une exigence nécessaire pour l’activité proposée.

[34] À la lumière des éléments de preuve déposés, l’Office est d’avis qu’il n’est pas suffisant pour GMSL de simplement déclarer que si le « ITB 45 » était responsable d’entreprendre les réparations, les coûts deviendraient non viables; GMSL doit fournir les renseignements financiers qui appuient ses allégations.

[35] Par conséquent, l’Office conclut que GMSL n’a pas démontré que l’utilisation du « ITB 45 » rendrait l’activité non viable sur le plan commercial.

DISPONIBILITÉ

[36] ITB indique qu’il n’y a pas de détails particuliers sur le type ou la nature des travaux de réparation prévus ou attendus, et que la délivrance d’une dispense générale de pavillon pour une période d’un an sans détails particuliers liés au type de travaux à effectuer ne semble pas raisonnable ou conforme aux règlements applicables. ITB ajoute que si une admission temporaire de navire étranger était nécessaire, une demande devra être déposée pour des travaux de réparation donnés ou pour une pièce d’équipement particulière à entretenir à ce moment-là.

[37] GMSL indique que même s’il se peut qu’il n’y ait pas de réparations au moment de la demande, l’admission temporaire doit être en place pour pouvoir respecter le critère d’intervention dans un délai de 24 heures, qui est essentiel à l’infrastructure canadienne. GMSL ajoute que tout navire canadien devrait prouver qu’il est en mesure de satisfaire cette exigence à longueur d’année. En outre, GMSL soutient que la présentation d’une demande pour une admission temporaire pour chaque réparation créerait des retards possibles, ce qui pourrait menacer l’intégrité du réseau de fibre optique canadien.

[38] ITB indique que le « ITB 45 » est aisément disponible pour exécuter les travaux et note que si le « WAVE VENTURE » répond à un appel de service, l’exigence d’intervention dans un délai de 24 heures pour les autres clients de l’accord ZNA est annulée.

[39] GMSL réplique que le « ITB 45 » n’est pas assigné à l’entretien de câbles, et qu’il est seulement disponible lorsqu’il n’exécute pas des travaux pour d’autres contrats.

Analyse et constatations

[40] En ce qui concerne la question de la disponibilité, l’Office fait référence aux paragraphes 39 et 40 de la décision no 148‑W‑2012, qui indiquent ce qui suit :

[...] il incombe à GMSL de fournir des renseignements quant au moment où le navire canadien devra être disponible pour être affecté à l’activité. Même si l’Office reconnaît l’importance de la rapidité des réparations, au besoin, aucune date n’a encore été fixée pour les travaux. C’est pourquoi l’Office conclut que le « ITB 45 » est disponible pour être affecté à l’activité.

Si des réparations d’urgence doivent être effectuées dans les eaux canadiennes et que GMSL estime qu’il est nécessaire d’utiliser un navire étranger, elle peut en faire la demande auprès de l’Office en présentant les détails des travaux nécessaires à ce moment-là.

[41] Comme il a été souligné précédemment, l’Office est d’avis qu’il incombe à GMSL de fournir les renseignements quant au moment où un navire canadien devra être disponible pour être affecté à l’activité. Étant donné qu’aucune date n’a été donnée, l’Office conclut que le « ITB 45 » serait disponible pour être affecté à l’activité proposée.

[42] Par conséquent, selon la preuve fournie, l’Office est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que l’« ITB 45 » est disponible pour être affecté à l’activité proposée.

DÉTERMINATION

[43] À la lumière des constatations qui précèdent, l’Office détermine, conformément au paragraphe 8(1) de la Loi sur le cabotage, qu’il existe un navire canadien qui est à la fois adapté et disponible pour être affecté à l’activité.

[44] L’Office communiquera cette détermination au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.

Membre(s)

Jean-Denis Pelletier, ing.
Geoffrey C. Hare
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